• Biographies / Essais Historiques / Mémoires

      

    Biographies / Essais Historiques / Mémoires

    SOMMAIRE BIOGRAPHIES, ESSAIS HISTORIQUES, MÉMOIRES, CORRESPONDANCES 

     

    - A - 

    Abélard, Argenteuil (d') Héloïse, Correspondance 

    Armstrong Lindsay, Charles Quint : l'Indomptable 

    Avril Nicole, L'Impératrice 

    - B - 

    Baylac Marie-Hélène, Hortense de Beauharnais 

    Beaumarchais (de) Pierre Caron, « Quand on a le bonheur d'aimer, tout le reste est vil sur la Terre », lettres d'amour à Amélie Houret de la Morinaie, 1787-1799

    Beaune Colette, Jeanne d'Arc : Vérités et Légendes 

    Bély Lucien, Histoire de France Illustrée 

    Berly Cécile, Les Femmes de Louis XV 

    Bernet Anne, Madame Elisabeth : sœur de Louis XVI 

    Bertière Simone, Les Reines de France au temps des Bourbons, tome 1, Les Deux Régentes

    Bertière Simone, Les Reines de France au Temps des Bourbons, tome 2, Les Femmes du Roi-Soleil 

    Bertière Simone, Les Reines de France au Temps des Bourbons, tome 3, La Reine et la Favorite

    Bertière Simone, Les Reines de France au Temps des Bourbons, tome 4, Marie-Antoinette, l'Insoumise

    Bertière Simone, Mazarin, le Maître du Jeu

    Blondel Jean-François, Châteaux de la Loire : drames et passions 

    Bordonove Georges, Henri IV 

    Bordonove Georges, Les Rois qui ont fait la France : Louis XV, grand-père de Louis XVI

    Bourbon-Parme (de) Isabelle, « Je meurs d'amour pour toi... » Lettres à l'archiduchesse Marie-Christine, 1760-1763 

    - C - 

    Campan (Madame), Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette 

    Cars (des) Jean, Eugénie : la Dernière Impératrice 

    Cars (des) Jean, La Princesse Mathilde : l'Amour, la Gloire et les Arts

    Cars (des) Jean, La Saga des Favorites 

    Cars (des) Jean, Le Sceptre et le Sang : Rois et Reines dans la tourmente des deux guerres mondiales 

    Cars (des) Jean, Louis II de Bavière ou le Roi Foudroyé 

    Castarède Jean, Louis XIII et Richelieu

    Craveri Benedetta, Les Derniers Libertins

    - D - 

    Decker (de) Michel, La Reine Margot : la Reine Libertine 

    Decker (de) Michel, Louis XIV : le Bon Plaisir du Roi

    Deutsch Lorànt, Hexagone 

    Dufour Hortense, Madame de Pompadour : l'Amie Nécessaire 

    Durel Elie, Héloïse et Abélard : la Gloire, l'Amour et la Spiritualité 

    - E - 

    El Makki Laura, Les Soeurs Brontë : la Force d'Exister

    - F - 

    Fédorovski Vladimir, Les Tsarines : Les femmes qui ont fait la Russie

    Fraser Antonia, Les Femmes dans la Vie de Louis XIV 

    Fraser Antonia, Marie-Antoinette 

    - G - 

    - H - 

    Haroche-Bouzinac Geneviève, Elisabeth Vigée Le Brun : Histoire d'un Regard

    Hillerin Laure, La Duchesse de Berry : l'Oiseau rebelle des Bourbons 

    - I - 

    - J -

    - K - 

    - L - 

    Lassère Madeleine, Lucie de La Tour du Pin (1770-1853), marquise courage

    Launay (de) Anne-Prospère, Sade (de) Donatien, « Je jure au marquis de Sade, mon amant, de n'être jamais qu'à lui »

    Lever Evelyne, Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789

    Lever Evelyne, Marie-Antoinette telle qu'ils l'ont vue : témoignages, lettres, rapports secrets, souvenirs, confidences 

    - M -

    Maral Alexandre, Femmes de Versailles 

    Mason Phil, Les Hémorroïdes de Napoléon...et toutes ces petites histoires qui ont fait la grande ! 

    Mason Phil, Les Testicules de Jeanne d'Arc et...autres surprises de l'Histoire !

    Metternich (de) Pauline, « Je ne suis pas jolie, je suis pire », Souvenirs 1859-1871

    Mourousy Constantin, L'Enigme de la Vénus de Milo

    - N - 

    - O - 

    - P - 

    Philippe Alexandre, L'Aulnoit (de) Béatrix, Pour mon fils, pour mon roi : la reine Anne, mère de Louis XIV

    Pernoud Régine, La Femme au Temps des Cathédrales 

    Petitfils Jean-Christian, Fouquet 

    Petitfils Jean-Christian, Jésus 

    Petitfils Jean-Christian, La Transparence de l'Aube, Mémoires de Claire-Clémence, princesse de Condé

    Petitfils Jean-Christian (dir.), Le Siècle de Louis XIV 

    Petitfils Jean-Christian, Louis XIII

    - Q - 

    - R - 

    - S - 

    Saint-Simon (de) Louis, « Cette pute me fera mourir », Mémoires du duc de Saint-Simon

    Sapori Michelle, Rose Bertin : couturière de Marie-Antoinette

    Sévillia Jean, Histoire passionnée de la France 

    Sévillia Jean, Zita, Impératrice courage 

    Simon Jean-Marc, Marie-Antoinette ou l'Insouciance Assassinée 

    Solnon Jean-François, Les Couples Royaux dans l'Histoire 

    - T - 

    - U - 

    - V - 

    Veil Simone, Une Vie 

    - W - 

    Wagener Françoise, L’Énigme Fersen

    Walch Agnès, La Marquise de Brinvilliers

    Wiazemsky Anne, Un An Après

    Worth Jennifer, Appelez la sage-femme 

    - X - 

    - Y - 

    - Z - 

  • « D'un bout à l'autre de sa course, le Grand Siècle a vibré de l'engagement des grandes âmes. Cet engagement prit des formes diverses, à la mesure des talents, des ancrages sociaux, des circonstances et des appels reçus, s'inscrivant aussi dans différents domaines de la vie, qu'il s'agisse de spiritualité et d'action chrétienne dans la cité, de littérature et de culture, de vie en société ou de politique. »

     

     

     

        Publié en 2022

      Éditions Perrin

      382 pages

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Alors que l'histoire des femmes est aujourd'hui largement abordée et débattue sous l'angle de la condition féminine - souvent pour en dénoncer les carences -, le point de vue du présent ouvrage renverse les perspectives, en mettant en valeur la force singulière de l'empreinte féminine sur la société du Grand Siècle.
    Certes, il existe de nombreuses biographies de femmes célèbres de cette époque, mais une galerie de portraits rassemblant, dans leur thématique propre, de grandes dames de la spiritualité, de la vie culturelle et littéraire ainsi que de la vie politique relève d'une démarche originale et inattendue.
    Barbe Acarie, Louise de Marillac, Marie de l'Incarnation, Angélique Arnauld, Catherine de Rambouillet, Madeleine de Scudéry, Mme de Sévigné, Mme de La Fayette, la duchesse de Longueville, Anne d'Autriche et Mme de Maintenon : les onze portraits brossés avec autant de rigueur que de conviction par Marie-Joëlle Guillaume frappent par la puissance civilisatrice et l'intensité d'âme et d'esprit de leurs modèles, qui n'ont rien à envier aux héroïnes du théâtre classique. Ils offrent une plongée concrète et très vivante dans les mentalités du XVIIe siècle, de Corneille à Port-Royal. Ils font surtout apparaître que l'excellence de la civilisation française, de Louis XIII à Louis XIV, est directement liée aux femmes d’élite qui en furent les actrices.

