• « Tu pleures ? C'est bien. Il faut bien que tu pleures. Il faut que quelqu'un pleure puisque moi je ne le puis... »

    La Saga des Médicis, tome 3, Lorenzo ou la Fin des Médicis ; Sarah Frydman

    Publié en 2006

    Editions Le Livre de Poche

    602 pages

    Troisième tome de la saga La Saga des Médicis 

    Résumé :

    Suite et fin de la grande saga des Médicis, dont Contessina et Le Lys de Florence, les deux premiers volumes, ont connu un très grand succès, Lorenzo met à nouveau en scène une Florence plus florissante que jamais, berceau des arts et des lettres, enviée de tous les autres Etats, où se déroulent fêtes somptueuses mais aussi conspirations de clans rivaux attisées par Rome et ses papes dépravés. Lorenzo, « le Magnifique », en est le chef, l’âme et l’intelligence, mais le destin du plus illustre des Médicis a aussi son versant sombre, fragile et tourmenté : son amour d’enfant puis d’adolescent pour Lucrezia Donati, d’une vieille famille florentine ruinée, qu’il sacrifiera pour raison d’Etat, le poursuivra toute sa vie et nourrira sa poésie.
    Sarah Frydman, dans Lorenzo ou la fin des Médicis, retrace avec passion et clairvoyance les derniers feux de cette Renaissance italienne tumultueuse et prolifique ; déjà s’annoncent l’obscurantisme et l’Inquisition avec l’entrée dans Florence du moine Savonarole.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Après s'être intéressée aux destins des premiers Médicis dans Contessina et Le Lys de Florence, Sarah Frydman s'attaque à un personnage dont l'aura a dépassé les frontières de l'Italie : il s'agit de Lorenzo, connu en France sous le nom de Laurent le Magnifique, le fils de Lucrezia Tornabuoni et Piero de Médicis, petit-fils du fameux Cosimo le Vieux, dont il a hérité bien des traits de caractère. Homme laid mais puissamment magnétique, à l'intelligence prodigieuse, philosophe dans l'âme, il est l'un des fers de lance de l'émulation artistique et culturelle qui caractérise le XVème siècle italien et, plus particulièrement, le XVème siècle florentin. Mécène de Michel-Ange et de Botticcelli, il était aussi l'ami de grands humanistes tels que Pic de la Mirandole, Marsile Ficin, digne héritier en cela des érudits qui avaient, depuis longtemps, émaillé chaque génération de la famille des Médicis. Parvenus, peut-être, détenteurs d'une fortune qui pouvait choquer, en une époque où les classes sociales avaient une importance non négligeable, même dans une république comme Florence, c'est à force de ténacité et d'intelligence, que, de marchands et de banquiers, ils ont pu se hisser sur la plus haute marche et tenir la dragée haute à des nobles de naissance mais corrompus de l'intérieur et bien plus indignes, finalement, que ces descendants de médecins dont ils portaient encore le nom, plusieurs siècles plus tard...Lorenzo de Médicis n'était pas né noble, mais ses descendantes lointaines, Catherine et Marie, seront reines de France et nos derniers souverains, au XIXème, descendaient donc, par là même, un petit peu des Médicis...et bien d'autres familles européennes ont, assurément, un peu de ce sang roturier dans leurs veines. Sang roturier peut-être, mais ô combien estimable, car il est l'incarnation même du savoir et de l'intellect, porté à son plus haut niveau. Le règne de Lorenzo de Médicis coïncide assurément avec l'âge d'or de Florence et si son grand-père en fut l'initiateur, il poursuivit son oeuvre après l'intermède rapide du règne de son père, Piero, dit Le Goutteux, qui, en mauvaise santé, délégua rapidement les affaires à ses conseillers et à son fils. Mais la fin de sa vie sera aussi parallèle au lent déclin de cette Renaissance flamboyante mais aussi rapide qu'un feu de paille et qui s'essouffle déjà dès les années 1480...ce sera l'époque de Savonarole et de ses prêches illuminés dans les églises florentines, qui succède à la tragédie qui a déjà endeuillé les Médicis, en 1478 : la conjuration des Pazzi, qui verra la mort de Giuliano, le frère de Lorenzo. Très certainement téléguidé par la sinistre Inquisition espagnole, qui se mettait dangereusement en place dans un royaume que les Rois Catholiques réunifiaient à grand peine et récupéraient, parcelle après parcelle, aux musulmans du sud, et qui menaçait l'Europe entière, le moine de Ferrare s'oppose violemment aux Médicis, taxant Lorenzo le Magnifique de tyrannie et conduira, par ses diatribes enflammées, à ces bûchers de Florence, ces bûchers des vanités qui virent flamber des trésors inestimables, tableaux, sculptures et livres qui disparurent irrévocablement, la fanatisme obscur de l'Eglise triomphant du Beau et du Savoir. Et, hasard le plus complet, Lorenzo de Médicis mourut en 1492, l'année même de la prise de Grenade et de la découverte des Amériques par Christophe Colomb, qui allait ouvrir une nouvelle page de notre ère et bouleverser le monde à jamais. Dernier représentant de l'Ancien monde, si on peut dire, Le Magnifique fermera les yeux et ne verra jamais le Nouveau qui n'aurait sûrement pas manqué d'intéresser un érudit comme lui. La Renaissance italienne, à Florence, se termine dans le chaos et dans la noirceur fanatique des moines embrigadés qui apportaient dans leur bure des relents des temps anciens, et tourne déjà les yeux vers le nord de l'Europe, vers la France, vers les Provinces-Unies, vers l'Empire, l'Angleterre, où elle va s'épanouir pendant un siècle encore, de manière différente,
    mais sans renier pour autant ses racines italiennes, tandis que la péninsule va replonger dans des spasmes politiques violents qui vont l'empêcher de se développer et de se mettre au même rang que les puissances émergentes, en ce début d'époque moderne. En cela, on peut dire effectivement qu'avec la mort de Lorenzo, c'est aussi la fin des Médicis qui s'opère.

