• « Vous êtes née dans un royaume déchiré, souvenez-vous-en. Votre chemin sera teinté de sang, pavé de douleur. »

    La Reine Clandestine ; Philippa Gregory

     

    Publié en 2009 en Angleterre ; en 2014 en France (pour la présente édition)

    Titre original : The Cousins' War, book 1 : The White Queen

    446 pages

    Premier tome de la saga The Cousin's War

    Résumé : 

    1464. L'Angleterre se déchire. La maison d'York, avec à sa tête le roi Edouard IV, s'oppose à la maison de Lancastre, qui souhaite lui reprendre le trône. 

    Le jeune roi fait alors la connaissance d'Elisabeth Woodville, veuve et mère de deux garçons. Séduit par son extrême beauté, il l'épouse en secret. 

    Richard Neville, comte de Warwick, cousin et principal conseiller du roi, réprouve cette union qui contrecarre ses desseins politiques. Il voit de plus son influence décroître au profit des proches d'Elisabeth. Neville passe alors à l'ennemi et rejoint la maison de Lancastre. 

    Autour d'un épisode méconnu de la guerre des Deux-Roses, Philippa Gregory met en scène une héroïne inoubliable au milieu de la tourmente, prête à tout pour l'honneur des siens...

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1464, Elizabeth Woodville, fille de Richard Woodville, baron de Rivers, sollicite une faveur du jeune roi Édouard IV : après la mort de John Grey, son époux, à la bataille de St-Albans (1461), elle se voit spoliée des terres formant son douaire. Avec elle, ce sont aussi ses deux fils, Thomas et Richard, qui se trouvent démunis.
    La démarche, pourtant, ne va pas de soi, parce qu'Edouard et Elizabeth n'appartiennent pas au même parti : lui est un roi yorkiste, elle, la fille et l'épouse d'hommes qui ont soutenu le parti lancastrien.
    York...Lancastre... ça ne vous dit rien ? Mais si, bien sûr, la Guerre des Deux-Roses, ce fameux conflit qui enflamma et ensanglanta l'Angleterre en cette fin du XVème siècle.
    Replaçons nous dans le contexte. Alors que l'interminable Guerre de Cent Ans s'achève enfin, l'Angleterre, loin de lécher ses plaies et se remettre de sa défaite, tombe dans un conflit civil d'une rare violence, opposant deux branches de la famille royale, les Lancastre et les York, donc, dont l'emblème est deux roses, une rouge pour le parti lancastrien et blanche pour les yorkistes, d'où le nom du conflit. Les Lancastre descendent de Jean de Gand, deuxième fils du roi Édouard III et les York de son dernier fils, Edmond, duc d'York.
    Au début des années 1460, le roi légitime est un Lancastre, Henri VI, arrière-petit-fils de Jean de Gand. Par sa mère Catherine de Valois, il est le petit-fils de Charles VI et d'Isabeau de Bavière et a, malheureusement pour lui, hérité de la fragile santé psychologique de son grand-père français. Devenu inapte à régner, le pauvre roi Lancastre voit son épouse, Marguerite d'Anjou tenter comme elle peut de maintenir un semblant de royaume en rassemblant les lambeaux de l'Angleterre et ses cousins York lui disputer la couronne. En 1464, quand Elizabeth rencontre Édouard, il y'a deux rois en Angleterre et une reine en déroute, réfugiée en Écosse avec un prince héritier dont on doute de la légitimité.
    Vous pouvez voir que le tableau n'est pas reluisant et ne devrait pas l'être du tout pour la famille Woodville, de tout temps acquise à la cause lancastrienne.
    Mais c'est sans côté sur l'ingéniosité de Jacquette de Luxembourg, la mère d'Elizabeth, qui se targue d'avoir le sang de Mélusine coulant dans ses veines et étant, à ce titre, un peu magicienne. Est-ce à cause de ses pouvoirs et de quelques philtres dont elle a le secret ou bien le charme naturel de sa fille, toujours est-il que le jeune roi Édouard, âgé de vingt-deux ans, tombe follement amoureux de la belle veuve de vingt-sept ans venue humblement lui demander une faveur, au point de souhaiter en faire sa reine, en dépit des aspirations de sa mère ou de celles de son ami et mentor, le comte de Warwick, surnommé « le faiseur de rois » et qui voit d'un mauvais œil son souverain épouser une jeune femme désargentée, sans influence et surtout, issue du clan ennemi.
    Cela fait beaucoup de handicaps qu'Elizabeth, que rien ne prédestinait à un tel destin, devra surmonter pour se montrer à la hauteur de la nouvelle dignité qui lui échoie.
    Mais qui est-elle, cette Elizabeth Woodville, née en 1437 et qui, comme Anne Boleyn bien plus tard, n'aurait jamais dû ceindre la couronne anglaise ? Autant le dire tout de suite : une parvenue. Et elle se conduisit comme telle une fois sacrée. Paradoxalement, elle est pourtant issue d'une prestigieuse lignée par sa mère, Jacquette de Luxembourg, aux origines bourguignonnes et italiennes et qui épousa en premières noces le duc de Bedford, issu de la lignée Lancastre et descendant en droite ligne de Jean de Gand. Mais voilà, les enfants de Jacquette ne sont pas issus de cette première union mais de la seconde, contractée certes par amour mais qui est clairement une mesalliance, le baron de Rivers appartenant à la petite gentry campagnarde. Elizabeth et ses frères et soeurs ne sont donc ni plus ni moins considérés que comme les rejetons d'un gentilhomme campagnard.
    Et pourtant, Elizabeth a connu une ascension fulgurante et fut la mère des petits princes au destin shakespearien, Édouard et Richard, disparus probablement en 1483, à la suite de la mort de leur père et, sûrement, sur ordre de leur oncle, Richard III. Elle eut aussi des filles, dont celle qu'on retiendra le plus : la petite Bessie, surnommée ainsi parce qu'elle portait le même nom que sa mère et qui, devenue grande, épousa le représentant d'une autre lignée incontournable de l'Histoire anglaise, les Tudor, Henri VII. Ils devinrent les parents du fameux Henri VIII. Elizabeth, la petite Elizabeth aux sangs mêlés et qu'on considérait comme un peu magicienne ou sorcière est donc la grand-mère maternelle de ce fameux roi de la Renaissance

