• Colis reçu le : 7 mai 2016

    Aujourd'hui, je vous présente un colis un peu atypique qui n'est pas vraiment un swap mais qui, dans le principe, peut s'en rapprocher un peu. La seule différence, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'échange...mais on reçoit un colis chaque mois et c'est toujours la surprise à chaque fois, un peu comme pour les swaps ! ! Donc j'ai décidé que je vous présenterai mes Thé Box dans la catégorie des Swaps puisqu'il faut bien les classer quelque part ! 

    La Thé box de mai est la deuxième que je reçois et je suis encore une fois ravie ! Il n'y a pas d'autres mots...comme le mois de mai, c'est le mois de la fête des mères, la Thé box a décidé de nous concocter une box toute douce, avec des petites surprises chocolatées et à la noix de coco (j'en salive déjà) et des thés et des infusions aux bons goûts fruités et vanillés. 

    C'est parti pour la présentation ! ! 

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse

    Et voici la box (ne faites pas attention à mon couvre-lit râpé qui a servi de fond pour les photos)...toute douce, elle annonce bien le thème, avec ses couleurs pastel et ses petits brillants...bien sûr, je n'ai qu'une envie, l'ouvrir et voir ce qu'elle contient. 

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse 

    Et voici la bête...juste au-dessus, le Carnet de Saveurs, que l'on retrouve dans chaque box et présente les différents produits et producteurs...Maintenant, il est temps de soulever ce joli carnet et de regarder enfin ce que contient cette box prometteuse...

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse 

    D'abord, quelques petits sachets de marques différentes : de gauche à droite, le thé Tea Time (tout un programme) créé par Tamia et Julia pour La Thé Box : il s'agit d'un thé vert sencha de Chine aux arômes fruités ; ensuite, le thé Tendresse, toujours une création pour La Thé Box, un oolong de Chine à la noix de coco (miam) ; ensuite, une infusion merveilleuse aux baies de goji, de La Malle à Thé une petite marque familiale très sympa que je connais déjà et enfin, pour terminer, le thé Oh ma chérie (j'adore son nom) à la cerise, qui promet d'être vraiment bon et puis la cerise...ce n'est pas comme si ça allait être le fruit incontournable des prochaines semaines. 

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse

    Les douceurs, incontournables dans une box tendresse : des petits chocolats Lindt à la canneberge et aux framboises ; des rochers à la noix de coco (je sens qu'il ne vont pas durer longtemps...d'ailleurs, entre le moment où j'ai rédigé cet article et le moment où je le publie, j'ai goûté les rochers et c'est une tuerie, y'a pas d'autres mots ! ) et des petits biscuits belges aux amandes qui ont l'air sympas...

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse

    Quatre sachets de deux variétés différentes du Palais des Thés : il s'agit de Blue of London, un thé noir du Yunnan, présenté comme LE thé du tea time à l'anglaise. Vaste programme ! Apparemment, il s'agit d'un Earl Grey, un thé que je n'apprécie pas en général mais je vais goûter celui-là avant de me faire une idée, bien évidemment. Et ensuite, deux autres sachets de thé provenant toujours de Chine et qui porte d'ailleurs le joli nom exotique de Long Jing : celui-ci, apparemment, à des senteurs plus végétales. A découvrir aussi, donc. 

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse 

    Des petits sachets très vitaminés, aux couleurs très flashy qui attirent l'oeil  aussitôt : je vous présente une petite collection sympa de la marque Stash...le sachet jaune est une infusion appelée Sunny Orange Ginger, dont les notes de tête sont, comme son nom l'indique, l'orange et le gingembre, mais avec aussi un soupçon de réglisse, d'hibiscus et de carthame (je ne sais même pas ce qu'est cette chose) ; ensuite, vient le sachet d'un beau caraml soutenu, qui lui est un thé énergisant pour le matin, à base de thés noirs et de maté (il s'appelle Power Breakfast ce qui veut tout dire) ; ensuite, le sachet mauve renferme lui un thé au nom anglais mais qui sent bon la France, Breakfast in Paris, un mélange de thés noirs aux notes de lavande, de bergamote et de vanille...le thé à la lavande, je ne connais absolument pas mais ça va être l'occasion ; et enfin, dans le sachet rouge, une petite infusion à la canneberge et à la grenade qui m'a l'air plutôt sympathique...hâte de découvrir ces différentes saveurs et cette marque, que je connais pas du tout. 

    La Thé Box, Mai 2016 : Tendresse

     

    Et voici les surprises de cette box : après la petite boule à thé en forme de chat japonais dans la box d'avril, voici le plateau estampillé Tea Time et les petites roses toutes douces sur lesquelles on peut noter tout ce qui nous passer par la tête. 


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  • « Il faut changer la loi ou changer d'élites. Parfois, sur son élan, le peuple change les deux... »

    L'Enfant des Lumières ; Françoise Chandernagor

    Publié en 2007

    Editions Folio

    690 pages

    Résumé :