    Lorenzo de Médicis par Girolamo Macchietti (XVIème siècle)


    Lorenzo ou la Fin des Médicis, c'est aussi, comme dans les deux premiers tomes, l'évocation d'une romance, qui sert en quelque sorte de colonne vertébrale au récit et autour de laquelle l'auteure brode ensuite une intrigue mâtinée de politique et de diplomatie. Si, dans le premier tome, nous avons vu naître l'histoire d'amour des aïeux, Cosimo et Contessina, mariés de force mais qui parvinrent, malgré une incompréhension mutuelle, à s'aimer pendant de nombreuses années, dans le second, c'est l'intrigue sentimentale de Lucrezia Tornabuoni, la propre mère de Lorenzo et de son amant le comte Vernio de Bardi, qui occupera la plus grande place. Et, dans celui-ci, Sarah Frydman nous relate les amours adolescentes de Lorenzo de Médicis avec la belle Lucrezia Donati, qu'il ne pourra épouser, pour des raisons qui le dépassent -raisons familiales, raison d'Etat-, mais qui restera à jamais son grand amour et la femme qu'il aima toute sa vie, malgré sa prestigieuse union avec une princesse romaine, riche mais sans séduction, la princesse Clarissa Orsini. Amis d'enfance, les petits Médicis et les petits Donati seront séparés, à l'âge adulte, par des antagonismes qui les dépassent, dans leur candeur juvénile, mais qui finiront par les éloigner irrévocablement. Chacun se mariera, aura des enfants de son côté, sans s'oublier pour autant. Mais l'histoire d'amour passionnée qui unit Lorenzo de Médicis à Lucrezia a été immortalisée par les mémoires que le grand homme écrivit mais aussi par les nombreux poèmes -de qualité, d'ailleurs- qu'il laissa à la postérité et qui, dans la veine de Pétrarque vantant la beauté de Laure, fêtent la beauté de Lucrezia Donati.
    Roman de qualité, avec un contexte historique bien amené mais qui présente aussi des lacunes et donc, une marge de liberté pour le romancier, que Sarah Frydman exploite avec justesse, Lorenzo ou la Fin des Médicis clôt plutôt bien la saga. Plus mélancolique, plus centré sur la réflexion intérieure et les raisonnements intimes des personnages, il préfigure, quasiment dès le début, cette fin inéluctable de la grandeur des Médicis et, avec elle, celle de Florence. Avec un peu de mélancolie, on voit disparaître les uns après les autres les personnages qui ont formé le maillon de cette chaîne solide que représentait la lignée Médicis au XVème siècle et les bouleversements qui se profilent au loin avec, dans leur sillage, une montée grandissante des périls, qui trouvera son point d'orgue dans l'assassinat horrible du plus jeune des Médicis pendant les Pâques de l'année 1478 puis la mainmise de l'Inquisition sur Florence, par le biais de Savonarole.
    Pas gênée du tout par les libertés prises par l'auteure et que j'explique un peu plus haut, je l'ai plus été par le style, un peu inégal. Certains chapitres sont bien construits, avec une réelle qualité narrative et d'autres plus lourds. De même pour les dialogues, particulièrement ciselés pour certains, avec une réflexion profonde et juste et qui font naître une véritable émotion chez le lecteur et d'autres qui m'ont un peu dérangée par leur tournure. Dommage aussi qu'il n'y ait pas de bibliographie en fin d'ouvrage ni même d'explications des parti-pris de l'auteure en fin d'ouvrage mais gros point positif, la présence dans le récit de citations historiques authentiques, d'extraits des mémoires et des poèmes de Lorenzo de Médicis qui donnent encore une autre teneur au roman.
    Finalement après une lecture en demi-teinte la première fois, j'ai beaucoup plus apprécié cette relecture. Je l'ai presque complètement découverte, ne m'en souvenant absolument pas ! ! Si les deux premiers tomes m'avaient laissé quelques souvenirs ce n'était absolument pas le cas pour cet ultime tome. Du coup je l'ai lu comme un roman que j'aurais découvert pour la première fois, en essayant au maximum d'occulter les a priori un peu négatifs qui me restait de ma première lecture, il y'a sept ans, et ça a marché. Bon, je ne vais pas vous mentir, ça n'a pas été un coup de cœur et j'ai vu quand même des petits défauts qui m'ont gênée, mais, comme pour les deux premiers tomes, j'ai un peu mieux apprécié les qualités de la saga qui contrebalancent finalement assez bien ses défauts. Un roman parfait, ça n'existe pas...ou très peu...sur un roman historique, on a les écueils réguliers de l'anachronisme, de la faute historique qui va piquer les yeux...ça arrive...ça ne veut pas dire pour autant que le roman sera nul et il aura forcément des aspects positifs qui rattraperont quelque peu les points un peu plus décevants.
    La Saga des Médicis est finalement une saga inégale mais assez positive quand même !!! Une bonne saga historique qu'on verrait bien en série ou en film, la Renaissance étant une période très visuelle et qui rend toujours bien à l'écran. Et une série sur les Médicis, ça pourrait vraiment le faire !! Finalement, ces trois romans sont intéressants, chacun à leur manière et enrichissants malgré quelques erreurs.