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Lorsqu’on pense au XVIIème siècle, on songe facilement au règne de Louis XIV, aux Mousquetaires, à Richelieu ou à de grands militaires comme Turenne ou le Grand Condé. On convoque moins spontanément les figures féminines et pourtant, le Grand Siècle en recèle un nombre important.
    Femmes de foi, de gouvernement, de lettres, héroïnes de théâtre : les années 1600 sont remplies, pour peu qu’on veuille se donner la peine de les chercher, de figures féminines phares, indissociables d’une époque mais aussi d’une grande modernité pour certaines.
    Ce sont ces destins féminins, très connus ou plus confidentiels que l’autrice Marie-Joëlle Guillaume se propose de nous raconter ici. D’Anne d’Autriche en passant par Madame de Sévigné ou encore Madame de Maintenon, on découvre un XVIIème siècle marqué par une influence féminine forte : qu’auraient été les lettres françaises sans les femmes qu’il ne faut pas réduire simplement à de ridicules précieuses ? Quel a été leur apport à la foi catholique et à sa fortification, dans le contexte de la Contre-Réforme ? Et en ce qui concerne l’État, les femmes ne sont pas en reste, que ce soit Anne d’Autriche, régente du royaume pendant la minorité de son fils ou encore, la duchesse de Longueville, qui se soulève pendant la Fronde, bercée d’un idéal aristocratique qu’elle entend défendre coûte que coûte, même contre le pouvoir royal.
    Divisé en trois parties, le livre aborde comme dit plus haut les femmes de foi, les femmes politiques et les écrivaines, les autrices. Certains destins nous sont plus familiers que d’autres : ainsi, on redécouvre plutôt que l’on découvre l’histoire de Madame de Sévigné, la célèbre épistolière ou encore, celle d’Anne d’Autriche, la reine espagnole devenue viscéralement française dès lors qu’il s’est agi de défendre les intérêts de son fils mineur. On en apprend un peu plus sur Mademoiselle de Scudéry, la fameuse inventrice de la Carte du Tendre, à laquelle on l’a trop souvent réduite alors que son œuvre est bien plus riche et bien plus vaste, on découvre aussi avec intérêt tant la psychologie que le quotidien de Madame de La Fayette, qui nourrit son œuvre et a fait traverser le temps à ses romans, La princesse de Montpensier ou encore, le célébrissime La princesse de Clèves.

    Louise de Marillac fonde les Filles de la Charité et se met toute sa vie au service des pauvres et des nécessiteux


    En revanche, c’est avec un certain intérêt que j’ai découvert les femmes de foi, ces femmes qui s’inscrivent avec ferveur dans la mystique complexe et exaltée du XVIIème siècle : Barbe Acarie, née en pleine Contre-Réforme et soutenue par une foi indéfectible qui la conduira à une vie religieuse exemplaire après une vie dans le siècle où elle fut épouse et mère (ce fut elle qui introduisit le Carmel en France). Quant à la tourangelle Marie de l’Incarnation, c’est aussi avec souffle et avec ferveur qu’elle s’engage dans l’aventure de sa vie : s’embarquer pour la Nouvelle-France afin d’y apporter la foi catholique, dans une volonté missionnaire que l’on comprend mal aujourd’hui et qui ne se justifie plus mais qui était alors d’une importance certaine. Arrêtons-nous également un instant sur la battante Louise de Marillac, restée longuement en marge de sa famille car née bâtarde, fondatrice avec Vincent de Paul des Filles de la Charité, qui existent encore de nos jours et œuvrent partout dans le monde, notamment en Afrique auprès des plus déshérités, leur apportant un secours non seulement matériel mais aussi religieux ou encore sur Angélique Arnauld, abbesse de Port-Royal à 18 ans et devenue, à l’instar des membres masculins de sa famille, une figure de proue du jansénisme naissant.
    N'étant pas croyante et pas forcément très à l’aise avec les notions de doctrine, de mystique, de dogme, j’avoue que certains concepts m’ont paru un peu obscurs mais dans l’ensemble, cela ne m’a pas gênée plus que cela pour la compréhension même si, évidemment, mon rythme de lecture s’en ressenti car il m’a fallu plus de temps pour tout bien assimiler. J’ai bien évidemment préféré les chapitres consacrés aux femmes d’État, qu’elles aient tenu le pouvoir effectif entre leurs mains contre Anne d’Autriche ou qu’elles l’aient approché de près, comme Madame de Maintenon après son mariage morganatique avec Louis XIV en 1683 et ceux consacrés aux femmes de lettres. J’ai apprécié également que tous ces portraits de femmes ayant existé et compté soient étoffés d’un chapitre plus court mais tout aussi éclairant, sur les femmes du théâtre, que ce soit celles du théâtre racinien, les héroïnes de Corneille ou encore celles de Molière, car elles nous apprennent beaucoup, à leur manière, sur une époque bien plus riche et bien plus complexe que les images d’Épinal que nous convoquons spontanément ne veulent bien nous le laisser penser. Le XVIIème siècle fut peut-être un siècle misogyne et paradoxalement, une époque où les femmes ne furent jamais si fortes, ni si représentées dans toutes les strates de la société, capables de faire entendre leur voix et de s’imposer.
    Pour autant, ce livre est exigeant et dense et ne se lit pas comme un roman loin s'en faut. Il peut même être nécessaire de faire quelques pauses voire quelques recherches en cours mais ça reste une lecture passionnante pour peu qu’on soit intéressé par l’Histoire en général et par l’Histoire des femmes – les grandes oubliées, malheureusement de l’historiographie pendant des siècles – en particulier.

     

    Anne-Geneviève de Bourbon-Condé, sœur du Grand Condé, est l'une des égéries de la Fronde

    En Bref :

    Les + : il ne s'agit pas ici de récrire l'Histoire mais bien de replacer les femmes dans un contexte où elles ont été partie prenante avant que l'historiographie ne les efface. Ces femmes de foi, de gouvernement, de culture, ont toute leur place dans un siècle que l'on voit volontiers comme très masculin. Une lecture dense et exigeante mais passionnante
    Les - : quelques notions, notamment religieuses, un peu complexes à comprendre pour un esprit du XXIème siècle.