    Ruiné par des affairistes sans scrupules, le comte de Breyves s'est donné la mort : au XVIIIe siècle, pire qu'un malheur, un scandale.
    Veuve à trente ans, sans appuis, sans fortune, sa femme fuit Paris et la Cour pour se réfugier dans une campagne éloignée avec son fils Alexis, âgé de sept ans. Désormais, elle va consacrer sa vie à cet enfant. Avec une idée fixe : le rendre invulnérable. D'Alexis, si gai et charmeur, Madame de Breyves veut faire un homme apte à tous les combats, toutes les ruses.
    Ce grand roman d'amour -celui d'une mère pour son fils- se situe à la fin du siècle des Lumières, à la veille de la Révolution. Mais les questions qu'il pose sont aussi celles d'aujourd'hui : pour affronter un monde de plus en plus dur, faut-il endurcir nos enfants ? Quelles valeurs transmettre encore, quand autour de nos la société se défait ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    A la fin du règne de Louis XV, madame de Breyves veuve. Ca n'est pas la première, ça ne sera pas non plus la dernière femme à avoir la douleur de perdre son mari. Mais à la peine -incongrue, à une époque où l'on se targue de ne s'attacher à rien- s'ajoute en plus la honte : monsieur de Breyves n'est pas tranquillement mort dans son lit mais s'est suicidé. Et même si l'époque est au progrès, sous l'influence des philosophes des Lumières, on en reste pas moins dépendant des croyances ancestrales et, parmi elles, l'idée que le suicide est la mort la plus ignominieuse. Qui plus est, histoire de fignoler le tableau, monsieur de Breyves, avant de mourir, s'est ruiné et laisse donc dans l'indigence son épouse et son fils, Alexis. Madame de Breyves doit quitter Paris pour la province. Là, entre Berry et Marche, dans la maison de son grand-père, elle élèvera celui qui lui reste, Alexis, le nouveau comte de Breyves, celui auquel elle se raccroche jusque au bout, en l'aimant immodérément pour compenser la perte d'un mari trop admiré.
    L'Enfant des Lumières est un roman d'amour atypique. Et, même s'il unit un homme et une femme, il a surtout pour héros une mère et son fils. Un couple que l'on n'a pas l'habitude de voir dans les romans d'amour, il est vrai, mais qui fonctionne. Car si l'amour peut être passionnel et destructeur, il faut bien avouer que l'amour filial peut l'être tout particulièrement. Madame de Breyves devient une Andromaque moderne, prête à tout pour préserver l'héritage de son Hector disparu : leur fils. Leur fils qui doit devenir, en grandissant, la main armée de la vengeance de la mère contre ceux qui ont tué le père. Et les agioteurs, les banquiers, les créanciers du comte de Breyves deviennent les Grecs, les ennemis irrémédiables, ceux que madame de Breyves doit abattre, pour espérer moins souffrir et donner la paix à l'âme d'un mari mort violemment.
    Passionnel, l'amour de madame de Breyves pour son fils l'est pendant l'enfance de ce dernier. Alexis a oublié de naître imbécile et se voit doté d'une intelligence rouée, un peu sournoise, mais exceptionnelle malgré tout. Et s'il se montre rétif aux enseignements, madame de Breyves comprend rapidement qu'elle va aussi pouvoir l'utiliser, en faire son ange vengeur...et l'amour maternel devient alors destructeur, intéressé, néfaste, pour elle comme pour l'enfant. Car l'amour que lui voue sa mère est aussi le fardeau du jeune Alexis, qui grandit et aime la vie, tandis que sa mère, en vieillissant, s'aigrit de plus en plus sous les épreuves, remâchant une vengeance qui, croit-elle, la délivrera alors qu'elle ne fait que l'engluer encore plus dans un passé définitivement révolu et que les bouleversements qui menacent se chargeront d'enterrer définitivement. Et ce qu'elle exige tacitement de lui devient une chaîne trop lourde à porter pour un jeune homme à qui le combat de sa mère est étranger...certes, monsieur de Breyves était son père, mais il ne l'a que peu connu et ne ressent donc pas le besoin, comme sa mère, de venger ce père qui lui est étranger. Alors la déchirure sera inévitable, et si elle achève de plonger madame de Breyves dans la douleur -même si c'est elle qui provoque l'éloignement-, elle sera aussi pour Alexis, une libération : car le drame de l'enfant est d'aimer trop passionnément une mère qui est son alter ego, son double, sa moitié et sans laquelle -du moins le croit-il-, il ne peut vivre. Et le délitement de la passion qui a uni pendant si longtemps madame de Breyves à son fils se déroule en parallèle d'une autre décrépitude : celle du XVIIIème siècle et de l'Ancien Régime, jusqu'au grand soulèvement de 1789.
    Situé à une époque riche d'événements et de personnages, tous complexes et dotés d'une psychologie intéressante -qu'ils soient personnages historiques ou fictifs, d'ailleurs-, L'Enfant des Lumières n'en est pas moins un roman très contemporain et universel. En cela, on peut le rapprocher de La Chambre, un autre roman de Françoise Chandernagor, dans laquelle elle raconte la captivité du petit Louis XVII au Temple, à travers le prisme de considérations humaines, empathiques et universelles...c'est aussi le cas dans ce roman, qui nous fait arriver à la conclusion que, finalement, nous ne somme ni plus ni moins que nos ancêtres et que, si les sociétés et les mentalités changent, il n'en est rien de l'essence fondamentalement humaine qui, elle, reste la même : les réflexions, les sentiments, les inclinations du cœur ne changent pas. Tout passe, tout casse, peut-être, sauf ce qui fait de nous des êtres humains. Ce roman pourrait être transposé à n'importe quelle époque, il marcherait. C'est une ode vibrante à la maternité, un hommage aux mères qui font tout ce qu'elles peuvent, même si, au final, elles sont jugées quoi qu'il en soit et cataloguées comme bonnes ou mauvaises mères. C'est cela aussi que nous démontre l'auteure dans son roman : il n'y a pas vraiment ni de bonnes mères ni de mauvaises...chacune fait comme elle peut et peut un jour basculer dans l'un ou l'autre camp ou se tromper, malgré toute sa bonne volonté. Madame de Breyves devient une mauvaise mère par obligation, pour que son fils vive enfin sa vie en cessant de chercher sans arrêt l'approbation ou l'admiration de sa mère, mais en même temps, elle est déchirée de faire ce choix. Etre une mère, c'est complexe, c'est dur, parfois on fait des choix malheureux qui paraissent pourtant, sur le moment, les meilleurs, mais être une mère, c'est beau aussi, quoi qu'il en soit, quoi qu'il advienne...c'est aussi cela le message de Françoise Chandernagor...et son héroïne personnifie bien cela : l'ambivalence de la mère, sa volonté de donner à ses enfants toutes les armes pour affronter le monde, en les bousculant un peu parfois, mais aussi le don de soi qui caractérise la mère, l'attachement viscéral et instinctif qui la ferait mourir pour son enfant...Madame de Breyves est en quelque chose notre mère à tous ou celle que l'on aurait pu souhaiter avoir, même avec ses défauts ou peut-être devrait-on dire, avec ses défauts parce que sans cela, elle ne serait pas humaine et ne serait pas douée d'amour non plus...
    Ce roman est une vraie perle. Roman historique parfait, chronique de mœurs irréprochable, réflexion juste sur l'humain, L'Enfant des Lumières est un ouvrage sublime, que j'ai pris grand plaisir à lire, lentement, pour m'en imprégner délicatement et laisser les mots faire leur chemin. Non seulement le style de Françoise Chandernagor est magnifique, mais son propos ne peut laisser indifférent. Ce roman touche, cela ne peut être autrement et il est servi par un style qui le sublime totalement : les mots deviennent un plaisir et L'Enfant des Lumières est ce genre de livres dont on tourne les pages lentement et qu'on lit à mi-voix, pour donner encore plus de vibrant aux mots et aux phrases. Le roman se déroule sous nos yeux comme un beau tapis, on s'y love, on s'y plonge et on devient personnage à part entière de cette histoire.
    Une très belle expérience, que je vous conseille, si vous aimez les réflexions quelque peu philosophiques et le XVIIIème siècle.