    En Bref :

    Les + : un roman un peu plus centré sur la politique et le contexte historique ; une réflexion humaine et universelle qui parle à tous.
    Les - : quelques anachronismes, des passages un peu lourds.


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  • « On ne doit pas essayer de forcer la vie, elle est plus forte que nous finalement. »

    Légende d'une Vie ; Stefan Zweig

    Publié en 2011

    Editions Grasset

    180 pages

    Résumé :

    Quatre personnages se croisent : Leonore Franck, veuve du célèbre écrivain Karl Amadeus Franck, leur fils Friedrich, Bürstein, le biographe du maître et une mystérieuse femme qui s’avère être l'amour d'enfance du grand écrivain, celle à qui il a écrit des dizaines de pièces enflammées et dédié une pièce de théâtre que tout le monde croyait jusqu'alors perdue. Or cette femme détient les lettres et le manuscrit...
    Tout le génie de Zweig est de glisser du vaudeville classique à la pièce métaphysique sur la création. Depuis la mort de l’écrivain, sa veuve, ainsi que le biographe, ont maquillé la réalité. Or quand Bürstein se repent, la légende de l'écrivain s'effondre, mais pour donner naissance à la véritable histoire d'une vie et d'un amour passionné.
    Légendes d'une vie est consacrée aux relations d'une famille et de l'œuvre que laisse un grand homme disparu. A-t-elle le droit de tout publier? Doit-elle censurer, couper, rectifier ?

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Il y'avait longtemps que je n'avais pas lu de théâtre et pourtant, ce n'est pas un genre qui me rebute. Il fut un temps où j'avais lu beaucoup de Molière et puis je crois que l'étude intensive de Roméo et Juliette pour le BAC m'a un peu dégoûtée. Ca faisait donc vraiment un moment que je n'en avais pas lu et je me demande même si mes dernières lectures ne remontent pas au lycée, justement ! ! Du coup, ça commence à faire un moment ! !
    Et Légende d'une Vie est dans ma PAL depuis cinq ans déjà et je ne me décidais pas du tout à l'en sortir, je ne sais pas pourquoi...en fait, je l'ai acheté un peu sur un coup de tête, sans forcément prêter attention au titre. Je l'avoue, j'ai l'ai surtout acheté pour Zweig...J'avais lu Marie-Antoinette et Marie Stuart, ses deux biographies très connues puis, entre-temps, j'ai lu Vingt-quatre heures de la Vie d'une Femme. Pour le coup, on s'éloignait totalement de la biographie pour partir plutôt dans la nouvelle et j'ai été séduite : finalement, Zweig est plutôt doué dans les deux genres ! On se rend compte que c'est un auteur vraiment complet et à l'aise dans tous les genres. Pas historien de formation il a pourtant laissé deux biographies qui sont devenues presque des incontournables malgré les défauts qu'elle peuvent comporter. Et après avoir terminé Légende d'une Vie, si je compare avec Vingt-quatre heures de la Vie d'une Femme, je peux dire qu'il en est de même pour le roman ou pour le théâtre : Zweig adopte rapidement, avec justesse et fluidité, le genre littéraire qu'il a choisi pour raconter son histoire.
    Ici, pour raconter l'histoire de Friedrich Frank, ce sera donc le théâtre qu'il choisira. Son jeune héros est un poète, il a dix-neuf ans mais surtout, il est porteur d'un lourd passif, celui de son père, Karl Amadeus Frank, un romancier et un poète, lui aussi, qui a connu un énorme succès de son vivant. Décédé depuis six ans déjà, son aura n'a pourtant pas pâli et le jeune Friedrich, influencé en cela par la poigne ferme de sa mère, Léonore, vit dans le souvenir et l'adoration d'un homme qu'il se met pourtant, l'âge adulte arrivant, à ressentir de plus en plus comme un rival. Le vivant doit le disputer au souvenir d'un père tout-puissant et admiré auquel il ne se croit pas capable de se mesurer. Mais des révélations sur le passé de son père, qui le rendent soudain plus humain au fils va permettre à ce dernier de se défaire du sentiment d'obligation qu'il ressentait malgré lui envers le défunt et qui l'enferrait de plus en plus dans une vie mécanique et qui ne lui convenait pas...
    Réflexion sur le souvenir, l'héritage, l’accommodement que les enfants de célébrités doivent opérer entre leur propre vie et celle de leurs parents, vivants ou disparus d'ailleurs, à plus forte raison si, comme Friedrich, ils ont choisi de suivre les traces de leurs géniteurs, consciemment ou inconsciemment, Légende d'une Vie est d'une justesse extraordinaire. Et puis survient soudain l'élément qui va libérer Friedrich, le faire soudain déculpabiliser et appréhender donc d'une bien meilleure manière sa relation au père, même si celui n'est plus. Drame d'ailleurs d'un fils jeune et qui se voit sans cesse confronté au souvenir omniprésent d'un mort à qui il se voit comparé, parfois de façon bienveillante et parfois pas. C'est aussi une réflexion sensée sur la relation fils-père, qui peut s'avérer très compliquée et même, on le voit ici, au-delà de la mort, car Friedrich ne peut s'empêcher d'éprouver autant d'admiration pour un père unanimement loué que de la haine pour lui car il considère qu'il n'a pas de vie propre, qu'il n'est finalement pas une personne à part entière pour ceux qui le côtoient mais en quelque sorte un avatar, un ersatz de Karl Amadeus FrankEt puis surviennent donc ces révélations, confiées à Friedrich par une femme qui a connu Karl Amadeus dans sa jeunesse et qui, contrairement à sa veuve, Léonore, n'a aucun intérêt à préserver la mémoire de l'écrivain adoré. Au contraire, même. Et ces révélations qui auraient pu, peut-être conforter le fils dans son avis inconscient sur le père s'avèrent finalement bénéfiques pour lui qui ouvre les yeux : non son père, même s'il était un génie, n'en était pas pour autant un homme parfait. Et parce que justement Karl Amadeus n'était pas un homme parfait mais un homme normal, avec des failles, des travers et un passé pas forcément aussi lisse qu'on a bien voulu le lui faire croire, il va s'attacher à cette figure paternelle-là qui, finalement, ne lui fait plus d'ombre, moins encombrante qu'elle est soudainement dans son humanité soudain révélée. Et, de fait, l'existence du jeune homme change radicalement, qu'il s'agisse de se relation aux autres, conflictuelle et difficile jusque là ou même, que ce soit la relation qui l'unit à sa mère, faite de beaucoup d'animosité de la part du fils, de plus en plus lassé et exaspéré d'être sans cesse, par sa propre mère, comparé à son père et ressentant d'ailleurs dans les propos de cette dernière qu'il ne l'égale pas.
    C'est donc aussi une démonstration assez fines des relations familiales qui ne sont pas toujours un long fleuve tranquille et cela n'arrange rien quand, comme dans la famille de Friedrich Frank une notoriété vient apporter encore une complication dans les relations et les interactions des différents membres de la famille.
    Légende d'une Vie se lit extrêmement vite, on est même surpris quand on arrive à la fin, qui est un peu abrupte d'ailleurs, mais qui achève la pièce de façon positive néanmoins. C'est, comme cela est dit dans le résumé de la quatrième de couverture, une sorte de nouvelle dialoguée plutôt agréable ! ! Le style est toujours un peu froid mais de qualité et toujours aussi facile à lire. C'est un plaisir, je trouve, que de lire du Zweig.
    En tous cas, je n'ai pas du tout été déçue bien au contraire et même, j'aurais dû le sortir bien plus tôt de ma PAL ! ! Je vous conseille cette lecture. 