    Philippa Gregory, qui aime son pays et son Histoire, se propose de nous faire partir ici à la découverte de personnages un peu méconnus pour nous, lecteurs français. Il est vrai que ses personnages de Deux soeurs pour un roi, Anne et Mary Boleyn, nous parlent un peu plus que la pauvre Elizabeth, perdue dans les brumes du Moyen Âge finissant et ne fut finalement qu'une reine consort, comme bien d'autres avant et après elle. Oui, mais...elle eut tout de même un destin assez hors du commun, vous ne trouvez pas, elle dont l'avenir était celui d'une jeune veuve sans histoire, reléguée au fin fond du pays et administrant les biens de ses fils.
    Il est vrai qu'une telle destinée nous surprend, nous lecteurs français : aucun exemple similaire n'existe dans notre Histoire, hormis chez les premiers rois capétiens et encore... en France, un roi se mariait par intérêt et pour nouer des alliances avantageuses et se choisissait une maîtresse par amour. En Angleterre, les souverains ne s'embarrassaient pas et confondaient allègrement les deux. Elizabeth profita de cette conjoncture pour faire sa fortune et celle de sa famille.
    Pour autant, sa vie de reine aux côtés d'Edouard ne fut pas si simple. Non seulement le contexte ne s'y prêtait pas, on s'en doute et son existence n'est encore qu'un bon exemple de ce que l'on sait : l' Histoire n'a jamais été tendre avec les femmes. Certaines connurent des destins extraordinaires mais plus dure fut la chute lorsqu'elles se brûlèrent les ailes.
    D'emblée, Elizabeth dut faire face à l'hostilité de la Cour, celle de la mère d'Edouard, de lord Warwick, des familles qui avaient escompté marier l'une des leurs au roi. Elle dut aussi faire oublier aux York qu'elle était une Lancastre.

    Portrait de la reine Elizabeth Woodville 

    De Philippa Gregory, je ne connaissais que ses romans sur les Tudors, notamment le plus célèbre, Deux soeurs pour un roi, qui m'avait bien plu puis L'Héritage Boleyn, dont l' héroïne était Anne de Clèves.
    Pour cette saga, intitulée The Cousin's War en anglais et qui est en train d'être éditée et traduite en France, j'ai surtout été séduite par le contexte historique. Parce que j'aime l'Histoire, je connaissais le personnage d'Elizabeth Woodville mais je pense qu'aujourd'hui elle est oubliée et c'est dommage.
    Il est sûr que beaucoup de romanesque entre dans la composition du livre mais Philippa Gregory nous brosse ici un portrait très vraisemblable de cette reine de la fin du Moyen Âge
    L'époque n'etait franchement pas tendre pour les femmes, à plus forte raison si elles étaient reines et devaient, alors, défendre des intérêts qui les dépassaient elles-mêmes. 
    Elizabeth a aujourd'hui une légende noire qui lui colle à la peau -notamment une réputation de sorcière ou de magicienne- et l'auteure, dans son roman, minore un peu cette réputation négative sans excuser Elizabeth non plus ou en faire une sainte. Comme je le dis plus haut, il est clair qu'Elizabeth usa de sa nouvelle position à la Cour en parvenue et comprit très vite quel outil efficace était l'amour que le roi lui portait. Pas dénuée d'ambition, elle a su adroitement placer son clan autour d'Edouard IV, ses frères jouissant des meilleures places et ses sœurs appelées à épouser les meilleurs partis.
    Certes, mais elle fut aussi une épouse aimante et une mère soucieuse du bien-être et de la sécurité de ses enfants. Elle éleva elle-même les enfants royaux, sans nourrices ou une pléthore de gouvernantes et il semblerait qu'elle ait porté beaucoup d'amour tant aux petites princesses qu'à ses deux fils. 
    En somme, c'est un portrait assez objectif que Philippa Gregory nous propose de lire ici et je dois dire que j'ai pris plaisir à découvrir le destin d'Elizabeth qui m'a paru, en plus de ça, assez attachante.
    Ce qui m'a gênée, maintenant, serait plus la forme que le fond, celui-ci répondant aux normes d'un roman historique efficace. La présence récurrente du passé simple dans les dialogues m'a donné à la longue un sentiment de lourdeur et j'avais l'impression de lire des échanges trop artificiels, dénués de la spontanéité qu'on peut attendre des vraies conversations. De fait, les derniers chapitres ont été assez laborieux et j'ai un peu traîné pour les finir, n'arrivant pas à bien me concentrer. Dommage que la traduction ait fait le choix de changer de titre en français, le titre original étant bien plus cohérent et surtout, une traduction littérale était faisable, sans aucun problème. Autre problème : on retrouve souvent le terme de dauphin pour désigner l'héritier du roi, or c'est une traduction trop française, qui m'a gênée, le titre de Dauphin du Viennois étant un titre très français et le terme générique de dauphin, souvent utilisé de nos jours, trop contemporain, à mon sens, pour un roman se passant dans les dernières années du Moyen Âge, mais ce n'est là que mon avis. Les parti-pris des traducteurs sont ce qu'ils sont, il faut que nous, lecteurs, fassions avec. Il n'empêche que je n'ai pas toujours été raccord avec eux. 
    Pour ce qui est du fait, maintenant, que le roman est à la première personne ne m'a pas spécialement déplu d'autant plus que, pour décrire certains événements auxquels Elizabeth n'assista pas, l'auteur revient à un narrateur omniscient : certaines lectrices ont été gênées qu'Elizabeth soit le narrateur principal, moi pas. Je n'ai pas été gênée non plus par la succession de bataille ou d'intrigues que l'on trouve dans la seconde partie du roman. Certains lecteurs ont soulevé cela, pour ma part, je trouve assez normal que, en plein conflit civil, l'existence des héros ne se déroule pas de façon très paisible. C'est même normal et Philippa Gregory ne fait là que respecter une chronologie historique et authentique