    En Bref :

    Les + : un beau roman, historique et philosophique, qui fait réfléchir.
    Les - :
    Aucun !

     

     

     

    Coup de cœur 

     

     


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  • INTERMEDE LXVIII

     

    L'impératrice Alexandra Fedorovna (photographie de 1908)

    Née le 6 juin 1872 à Darmstadt, en Allemagne, la petite princesse Victoria Alix Hélène Louise Béatrice de Hesse et du Rhin a du sang allemand par son père et du sang anglais par sa mère. Princesse de Hesse et du Rhin, elle est la fille du grand-duc Louis IV de Hesse et d'Alice du Royaume-Uni, seconde fille de la reine Victoria et du prince Albert de Saxe-Cobourg. Alix est l'avant-dernière enfant du couple. Avant elle sont nés trois soeurs - Victoria, Elizabeth et Irène- et deux frères -Ernest-Louis, qui deviendra grand-duc de Hesse et Frédéric. Après elle, viendra au monde Marie, en 1874.
    La princesse est baptisée un peu moins d'un mois après sa naissance, le 1er juillet 1872 dans la foi luthérienne. Elle a pour parrains le prince de Galles, son oncle, futur Edouard VII ainsi que l'empereur Alexandre III de Russie. Ses marraines, quant à elles, sont la princesse de Galles, Alexandra de Danemark, Béatrice de Royaume-Uni ainsi que les princesses Augusta de Hesse-Cassel et Anne de Prusse.
    Alix grandit en Allemagne, mais se rend aussi souvent en Angleterre où sa grand-mère, la charismatique reine Victoria, tombe amoureuse de sa charmante petite-fille. C'est elle qui la surnomme pour la première fois Sunny, petit soleil. Ce surnom sera repris ensuite dans sa famille. La petite Alix doit ce surnom à son beau sourire, constamment plaqué sur ses lèvres et sa gaieté à toutes épreuves.
    L'enfant perd son insouciance à l'âge de six ans, lorsqu'un drame terrible la touche de plein fouet : sa sœur cadette, Marie et sa mère, la princesse Alix sont emportées, à quelques jours de distance, par la diphtérie. La petite Marie avait quatre ans, leur mère, trente-cinq. Elle laisse cinq enfants : Elizabeth, Irène, Victoria, Alix et Ernest-Louis. Frédéric est mort en 1873, alors que Sunny n'avait qu'un an. Hémophile, l'enfant succombe à sa maladie. Ce terrible gène, Alix l'apportera à son propre fils, Alexis.
    La perte de sa mère et de sa jeune soeur provoque un choc terrible chez l'enfant. Plus jamais la petite Sunny ne sera comme avant et le drame va profondément modifier son rapport aux autres. Désormais, la petite fille pétillante et enjouée n'est plus. Alix grandit et devient une jeune fille triste, timide et méfiante. Elle se réfugie dans l'étude et s'éloigne des autres. Après la mort de sa mère, Alix sera élevée en Angleterre, auprès de sa grand-mère Victoria, qui va s'attacher profondément à elle.