    En Bref :

    Les + : une belle réflexion sur l'humain, l'héritage, les relations parents-enfants ; un style froid mais toujours de qualité.
    Les - : Aucun. 


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  • Colis reçu le : 11 avril 2016

    Aujourd'hui, je vous présente un colis un peu atypique qui n'est pas vraiment un swap mais qui, dans le principe, peut s'en rapprocher un peu. La seule différence, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'échange...mais on reçoit un colis chaque mois et c'est toujours la surprise à chaque fois, un peu comme pour les swaps ! ! Donc j'ai décidé que je vous présenterai mes Thé Box dans la catégorie des Swaps puisqu'il faut bien les classer quelque part ! 

    La Thé Box d'avril est donc ma première ! Je me suis inscrite le mois dernier et j'ai eu la surprise de recevoir ce matin un petit colis dans lequel se trouvait une jolie boîte noire tâchée de blanc. Et, à l'intérieur, je dois dire qu'elle était bien remplie et que je ne suis pas déçue. 

    Son thème ? Black, donc. La Thé Box s'associe au mois du polar pour nous livrer une belle boîte qui fleure bon les romans d'Agatha Christie et les enquêtes de Sherlock Holmes. 

    C'est parti pour la présentation ! ! 

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Ouverture de la box : déjà, on en prend plein les yeux et on a envie de tout découvrir ! 

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Oh !! Une jolie petite boule à thé avec un chat japonais ! ! 

     

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Des petites douceurs cassis / bergamote

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Le thé noir du Yunnan et la jelly au darjeeling de chez Damman...miam ! 

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    A nouveau des thés de chez Damman : Pecan Pie aux saveurs de noix de pécan, amandes, noisettes et pistaches ; Velours Nacré, mélange de thés noirs de Chine et de Ceylan avec un arôme subtil d'orange sanguine ; L'Oriental Noir, aux fruits, pêches, passion, fraises des bois ; et Darjeeling un thé noir nature venu d'Inde...

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Ensuite, ensuite...eh bien du rooibos, le fameux thé rouge d'Afrique du Sud, qui n'est en fait pas vraiment un thé mais est toujours surprenant au niveau du goût : un rooibos bio saveur vanille qui se mariera certainement très bien avec ce chocolat noir Sherlock, à 72 % ! Je suis une fan de chocolat noir et il ne va certainement pas faire long feu ! 

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Viennent après le thé Prince d'Orange de Teatower, un Lapsong Souchong parfumé à l'orange et des petites infusions et thés de la marque Higher Living : les deux thés, au citron et à la framboise, me font très envie ! Ils sont accompagnés de deux infusions, une à la menthe et l'autre avec différentes plantes, notamment pissenlits, réglisse et menthe qui lui donnent un nom healthy : purity. 

