• Le château de mon père ; Maïté Labat et Alexis Vitrebert

    «  Une histoire vraie que l'on raconte comporte toujours une part de fiction. »

    Couverture Le château de mon père

     

     

     

         Publié en 2019

      Éditions La Boîte à Bulles (collection Hors Champ)

      160 pages 

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Comment imaginer que voici 150 ans, il a fallu toute la détermination de Pierre de Nohlac pour sortir de l'oubli le Château de Versailles ? Enfant, Henri de Nolhac a souffert de l'absence de son père, bien que celui-ci passe ses journées à quelques mètres du domicile familial. Car son père travaille au Château de Versailles. Ou plutôt a dédié sa vie au palais du roi Soleil... En 1887, Pierre de Nolhac est nommé attaché au Château de Versailles afin de veiller sur les collections de ce dernier, derniers trésors d'une royauté désormais abolie. Mais le jeune homme a de l'ambition : il veut redonner au château une place de choix dans le cœur des politiciens, des artistes, des Français tout simplement. Dans ce récit mêlant grande et petite histoire, on soulève les jupes de Versailles avec un voyeurisme délicieux !

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Avec plus de 7 millions de visiteurs par an, le château de Versailles fait aujourd'hui partie des lieux les plus fréquentés au monde. C'est aussi un symbole de la France et de son Histoire, connu dans le monde entier, un fleuron du savoir-faire national, où les plus grands talents du XVIIème siècle ont exercé leur art. 
    Et pourtant, il y a encore cent-trente ans, Versailles était tout sauf le grandiose domaine que l'on connaît aujourd'hui, avec son immense parc, ses jardins à la française, Trianon, le potager du Roi... Abandonné, délabré, le château des rois est voué à tomber dans un profond oubli alors que la IIIème République triomphante règne sur la France. 
    C'est sans compter sur son conservateur emblématique, Pierre de Nolhac, arrivé à Versailles en tant qu'attaché de conservation en 1886. Âgé de vingt-sept ans, le jeune Auvergnat va se dévouer corps et âme pour ce grand navire en perdition, en lui redonnant ses lettres de noblesse. Si, aujourd'hui, Versailles attire visiteurs et touristes du monde entier, c'est probablement grâce à l'action et l'énergie de Nolhac, qui en sera nommé conservateur en 1892. C'est lui également qui y ouvrira une chaire d'Histoire de l'art relevant de l'Ecole du Louvre en 1910, avant de prendre finalement sa retraite à Paris, au musée Jacquemart-André. On peut considérer aujourd'hui, quatre-vingt-sept ans après sa mort, que son oeuvre à Versailles a été déterminante pour la sauvegarde du site, puisqu'il a contribué à sa modernisation, à son ouverture vers le public et à la reconstitution de ses vastes collections. Pierre de Nolhac sera aussi un témoin des grandes heures de l'Histoire, notamment de la Grande Guerre et du traité signé dans la galerie des Glaces, en 1919. 
    Le roman graphique Le château de mon père (dont le titre n'est pas sans rappeler l'oeuvre de Pagnol, ce que les auteurs reconnaissent volontiers) s'ouvre en 1935. Pierre de Nolhac est alors à la fin de sa vie - il mourra l'année suivante, le 31 janvier 1936 - et reçoit la visite de son fils, Henri, qui est peintre. Pour ce dernier, c'est l'occasion de raconter l'existence de sa famille à Versailles et le bouleversement que la nomination de son père et son implication vont avoir sur la vie de famille : car si Pierre est profondément dévoué à Versailles, sa femme Alix, qui reste seule avec ses enfants, s'y ennuie et reproche à son mari son investissement pour le château. Pour les enfants en revanche, grandir à Versailles est une expérience particulière : quel terrain de jeu pour Henri et ses frères ! Et en même temps, c'est aussi devoir partager leur père avec le monument qui en demande toujours plus, c'est accepter son absence aux repas ou des visites succinctes parce que le devoir l'appelle. Le travail de Pierre de Nolhac, s'il peut être aujourd'hui salué d'un point de vue patrimonial, car il a contribué à sauver le château des rois d'un désastre annoncé, a aussi sa part d'ombre et notamment parce que sa famille a pâti en quelque sorte de ce travail qui est devenu un véritable combat et s’avérera être l'oeuvre d'une vie. 