    Le tsarévitch Nicolas et la princesse Alix en 1894


    La petite-fille de la reine Victoria va bientôt susciter l'intérêt masculin mais la jeune fille refuse systématiquement les demandes : ainsi, elle repousse son cousin Albert Victor, duc de Clarence et deuxième dans l'ordre de succession au trône britannique. Il faut dire que, à l'âge de douze ans, dans le courant de l'année 1884, sa sœur aîné Elizabeth, surnommée Ella, s'en va se marier en Russie avec Serge Alexandrovitch Romanov, frère cadet du tsar Alexandre III. Alix est conviée à la cérémonie et, pour la première fois, elle pose les yeux sur l'héritier du trône impérial russe, Nicolas, le tsarévitch, fils d'Alexandre III et de la princesse Dagmar de Danemark, devenue l'impératrice Maria Fedorovna. Par le jeu des alliances, Nicolas est devenu le neveu d'Ella, la sœur d'Alix. Il est âgé de seize ans, quatre ans de plus que la jeune Alix et pourtant, un sentiment très fort va naître entre les deux jeunes gens. Cette jeune allemande lui plaît au-delà de ce qui est imaginable, il en va de même pour la petite-fille de la reine Victoria, qui tombe sous le charme du jeune héritier russe...ce sentiment si fort qui va les unir perdurera toute leur vie, sera couronné par un mariage et la naissance de cinq enfants et ne disparaîtra qu'avec eux, tragiquement, en 1918...en attendant, Alix reprend goût à la vie.
    Pourtant, le couple impérial russe, Alexandre III et l'impératrice Marie refusent de voir leur fils épouser une princesse allemande. En effet, en Russie, on estimait que les noces avec des allemandes et surtout des allemandes de Hesse portaient malheur : par exemple, Alexandre II, grand-père de Nicolas, avait épousé une princesse de Hesse et du Rhin, Marie, par ailleurs grand-tante d'Alix. Il mourut atrocement lors d'un attentat perpétré contre sa personne. Un peu plus tôt, le fils de la grande Catherine, Paul Ier, lui aussi époux d'une princesse issue de la maison de Hesse-Darmstadt est mort assassiné lors d'un complot...
    Et puis, cette princesse a été élevée dans la religion luthérienne, elle n'est pas orthodoxe et, décidément, si elle plaît à Nicolas, elle ne plaît pas du tout à ses parents. Ne pouvant faire la cour à sa princesse allemande, le jeune tsarévitch va entretenir une relation avec une danseuse, Mathilde Kchessinskaïa.
    Mais la santé du tsar Alexandre III se dégrade vite en cette fin de XIXème siècle et le couple va finalement se résigner à accorder à son fils aîné ce qu'il veut, d'autant plus que la jeune princesse de Hesse, aussi éprise que l'héritier russe, se dit prête à renoncer à sa religion de baptême pour devenir orthodoxe si telle est la condition pour qu'elle épouse celui qu'elle aime. Il semble aussi que la princesse Elizabeth, dite Ella, jeune belle-sœur d'Alexandre III ait intercédé auprès de lui en faveur de sa sœur. C'est à l'occasion du mariage du frère d'Alix, Ernest-Louis, en 1894, que les deux jeunes gens vont se fiancer.
    Le 26 novembre 1894, le mariage est finalement célébré, à Saint-Pétersbourg, quelques semaines seulement après la disparation du tsar Alexandre III, emporté par une néphrite, à Livadia. Pour épouser l'héritier russe, la jeune princesse allemande a dû abandonner la religion luthérienne pour devenir orthodoxe et prend le nom d'Alexandra Feodorovna. Sur son passage, la foule murmure. Cette princesse allemande va apporter le malheur à la Russie, dit-on, puisqu'elle est arrivée « derrière un cercueil ! ». Pour couronner le tout, durant les fêtes qui célèbrent l'union du nouvel empereur, un accident va se produire sur le champ de foire et causer de nombreuses victimes : un peu plus d'un siècle auparavant, il était arrivé la même chose lors des réjouissances données pour les noces de Marie-Antoinette et Louis XVI...les deux couples finiront leur vie dans la même tragédie...
    Le 14 mai 1896, Nicolas et Alexandra sont couronnés souverains de Russie.
    Les premières années de règne des jeunes Nicolas et Alexandra vont être marquées du sceau du conservatisme. Le jeune tsar se refuse à envisager les changements nécessaires pour faire de la Russie un pays moderne et la sortir de l'obscurantisme. Le couple va rapidement devenir impopulaire pour cette raison mais aussi, parce que l'impératrice se montre incapable de donner un héritier au trône. En effet, entre 1895 et 1901, elle donnera naissance à quatre filles, les grande-duchesses Olga, Tatiana, Maria et Anastasia. La personnalité d'Alexandra déroute aussi les russes puisqu'elle se montre névrosée et antipathique, peut-être du fait d'une grande timidité qui l'empêche d'être spontanée. Belle et fière, Alexandra, par sa trop grande froideur, éloigne l'amour de son peuple et suscite l'inimitié.
    En 1904, le 12 août précisément, l'impératrice accouche d'un fils, le tsarévitch Alexis, au palais de Peterhof et, pour la première fois, le peuple russe communie dans la joie avec ses souverains. Mais, comble de l'horreur, on se rend vite compte que cet enfant tant espéré est porteur du gène de l'hémophilie, transmis par les femmes à leurs enfants mâles. De nombreux descendants de la reine Victoria, à commencer par le propre frère d'Alexandra, sont morts de cette terrible maladie. Horrifiée, se sentant coupable d'avoir transmis cette maladie à son fils, Alexandra, qui s'était jetée avant autant de ferveur dans l'orthodoxie que dans le luthérianisme, va verser dans un mysticisme de plus en plus important, qui va encore plus la discréditer auprès du peuple, notamment à cause la présence de l'influent Raspoutine dans son entourage, présenté à elle par une dame d'honneur particulièrement impopulaire, Anna Vyroubova. Autre erreur commise par le couple, la dissimulation de la maladie de l'héritier, qui va être vue comme une trahison par les Russes.