    En revanche, j'ai moins aimé que la légende de Mélusine, autour de laquelle le récit s'articule comme autour d'une colonne vertébrale, donne parfois lieu à des passages quelque peu surnaturels... que la mère d'Elizabeth soit un peu sorcière sur les bords, prépare des philtres ou des potions étranges passe encore... mais qu'elles invoquent depuis Londres une tempête censée se déchaîner sur la Manche m'a...comment dire ? Laissée un peu (voire carrément) dubitative. Qu'Elizabeth ou sa mère aient pris pour argent comptant leur possible filiation avec la nymphe mi-femme mi-serpent des légendes anciennes ne me choque pas parce que le merveilleux était très présent dans le quotidien médiéval mais que cela donne lieu à des passages un peu équivoques dans un roman qui ne se réclame pas du fantastique m'a un peu dérangée, je dois bien l'avouer. 
    Pour le reste, j'ai trouvé cette lecture agréable et surtout, le roman a le mérite de présenter de façon très claire un contexte des plus embrouillés. On sent que Philippa Gregory a bossé son sujet.
    Alors, Elizabeth Woodville, une reine des circonstances, naviguant à vue dans le brouillard dense des dernières années de la Guerre des Deux-Roses ? Une aventurière ambitieuse n'hésitant pas à renier le parti de Lancastre pour la rose blanche yorkiste ? Peut-être, mais elle fut aussi une mère attentive doublée d'une épouse fidèle et dévouée à un homme qu'elle n'abandonna jamais. Quant aux accusations de sorcellerie, qui relèvent essentiellement de l'imaginaire médiéval, on ne peut évidemment aujourd'hui l'imputer à Elizabeth comme un gage de mauvaise réputation. 
    Moi, j'ai eu sous les yeux, tout au long de ma lecture, une reine fascinante et une battante. Belle et intelligente, Elizabeth Woodville personnifie bien à elle seule ces femmes de la fin du Moyen Âge, ces reines surtout qui furent confrontées à des conflits dans lesquels elles eurent une place pleine et entière et dont elles eurent à souffrir jusque dans leur chair, avec la perte de leurs enfants notamment -et Elizabeth ne fut pas épargnée, c'est le moins qu'on puisse dire. J'ai aimé ce roman pour ça. Après, il n'est pas parfait et présente quelques petites inégalités mais je l'ai apprécié et ai passé un bon moment : à mon sens, c'est tout ce qui compte. 

    Dans la série The White Queen, Elizabeth Woodville est interprétée par Rebecca Ferguson

     

    En Bref :

    Les + : un roman historique efficace et cohérent, comme je les aime, qui a le mérite de nous présenter une héroïne au destin fascinant, tragique mais si intéressant. Elizabeth Woodville revit sous nos yeux. 
    Les - : quelques parti-pris de traduction avec lesquels je ne suis pas d'accord, mais cela n'appartient qu'à moi ; l'omniprésence du passé simple dans les dialogues, ce qui implique des lourdeurs à la longue. 

     

     

     


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  • « Louis songeait avec force inquiétude qu'il avait accepté une affaire plus considérable et plus dangereuse qu'il ne l'avait pensé de prime abord. Réussir, c'était s'assurer des ennemis implacables. Échouer, c'était perdre ses soutiens. »

    Les Enquêtes de Louis Fronsac, tome 6, L'Exécuteur de la Haute-Justice ; Jean d'Aillon

    Publié en 2006

    Editions du Masque (collection Labyrinthes)

    465 pages

    Sixième tome de la saga Les Enquêtes de Louis Fronsac

     

    Résumé : 

    Nous sommes en 1645 après la Conjuration des Importants. La cour de France se déchire à nouveau et un jeune homme de quinze ans arrive inopinément des Pays-Bas. 
    Il serait le fils du duc de Rohan et pourrait devenir le chef de file des huguenots de France. Mais le duc d'Enghien laisse entendre qu'il est un imposteur...

    L'ancien notaire, Louis Fronsac, désormais chevalier, sera chargé de découvrir la vérité. Aidé de son ami de toujours, Gaston de Tilly, ils mèneront l'enquête autour de la Bastille et dans le rue de la Pute-y-Musse et recevront l'aide d'un certain Jean-Baptiste Poquelin qui vient d'installer sont Illustre Théâtre au jeu de paume de la Croix-Noire. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis : 