     


     

    Le Grand Siècle au féminin : femmes de foi, de culture et de gouvernement ; Marie-Joëlle Guillaume

     Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     


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  • « Toute la vie de Nicolas II et des  siens, y compris pendant leur captivité et pratiquement jusqu'à leur exécution, nous est ainsi familière. Des fastes de la Cour à la précarité de leur exil, d'une jeunesse souvent douloureuse à l'épreuve du pouvoir et des drames personnels poignants, on découvre un minutieux et parfois indiscret album de famille. »

     

     

     

     Publié en 2015

     Éditions Perrin (collection Biographies)

     459 pages

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Coupable ou martyr ? Coupable et martyr ? Longtemps, l'histoire officielle, d'inspiration marxiste, a accablé Nicolas II, chargé de tous les crimes, accusé de toutes les erreurs. Depuis la chute de l'URSS, la spectaculaire révision de son rôle, de son attitude, de son influence, les drames personnels qu'il a subis et l'engrenage de la Première Guerre mondiale nous montrent un autre souverain, un homme différent de celui qu'on présentait, dépassé par les évènements, miné par la fatalité et finalement broyé par une histoire éminemment tragique. La destinée du dernier tsar, patriote jusqu'au bout, est plus fascinante et bouleversante que celle de ses illustres prédécesseurs parce que, précisément, le pouvoir des Romanov s'achève en tragédie.
    Cent ans plus tard, dans cette biographie inédite et richement illustrée, Jean des Cars dresse le portrait intime du couple formé par Nicolas II et Alexandra Feodorovna, et de leurs enfants: les grandes-duchesses Olga, Tatiana, Maria, Anastasia et le tsarévitch Alexis qui naîtra hémophile - un calvaire pour son entourage, une menace sur la dynastie.
    Du couronnement à l'assassinat de toute la famille, l'auteur nous conte avec son talent coutumier la vie du dernier couple impérial russe, des années de bonheur à l'épreuve de la guerre et des révolutions, des réformes intérieures au pouvoir de Raspoutine, de l'abdication au massacre.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Dans la nuit du 17 juillet 1918, la famille Romanov est réveillée brutalement par ses geôliers et sans ménagement conduite jusqu’à la cave de la maison Ipatiev, où elle est détenue depuis quelques semaines. L’avancée des armées royalistes dans la région étant inquiétante, va-t-on les emmener ailleurs, encore une fois : après Tsarskoïe Selo, où la famille a vécu en résidence surveillée, puis Tobolsk, va-t-elle encore devoir gagner une nouvelle prison ? La famille ne sait pas encore qu’elle n’ira plus jamais nulle part, du moins de son vivant. Silencieusement, les Romanov – l’empereur, l’impératrice, leurs quatre filles et le petit Alexis, dans les bras de son père -, descendent les vingt-trois marches qui les mènent vers leur supplice. Ils sont accompagnés du médecin de famille et d’une femme de chambre de l’impératrice. Dans la pièce, ils sont sous la surveillance de leur gardien, le sinistre Iakov Yourovski. C’est lui qui, quelques minutes plus tard, donnera l’ordre à ses soldats de tirer : les Romanov et leurs serviteurs sont assassinés à bout portant. Il n’y aura aucun survivant à cette tuerie qui n’avait pas d’autre but que d’éradiquer purement et simplement la famille du tsar déchu. D’autres membres de la famille seront aussi les victimes du nouveau régime : un peu avant Nicolas II et les siens, son frère le grand-duc Michel a été exécuté, puis ce sera au tour de la grande-duchesse Ella – sœur de l’impératrice et épouse du grand-duc Serge – et de certains cousins de Nicolas II d’être passés par les armes.
    Transportés vers un puits de mine dans une forêt, non loin de la ville d’Ekaterinebourg où la famille était détenue depuis la fin mai à la maison Ipatiev (la maison à destination spéciale), les corps sanglants sont déshabillés, démembrés, jetés pêle-mêle dans le puits. Pour essayer de faire disparaître toute trace du massacre, les soldats de Yourovski finissent par y jeter des grenades qui font exploser les galeries. Sans preuves, personne ne pourra accuser le nouveau régime d’être l’assassin du tsar et de sa famille. Ce mystère entourant la fin des derniers Romanov aura pour conséquence l’apparition dans les années qui suivent d’une fausse Anastasia, qui se révèlera en fait être un imposteur. Aujourd’hui, grâce à des tests ADN, nous savons de manière certaine qu’aucun Romanov n’est sorti vivant de la maison Ipatiev – aujourd’hui rasée, cette dernière a laissé place à une église orthodoxe commémorative.
    La mort de la famille impériale et l’exil des survivants, met fin à un régime autocratique séculaire : hasard macabre, le premier tsar Romanov, Michel, avait tiré de son couvent pour être placé sur le trône en 1613, couvent qui portait le nom…d’Ipatiev. Héritier de figures aussi célèbres que Catherine II ou Pierre le Grand, le futur Nicolas II est né en 1868 : il est le fils d’Alexandre III et de son épouse danoise, la princesse Dagmar de Danemark, devenue la tsarine Maria Feodorovna. Le jeune garçon a treize ans quand, à la fin de l’hiver 1881, son grand-père Alexandre II succombe à une énième attaque à la bombe. Le futur tsar sera profondément choqué devant le corps sanglant et désarticulé de son grand-père, si grièvement blessé aux jambes qu’il ne survivra pas. Alors que son père accède au trône de Russie, Nicolas devient le tsarévitch, l’héritier du trône : on pourrait penser logiquement que toute sa future éducation sera conditionnée par ce statut particulier or, il n’en est rien. Le futur Nicolas II est mal préparé, tenu à l’écart par son père Alexandre III, maintenu dans une sorte d’insouciance enfantine loin des affaires. Nicolas noue une relation avec une jeune danseuse, voyage en Europe et jusqu’au Japon mais n’est pas associé au pouvoir par un père tout-puissant, bienveillant mais qui ne saura pas préparer son fils à la tâche qui l’attend. Alexandre III meurt prématurément à l’âge de 49 ans d’une maladie rénale, laissant l’empire russe à un jeune homme de vingt-quatre ans, épouvanté devant le colosse qu’il s’apprête à porter à bout de bras. Comme Louis XVI qui dira à l’annonce de la mort de son grand-père Louis XV « Mon dieu, protégez-nous, nous régnons trop jeunes. », le cri du cœur spontané qui échappe à Nicolas II est éloquent : « Je n’ai jamais voulu être tsar. » La suite des événements lui prouvera qu’il n’était effectivement pas taillé pour l’être.

     

    La famille impériale est unie et mène une vie relativement simple, quasi bourgeoise : le couple formé par Nicolas et Alexandra est très lié autour de sa progéniture et surtout du petit Alexis. Mais cette entente et cette harmonie familiale ne suffisent pas à les rendre populaires


    Quelques semaines après la mort de son père, le jeune tsar se marie : mauvais présage ? Pour le peuple russe, chez qui grande religiosité et superstitions se mêlent intrinsèquement, cela ne fait pas de doutes, d’autant plus que le choix du jeune tsar s’est porté sur une fille de la famille de Hesse-Darmstadt, la jeune princesse Alix. Il n’est pas le premier empereur russe à choisir une épouse dans cette éminente famille allemande or, à chaque fois, le souverain marié à une princesse de Hesse connaîtra un destin tragique : ainsi, Paul Ier et Alexandre II, tous deux unis à une princesse issue de cette famille seront assassinés. Les parents de Nicolas se montreront réservés à l’annonce de l’intérêt que le jeune homme porte à Alix, petite-fille de la reine Victoria et ne donneront finalement leur accord que lorsque l’état de santé d’Alexandre III deviendra réellement préoccupant. Les Russes se montrent réservés face à cette princesse peu souriante, qui semble hautaine et surtout, souveraine faute, arrive « derrière le cercueil » de son beau-père.
    Heureux et uni, le couple aura cinq enfants : tout d’abord quatre filles, Olga, Tatiana, Maria et Anastasia, entre 1895 et 1901 puis le fils tant désiré, Alexis, en 1904. Dans l’intimité, tout semble aller pour le mieux pour ce couple qui, dans les somptueux palais des tsars, vit de manière relativement simple et bourgeoise, avec leurs enfants auxquels ils portent un sincère intérêt. Le drame de la vie de Nicolas II et d’Alix, devenue l’impératrice Alexandra Feodorovna sera la maladie du petit tsarévitch, découverte quelques semaines après sa naissance, en septembre 1904 : l’enfant est alors victime d’une hémorragie du nombril qui conduit à la pose d’un diagnostic irrévocable. Comme beaucoup de descendants de la reine Victoria, grand-mère de l’Europe, Alexis souffre d’hémophilie, une maladie du sang qui l’empêche de coaguler correctement. De là, on comprend donc aisément ce que risquent les malades : une blessure, des hémorragies soudaines peuvent les emporter en quelques heures. Dès lors, l’enfant va être constamment surveillé, élevé dans une bulle protectrice mais aussi frustrante pour un enfant qui ne peut jouer et se dépenser comme il veut : la moindre entorse, la moindre contusion peut occasionner des hémorragies internes, des hématomes ou des douleurs articulaires terribles, qui laissent l’enfant épuisé et ses parents désemparés. Pour l’impératrice, la peine est double : non seulement elle est condamnée à voir souffrir son fils unique, impuissante à le soulager mais elle doit vivre aussi avec le poids de la culpabilité car c’est elle qui a transmis le mal à Alexis. L’hémophilie a en effet la particularité de se transmettre par les femmes mais uniquement à leurs fils.