    L'impératrice photographiée avec ses filles : de gauche à droite, Olga, Tatiana, Anastasia et Maria (1913)


    La Russie est en train de traverser des heures sombres, d'autant plus que le spectre de la Grande Guerre s'approche de plus en plus et plane sur l'Europe entière. Le pouvoir va devoir affronter une défaite contre le Japon, des manifestations étudiantes et ouvrières qui tournent à l'émeute...Lorsque la Première Guerre Mondiale éclate, Nicolas II prend lui-même le commandement de ses troupes et Alexandra, soutenue par ses deux filles aînées, Olga et Tatiana, transforme les palais du pouvoir en hôpitaux du pouvoir tandis qu'elle-même et ses filles s'improvisent infirmières pour apporter leur secours aux soldats russes blessés au front. Mais c'est déjà trop tard : la Russie en a plus qu'assez de ce souverain hésitant qui sait parfois se montrer cruel -le Dimanche sanglant est dans tous les esprits- et qui ne répond pas aux aspirations du peuple et de cette impératrice étrangère -elle est encore plus détestée, en tant qu'allemande, depuis que la Russie se bat contre l'Allemagne-, manipulée par un moujik venu des confins de la Russie rurale et détesté par la noblesse. La contestation politique devient de plus en plus importantes, le pays est paralysé par des grèves et le mécontentement populaire grandit. Lorsque Raspoutine est assassiné par le prince Félix Youssoupov et d'autres conjurés, le 31 décembre 1916, le régime tsariste vit ses derniers mois...Montée sur le trône en 1613, la dynastie Romanov s'apprête à en descendre, dans la violence.
    La famille du tsar va d'abord être emprisonnée à Tsarskoïe Selo, puis transférée par les bolcheviques à Tobolsk, avant de rallier la sinistre maison Ipatiev, à Iekaterinebourg. Jusqu'au bout, l'impératrice déchue va se consacrer à son fils, son unique raison de vivre. Dans la nuit du 17 au 18 juillet 1918, toute la famille ainsi que son personnel est réveillée par les gardes bolcheviques qui la font descendre dans la cave de la maison. Là, sans aucun jugement, Nicolas II et les siens sont passés méthodiquement par les armes. Les corps, évacués de la maison seront passés à la chaux et jetés dans un puits mine situé au cœur de la forêt de Koptiaki, proche de Iekaterinebourg. La même nuit, la soeur d'Alexandra, Ella, veuve du grand-duc Serge est assassinée par les bolcheviques avec d'autres membres de la famille impériale, à Alapaveïsk, dans la province de Perm, non loin de Iekaterinebourg.
    Certains historiens défendent une possible survivance des femmes de la famille impériale : ainsi, seuls Nicolas II et son fils auraient été assassinés dans la cave de la maison Ipatiev, la maison à destination spéciale tandis que l'impératrice et ses filles auraient été discrètement remises aux Allemands, par exemple. D'autres légendes, plus tenaces, voudraient qu'Anastasia fut la seule survivante et prit le nom d'Anna Anderson -hypothèse aujourd'hui infirmée. Depuis quelques années, on suppose également que la grande-duchesse Olga, âgée de vingt-deux ans en 1918, aurait survécu et coulé des jours paisibles dans un couvent italien.

    Alexandra et son fils Alexis, en 1911


    Dès le début des années 1990, alors que l'URSS n'existe plus et que le pouvoir en Russie s'assouplit, les autorités ordonnent des fouilles dans les bois autour de Iekaterinebourg. En 1991, les restes des Romanov suppliciés en 1918 sont retrouvés dans une fosse commune, au milieu des bois. Mais, une fois la tombe ouverte, les archéologues convoqués pour mener les fouilles se rendent compte que sur les onze corps qui auraient dû se trouver dans cette fosse -en comptant la famille plus des membres du personnel-, il n'y en avait que neuf. En effet, il manquait le corps du petit tsarévitch et de l'une de ses soeurs, Maria ou Anastasia.
    Finalement, le 16 juillet 1998, les corps de Nicolas II et d'Alexandra, de leur trois filles et des membres de leur suite son inhumés dans un caveau de la cathédrale Pierre-et-Paule de Saint-Pétersbourg, en présence de descendants de la famille Romanov : parmi eux, Nicolas Romanov, chef de la maison impériale. Le 14 août 2000, le dernier tsar et sa famille sont canonisés par l'église orthodoxe.
    En 2007, les recherches n'ayant pas été abandonnées, les deux corps manquant sont finalement retrouvés, non loin de l'endroit où le premier charnier avait été mis au jour. Voici ce que déclare officiellement, à cette occasion, le gouverneur de Sverdlovsk, en avril 2008 : « Le plus grand laboratoire génétique des États-Unis a confirmé leur identité, les corps retrouvés en août 2007, sont bien les corps des deux enfants d'Alexandra et du tsar Nicolas II, la grande-duchesse Anastasia et le tsarévitch Alexis [...] Nous avons à présent retrouvé la famille au grand complet. »
    Aujourd'hui, la malheureuse impératrice repose donc avec les siens dans la sérénité de la cathédrale de Saint-Pétersbourg.

     

    Le couronnement de Nicolas II et Alexandra Fedorovna en mai 1896

     

     © Le texte est de moi, je vous demanderais donc de ne pas le copier, merci.

     

    Pour en savoir plus :

    - Nicolas II et Alexandra de Russie. Une tragédie impériale, Jean des Cars. Biographie.
    - La Saga des Romanov, Jean des Cars. Biographie.
    - Les Romanov, une dynastie sous le règne du sang, Hélène Carrère d'Encausse. Biographie.
    - Nicolas II, Hélène Carrère d'Encausse. Biographie.
    - La Fin Tragique des Romanov, Pierre Lorrain. Biographie.