    En 1630, alors que la ville d'Aix-en-Provence est en pleine agitation politique, le pouvoir local tolérant mal l'ingérence que le roi et le cardinal voudraient instituer dans leur ville, une jeune femme accompagnée de sa fille, de sa demoiselle d'honneur et flanquée d'hommes d'armes qui ressemblent plus à des malandrins, arrive dans la ville où elle séjourne un peu avant de remonter vers Paris. Arrivant de Venise, la duchesse de Rohan, enceinte doit ensuite gagner Paris où elle va accoucher. L'enfant est-il l'héritier légitime des Rohan ou le rejeton naturel d'un des amants de la duchesse, réputée d'avoir la cuisse légère ? C'est la grande question.
    Marguerite de Rohan n'est pas n'importe qui : elle est l'épouse du duc de Rohan et porte peut-être son héritier. Petite famille bretonne, elle a connu une ascension fulgurante et, au début des années 1630, le duc est le chef de file des huguenots. Il s'est battu dans les Cévennes et dans le Languedoc contre le prince de Condé, tenant du parti royal et catholique.
    En 1645, à Paris, Louis Fronsac est approché par le duc d'Enghien. Vainqueur de Rocroi, le jeune prince est entouré d'une aura et d'une influence importante : à la mort de son père, il sera prince de Condé et deviendra l'un des plus importants prince du sang. Il informe l'ancien notaire du prochain mariage de la jeune Rohan, la fille du duc et de la duchesse nommés plus haut, avec son compagnon, Chabot. Le but avoué de cette union est que Chabot récupère, par sa femme, la fortune des Rohan et le titre de duc. Seulement, la duchesse ne cesse de clamer depuis peu de temps que le fils qu'elle a mis au monde en décembre 1630 à Paris et que l'on croyait mort depuis plusieurs années est en fait en vie, a quinze ans et a été élevé à Leyde en Hollande. Pour Chabot, la déconvenue est grande, lui qui se voyait déjà duc. Pour Enghien, fils du prince de Condé, la possible existence d'un héritier des Rohan pourrait rallumer les anciennes tensions entre Rohan et Condé, vieilles d'une quinzaine d'années.
    Louis, qui est connu pour son incroyable capacité à démêler les affaires les plus embrouillées va donc devoir enquêter sur ce possible héritier de la famille Rohan et décider s'il est un imposteur ou bien le fils de feu le duc de Rohan et de la duchesse, dont la réputation sulfureuse n'incline pas à la croire quand elle proclame que son fils n'est pas un bâtard.
    Commence alors une enquête difficile pendant laquelle Louis va marcher sur des oeufs et s'attirer maints ennuis... Qui est donc ce mystérieux seigneur protestant qui semble tout faire pour lui mettre des bâtons dans les roues, envoyant même, pour ce faire, des hommes de main le rosser en pleine rue ? Et cette femme, tout aussi mystérieuse, qui semble s'attacher tant aux pas de Louis qu'à ceux de ses ennemis implacables ?
    La sixième aventure de Louis Fronsac est encore une fois assez captivante, malgré quelques longueurs au départ : l'intrigue met du temps à se mettre en marche et on en retrouve aussi quelques-unes avant les derniers chapitres, de nouveau captivants. Je dirais que le roman est un peu inégal, un peu en dents de scie, pour cette raison, sans que ce ne soit très, très gênant pour autant. Au final, quand on connaît bien l'univers de Louis Fronsac, on fait vite abstraction de ces petites imperfections
    On s'éloigne un peu de l'enquête policière convenue pour s'orienter vers quelque chose de moins criminel mais de tout aussi intéressant puisqu'il s'agit de rétablir une vérité, de démasquer un imposteur ou, au contraire, de confirmer une personne de bonne foi dans ses droits. Le souci c'est que l'enquête de Louis se passe à une période d'agitation politique intense et l'affaire finirait presque par ressembler à une affaire d'État. Quoique Louis conclue, il se fera forcément des ennemis, de l'un ou l'autre parti et pourrait perdre le soutien important du duc d'Enghien, ce qui n'est pas rien.
    En parallèle, nous retrouvons son grand ami Gaston de Tilly, commissaire au Châtelet qui enquête sur la mort étrange de l'un de ses sergents du guet retrouve roué dans le charnier près de la rue Saint-Antoine qui sert de cimetière à la Bastille. Y'aurait-il un lien entre l'affaire qui occupe Louis et celle-ci, qui s’avérerait alors être autre chose qu'un simple crime sordide comme il y'en avait tant à Paris à l'époque ?
    Après L'Homme aux Rubans Noirs, cinquième opus des fameuses Enquêtes de Louis Fronsac qui nous faisait faire un bon dans le temps grâce à cinq nouvelles se passant sous la régence d'Anne d'Autriche, nous « rétropédalons » -je ne crois pas que ce mot existe, hein, mais je l'aime bien et puis vous avez compris, non ?- pour revenir en 1645 et je dois dire que j'ai parfois été un peu perdue me souvenant de faits ou de détails du précédent tome et que l'on ne retrouve que de façon superficielle dans ce tome, tel ou tel événement n'étant pas censé s’être encore passé. Pour autant, cette sensation a vite disparu parce que j'ai été très intéressée par l'intrigue tournant autour de Tancrède de Rohan ou du moins, autour du jeune homme prétendant être Tancrède de Rohan. Cela nous change des enquêtes criminelles lambda et plus ou moins toutes menées de la même manière ! Je ne dis pas que ce n'est pas intéressant mais c'est parfois bien aussi de changer la façon de faire. D'autant plus qu'on retrouve quand même une enquête criminelle menée en parallèle de celle de Louis, par son acolyte de toujours, le commissaire de Tilly. Cela dit, au final, le parallélisme et la distinction entre les deux enquêtes s'avèrent un peu moins évidents à mesure que l'on avance dans la lecture car Jean d'Aillon, avec son habileté notoire, a bien sûr réussi, grâce à force pirouettes et cabrioles, à faire en sorte que les deux affaires soient bien plus liées qu'il n'y paraît de prime abord ! Elles finissent même par se télescoper en fin de volume pour finalement n'en plus devenir qu'une seule, ce que j'avais commencé à soupçonner dès le milieu de l'ouvrage sans savoir comment l'auteur allait amener cette fusion.
    Ce sixième m'a bien plu, vous l'aurez compris, même si ce n'est peut-être pas mon préféré. Passons sur deux trois petites incohérences, rien de grave en soi : mais c'est vrai que, parfois, cela a gêné ma compréhension de quelques passages. A part ça, le Paris des années 1640 revit sous nos yeux et Jean d'Aillon nous fait même faire un crochet par l'Aix-en-Provence des années 1630, une ville en proie aux troubles et en révolte ouverte contre les prérogatives royales.
    J'ai été peut-être un peu moins captivée que d'habitude mais l'intrigue a le mérite d'être originale et bien menée. Parce que j'ai des éléments de comparaison avec les précédents tomes, j'ai trouvé celui-là peut-être un peu moins enlevé mais c'est quand même un bon cru : je dois dire que, même si j'ai ressenti quelques longueurs en milieu d'ouvrage, les derniers chapitres m'ont vraiment captivée et je suis restée vraiment surprise devant le dénouement des investigations de Louis mais aussi de Gaston.
    L'enquête autour de Tancrède de Rohan ou, du moins, le prétendu Tancrède de Rohan est intéressante pour les conséquences politiques qu'elle implique et illustre bien le contexte de l'époque, les hostilités et tiraillements entre castes ou religions.
    Jean d'Aillon s'est basé ici sur une histoire authentique, rapportée par Gédéon Tallemant des Réaux dans ses Historiettes et qui secoua la Cour de France dans la seconde moitié des années 1640 : il y'eut bien une affaire Tancrède de Rohan. Partant ensuite de ce fait plus ou moins avéré et authentique, Jean d'Aillon brode pour nous fournir, un peu à la Alexandre Dumas, un roman d'aventures dans lequel s'entremêlent Histoire et romanesque. Et ça marche. Il nous fait faire connaissance également avec le bourreau de Paris, que l'on qualifie d'un doux euphémisme, l'exécuteur des hautes œuvres ou de la haute justice, terme qui a d'ailleurs donné son nom au roman et sa mystérieuse fille, Mathurine... 