     

     

    Les quatre grandes-duchesses (de gauche à droite Maria, Tatiana, Anastasia et Olga) entourant leur petit frère Alexis, né en 1904 : il est atteint d'un mal génétique et incurable, l'hémophilie


    La maladie de l’héritier, incurable et si douloureuse, qui les fait vivre dans une angoisse permanente de l’accident fatal et l’impuissance de la médecine de l’époque, qui soulage l’enfant avec de l’aspirine – on découvrira plus tard que le médicament est complètement contre-indiqué en cas de troubles de la coagulation, ayant pour propriété de fluidifier le sang -, conduisent la tsarine à se réfugier dans une religiosité qui tend rapidement au mysticisme et la rend particulièrement faible face à des gourous et autres thaumaturges prétendant pouvoir soulager le tsarévitch. Le plus célèbre sera le fameux Raspoutine, sous la coupe duquel tombera non seulement l’impératrice mais aussi ses filles et, probablement, l’empereur. Mais peut-on reprocher à des parents désespérés de chercher à soulager les souffrances de leur enfant, d’autant plus que Raspoutine, bien plus que les médecins de la Cour, est le seul à parvenir à endiguer les crises qui engendrent de terribles souffrances chez le petit malade.
    La mauvaise préparation de Nicolas II à la charge qu’il devait occuper, une tsarine mal acceptée par l’opinion qui, à l’instar des Français du XVIIIème siècle qui appelaient Marie-Antoinette « l’Autrichienne », finira par ne plus la qualifier autrement que comme « l’Allemande » puis un contexte social et politique complexe, une guerre mondiale sans précédent, auront finalement raison du régime tsariste et l’émergence d’un autre pouvoir, personnifié notamment par la figure de Lénine.
    On a beaucoup écrit sur les Romanov : de leur fin tragique jusqu’à la spectaculaire contrition du pouvoir soviétique entre les années 1900 et 2000, tout a contribué à faire d’eux un mythe. Ici, Jean des Cars ne s’attache pas à décortiquer la politique malheureuse du dernier tsar : c’est plutôt une biographie domestique que l’auteur nous propose, nous faisant pénétrer dans l’intimité du couple puis de la famille. On découvre ainsi une famille unie, profondément liée par la maladie du tsarévitch et les inquiétudes permanentes induites par sa santé. Les sœurs aînées entourent leur petit frère très aimé de beaucoup d’attentions et de tendresse, elles se montrent protectrices les unes envers les autres mais surtout, toutes les quatre ensemble pour Alexis, tellement fragile. Elles suppléent ainsi leur mère, la tsarine Alexandra, dont la propre santé est rapidement chancelante : celle-ci souffre d’angoisses profondes mais aussi de problèmes circulatoires qui l’empêchent souvent de marcher et de participer aux activités que la famille aime…ainsi, le tsar et ses filles qui sont passionnés de photographie, adorent les activités de pleine nature, les longues marches et même la natation. Leur pratique assidue de la photographie permet aujourd’hui aux historiens d’avoir un accès à des documents inestimables, témoins de la vie quasi-bourgeoise et loin des fastes de la représentation que menaient le couple impérial et ses enfants.
    Et pourtant, la beauté des grandes-duchesses, la maladie d’Alexis, longtemps cachée à l’opinion puis éclipsée par le scandale de l’influence de Raspoutine auprès de la tsarine, ne sauveront pas l’empire. Comme l’empire du Kaiser Guillaume II en Allemagne, l’empire austro-hongrois de Charles Ier et l’empire ottoman, le géant qu’est l’empire russe des tsars sera balayé par le contexte politique puis la Première guerre mondiale : la déconnexion de Nicolas II, le paradoxe entre son éducation et les bouleversements d’une époque qu’il ne comprend pas, la maladie de son fils qui le pousse à se replier sur sa vie domestique au détriment de la politique et du peuple russe qui attend des décisions concrètes de ses dirigeants concourent à faire disparaître un régime séculaire mais dépassé. Nicolas II ne fut pas un bon tsar : de cela aujourd’hui, nous ne pouvons douter. Le couple impérial ne parvint pas ou ne voulut pas comprendre les aspirations d’un peuple fatigué, d’abord par l’inflation et la pauvreté puis par une guerre internationale sans précédent, il laissa pourrir la situation et, par manque de volonté, par faiblesse, se conduisit lui-même au supplice, y entraînant aussi ses enfants. Il ne nous appartient pas aujourd’hui de juger ce qui fut fait hier, nous ne pouvons que l’étudier au mieux, loin des contre-sens que peuvent induire notre manière de pensée appliquée à une époque plus ancienne. Pour autant, humainement, il est difficile de ne pas considérer aujourd’hui la mort de la famille impériale comme une incroyable tragédie, de part probablement le nombre conséquent de sources photographiques qui nous permet de mettre des visages sur des noms et par la proximité de ce drame – à peine une centaine d’années nous séparent des derniers Romanov. Il y a aussi quelque chose d’assez fascinant dans cette tragédie familiale et de suffisamment horrible pour l’entendement pour conduire à de nombreuses rumeurs de survivance (notamment de la grande-duchesse Anastasia, aujourd'hui infirmées par la plupart des historiens), toutes battues en brèche par les analyses génétiques et scientifiques qui ont pu être menées entre la fin des années 1990 et les années 2000. Exhumés du puits de mine de Ganina Yama non loin d’Ekaterinebourg pour être officiellement ré-inhumés avec tous les honneurs à Saint-Pétersbourg, les Romanov sont tous réunis dans la mort depuis quelques années et peuvent enfin reposer en paix. Des lieux de commémoration, des sanctuaires ont été élevés à l’emplacement de la maison Ipatiev, dans la forêt où les corps ont été hâtivement dispersés au matin du 17 juillet 1918…la Russie moderne, au-delà de ses troubles politiques, semble s’être réconciliée avec son passé et l’historiographie actuelle peut étudier les derniers Romanov de manière apaisée, sans se détacher pour autant de la pitié qui nous envahit face aux visages si beaux des grandes-duchesses et de leur petit frère, que l’on voit grandir et s’épanouir sur les clichés de famille tout en sachant que la course à l’abîme est commencée et que le tourbillon les emportera tous, dans la fleur de l’âge : la plus âgée, Olga, allait avoir 23 ans. Son petit frère aurait eu 14 ans moins de quinze jours après la tragédie de la maison Ipatiev.
    Avec beaucoup de chaleur, Jean des Cars fait revivre la dernière famille impériale russe, entre grandes joies et profonds chagrins, jusqu’au drame final. Une lecture passionnante et aussi fascinante que ses sujets d’étude.