     

     


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  • « On ne craint pas ce que l'on ignore. »

    Un Aussi Long Chemin ; Juliette Benzoni

    Publié en 2015

    Editions Pocket

    459 pages

    Résumé : 

    Son visage est voilé. On ne voit que ses yeux, les plus beaux yeux qu'il ait jamais été donné de contempler. Personne ne sait rien d'elle et, depuis ce jour de Pâques de l'an 1143 où elle a rejoint les pèlerins qui font route vers Saint-Jacques de Compostelle, les langues vont bon train. On murmure qu'elle entreprend ce long et périlleux voyage pour sauver la vie et l'âme d'un innocent. On chuchote aussi qu'elle s'est défigurée pour ne plus avoir à souffrir des hommes...
    Le baron Hughes de Fresnoy est batailleur, débauché et bravache. Aussi pour conquérir la mystérieuse inconnue est-il prêt à tout, même à suivre les pèlerins en Galice...

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Un Aussi Long Chemin n'est pas le livre le plus connu de Juliette Benzoni et j'ai d'ailleurs pensé, en l'achetant, que ce roman n'était vieux que de quelques années et faisait partie de ses dernières productions. En fait, pas du tout : ce roman qui se déroule au cœur du Moyen Âge a une trentaine d'années puisqu'il a été publié dans les années 1980 ! Mais, effectivement, il a eu un succès moins retentissant que les fameuses sagas de Benzoni, telles que la série des Marianne, du Gerfaut des Brumes, de La Florentine, des Aldo Morosini et on en passe... !
    J'ai pourtant trouvé ce roman intéressant et très palpitant...il a également eu un aspect particulier pour moi car ma dernière lecture de Benzoni remonte à quelques mois et l'auteure était alors encore de ce monde. Entre temps, Juliette Benzoni est décédée, en février dernier, à l'âge respectable de 95 ans, à quelques jours de distance d'une autre grande dame, l'auteure américaine Harper Lee. Du coup, c'était une lecture étrange pour moi que celle d'Un Aussi Long Chemin car elle était donc la première que j'effectuais depuis le décès de l'auteure et cette chronique sera donc aussi un moyen de rendre un hommage à cette dame et à son oeuvre que j'ai découverte il y'a plusieurs années déjà et que, comme beaucoup de lectrices, je n'ai plus lâchée ensuite. Je n'ai pas été passionnée par tous ces romans, il y'a du bon et du moins bon dans son immense production littéraire mais, il faut bien l'avouer, il y'a quand même bien plus de bon que de mauvais ! Juliette Benzoni a le don, avec un style simple et efficace, de nous faire voyager...en général, les contextes historiques qu'elle choisit sont toujours bien restitués, documentés et deviennent ainsi, pour les intrigues, des assises solides et sûres. Et ces personnages sont toujours captivants à suivre, pas toujours attachants mais assurément intéressants parce qu'aboutis et ciselés.
    Un Aussi Long Chemin ne déroge pas à la règle et, même si les différents protagonistes sont stéréotypés -attention, rien de péjoratif dans cette constatation, au contraire !- et quelque peu manichéens, cette différenciation assez marquée et assumée entre le bien et le mal colle parfaitement à cette intrigue. Le roman d'aventures, un peu comme les romances ou les romans de cape et d'épées, est un genre très codifié, qui doit sauter immédiatement aux yeux du lecteur et cela passe justement par la réutilisation de codes vus et revus mais qui fonctionnent cependant. En général, les romans de Juliette Benzoni sont peuplés d'héroïnes intrépides et charismatiques et ce, qu'elles soient des figures historiques authentiques -Marie de Rohan, duchesse de Chreveuse ou Aurore de Königsmark- ou pas -on peut penser ainsi à Fiora, la belle Italienne de La Florentine ou encore Sylvie de Valaines, l'héroïne du Temps des Poisons- et on en retrouve une dans ce roman médiéval : Marjolaine, fille de la noblesse laonnaise désargentée, mariée puis veuve d'un riche bourgeois de Paris, qui entreprend le pèlerinage de Compostelle avec un mystérieux voile sur le visage -qui rappelle d'ailleurs un peu une légende merveilleuse de ce XIIème siècle, celui de la fée Mélusine, qui trouverait son origine dans la présence, à Lusignan, en Poitou, d'une mystérieuse femme voilée, ramenée, dit-on, par un des seigneurs de Lusignan de cet Orient mystérieux découvert pendant les Croisades.
    Tous les auteurs ont leur manière de faire découvrir et renaître le Moyen Âge, une longue période de notre Histoire et qui fascinera certainement toujours. Sujette aux stéréotypes et aux préjugés, c'est une période difficile à retranscrire fidèlement dans un roman et pourtant...dernièrement, nos auteurs s'y essaient de façon assez heureuse, débarrassés que nous sommes aujourd'hui de la vision carrément négative des historiens du XIXème siècle. Il y'a ceux qui vont produire des romans poisseux et à l'atmosphère tendue, penchant vers les superstitions, les intolérances religieuses, les enquêtes policières, la sorcellerie et il y'a ceux qui vont plutôt se concentrer sur les facettes positives de l'époque médiévale : c'est le cas de Jeanne Bourin et c'est le cas aussi de Juliette Benzoni dans Un Aussi Long Chemin. Il est vrai que son histoire se situe à une époque charnière, entre la violence du Haut Moyen Âge et celle, guerrière, qui caractérisera les derniers siècles du Bas Moyen Âge, avant la Renaissance...le XIIème siècle n'est pas exempt d'horreurs et de violence mais c'est aussi l'époque des troubadours, des cours d'amour, du règne d'Aliénor d'Aquitaine la fameuse, une époque où arts et littérature connaissent un essor certain. Et on retrouve cette émulation-là dans le roman de Juliette Benzoni où le personnage masculin principal, soudard amateur de femmes devient peu à peu à l'image de ces chevaliers des romans courtois qui furent si à la mode à l'époque, se montrant capable de tomber amoureux sincèrement d'une femme et d'en faire sa dame, celle pour qui il donnerait sa vie. Certes, le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle n'est pas dépeint comme une promenade de santé, il ne faut pas exagérer non plus, mais cette vision presque enjouée du Moyen Âge et surtout cette romance, sont rafraîchissantes et vident la tête. Un Aussi Long Chemin n'est pas un roman léger car il est plein de péripéties et de rebondissements mais c'est le genre de petit roman que l'on peut lire tranquillement à la plage et sous un beau soleil de printemps. C'est le genre de romance aventureuse efficace, qui, sans jamais tomber dans la mièvrerie, nous captive et nous donne envie d'aller au bout du roman pour savoir enfin -même si on l'entrevoit très vite- ce qui va advenir de nos personnages. Ceux-ci ne sont pas toujours lisses et parfois, la sympathie que l'on peut nourrir pour eux flanche un peu...mais dans l'ensemble, ils sont sympathiques et Marjolaine mérite amplement sa place dans le panthéon des héroïnes féminines de l'oeuvre de Benzoni : elle a ce petit truc savamment dosé que l'auteure a toujours su donner avec beaucoup de brio à ses personnages féminins.
    Bref, je ressors de cette lecture satisfaite : Un Aussi Long Chemin m'a donné ce que j'attendais de lui et, après avoir lu beaucoup de romans médiévaux noirs ces derniers temps -je pense notamment aux productions d'Andrea H. Japp ou encore celles de Serge Brussolo, dernièrement-, cela m'a fait du bien de retrouver une petite histoire haletante, certes, mais moins violente et pleine de romance : je n'aime pourtant pas beaucoup ce genre-là, qui a trop souvent tendance à glisser vers le roman mièvre à l'eau de rose mais cet écueil est toujours subtilement évité par Benzoni. Il y'a quelque chose des Pérégrines, la fameuse duologie de Jeanne Bourin, dans ce roman-là. Il y'a quelque chose aussi de La Chambre des Dames et c'est assurément grâce à de tels romans que le Moyen Âge reste encore si vivant dans notre imaginaire contemporain. 
    Et cette lecture-là, comme je le disais en début de chronique, a été différente du fait que j'ai effectué cette lecture quelques mois seulement après la mort de l'auteure...Juliette Benzoni n'écrira plus jamais, elle ne nous livrera plus d'inédits, nous n'aurons plus la surprise et la joie, en fouinant sur internet ou ailleurs, de tomber sur un nouveau titre, mais son oeuvre est cependant suffisamment fournie pour qu'elle fasse notre bonheur pendant encore beaucoup d'années. Juliette Benzoni nous a laissé une somme folle de romans en tous genre et c'est maintenant en eux, en nos chroniques et en nos lectures qu'elle continuera de survivre, parce qu'un bon auteur est immortel et que son aura est éternelle. Juliette Benzoni fait partie de ceux-là et si c'est avec un pincement au cœur que j'ai commencé les premières pages d'Un Aussi Long Chemin, elle est assurément parvenue, au fil des pages, à me faire oublier sa disparition. Juliette Benzoni n'est pas vraiment morte parce qu'elle sera toujours là avec nous, comme une grand-mère bienveillante, à travers ses romans.