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Je vous présente maintenant le Gunpowder de la marque We are tea. C'est un genre de thés que je ne connais pas du tout...  !! Je suis curieuse, j'espère qu'il va me plaire.  

     

    La Thé Box, Avril 2016 : Black

     

    Ce mois-ci, La Thé Box s'est associée au Mois du Polar et à Audiolib pour nous proposer une box très...noire... ^^ On a donc reçu, en plus du thé et des petites gourmandises des extraits de livres audio, de Michel Bussi en passant par Stephen King. Une bonne alliance entre lecture et thés je trouve ! 

     

     


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  • «Rien à présent ne peut plus me faire de mal . »

    Marie-Antoinette ou l'Insouciance Assassinée ; Jean-Marc Simon

    Publié en 2006

    Editions Bernard Giovanangeli (collection Biographies express)

    142 pages 

    Résumé :

    Dernière grande figure féminine de la monarchie française, Marie-Antoinette conserve une image bicéphale entre l'innocente bergère de Trianon et «l'Architigresse d'Autriche» trahissant la France pour les Habsbourg. Tandis que certains se laissent prendre au charme de cette reine du rococo qui fut la mode, d'autres ne voient en elle qu'une «Madame Déficit» au temps où la grande affaire du royaume était la dette publique.

    Épouse d'un mari faible, elle voulut combler de bienfaits la petite société faisandée de ses courtisans. Pire, elle prétendit se mêler des affaires de l'État pour obliger ses entours, le beau Fersen et plus encore ses parents de Vienne. Bouc émissaire d'un système social et fiscal à bout de souffle, cette naïve fut victime de son insouciance et de cette médisance qui, une fois mise au monde, s'emballe d'elle-même en fantasmes immondes.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Marie-Antoinette est un personnage qu'on ne présente plus, par ici. Tous mes lecteurs savent plus ou moins qu'elle est sinon, le préféré, du moins l'un de mes personnages historiques préférés. Si, peut-être bien qu'elle est ma favorite, si j'y réfléchis. Le personnage n'est pas exempt de défauts ni même d'erreurs mais justement, ces inégalités chez elle me la rendent infiniment proche et je crois que son destin ne pourra jamais cesser de m'émouvoir. A chaque livre que je lis sur elle, j'espère toujours très fort -et naïvement- que, peut-être, cette fois-ci, la fin sera différente. Elle ne le sera jamais et on ne peut pas réécrire l'Histoire mais d'un point de vue humain, j'avoue avoir du mal à ne pas m'attendrir sur Marie-Antoinette. A mon sens, quelles que soient les erreurs qu'elle ait pu commettre dans son existence, ses faux-pas, elle a subi un sort qu'elle ne méritait certainement pas. En Marie-Antoinette, c'est la frivolité et l'insouciance de la jeunesse qui furent punies et condamnées à mort. Seulement, on est moins enclin à laisser la bride sur le cou aux jeunes gens qui sont censés un jour administrer un pays et si l'insouciance et la légèreté de la jeunesse sont attendrissantes chez les autres, elles deviennent de mortels défauts pour les futures têtes couronnées. Et Marie-Antoinette fut peut-être coupable de n'en avoir pas pris la mesure, de n'avoir pas su, alors qu'il était encore temps.
    Si Louis XVI n'avait pas perdu ses parents jeune, c'est, à la mort de Louis XV, son père, Louis-Ferdinand, qui serait monté sur le trône. La France aurait eu un roi de quarante-cinq ans, avec une plus grande expérience du pouvoir que son jeune fils qui ceint la couronne de son grand-père, à la mort de ce dernier. Et, si on lui avait prêté vie, peut-être son héritier aurait-il, à l'ombre du trône et sa jeune épouse avec lui, appris tranquillement son métier de roi. Peut-être, d'ailleurs, si Louis-Ferdinand et son épouse Marie-Josèphe de Saxe étaient devenus souverains en 1774 n'y aurait-il jamais eu d'alliance matrimoniale avec l'Autriche, la mère de Louis XVI se montrant tout à fait hostile au parti autrichien. Et le destin de Marie-Antoinette aurit donc pu être tout autre...
    Mais tout ceci n'est que conjectures et, c'est bien connu, on ne fait pas l'Histoire avec des si. Quoi qu'il en soit, la préparation du jeune couple est médiocre voire inexistante et il se voit brutalement propulsé sur le trône après les dix jours de maladie de Louis XV. Louis et Marie-Antoinette se retrouvent seuls et désemparés, devant une tâche bien trop grande pour leurs jeunes épaules. Et il est avéré que la jeune reine, à dix-neuf ans, n'a pas su prendre la mesure de la tâche qui lui incombait désormais et, très rapidement, elle sera la cible de critiques, d'abord peu virulentes puis devenant de plus en plus acerbes et dégoûtantes, en visant par exemple une hypothétique sexualité débridée à Marie-Antoinette, qui aurait accumulé amants et liaisons saphiques avec ses favorites, Madame de Lamballe puis la comtesse de Polignac. Avec un besoin inconscient d'amour et de reconnaissance, la jeune reine, malheureuse dans son couple auprès d'un homme timide et qui ne lui témoigne rien d'autre que respect et estime -c'est déjà bien, il est vrai, mais la jeune femme avait besoin d'autre chose-, elle va s'entourer d'une coterie qui va profiter d'elle et elle commettra un jour l'erreur de se séparer de ceux qui étaient, dans leurs amitiés, sûrement les plus sincères, comme Madame de Lamballe pour se concentrer sur des amitiés qui ne valaient certainement pas son intérêt et qui vont profiter de son bon cœur.