     

     Nicolas II et son épouse allemande, Alix de Hesse-Darmstadt : l'impératrice, intransigeante, conservatrice et psychologiquement gouvernée par Raspoutine cristallisera la haine et l'hostilité du peuple russe

    En Bref :

    Les + : un très bon livre qui aborde l'histoire des derniers Romanov du point de vue intime et familial...c'était passionnant et j'ai passé un très bon moment de lecture. Jean des Cars a le don pour rendre l'Histoire accessible et on prend plaisir à lire ce livre, comme un roman, même si l'on connaît déjà l'issue tragique.
    Les - : quelques petites coquilles, probablement dues à des erreurs de frappe, dommage mais pas catastrophique non plus.


    Nicolas II et Alexandra de Russie : une tragédie impériale ; Jean des Cars

     

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

     


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  • « Dans sa vie de femme et dans ses relations avec les hommes, Marie-Antoinette a rêvé, espéré, imaginé, convoité, un lien idéalisé par la lecture des romans, l'empêchant toujours davantage de rejoindre la réalité d'une relation d'amour. »

     

     

     

         Publié en 2019

      Éditions Tallandier  

      384 pages

     

     

     

     

     

    Résumé :

    16 mai 1770. Marie-Antoinette épouse à Versailles celui qui deviendra Louis XVI. D'abord émerveillée par les fastes de la cour, la jeune dauphine se lasse rapidement des devoirs de sa charge. Pour fuir les contraintes imposées par l'étiquette, elle se retire dès qu'elle le peut en compagnie de quelques privilégiés, le cercle des favoris de la reine.

    Alors que nul n'ignore ses déboires conjugaux, la reine est vue à Paris au bal de l'Opéra avec le comte d'Artois, à Versailles avec le beau Lauzun, volage et inconstant, avec le médisant baron de Besenval, le capricieux comte de Vaudreuil, le docile comte Esterhazy, ou encore le ténébreux comte de Fersen.

    Loin de garder la réserve habituelle des reines de France, Marie-Antoinette entend vivre comme  bon lui semble, malgré les fréquentes remontrances de l'impératrice Marie-Thérèse. Elle goûte par-dessus tout la joie de retrouver ses amis en des lieux fermés au reste de la cour, voués à l'intimité et au déclassement : « Ici, je ne suis pas la reine, je suis moi. »

    A la cour comme à la ville, les rapports de Marie-Antoinette aux hommes font beaucoup jaser  - ce qui n'empêche pas nombre de courtisans de briguer la place de favori dans son cœur. De Versailles à Trianon, les intrigues se nouent et se défont entre les candidats et leur soutiens, au gré des caprices de la reine.

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Quand l’archiduchesse Marie-Antoinette épouse le Dauphin de France Louis-Auguste en mai 1770, à l’âge de quinze ans, pour consolider la nouvelle alliance entre leurs deux pays, elle ne sait pas encore qu’elle va enterrer la monarchie avec elle, vingt-trois ans plus tard. Elle ne sait pas encore que la liesse populaire se transformera peu à peu en haine inextinguible, qui ne s’arrêtera pas même au pied de l’échafaud. Marie-Antoinette est probablement la reine de France la plus connue, celle sur laquelle on a le plus écrit, le plus extrapolé.
    On pourrait donc considérer que tout a été dit, écrit sur elle. Comment passer, par exemple, après une somme comme celle de Simone Bertière (Marie-Antoinette l’insoumise) ou les travaux d’Evelyne Lever ?
    Pourtant ici, Emmanuel de Valicourt analyse le règne de Marie-Antoinette à travers le prisme de sa vie privée et de son cercle, que certains ont appelé sa « coterie », dominée notamment par l'omniprésence d'une seule et même famille : les Polignac.
    Jeune et instinctivement légère et immature, de surcroit mariée trop jeune et confrontée à un âge trop tendre à des exigences qui la dépassent, se heurtant à un époux peu démonstratif et à un impératif de maternité qu’elle ne peut satisfaire – sans être la seule responsable, bien sûr –, Marie-Antoinette s’étourdit dans les plaisirs faciles que lui offrent la cour de France, qu’elle découvre à quinze ans. Quatre ans plus tard, devenue reine, elle laisse libre court à ses caprices, ses fantaisies. Mais surtout, Marie-Antoinette est avide de liberté, que l’on refuse généralement aux reines, qui se doivent à leur pays. La conscience politique d’Anne d’Autriche, l’effacement terne de Marie-Thérèse d’Autriche ou de Marie Leszczynska, lui sont étrangers. Marie-Antoinette se sent oppressée en représentation, boude le « Grand Couvert » où elle doit manger devant les courtisans, s’effare du protocole raide qu’elle doit observer et qui est personnifié par sa dame d’honneur, Madame de Noailles, qu’elle surnomme d’ailleurs avec espièglerie « Madame l’Étiquette ».
    Marie-Antoinette n’est pas foncièrement mauvaise. Est-elle le monstre de perversion, entretenant des relations adultères avec les hommes comme avec les femmes, se livrant à la pire des licences que les libelles de la fin des années 1780 puis de la Révolution vont mettre en scène ? Ni Messaline, ni sainte, il convient de situer Marie-Antoinette dans un prudent entre-deux, sans tomber dans les écueils inverses qui veulent où la réhabiliter au risque de brosser une hagiographie qui aurait tout autant de non-sens que le portrait le plus négatif.
    C’est ce que fait ici Emmanuel de Valicourt en analysant la vie de la reine à travers ses favoris et notamment, ses favoris masculins. Car Marie-Antoinette ne se contente pas d’une cour exclusivement féminine et compassée, entourée de dames d’honneur nommées arbitrairement. Marie-Antoinette souhaite avoir un cercle choisi, d’amis proches d’elle selon son cœur. Lorsque Louis XVI lui offre en cadeau le Petit Trianon, la jeune reine nostalgique y recrée un lieu sécurisant loin de la pompe de Versailles, qu’elle appelle son « petit Vienne » et où elle ne souhaite recevoir que ceux qui seront expressément admis par elle. Petit à petit, celle que l’on n’a pas cessé d’appeler « l’Autrichienne » (car il ne faut pas oublier que le surnom péjoratif que l’on donnera à la reine pendant la Révolution n’est pas une nouveauté : il lui est donné dès avant son arrivée en France, dans le cercle des filles de Louis XV opposées à l’alliance avec Vienne), cristallise les haines et les rancœurs de ceux qui ne sont pas acceptés dans son cercle, ceux qui sont tenus à l’écart, ceux qui se sentent moqués injustement. La haine qui accompagnera les dernières années de la reine naît dans ces années fastes où la monarchie ne semble rien craindre encore, où la contestation n’est pas encore suffisamment forte ni assez violente pour mettre à bas le trône de France, plusieurs fois centenaire. En 1775, lorsqu’ils montent sur le trône, Marie-Antoinette et Louis XVI pensent-ils qu’ils vont creuser la tombe de la royauté française ? Probablement, non. Par leur comportement pourtant, ils y participent tous les deux. Louis XVI par effacement et manque de volonté, Marie-Antoinette par folie dispendieuse et parce qu’elle est avide de liberté.