    Et, encore une fois, on ne peut que louer l'immense travail de Jean d'Aillon. Une bonne bibliographie complète l'ouvrage, ce qui lui confère une certaine crédibilité. L'auteur est très investi dans chacune de ses sagas et on sent tout l'attachement, sinon l'amour, qu'il porte à chacun de ses personnages et peut-être plus particulièrement à Louis Fronsac qui est un peu son personnage phare, comme Sherlock Holmes a pu être celui de Conan Doyle.
    Je continuerai cette saga, parce que moi aussi je me suis attachée aux personnages notamment à Julie et Louis. Et revenir voyager dans le Paris de la régence d'Anne d'Autriche et les débuts du règne de Louis XIV, en compagnie de Louis et de ses compagnons, est toujours un plaisir

    En Bref :

    Les + : une enquête intéressante, avec des conséquences politiques et religieuses importantes et bien cernées par l'auteur. 
    Les - : quelques longueurs et, peut-être, deux trois petites incohérences. 


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  • « Quand on est jeune, il y'a plein de choses qu'on ne comprend pas. Vieillir, ça t'apporte de la sagesse, et la sagesse est une belle chose. »

    Lola Bensky ; Lily Brett

    Publié en 2013 en Australie ; en 2016 en France (pour la présente édition)

    Titre original : Lola Bensky

    Editions 10/18 (collection Domaine Etranger)

    310 pages

    Résumé : 

    Londres, 1967. Lola, 19 ans, pige pour le magazine Rock Out. Sans diplôme, trop ronde, trop sage, celle dont le seul bagage est d'être l'enfant de survivants de la Shoah plonge au cœur de la scène rock, causant bigoudis, sexe ou régime avec Hendrix, Mick Jagger, Janis Joplin. Des portraits inattendus qui révèlent son inconsciente quête identitaire...Entre guitares électriques et survie, avec humour et tendresse : un roman survolté, poignant autoportrait et savoureux hommage aux génies du rock des années 60-70. Une pépite. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1967, Lola Bensky, jeune journaliste australienne de dix-neuf, vingt ans, est à Londres, pour interviewer toutes les stars montantes de la scène anglaise : les Stones bien sûr, mais aussi les Beatles, les Who, Cat Stevens, prend un café avec Mick Jagger et passe une soirée avec Paul McCartney. La fin des années 60 est dynamique en Angleterre et surtout à Londres où l'on danse, où l'on s'amuse et où l'on adore des rock stars à peine plus âgées que soi, dans des clubs sombres, enfumés et sensuels.
    Lola n'est pas à proprement parler une groupie même si elle est un pur produit de cette génération tellement émancipée des codes de la précédente : indépendante, des faux-cils exubérants collés aux paupières et soulignées de khôl, robes courtes et bas résille, Lola est bien de son époque. Elle exerce un métier dont beaucoup rêveraient : elle écrit pour un magazine australien musical et peut donc approcher toutes les stars du moment, après un concert ou même en une rencontre informelle chez eux, autour d'un café : ce qui peut nous paraître fou quand on voit aujourd'hui les bataillons d'agents et d'assistants qui entourent les stars et les rendent inaccessibles. Parce que oui, à l'époque et ce n'était il n'y pas si longtemps, ça se passait comme ça.
    Lola ne va pas s'arrêter en si bon chemin. Après l'Angleterre, direction New York, une ville encore piteuse, miteuse et banale en comparaison du Swinging London ! Là-bas, pourtant, des groupes aussi prennent leur envol, ce qui fait du rock une musique éminemment anglo-saxonne. Elle rencontre le dérangeant chanteur des Doors, Jim Morrisson qui proclame détester ses parents mais adorer Satan, y retrouve Jimi Hendrix, rencontré à Londres, capable de faire l'amour sur scène à sa guitare et à son pied de micro mais tellement réservé dans la vie et Cher, sensuelle et troublante mais dépendante de son mari Sonny.
    Elle couvrira le festival de Monterey, où se produit tous le gratin de la scène rock et fera à cette occasion la rencontre d'une des rares femmes à avoir réussi à s'insérer dans ce milieu et à y rester : Janis Joplin. Comme Hendrix, comme Morrisson, elle est déjà en train de se brûler les ailes et rejoindra elle aussi le Club des Vingt-Sept, ces artistes foudroyés en pleine ascension, à vingt-sept ans, brisés par le succès, les excès ou la dépression.
    Mais Lola Bensky, ce n'est pas non plus que ça. Ayant vingt ans au milieu des années 60, elle est donc née au milieu des années 40. Et si Lola est australienne parce qu'elle a vécu dans ce pays depuis toujours et y a reçu son éducation, elle n'est pas australienne d'origine. Lola est née dans un camp de transit pour personnes déplacées, juste après la Guerre. Ses parents, Renia et Edeck, ont connu les ghettos juifs, les pogroms et surtout les camps où leurs familles respectives ont été brisées. Plus rien, jamais, n'a pu être pareil. Et ils ont transmis leur souffrance et leur mal-être à leur fille, bien que celle-ci n'ait pas à proprement parler connu la guerre. Cette dernière continue d'influencer sa vie de jeune femme, ses relations avec ses parents et de la hanter.