    Il y'a également sous le règne de Louis XVI une notion qui mérite d'être soulignée et qui resurgit avec lui : l'absence de favorite royale. Louis XV en eut, Louis XIV avant lui également et on peut compter sur les doigts d'une main les rois de France qui, depuis Charles VII n'ont pas installé, en parallèle de leur couple légitime, une maîtresse qui devenait rapidement la seconde femme voire, la première dans le cœur du roi. Or, Louis XVI, qui fut suffisamment, du vivant de son grand-père, scandalisé par sa vie sentimentale et qui n'avait de toute façon aucun penchant sensuel, au contraire de son aïeul, n'aura jamais de maîtresse. Il prive donc en quelque sorte son épouse du paravent dont les autres reines avaient bénéficié, paravent symbolisé par la favorite qui cristallisait toutes les haines et toutes les critiques. Il est vrai aussi que Marie-Antoinette n'aura pas le caractère instinctivement effacé de certaines, comme Marie Leszczynska ou Marie-Thérèse, l'épouse de Louis XIV, qui parviendront toujours à rester à l'écart des critiques en se cantonnant dans leur rôle traditionnel de reine : celui d'être des ambassadrices de leur pays d'adoption en donnant des enfants légitimes à leur époux et, de préférence, des fils. Et là-dessus aussi, Marie-Antoinette ne remplit pas sa mission, qui doit la faire adopter mais aussi renforcer l'alliance de la France et de l'Autriche qui n'était pas naturelle : il était absolument impératif que la jeune femme donne un fils à son époux. Seulement leur mariage ne sera consommé complètement qu'en 1777, sept ans après que l'union ait été célébrée, leur premier enfant naîtra l'année suivante mais ce sera une fille -la future duchesse d'Angoulême- et le premier fils du couple ne verra le jour qu'en 1781. Puis, lorsque Marie-Antoinette aura enfin mis des enfants au monde, l'opinion tournera les yeux vers d'autres défauts de la reine : ses dépenses, sa frivolité, sa légèreté blâmables. Et ces piques-là, autrefois, étaient réservées aux favorites accusées de pervertir le roi, de le rendre faibles et de ruiner le royaume. Désormais, c'est la reine qui devient l'objet des ressentiments, ressentiments qui participent certainement, à une désacralisation progressive des personnes royales jusqu'à ce que l'irréparable ne soit voté : la mort du roi, puis celle de la reine, à neuf mois d'intervalle, en 1793.
    Malgré tout, on ne peut que penser que Louis XVI et Marie-Antoinette furent emportés par le tourbillon des événements. Ils ne furent certainement pas, ni l'un ni l'autre, exempts d'erreur et de faux pas, au contraire, même. Peut-être Louis XVI aurait-il eu besoin d'un peu plus de fermeté et d'une meilleure préparation, qu'on ne daignera pas lui donner dans sa jeunesse et Marie-Antoinette, elle, aurait peut-être trouvé un bénéfice dans une maturité acquise plus tôt. En cassant volontairement les codes de la monarchie, en bouleversant la hiérarchie, en n'écoutant pas les conseils de ceux qui pouvaient faire s'améliorer sa conduite, assurément qu'elle a eu tort. Mais ils ne furent pas des tyrans et Louis XVI essaya, sincèrement, sans y parvenir, à améliorer l'existence de ses sujets. Ils paieront de leur vie le mécontentement et le détâchement progressif du peuple français envers ces rois, désamour qui s'était amorcé dès le XVIIème siècle avec les troubles de la Fronde.
    Le livre de Jean-Marc Simon est très court, on se demande même comment il a pu synthétiser en même pas 150 pages le destin de Marie-Antoinette ! Et pourtant, l'essentiel est là. Ce que j'ai aimé, c'est que le livre soit vraiment centrée sur elle, sans les digressions géopolitiques ou militaires que l'on trouve en général dans toute biographie historique. Le propos tourne vraiment autour de la reine, de sa famille, de ses engagements politiques mais sans entrer trop dans les détails non plus : on sent que l'auteur a voulu se concentrer essentiellement sur le mode de vie de Marie-Antoinette...Sans minimiser ni passer sous silence ses erreurs, au contraire, l'auteur n'en est pas moins bienveillant avec l'objet de son étude. En cela, il ne s'éloigne pas de l'historiographie moderne, qui fait de Marie-Antoinette, certes une victime, mais une jeune femme qui a commis des faux-pas qu'elle n'a pas su rattraper et qui a fini par en payer cher le prix. Sans diaboliser le personnage comme cela fut faix pendant et après la Révolution, sans faire non plus de son livre un martyrologe ou une hagiographie, Jean-Marc Simon parvient, si cela n'est pas déjà le cas, à faire se lever chez son lecteur une certaine empathie pour le personnage. Humainement effectivement, on ne peut pas considérer froidement les dernières semaines de la reine, malade, minée par très certainement par un cancer de l'utérus, ni même les dernières années qui précédèrent sa condamnation à mort et celle du roi, car elles furent un véritable chemin de croix pour elle.
    Je regrette que le livre recèle quelques erreurs...c'est dommage, pas grave en soi, mais c'est vrai que ça dénature un peu le propos...je ne sais pas vraiment si ce sont de véritables erreurs, ceci dit, ou bien des coquilles, ce qui arrive assez régulièrement.
    Quoi qu'il en soit, le livre est vraiment une bonne introduction et plus abordable, pour ceux qui ne savent pas par quoi commencer, que les travaux d'Evelyne Lever ou Antonia Fraser, qui nous ont livré des livres très complets, donc très denses et qui peuvent faire hésiter -malgré leurs qualités-, quand on ne connaît pas le personnage et qu'on veut en apprendre un peu plus sans se perdre dans une démonstration historique un peu plus vaste plutôt que dans un portrait plus intimiste. J'ai aussi aimé cette approche pour ma part.