     

    Le petit Trianon à Versailles, domaine offert à Marie-Antoinette par Louis XVI et qu'elle appelle son Petit Vienne


    Dans ce livre, l’auteur brosse d’abord le portrait de la reine et de sa « société », ce cercle de Trianon où Marie-Antoinette baisse le masque et peut se montrer telle qu’elle est vraiment. Ne dit-elle pas d’ailleurs qu’à Trianon elle n’est plus la reine mais juste elle-même ? S’offrant un luxe qu’on ne lui pardonne pas, elle devient une simple particulière évoluant dans son cercle d’amis, des personnes qu’elle aime selon son cœur, tout particulièrement distingués par elle. De ce cercle, on retient notamment la figure de Madame de Polignac, qui sera l’objet des faveurs les plus dispendieuses ainsi que sa famille et qui en profitera sans vergogne. Par le biais de cette jeune femme, Marie-Antoinette rencontre le comte de Vaudreuil, qui fera partie de son cercle mais ne sera pas à proprement parler un favori. Elle fera aussi la connaissance du baron de Besenval, d’origine suisse, beaucoup plus âgé et qui décide de s’instaurer guide de la jeune reine, en profitant pour la manipuler mine de rien. Il y aura aussi le duc de Lauzun, de grande noblesse mais qui se comportera avec maladresse avec la reine et se verra disgracié. On peut retenir aussi la figure du discret Esterhazy, avec lequel Marie-Antoinette partage des origines communes et surtout, la figure tutélaire d’Axel de Fersen, le beau Suédois pour lequel Marie-Antoinette éprouvera probablement un sentiment le plus proche d’un amour véritable – amour qui, contrairement à ce que les âmes romantiques ont parfois voulu voir comme un amour charnel, restera probablement au stade d’une amitié profonde qui prendra fin avec l’exécution du roi et de la reine en 1793.
    Avoir des « favoris » quand on est reine ne veut pas dire avoir des amants. Mais, comme les célèbres favorites de Louis XIV ou de Louis XV, les favoris de Marie-Antoinette profitent d’avantages et de privilèges qu’ils n’auraient sûrement pas eus s’ils n’avaient pas été proches d’elle. Trop généreuse quand il s’agit de l’avancement de ses amis, Marie-Antoinette jette volontiers l’argent du royaume par les fenêtres ou se pique de faire et défaire les ministres, selon les conseils parfois fallacieux de sa coterie.
    Peut-on réellement avoir des amis lorsqu’on est reine de France ? La sincérité de la relation n’est-elle pas fatalement gangrénée, à un moment donné, par l’avidité et l’ambition ? Il est clair que, loin de la servir, les amitiés nouées par Marie-Antoinette tout au long de son règne, la desserviront plus qu’autre chose. Lorsque la monarchie connaîtra ses premières difficultés, on sera tout disposé à le lui reprocher.
    Si la forme du livre m’a donné le sentiment d’une inégalité générale – des chapitres sont plus intéressants que d’autres et se lisent avec plus de facilités –, dans l’ensemble, j’ai passé un bon moment avec cette lecture. Oui, je peux le dire, il est encore possible d’en apprendre sur un personnage historique sur lequel on a déjà beaucoup lu. Ici, on découvre Marie-Antoinette autrement, la reine s’efface au profit de ses favoris, dont l’auteur brosse une biographie rapide. Parfois, Marie-Antoinette apparaît même en second plan. Je crois que j’aurais préféré un propos plus thématique, plutôt qu’un livre découpé en chapitres, chacun de ces chapitres étant centré sur un personnage en particulier (le duc de Lauzun, le comte de Fersen, le comte Esterhazy etc) j’ai eu parfois l’impression de redites, ce qui est dommage. Pour autant, le propos est intéressant et nous offre l’image nuancée d’une reine de France avide de plaisirs certes mais aussi très seule, à la psychologie peut-être plus compliquée que ce qu’on a bien voulu en dire, compensant probablement un manque, celui d’un père perdu trop tôt et d’un mari selon son cœur.

           Axel de Fersen | Château de Versailles   Pierre-Victor de Besenval de Brünstatt — Wikipédia    Valentin Esterházy

    Trois des favoris de la reine : le comte Axel de Fersen, le baron Pierre-Victor de Besenval et le comte Esterhazy

    En Bref :

    Les + : un point de vue intéressant, qui prend le parti de raconter Marie-Antoinette à travers ses favoris et notamment, ses favoris masculins. Dans l'ensemble c'est un essai historique réussi et intéressant, qui permet d'entrevoir la reine de France la plus célèbre autrement.
    Les - :
     une lecture un peu inégale. 


    Les favoris de Marie-Antoinette ; Emmanuel de Valicourt

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle  

     


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  • « Le XVIIIe est un réservoir quasi inépuisable d'images. Siècle si riche, et en premier lieu de ses contradictions, il mobilise des images élégantes, d'hommes et de femmes badinant, évoluant dans des paysages agrestes, où la nature est bienveillante et même idéale. »

    Couverture La légèreté et le grave : Une histoire du XVIIIe siècle en tableaux

     

     

     

         Publié en 2021

      Éditions Passés Composés

      186 pages

     

     

     

     

    Résumé :

    Le XVIIIe siècle s'ouvre avec Le Pèlerinage à l'île de Cythère d'Antoine Watteau et s'achève avec La Mort de Marat de Jacques-Louis David : la naissance de la fête galante versus l'agonie d'un tribun révolutionnaire. Deux chefs-d’œuvre qui illustrent la légèreté et la gravité d'un siècle, deux facettes antagonistes mais complémentaires d'une même époque. Les dix œuvres ici racontées sont ainsi autant de jalons pour saisir ce siècle passionnant dans ses innombrables contradictions : elles correspondent toutes à un moment du XVIIIe et disent son histoire artistique, culturelle, philosophique, sociale, économique et, bien évidemment, politique. Autant de chefs-d’œuvre qui ont forgé une société nouvelle, éprise de liberté, d'indépendance et de transgressions, au fil d'un siècle qui, sous la plume sensible de Cécile Berly, oscille sans cesse entre une légèreté savamment entretenue et une gravité qui confine au drame.