    Lily Brett en compagnie de John Weider, guitariste du groupe Eric Burdon and the Animals, en 1967


    Vous l'aurez compris, Lola Bensky n'est pas qu'un roman futile et superficiel où l'on croise des rock stars lascives et des groupies en transe, portant mini-jupe et faux cils. Déjà parce que l'héroïne, Lola, est bien éloignée du cliché de la fan hystérique qui ne cherche qu'à finir dans le lit de son idole. Approcher les stars est son métier, c'est tout. C'est devenu banal pour elle : parler avec les rock stars c'est assurer d'écrire un papier par la suite et être payée. Point. Pour autant, qu'elle le veuille ou non, Lola gravite dans ce monde et n'a tout de même pas une profession ordinaire, au contraire. Elle en a acquis les codes mais reste quand même une jeune femme de vingt ans comme les autres.
    C'est finalement cette banalité qui m'a plu chez elle. Dans cette jeune femme un peu forte, pas excessivement jolie, sans être un laideron non plus, nous pouvons nous retrouver. Il est plus facile de s'identifier à une jeune femme qui glisse des mouchoirs en papier entre ses cuisses pour éviter qu'elles ne frottent l'une contre l'autre et provoquer une pluie de particules blanches dans la loge de Jimi Hendrix ou encore, une jeune femme qui juge si elle a pris ou perdu du poids en estimant l'ajustement plus ou moins important de ces vêtements !
    Et puis Lola est touchante parce qu'elle est une fille de rescapés et qu'en cela elle a pris une part de leur souffrance, qui ressort dans une certaine fragilité nous la faisant tout de suite aimer.
    J'avais choisi cette lecture pour le thème de mars de mon Challenge des Douze Thèmes. J'avais proposé aux autres participantes de partir en Angleterre ce mois-ci et je dois dire que j'ai été bien embêtée quand je me suis rendu compte que l'action du roman ne se passait pas complètement en Angleterre. Les tribulations de Lola l’emmènent aux Etats-Unis puis elle retourne en Australie avant de retourner ensuite à New-York, où elle s'installera en famille, la quarantaine passée. Londres et l'Angleterre ne sont qu'une parenthèse dans sa vie, comme Monterey, comme Los Angeles. Et pourtant j'ai choisi de valider cette lecture. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas plus anglais que le rock et la pop music, à plus forte raison ceux des années 60 ! La scène rock est majoritairement représentée par des artistes et groupes britanniques et, pour les Américains, le passage obligé pour atteindre la célébrité est le hit-parade anglais. C'est l'époque du Swinging London, une émulation culturelle et musicale à nulle autre pareille. Comme Paris est la capitale des peintres et des intellectuels, Londres devient celle du rock. Alors que les groupes soient anglais ou américains, ils avaient finalement tous cette petite touche british les rattachant à la scène londonienne qui était un passage obligé et l'endroit où se lançaient les modes. Lola Bensky évolue dans un univers fortement marqué par l'ambiance de la capitale anglaise, qui est parvenue à s'exporter et même à devenir un modèle aux États-Unis.
    J'ai aimé cette plongée dans le mode interlope du rock des années 60, dur, sale, bruyant, parfois étrangement policé. Et que cette plongée se fasse à travers les yeux et l'expérience d'une jeune fille lambda et qui arrive là-dedans un peu par hasard m'a plu.
    C'est que j'ai aimé et ne soupçonnais pas, avant de démarrer ma lecture, ce sont les souvenirs de guerre, omniprésents. Et ces souvenirs ne sont pas relatés par la génération qui a en a souffert directement mais par la génération suivante, celle de ses enfants qui, nés à la toute fin de la guerre ou juste après, on en souffert aussi, indirectement mais tout autant. Chez Lola, cette souffrance vient de l'absence de ses parents et surtout de sa mère, recroquevillée sur son passé, ses souvenirs et ses regrets, ce qui, forcément, influe sur le propre équilibre de la jeune femme.
    L'incroyable gravité que ces passages, parfois assez insoutenables quand Lola raconte les horribles souvenirs de sa mère à Auschwitz, les morts en masse, les enfants exécutés, les pseudo expériences médicales pratiquées sur des cobayes humains, contrebalance totalement l'aspect plus superficiel, léger consacré aux stars du rock. Il est sûr qu'à côté des horreurs de la Shoah, leurs états d'âmes ne peuvent qu'apparaître bien dérisoires : on est là dans des registres complètement différents. Certains, cependant, apportent grâce aux questions de Lola, notamment, un éclairage juste et sensé sur la vie et la célébrité et sur ce que celle-ci implique comme bouleversements sur une existence.
    J'ai aimé également le parti-pris de l'auteur de raconter sa propre histoire à travers un avatar : Lily Brett devenant Lola Bensky. C'est une approche émouvante je trouve, teintée d'une grande pudeur, d'une grande modestie, comme si l'auteure avait voulu raconter son histoire, sa vie, sans se mettre trop en avant pour autant. À mon sens, il n'y a pas plus de démarche centrée sur le moi que l'autobiographie ou la rédaction de mémoires. Je pense même qu'il y'a chez certains une forme de narcissisme et de plaisir à se raconter et se mettre en scène dans une histoire destinée à être lue par des inconnus. Chez Lily Brett, rien de tout ça, du moins est-ce ainsi que je l'ai ressenti et j'ai aimé sa manière de se retirer derrière Lola, de devenir en quelque sorte une héroïne de roman à part entière. La pudeur et la justesse des mots qu'elle met sur l'horreur connue par ses parents et par la lente destruction que ces ses souvenirs opèrent sur sa propre existence sont d'une émotion infinie, entre le cynisme des vainqueurs et la douleur digne des vaincus. Le témoignage de Lily Brett est peut-être l'un des plus percutants que j'aie pu lire, tout simplement parce qu'il est là où ne l'attend pas. Qui pourrait imaginer que cette couverture, illustrée par les grands yeux clairs d'une baby doll puisse cacher un témoignage d'une telle intensité ? Personnellement, je ne m'y attendais pas, mais l'auteure mêle très habilement deux sujets qui sont pourtant à des années-lumière l'un de l'autre : raconter dans un même livre le Swinging London et la Shoah était un pari fou, relevé haut-la-main par l'auteure.
    Lola Bensky est un bijou, une petite pépite d'humour, d'amour, de légèreté et de gravité aussi, parfois. Bref c'est un condensé d'émotions diverses que je ne regrette pas d'avoir éprouvées. Lola Bensky est pour l'instant la meilleure surprise de ce début d'année 2017.