    En Bref :

    Les + : une histoire dynamique et aventureuse comme Juliette Benzoni a le don d'en inventer
    Les - : des petites inégalités ; et des coquilles 

     

    Chronique hommage à Juliette Benzoni, décédée en février 2016. 

     


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  • « Je n'ai jamais eu de raisons de m'endurcir suffisamment pour affronter ce qui m'attend si je dois rester. »

    Si Je Reste ; Gayle Forman

    Publié en 2009 aux Etats-Unis ; en 2014 en France (pour la présente édition) 

    Titre original : If I Stay

    Editions Pocket (collection Jeunesse) 

    185 pages

    Premier tome de la saga Si Je Reste

    Résumé : 

    Mia a 17 ans. Un petit ami, rock star en herbe. Des parents excentriques. Des copains précieux. Un petit frère craquant. Beaucoup de talent et la vie devant elle.
    Quand, un jour, tout s'arrête. Tous ses rêves, ses projets, ses amours. Là, dans un fossé, au bord de la route. Un banal accident de voiture...Comme détaché, son esprit contemple son propre corps, brisé. Mia voit tout, entend tout. Transportée à l'hôpital, elle assiste à la ronde de ses proches, aux diagnostics des médecins. Entre rires et larmes, elle revoit sa vie d'avant, imagine sa vie d'après. Sortir du coma, d'accord, mais à quoi bon ? Partir, revenir ? Si je reste...

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Mia a dix-sept ans et la vie devant elle. Violoncelliste de talent, elle attend les résultats de son audition à une prestigieuse école musicale de New-York. Et puis un jour de février, tout s'arrête pour elle : un malheureux accident de voiture, sur une route de l'Oregon rendue dangereuse par des chutes de neige. Une voiture qui glisse, un choc frontal et puis plus rien...une famille décimée en quelques minutes et une jeune fille qui se retrouve branchée de partout, à lutter sur un lit d'hôpital pour vivre encore un peu...mais si le corps de Mia est plongé dans l'inconscience, l'insensibilité, son esprit, lui, reste extrêmement bien éveillé et lucide. Comme détachée de son propre corps, la jeune fille se voit, allongée aux soins intensifs au milieu de machines qui la maintiennent en vie, sur la table d'opération, au milieu de chirurgiens qui font tout ce qui est en leur pouvoir pour la sauver, ses proches, qui se relaient auprès d'elle pour lui apporter leur réconfort...et Mia, à mesure que les heures avance et qu'elle comprend tout ce que cet accident a entraîné de drames et de tragédies pour elle, que jamais plus sa vie ne sera comme avant, oscille alors entre vie et mort, attendant le signe déterminant, celui qui la confortera dans l'idée de pencher ou pour l'une ou pour l'autre...