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Étudier une époque à travers le prisme de son art, essentiellement pictural, voilà un parti-pris original, me suis-je dit en découvrant ce roman.
    Parti-pris surprenant et pourtant, quand on y pense, pas tant que ça. C’est même assez logique…il y a maintes façons d’étudier une époque : par l’histoire militaire, l’histoire sociale, économique, géopolitique…les sources nous sont aussi d’une grande aide. Et si l’art nous en apprenait aussi beaucoup ? C’est évident.
    C’est donc ce que fait ici la jeune historienne Cécile Berly, spécialiste du XVIIIème siècle, qui s’est notamment intéressée aux figures féminines du siècle, de Marie-Antoinette en passant par les maîtresses de Louis XV ou encore certaines célèbres salonnières et femmes de lettres, comme Madame du Deffand…
    Le XVIIIème siècle est une période ô combien passionnante par ses ambivalences, ses paradoxes et ses contradictions. Siècle-charnière s’il en est, le XVIIIème voit mourir le Grand Siècle avec Louis XIV en 1715 et naître l’époque contemporaine avec la Révolution…c’est une époque hybride qui verra, en France, la société se modifier du tout au tout.
    Qu’en est-il dans l’art ? On s’en doute, l’art du XVIIIème siècle va évoluer en même temps que la société et connaître les mêmes ambivalences…souvent, quand on pense au XVIIIème siècle, on pense aux œuvres grivoises voire presque pornographiques d’artistes comme Watteau, Boucher ou encore Fragonard, qui peignent l’amour et des corps dénudés qui ne sont pas ceux de dieux païens. On peut ainsi largement comparer la fameuse Odalisque de Boucher à des photos de nu un peu coquin du XXIème siècle…chez Fragonard, le contact homme/femme se fait dangereux, lascif, on ne sait jamais si le baiser est volé, forcé ou consenti…puis il y a Watteau, un peintre à la carrière aussi fugace que la vie (il meurt à trente-sept ans sans s’être marié, sans enfant) dont la lecture grivoise est plus allusive, plus subtile…Pour la première fois, des artistes osent s’interroger sur l’amour, au sens charnel du terme, le plaisir, la sexualité, qu’ils déguisent à peine. Au même moment, des peintres plus « sages » continuent d’explorer la scène de genre comme Greuze ou Chardin, préférant aux personnages coquins et quasi-nus, les gens du quotidien, bourgeois ou paysans.
    Au contraire, la fin du XVIIIème siècle est marquée par l’omniprésence d’un artiste, Jacques-Louis David, inspiration de nombreux peintres d’histoire du siècle suivant. La fin de l’Ancien Régime et la Révolution s’accompagnent d’un retour à l’antique. Terminées, les petites odalisques fantasmées de Boucher qui osaient montrer leurs jambes et leurs fesses, dans une mise en scène à peine figurée de l’acte sexuel, le néoclassicisme renoue avec les scènes colossales, marquantes. David et ses pairs peignent pour édifier, que ce soit dans Le Serment des Horaces ou bien dans La Mort de Marat, tableau immense montrant la mort du tribun, dans lequel on ressent tout le choc du peintre après la mort brutale de son ami, assassiné en juillet 1793 par Charlotte Corday.
    Le XVIIIème siècle est aussi le siècle des femmes, peintres, pastellistes, portraitistes. Est-ce surprenant, si Marie-Antoinette préfère entre tous se faire portraiturer par une femme, Elisabeth Vigée-Le Brun, qui n’est pas peintre officielle mais, du moins, peintre préférée ? Est-ce surprenant aussi si le XVIIIème siècle est le siècle où une femme, pour la première fois, est acceptée à l’Académie, en la personne de la célèbre portraitiste vénitienne Rosalba Carriera ?
    Ce livre de Cécile Berly est intéressant dans tout ce qu’il dit et tout ce qu’il ne dit pas. On le comprend, l’autrice ne peut pas développer outre-mesure et les chapitres sont relativement courts. Cela peut être frustrant mais c’est le jeu : on comprend aisément que l’historienne ne peut développer son texte, au risque de se retrouver avec une somme immense et peut-être moins facile d’accès qu’un petit livre de moins de 200 pages…mais ce peut être une bonne introduction pour se documenter plus amplement et la bibliographie fouillée à retrouver en fin d’ouvrage peut nous y aider.

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    Le pèlerinage à l'île de Cythère, d'Antoine Watteau, date de 1717 et marque pour les historiens le début de l'art du XVIIIème siècle et de ce que l'on appellera « les fêtes galantes »


    J’avoue avoir mis un peu de temps à entrer dans le texte car je n’ai pas trouvé le style d’écriture très chaleureux de prime abord. Pour moi qui ai l’habitude des textes de Simone Bertière ou Evelyne Lever, qui parviennent à allier sans difficulté chaleur de la plume et rigueur historique, j’ai trouvé le style un peu conventionnel, un peu plat au départ : les phrases sont courtes et se succèdent rapidement…puis cela passe petit à petit.
    J’ai vraiment aimé ce voyage au XVIIIème siècle. En même temps, quand il s’agit du XVIIIème, je suis bon public. Depuis quelques années, je nourris un amour absolu, passionnel pour cette époque et notamment pour le XVIIIème français. Ne me demandez pas pourquoi, mais j’y aime tout, de l’art en passant par la musique et bien évidemment, les personnages (en particulier féminins mais pas que), dont je me plais à découvrir progressivement les biographies, de Marie-Antoinette en passant par les sœurs de Nesle, Louis XV, Madame du Barry, Madame de Pompadour, le Régent, la duchesse de Bourgogne ou encore, la duchesse du Maine, les sœurs de Louis XV…pour moi, c’est un réservoir passionnant et inépuisable, une mine d’informations, un siècle qui nous en apprend beaucoup sur l’humain, sur la société, un siècle fondateur à bien des égards.
    Parce que je nourris aussi un intérêt tout particulier pour l’histoire de l’art et en particulier pour la peinture (figurative, ne me demandez pas d’analyser de l’art contemporain, beaucoup trop abstrait et subjectif pour moi), j’ai été à la fête avec cette lecture. Quel bonheur de retrouver ces œuvres emblématiques que j’avais pu étudier il y a quelques années à l’université, que ce soit les Fragonard ou les œuvres de David. Gros coup de cœur aussi pour le tableau de Marie-Guillemine Benoist, peint en 1800 et qui clôture le livre, Portrait de Madeleine, représentant une femme vêtue de cotonnade blanche, le bras, l’épaule et le sein dévêtu. Cette femme, qui braque franchement son regard vers le spectateur est d’une grande beauté, d’un grand charisme…pour ceux qui ont lu Maryse Condé, vous aurez certainement déjà croisé le regard de cette femme sur la couverture de Moi, Tituba, sorcière…cette Madeleine, non seulement, est une femme mais en plus, elle a la peau noire. Encore aujourd’hui, les historiens de l’art s’interrogent sur la motivation de l’artiste, qui n’était pas réputée pour ses idées en faveur de la cause noire. Ce tableau, peint au tournant du siècle, alors que le XVIIIème finissant regarde déjà franchement vers le XIXème, politiquement, socialement, est peut-être celui qui symbolise au mieux les deux visages de cette époque passionnante, qui s’ouvre pour la première fois à la connaissance rationnelle alors que l’Église reste toute-puissante, où la pornographie la plus franche et la plus salace côtoie une pudibonderie extraordinaire, où des auteurs se lancent dans la tâche immense de rédiger une Encyclopédie alors qu’une large frange de la population est encore illettrée et que ceux qui pourraient y avoir accès la censurent sans hésitation…Quel paradoxe, pour le tableau de Benoist, de mettre en scène une femme, noire qui plus est, comme l’étendard d’une conviction alors que l’artiste, elle-même femme, ne semble rien vouloir revendiquer et sûrement pas la libération des esclaves…
    Bref, vous l’aurez compris, malgré un début légèrement compliqué pour moi, je me suis vite jetée dans ce livre, je mentirai si je disais que je l’ai lu comme un roman mais j’ai passé un excellent moment de lecture et je n’ai désormais plus qu’une envie : creuser, aller plus loin et me replonger dans les œuvres de mes peintres préférés.

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    Le Serment des Horaces, de David, peint en 1784 renoue avec les grands tableaux d'histoire et met en scène l'Antiquité romaine

    En Bref :

    Les + : une lecture passionnante d'une époque à travers ses œuvres emblématiques et ses artistes incontournables. Un livre court mais qui donnera au lecteur curieux les clés pour aller chercher un peu plus d'informations. 
    Les - :
    le style d'écriture un peu saccadé qui, au début, ne m'a pas transportée.


    La légèreté et le grave : une histoire du XVIIIe en tableaux ; Cécile Berly

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle  

     


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  • « Si Colette est une femme libre, elle l'est d'abord parce qu'elle a su conquérir sa liberté, non sans difficultés parfois, tout au long de son itinéraire de femme, à travers ses amours, ses mariages, ses divorces, ses audaces, ses provocations même, et aussi ses activités de mime et d'actrice, son travail de journaliste, de reporter ou de critique théâtral. »

    Couverture Colette à la plage

     

     

     

         Publié en 2018

      Éditions Dunod 

      176 pages 

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Comment Colette est-elle devenue la figure majeure de la littérature féminine de la première moitié du XXe siècle ? 