    Le festival de Monterey en Californie, en 1967 : un petit bout de rock anglais en pleine Amérique

     

    En Bref : 

    Les + : une jolie pépite livresque, pleine de surprises ; un style juste et touchant ; des souvenirs relatés avec enthousiasme ou pudeur. 
    Les - : dommage que le résumé de la quatrième de couverture nous présente ce roman comme étant exclusivement londonien, parce que ce n'est pas le cas. 

     

    Un Amour de Soie ; Lindsay Chase

    Thème de mars « My Tailor is Rich », 3/12

     


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  • « Tu fais partie des bâbordais de la Diane, mon gars. C'est désormais ta seule famille, et pour un moment, crois-moi ! »

     

    Publié en 2012

    Editions Pocket

    379 pages 

    Premier tome de la saga L’Énigme de la Diane 

    Résumé :

    En cette nuit de 1781, Basile, jeune Breton, est entraîné dans les rues malfamées de Brest par son oncle. Pour cet orphelin appelé à prendre sa succession à la tête des Conserveries pontécruciennes, la virée tourne mal : après une nuit d'ivresse, le voilà embarqué de force à bord de la Diane, frégate française en partance pour les Caraïbes. 
    Sous les ordres du capitaine Selcy, le garçon va faire le dur apprentissage du métier de marin. Une grande aventure à travers les mers du monde entier s'ouvre alors à lui...

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1781, le jeune Basile, douze ans, est élevé par son oncle et parrain. Habitant à Pont-Croix, en Bretagne, ce dernier est un bourgeois bien installé, propriétaire de conserveries prospères dont Basile est l'héritier.
    Mais tout se complique lorsque, emmené par son oncle à Brest, celui-ci est arrêté par la maréchaussée. Échoué dans une taverne du port, Basile est saoulé par un marin puis se réveille le lendemain à bord d'un navire de la Royale, une frégate plus précisément, appelée la Diane et qui appareille de Bretagne vers les Antilles.
    À bord, Basile va apprendre le fonctionnement d'un navire de guerre, il va apprendre à naviguer aussi, à vivre sur l'eau mais aussi à faire le deuil de son ancienne vie, qui le destinait à devenir un bourgeois, comme son parrain. Mais il se pourrait que Basile n'ait pas été embarqué sur la Diane par hasard... alors pourquoi le jeune garçon plutôt qu'un autre ? Quel est son secret ? Sur ce navire, au milieu d'hommes devenus peu à peu ses compagnons et faisant le coup de feu contre les Anglais, Basile pourrait bien apprendre des choses édifiantes sur lui-même mais aussi sur ses parents, Fanch et Chanig, qu'il a perdus petit et avec qui il vivait heureux à Audierne.
    De l'Iroise aux Caraïbes est le premier tome de la saga en deux volumes L'Énigme de la Diane, écrite par Nicolas Grondin. Né en 1963, l'auteur a notamment été libraire avant de devenir auteur. Il a été découvert en 2010 par Les Nouveaux Auteurs, avec L'Énigme de la Diane, justement et est soutenu par Yann Queffélec lui-même, qui lui a permis de se faire connaître et n'hésite pas à dire ceci de ce premier tome : « J'ai été bluffé, happé par l'histoire...Que vous aimiez la mer ou non, ce livre est un formidable roman d'hommes et d'horizons lointains. [...] GENIAL. »
    Alors, après lecture, suis-je aussi enthousiaste que lui ? Après avoir trouvé très belles les couvertures des deux romans (c'est vrai qu'elles sont belles, vous ne trouvez pas ?), ai-je bien fait de me laisser tenter ? Eh bien la réponse est un grand oui. Oui oui oui et encore une fois oui ! Je valide, j'achète, j'adhère. Il y'a longtemps que je n'avais pas été emportée aussi vite et aussi fort dans un roman d'aventures. Là, on a affaire à un roman peu connu mais qui a tout d'un grand, comme son auteur. Nicolas Grondin mérite d'être reconnu et d'être lu ! Bluffée ? Je l'ai été, indéniablement. Et je confirme : je crois que, que l'on aime la mer ou pas, on parviendra à se plonger dans l'ambiance de ce roman sans aucun problème. Qu'on s'y connaisse en navigation ou pas, on vibrera avec les héros de la Diane. Si au départ, j'ai été un peu perdue, par la grande multiplicité des personnages, qu'il m'a fallu un moment pour replacer et associer chacun à son nom et à sa fonction, une fois tout ceci mis à plat, ce fut un réel plaisir.