    Chloë Grace Moretz (Mia) dans l'adaptation du roman 


    Si Je Reste est un roman assez atypique et originalement tourné. Bien que son sujet reste tristement banal, Gayle Forman a choisi un parti-pris plutôt intéressant : plutôt que de confier la relation de son intrigue à un narrateur omniscient, ce qui aurait pu être froid et sans âme, elle donne la parole à son héroïne, Mia, mais une Mia qui est pourtant sensée être plongée dans le coma, ce qui lui donne la possibilité d'exploiter alors un sujet original : pour ma part, c'est en effet la première fois que je lis un roman tournant autour des EMI, expériences de mort imminentes. De plus en plus reconnues scientifiquement depuis quelques temps, ces expériences qui jusqu'ici suscitaient beaucoup de questionnements voire n'étaient pas prises au sérieux, ont fini, grâce au nombreux témoignages et à l'ouverture d'esprit de scientifiques qui se sont penchés sur elles pour les étudier, elles sont prises désormais au sérieux et on sait en effet, de façon certaine, sans pour autant pouvoir l'expliquer, que des personnes plongées dans le coma, à la suite d'accidents ou autres, se retrouvent parfois dédoublés, comme si le corps et l'esprit devenaient deux entités bien distinctes et qui ne se commandent plus l'un l'autre. C'est d'ailleurs ce qui arrive à Mia, totalement dématérialisée, incapable de bouger, d'être vue, mais qui suit, minute par minute, tout ce qui lui arrive, depuis l'accident jusqu'au lendemain matin...et ce qu'elle voit lui donne de quoi réfléchir car si son corps est brisé et souffrant, son esprit, lui, reste intact et capable d'analyser, malgré toute l'horreur qu'elle comporte, la situation actuelle, d'où le grand questionnement qui s'impose rapidement à la jeune fille : partir ou rester ? Doit-elle rester pour elle ou pour les autres ? Et si elle choisit de vivre, le pourra-t-elle, sachant qu'elle a laissé derrière elle une vie qu'elle ne retrouvera plus jamais et que rien, jamais, ne sera comme avant ? Doit-elle partir ? Et si oui, alors, qu'est-ce que la mort et y retrouvera-t-elle ceux qu'elle a perdus ? Elle se rend compte également qu'elle a une opportunité, aussi difficile soit-elle, qui n'est pas si souvent octroyée : on lui donne le choix de vivre ou de mourir...le choix est entre ses mains et c'est elle qui doit peser le pour et le contre, la faire pencher du bon côté. Et pour autant que cette opportunité soit terrifiante, Mia prend conscience qu'elle est importante et qu'elle doit choisir au mieux, en prenant bien des choses en compte, mais qu'elle a le choix et que cela est sans prix. Alors, elle se repasse tout le film de sa jeune vie, se souvenant des bons comme des mauvais moments...ainsi, le roman alterne entre le récit de la Mia dématérialisée, qui erre près de son corps dans les couloirs de l'hôpital et les souvenirs de la même jeune fille, qui remonte loin pour se rappeler de ses premiers émois pour la musique, la naissance de son petit frère, sa rencontre avec son petit ami, Adam et avec Kim, sa meilleure amie...comme si se rappeler ainsi pouvait en quelque sorte lui permettre de choisir et surtout, de choisir la bonne option. Car il s'agit là d'une question plus qu'importante : est-on en effet compétent pour décider de la vie et de la mort ?


    J'ai trouvé ce roman intéressant, bien écrit, fluide, malgré les nombreux flash-backs. Il est en effet important de découvrir ainsi Mia pour pouvoir s'attacher avec elle, créer une réelle empathie avec cette jeune fille. Bien sûr, le début est suffisamment violent, l'accident suffisamment tragique pour nous donner envie de devenir un soutien de Mia, proche d'elle en quelque sorte. Mais on s'attache d'autant plus à elle qu'elle nous dévoile bien des aspects de sa vie et nous incite finalement à en faire partie...l'idée de départ était aussi très originale, comme je l'ai déjà dit, et surtout, bien exploitée par l'auteure. Peut-être aurait-elle pu exploiter d'autres pistes mais la façon pudique dont elle raconte son histoire, tout en y insufflant émotions et sentiments, reste juste et convaincante. Roman jeunesse cependant très mâture, il peut s'adresser à un public bien plus large, un peu comme Nos Etoiles Contraires, car leurs sujets restent relativement universels. D'ailleurs, les deux duos qui animent les deux intrigues, Mia / Adam et Hazel Grace / Gus se ressemblent énormément par bien des aspects : ce sont des jeunes gens qui croquent la vie et se retrouvent soudain confrontés à quelque chose -l'accident ou la maladie- qui remet tout cela en question de façon irrémédiable. La seule différence est que les deux héros de Nos Etoiles Contraires n'ont pas le choix alors que Mia l'a, malgré tout ce que cela peut avoir d'angoissant et qui lui est encore laissé la possibilité d'influencer son existence.
    J'ai été très surprise par la teneur de ce roman, bien qu'il soit court et par toute la réflexion qui en découle. C'est un roman juste et fort, qui implique instantanément car on ne peut que se sentir concerné malgré tout. Ce qui arrive dans ce roman arrive malheureusement bien trop souvent dans la vie et partout dans le monde...bref, ma surprise a été très agréable ! J'ai été très vite captée par le roman et je dois dire que j'en sors avec un avis très positif. Et je pense maintenant que je lirai la suite sans hésitation.

     

    En Bref :

    Les + : un parti-pris de départ original, un style clair et fluide qui le sert bien, des personnages attachants.
    Les - : Aucun. 

     




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