    En Bref :

    Les + : une biographie synthétique mais complète, très centrée sur l'analyse de la personne de Marie-Antoinette, avec moins de considérations politiques.
    Les - :
    quelques erreurs, dommage. 


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  • « Nous suivons tous les voies du Seigneur, et ce ne sont pas toujours des sentiers battus qu’Il nous indique. »

    Gwyneira McKenzie, tome 1, Le Pays du Nuage Blanc ; Sarah Lark

    Publié en 2013 en Allemagne ; en 2014 en France (pour la présente édition)

    Titre original : Im Land der Weissen Wolke

    Editions Archipoche

    755 pages

    Premier tome de la saga Gwyneira McKenzie

     

    Résumé : 

    «Église anglicane de Christchurch (Nouvelle-Zélande) recherche jeunes femmes honorables pour contracter mariage avec messieurs de notre paroisse bénéficiant tous d'une réputation irréprochable.»

    Londres, 1852. Hélène, préceptrice, décide de répondre à cette annonce et de tenter l'aventure. Sur le bateau qui la mène au Pays du nuage blanc, elle fait la connaissance de Gwyneira, une aristocrate désargentée promise à l'héritier d'un magnat de la laine. Ni l'une ni l'autre ne connaissent leur futur époux.

    Une nouvelle vie - pleine d'imprévus - commence pour les deux jeunes femmes, qu'une amitié indéfectible lie désormais...

    Cette saga portée par un puissant souffle romanesque révèle le talent d'un nouvel auteur, dans la grande tradition de Colleen McCullough et de Tamara McKinley. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Le premier tome de la saga Gwyneira McKenzie raconte les destins croisés de deux jeunes femmes qui n'étaient absolument pas promises à se rencontrer mais qui vont finalement, dans l'adversité de leur nouvelle vie, nouer une amitié indefectible. Hélène Davenport, gouvernante londonienne de vingt-sept ans, sait qu'elle a désormais, au vu de son âge, pas canonique mais déjà plus si jeune, peu de chances de trouver un mari en Angleterre. C'est alors qu'elle remarque dans un journal une annonce matrimoniale recherchant des jeunes femmes prêtes à tout quitter pour aller se marier en Nouvelle-Zélande et débuter ainsi le peuplement d'une colonie à peine née.
    Gwyneira Silkham, elle, est la fille cadette d'un gentleman farmer du Pays de Galles. Bien que possesseur d'un titre, lord Silkham a peu de chances de marier sa seconde fille car Gwyneira ne peut prétendre à une dot. Quand Gerald Warden, baron des moutons néo-zélandais vient acheter quelques têtes de bétail dans le cheptel des Silkham, une proposition de mariage est lancée et la jeune fille de dix-sept ans, fougueuse et déterminée, nourrie aux romans d'aventures dans lesquels évoluent des cow-boys intrépides, accepte d'aller s'unir au fils de Warden, sur un autre continent, à des milliers de kilomètres des siens.
    Sur le bateau qui emmène vers l'Océanie de nombreux colons, Gwyneira et Hélène font la connaissance l'une de l'autre. La jeune galloise est en compagnie de son futur beau-père et de sa chienne adorée, Hélène d'un troupeau apeuré de petites orphelines envoyées en Nouvelle-Zélande pour y devenir domestiques dans les maisons convenables de l'île. Elles vont se lier d'amitié, une amitié qui ne faiblira plus, d'autant plus qu'il semblerait qu'elles ne vont trouver, ni l'une ni l'autre, ce qu'elles attendaient de leur nouveau départ. Le jeune époux de Gwyneira sembla cacher un étrange secret tandis que celui d'Hélène, si romantique dans les lettres envoyées en Angleterre et destinées aux candidates à l'émigration, s'avère être éloigné à des années lumière du gentleman farmer que la jeune gouvernante appelait de ses vœux. C'est une à vie difficile, une vie d'adaptation, à un nouveau pays, à de nouvelles familles, de nouvelles coutumes, que les deux jeunes Britanniques vont devoir s'acclimater sous les cieux tantôt accueillants et tantôt menaçants de la Nouvelle-Zélande, le Pays du Nuage Blanc, pour les Maoris (la légende veut que les premiers colons maoris, arrivés de Polynésie sur des barques, n'aient vu d'abord de leur nouvelle patrie qu'un immense nuage blanc qui embrumait les terres : ils ont alors donné au pays le nom de Aotearoa -le pays du nuage blanc).