    M. Pierre de Nolhac, conservateur du Musée de Versailles.jpg

    Photographie de Pierre de Nolhac à son bureau en 1911


    Le château de mon père aborde toutes ces thématiques, en une centaine de pages, ce qui en fait un roman graphique dense et consistant. J'ai tout de suite apprécié les dessins en noir et blanc, qui donnent beaucoup de cachet au roman : je ne sais pas si le propos aurait été aussi percutant avec des dessins en couleur. Cela donne un petit côté rétro très agréable, on a presque l'impression de voir de vieilles photos. J'ai apprécié aussi que le roman ne se contente pas de parler uniquement de Versailles mais nous fasse entrer aussi dans l'intimité des Nolhac car on s'aperçoit vite que l'exaltation de Pierre n'est pas partagée par Alix, sa femme, qui doit gérer le foyer en son absence, s'occuper des enfants, affronter les coups durs et souvent, sans le soutien de son mari car celui-ci est entièrement absorbé par un travail herculéen qui le dépasse mais, en même temps, le maintient debout et le pousse à se surpasser. 
    Parce que Versailles est aujourd'hui un site connu de tous, qu'on l'ait visité ou pas, parce que ce sont toujours des images grandioses qui nous viennent à l'esprit quand on évoque le château des derniers Bourbons (paradoxalement, Versailles incarne pour nous la royauté par excellence alors que le château ne fut résidence royale que de 1682 à 1789), il est intéressant aussi de le découvrir désert, boudé par le pouvoir républicain qui l'a délaissé, géant aux pieds d'argile dont l'ancienne grandeur transparaît dans les salles vides et les ors ternis, mais qui n'est plus rien. Et, en quelques années, Nolhac et ses équipes, avec force et conviction, vont permettre à la grande oeuvre de Louis XIV de retrouver un lustre nouveau, entre évocation de la grande Histoire et ouverture à la modernité (c'est l'époque des premières visites, des premiers mécénats étrangers aussi). 
    Moi qui ne suis pas familière des romans graphiques, j'avoue avoir apprécié celui-ci : je ne savais pas exactement dans quoi je m'embarquais au départ, ni même si j'allais vraiment aimer le livre. Finalement, ça a bien pris et je suis vraiment contente d'avoir découvert Le château de mon père. C'est, je pense, bien plus éclairant de suivre en images Pierre de Nolhac que de lire une simple biographie. L'impression d'avoir vécu une immersion complète dans un lieu et une époque perdure encore, plusieurs semaines après en avoir terminé la lecture. A recommander. 

    En Bref :

    Les + : un très beau roman graphique (et un bel objet) qui raconte le combat de Pierre de Nolhac, nommé conservateur de Versailles à la fin du XIXème siècle, pour redonner tout son lustre au château des rois. Les dessins en noir et blanc, épurés sans être simplistes, apportent aussi beaucoup au propos. 
    Les - : 
    pas vraiment de points négatifs à soulever, ce fut une bonne surprise.


       Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle


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  • Commentaires

    1
    Dimanche 12 Mars 2023 à 10:33

    Ce livre est une très belle découverte ! Je n'en ai jamais entendu parler mais je suis curieuse de découvrir un château comme délaissé alors qu'il y a foule dedans aujourd'hui ! Je sens que je vais aimer cette lecture :-))

      • Dimanche 12 Mars 2023 à 11:10

        C'est ça qui est assez fou : quand on sait que Versailles attire aujourd'hui des millions de visiteurs et quand on connaît le domaine, sa grandeur, ses collections...on a du mal à imaginer qu'à la fin du XIXème, ce n'était qu'un palais délabré et vide. C'est aussi un magnifique hommage au travail de Pierre de Nolhac, qui s'est entièrement consacré à la restauration du château et à sa valorisation, parfois au détriment de sa propre famille... la passion de cet homme transparaît à chaque page. 

        Une très jolie surprise pour ma part, moi qui ne suis pas très familière des romans graphiques. smile

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