    Lorsque Colette, poussée par Willy, commence la série des Claudine, elle ne s'imagine pas qu'elle deviendra, au fil des décennies, l'une des icônes de la littérature féminine de son siècle. Emblématique de l'itinéraire d'une femme écrivain qui a su s'émanciper grâce à l'écriture, son oeuvre est plus que jamais vivante : elle s'impose à nous par sa richesse, sa diversité, sa profonde cohérence mais aussi par une originalité et une modernité que le recul du temps permet de mieux mesurer. 

    Installez-vous confortablement dans un transat et laissez-vous entraîner par Marie-Odile André sur les chemins de Colette - de Saint-Sauveur-en-Puisaye jusqu'à Paris, des bois de Montigny au jardin du Palais-Royal, du music-hall à l'Académie Goncourt - pour une promenade voluptueuse et vagabonde. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Qu'on la lise, qu'on l'ait lue ou bien qu'on ne connaisse pas son œuvre, Colette (dont on fête d'ailleurs cette année les 150 ans) reste un personnage familier du paysage littéraire français du siècle dernier. 
    Née en Bourgogne en janvier 1873, morte en 1954, Colette a traversé la fin du XIXème siècle et tout le premier XXème siècle, de la Grande Guerre, en passant par les Années Folles et jusqu'au début des Trente Glorieuses après le traumatisme de la Seconde guerre mondiale, qu'elle traverse aux côtés de son troisième mari, Maurice Goudeket, qui était juif. 
    Colette a marqué son temps par sa plume et ses écrits. Paradoxalement, celle qui n'est pas arrivée à l'écriture par vocation et presque par hasard, lui doit sa célébrité. Mais elle n'est pas que ça non plus : mime, journaliste, esthéticienne aussi (oui oui), artiste, Colette est un personnage protéiforme et bien plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord. 
    Célébrant comme personne le vivant, les animaux, la nature, les saisons, d'une écriture incisive et sensuelle, elle est encore lue aujourd'hui et célébrée pour sa grande modernité de ton et de style et pour la liberté aussi qu'elle ne cessera de hisser haut. Et si, aujourd'hui en 2023, on serait tentés d'analyser Colette à l'aune d'idées contemporaines (homosexualité, féminisme, trans-identité), il ne faut pas oublier qu'elle ne fut pas féministe, qu'elle jugea très durement en son temps les suffragettes défenseures du droit de vote pour les femmes et qu'elle ne revendiqua jamais sa bisexualité comme militante. Et peut-être est-ce pour cela que Colette est un étendard et peut encore aujourd'hui être vue comme un chef de file. 
    Le Colette à la plage de Marie-Odile André pourrait presque être considéré comme une analyse voire une psychanalyse de l'autrice. En quelques grands chapitres, Marie-Odile André brosse un portrait à grands traits de Colette, de l'enfance bourguignonne jusqu'à la vieillesse immobile, marquée par les douleurs de l'arthrose qui clouent la vieille dame aux yeux charbonneux dans son appartement parisien, d'où elle écrira ses derniers livres, en compagnie de ses derniers animaux, notamment une belle chatte chartreux dont les grands yeux ont été immortalisés sur quelques clichés au début des années 1950. 

    Frédéric Maget : « Colette : à la fois provocatrice et classique »


    Mais Colette a vécu 81 ans : c'est encore une belle vie aujourd'hui et c'était une fameuse longévité en son temps. Entre 1873 et 1954, il s'est passé beaucoup de choses. En moins de deux-cents pages, vous vous doutez bien que Colette à la plage ne pourra pas parler de tout ni même entrer dans les détails - ou du moins, pas dans tous les détails. Il faudra choisir et sélectionner mais le point de vue de Marie-Odile André est malgré tout intéressant. Ici, c'est surtout l'oeuvre et la carrière qui sont décortiquées. Certes, elles sont souvent intrinsèquement liées, chez Colette, à la vie privée : comment aborder la naissance des Claudine, ses premiers livres qui furent un grand succès éditorial, sans parler de la figure de mentor de son premier mari, Henry Gauthier-Villars, dit Willy ? Comment ne pas parler de sa relation homosexuelle avec Missy (Mathilde de Morny), dont elle partagera la scène dans plusieurs mimodrames, notamment le scandaleux Rêve d'Egypte en 1907 ? Mais Marie-Odile André s'attarde plus sur l'apport du privé à l'oeuvre, à la nourriture que la vie de Colette, ses mariages, ses idylles, sa maternité, sa relation filiale également avec Sido, figure tutélaire de la maternité, son rapport au corps apporteront à ses romans et autres nouvelles et articles
    Ne vous fiez pas à la couverture estivale et au titre, qui peut apparaître léger : ce petit livre qui compte à peine deux-cent pas cache bien son jeu et j'ai été assez surprise en le commençant de le trouver si ardu. Je pense que je ne m'attendais pas à un propos aussi ambitieux et surtout, assez versé dans une certaine analyse philosophique voire psychologique qui m'a perdue par moments. Certes, c'est particulièrement intéressant mais le style riche et dense m'a demandé beaucoup de concentration, peut-être à un moment où je n'en avais pas tant que ça à revendre et que c'est pour ça que j'ai trouvé cette lecture finalement très intéressante mais, en même temps, assez fastidieuse. Il m'a parfois fallu revenir en arrière, relire des passages entiers car je me rendais compte que je ne comprenais pas ce que je lisais et ce n'est pas une sensation que j'apprécie. En parallèle, certains chapitres m'accrochaient bien et je les lisais sans trop de mal
    Je ressors donc de cette lecture avec un certain sentiment d'inégalité. C'était intéressant et j'ai été assez agréablement surprise de voir qu'en si peu de pages, l'autrice parvient malgré tout à saisir l'essence même d'une oeuvre que j'ai toujours ressentie, personnellement, comme assez insaisissable, difficilement explicable. Il est difficile de placer Colette et ses écrits dans des cases et si Marie-Odile André évite habilement cet écueil, elle nous livre une analyse fine d'une femme, qui fut autrice en son temps mais pas que. 
    Clairement, ce n'est pas un livre de plage, malgré ce que pourrait en laisser penser le titre. Ce n'est pas une lecture facile, ni une lecture estivale vite lue et vite oubliée. Riche, le propos ne manquera certainement pas de vous capter si, comme moi, vous aimez Colette...et peut-être même si vous l'aimez moins, ce livre vous la rendra un peu plus accessible. 

    Sido, Colette, le portrait de Sido : analyse linéaire [BAC]

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    Sidonie Landoy, mère de Colette, devenue la figure littéraire Sido, mère tutélaire et presque mythique comme la maison natale de Saint-Sauveur qui devient un motif récurrent de l'oeuvre 

     

    En Bref :

    Les + : un petit livre original mais qui cache bien son jeu...derrière sa couverture et son titre estivaux, il cache une analyse assez fine de l'oeuvre de Colette mais aussi de la femme.
    Les - : un sentiment d'inégalité et des passages un peu trop philosophiques que j'ai trouvés parfois assez ardus à lire. Le style de Marie-Odile André est ambitieux et rigoureux, c'est celui d'une chercheuse et il faut s'y habituer.


    Colette à la plage ; Marie-Odile André

       Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     

     

     


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