    La Nouvelle-Zélande dans les années 1880 


    Ce premier tome pose les bases de l'intrigue et nous présente les personnages. Tous, dans leur genre, présentent un intérêt certain, même ceux qui sont le moins sympathiques, comme le beau-père de Gwyneira ou le mari d'Hélène. Quant à nos héroïnes, j'avoue avoir préféré Gwyneira, moins timorée qu'Hélène et peut-être plus déterminée qu'elle à s'en sortir par tous les moyens. Dans Gwyneira, il y'a des velléités très modernes, des désirs peut-être confus mais bien présents, d'émancipation, qui préfigurent en cela le féminisme, pas encore existant en temps qu'entité bien réelle mais latent, tandis qu'Hélène, fille de pasteur reste malgré tout pétrie de principes rigoristes. Pour autant, elles sont toutes les deux intéressantes à leur manière, Gwyneira dans sa lutte incessante pour devenir quelqu'un indépendamment des hommes et prouver à ces derniers qu'elle est tout aussi -voire plus- capable qu'eux, Hélène dans son combat pour les enfants, que ce soient les petites orphelines convoyées par elle jusqu'en Nouvelle-Zélande ou ensuite pour les enfants des tribus maories, qu'elle instruit avec zèle. Et si la vie est dure sur l'île, si les déceptions et les désillusions sont nombreuses, elle n'est pas non plus exempte de certains bonheurs. On rencontre Gwyneira et Hélène alors qu'elles sont encore jeunes, que l'avenir s'ouvre à elles, et on les quitte grand-mères, à la fin du roman, alors que la vie tend, après bien des épreuves, à se calmer un peu.
    Ce roman m'a beaucoup plu...Sarah Lark, bien que n'étant pas anglaise, parvient à bien saisir l'ambiance victorienne qui a fait le charme des romans de Dickens, des sœurs Brontë ou d'Elizabeth Gaskell...c'est une Angleterre flamboyante, nourrie par son industrialisation galopante qu'elle nous décrit, mais où l'opulence le dispute aussi à la misère la plus noire -c'est justement l'époque des romans de Dickens, des romans industriels qui décrivent les conditions de vie des plus défavorisés : les classes ouvrières sont défavorisées, parquées dans des immeubles miteux ou bien enfermées dans les sinistres workhouses, les enfants deviennent délinquants, livrés à eux-mêmes dans les rues, les filles deviennent rapidement des prostituées...en Nouvelle-Zélande, l'émulation des débuts est là, l'excitation est toute neuve et portée à son comble et, pour ceux qui n'entrevoient aucun avenir en métropole, l'émigration peut être une solution, avec tous les risques que cela comporte néanmoins. On peut regretter parfois que la vie des colons ne soient pas plus explicitée, que l'auteure passe rapidement sur ses descriptions de la Nouvelle-Zélande...pour autant, l'ambiance est là. On navigue, avec Gwyneira et Hélène, dans un Nouveau Monde, on découvre en même temps qu'elles et avec des yeux émerveillés, un pays bien différent des nôtres. La Nouvelle-Zélande de l'époque, encore très sauvage, dont beaucoup de terres étaient encore aux mains des tribus maories, a quelque chose de très attirant, comme les Amériques au moment où les Européens y posèrent le pied, avec le sentiment d'avoir trouvé une terre où tout était promis, possible, à faire...

    Lac Ohau Lodge


    Mais Sarah Lark s'est, à mon sens, plus centrée sur les interactions entre les différents protagonistes de son roman. Le pays n'est finalement que l'endroit, grandiose, où des histoires humaines, violentes, parfois tragiques, mais belles aussi, vont prendre racine. On assiste ainsi au lent délitement de la famille Warden, minée par le secret de plus en plus présent quoique tu de Lucas, le fils unique de Gerald et époux de Gwyneira ; on assiste à la naissance des premiers émois amoureux de la jeune femme, fougueuse dans ce domaine comme dans les autres. L'existence d'Hélène ne sera pas plus reluisante, aux côtés d'un mari qui ne la comprend pas et qu'elle-même n'estime pas : mais elle trouvera un réel réconfort auprès de son fils, Ruben et des enfants maoris qu'elle instruit avec plaisir et sans arrière-pensées, contrairement à bien d'autres colons, vite enclins à se sentir plus importants et supérieurs que les indigènes, avec les tensions et les conflits que cela implique bien sûr...
    Le style aussi m'a plu...ni lourd ni trop léger, il est juste, percutant quand il le faut, incisif parfois, très dynamique. Il fluctue avec les situations, rend le roman trépidant. Peut-être y'a-t-il quelques longueurs mais rien de grave. Dans l'ensemble, j'ai été séduite et je ne regrette absolument pas cette lecture, au contraire. J'ai vibré et frémi avec Hélène et Gwyneira et j'ai hâte, dans les tomes suivants, de les retrouver ainsi que leurs descendants, enfants et petit-enfants. J'ai passé un bon moment, j'ai été émue, révoltée parfois, admirative souvent, agacée aussi...ce roman a sollicité mes sentiments instinctifs et c'est ce que je lui demandais. Je continuerai donc la saga avec plaisir.

    En Bref :

    Les + : une intrigue émouvante, centrée sur l'humain et les sentiments, un style dynamique, des personnages ciselés et attachants.
    Les - : des longueurs et des coquilles.


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