    La Lutine, une frégate française du XVIIIème siècle 


    Ce premier roman est d'une qualité époustouflante : fin, précis, le style est juste et racé. Les personnages, presque tous masculins, sont ciselés et finement travaillés. Le roman est extrêmement technique, peut-être trop pour quelqu'un qui, comme moi, n'y connaît rien en matière de navigation et d'organisation de la Marine Royale au XVIIIème siècle. Heureusement, un glossaire très détaillé est disponible en fin de volume. Je vous avouerais néanmoins que certains termes, même après lecture de la définition, sont restés quelque peu confus et abstraits pour moi. Pour autant, je n'ai pas été gênée plus que ça... le roman n'est pas totalement incompréhensible, malgré sa technicité. Il ne faut rien exagérer. Tout bien sûr, ne repose pas là-dessus... le roman est aventureux et les péripéties et rebondissements bien amenés, vraisemblables... quant à l'aspect humain du roman, je l'ai trouvé subtilement traité : Grondin parvient à retranscrire assez fidèlement ce que devait être la cohésion et la solidarité sur un navire de ce genre, l'union qui se crée entre des hommes des conditions et origines diverses, qui se battent pourtant et se démènent pour la même chose : pour survivre et pour servir le roi, malgré les doutes, malgré la peur, malgré les dangers innombrables, rendus plus effrayants encore sur les navires qu'au sol. Surtout, leur amour et leur respect pour le navire qui les porte, la Diane, est palpable, comme si elle était un camarade à part entière, dont il faut prendre un grand soin.
    Petit à petit, Basile va s'habituer à cette vie bien particulière, va s'attacher lui aussi à la frégate, connaître le baptême du feu et montrer qu'il a toutes les qualités requises pour devenir un bon marin de la Royale et même s’éveiller pour la première fois aux délices de l'émoi amoureux... Aux Antilles, il découvrira aussi un mode de vie différent et la dure loi de l'esclavage et des plantations.
    Le fait que le récit soit à la première personne nous rend Basile, le héros et narrateur, très attachant et ce, dès le départ. En ouvrant le livre, j'avais un peu peur, je ne savais pas si je parviendrais à m'attacher à un personnage si jeune, à peine un adolescent. Au final, oui, parce que c'est un Basile plus âgé qui se raconte. Parfois, la narration se fait plus omnisciente mais il s'avère que c'est toujours Basile qui raconte, comme s'il relatait alors des souvenirs auxquels il est étranger, qu'on lui a racontés, et qu'il retranscrit ensuite : j'ai aimé l'habileté de l'auteur à passer d'un style direct à un qui l'est subtilement beaucoup moins. Le style d'écriture de l'auteur n'en est pas simplifié ou réduit, au contraire, ce qui aurait pu advenir s'il avait prêté sa plume à un jeune narrateur : j'ai aimé la façon d'écrire de l'auteur, ses phrases sont dynamiques, elles virevoltent. Grondin est autant à l'aise avec les traits d'humour que dans la narration d'une prise de port. Sa plume sait se faire touchante ou plus incisive...
    Bref, ce premier tome de L'Énigme de la Diane a été une bonne surprise. J'avais envie de voyager, j'avais envie d'exotisme. J'ai eu les deux, en me plongeant dans ce roman. Le fait que l'histoire se passe, avec en toile de fond, un contexte riche n'est bien sûr pas pour me déplaire. Nicolas Grondin situe son roman au début des années 1780, alors que la Guerre d'Indépendance américaine fait rage, Anglais et Français en profitant pour s'écharper sur les mers et se disputer leurs colonies respectives... C'est une époque riche mais pas souvent abordée depuis le point de vue choisi par l'auteur, à savoir, celui des marins. 
    Bref, vous aurez sûrement compris que j'ai été séduite par ce roman ! J'y ai tout aimé et n'ai pas trouvé le moindre petit défaut !
    Alors vous m'excuserez mais il faut que je vous laisse maintenant pour aller me plonger sans plus tarder dans le deuxième tome ! 

    Combat de la Belle Poule, navire français et de l'Arethusa, navire anglais, en 1778

    En Bref :

    Les + : un roman enlevé et précis, d'une grande technicité, ce qui le rend hautement crédible, bien évidemment ; le style de l'auteur également.
    Les - : Aucun. 


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  • Bingo littéraire de printemps (du 20 mars au 20 juin 2017) sur Livraddict

     

    Aujourd'hui, je vous parle d'un petit défi littéraire que je me lance, histoire de pimenter un peu les lectures du printemps 2017 ! Il s'agit du Bingo Littéraire de Printemps, organisé sur trois mois, du 20 mars au 20 juin. Le principe est simple : comme avec une grille de bingo normale, il s'agit de remplir la grille petit à petit. Mais ici, ce ne sera pas avec des jetons, mais avec des livres, qui devront correspondre à chaque consigne. Bien sûr, un livre ne peut pas être comptabilisé deux fois, sinon, c'est trop facile ! 

    Ce challenge est organisé sur Livraddict par LaurenceAuthentique. Pour voir le sujet, c'est par là : cliquez.

     

    Et voici cette fameuse grille de bingo...une très belle création, je trouve : 

    Bingo littéraire de printemps (du 20 mars au 20 juin 2017) sur Livraddict

     

     

    Je viendrai par ici pour mettre mes lectures à jour dès que possible, avec un lien vers les chroniques.

    -Mes Lectures

    - Un livre paru en 2016 : Hortense de Beauharnais, Marie-Hélène Baylac

    - Un livre déjà lu à l'école : Les Liaisons Dangereuses, Pierre Choderlos de Laclos

    - Un livre qui se passe sur un autre continent : L'Île aux Mille Couleurs, Tamara McKinley

    - Un livre adapté au cinéma : 

    - Couverture de printemps : 

    - Un livre avec un personnage féminin fort : Le Serpent et la Perle, Kate Quinn 

    -Le livre le plus vieux de votre PAL : Mémoires d'Outre-tombe, tome 2, François-René de Châteaubriand

    - Un livre de poche : Charleston, Alexandra Ripley

    - Un livre avec du rouge sur la couverture : Les Enquêtes de Louis Fronsac, tome 7, L'Enigme du Clos-Mazarin

    - Un pavé de plus de 500 pages : La Part de l'Aube, Eric Marchal 

    - Un livre feel good : 

    - Un manga / BD / album / comic : Murena, tome 1, La Pourpre et l'Or, Jean Dufaux et Philippe Delaby

    - Jocker : Murena, tome 2, De Sable et de Sang, Jean Dufaux et Philippe Delaby

    - Un livre emprunté : L'Enfant de l'Etranger, Alan Hollinghurst

    - Un auteur africain : 

    - Un livre avec avril dedans : 

    - Un livre d'une petite maison d'édition : Quel Pétrin ! : Faute de Blé, la Boulangère a des Idées, Céline Barré

    - Un ebook : 

    - Un livre avec une créature fantastique : 

    - Un livre avec un aliment / boisson dans le titre : La Couleur du Lait, Nell Leyshon 

    - Un livre inspiré d'un fait réel : Danish Girl, David Ebershoff 

    - Un livre offert : Les Soupers Assassins du Régent, Michèle Barrière 

    - Un livre avec un animal : La Compagnie des Menteurs, Karen Maitland 

    - Un livre populaire : 

    - Un livre de moins de 200 pages : Mademoiselle Chon du Barry ou les Surprises du Destin, Frédéric Lenormand 

     

    Alors ? Qui en est ? 


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