• Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789 ; Evelyne Lever

    « Vous restez maître ici. Tâchez de sauver mon pauvre Versailles. » Louis XVI à M. de La Tour du Pin, au matin du 6 octobre 1789

    Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789 ; Evelyne Lever

    Publié en 2013

    Editions Fayard

    496 pages

    Résumé : 

    Cette chronique envoûtante commence le 5  janvier 1757, lorsque Louis XV échappe à un attentat. Elle s'achève le 6 octobre 1789, quand le peuple parisien marche sur Versailles et contraint Louis XVI et Marie-Antoinette à s'installer dans la capitale. Entre ces deux dates, le monde a changé. La Ville l'emporte sur la Cour qui l'a trop longtemps ignorée. Alors que Versailles, centre du pouvoir hostile aux Lumières, n'est plus que le sanctuaire de la monarchie, le conservatoire du bon ton et le foyer des intrigues, la société parisienne fermente jusqu'à l'implosion. Voltaire, Rousseau et Diderot achèvent leur oeuvre ; les salons se politisent ; Beaumarchais et Mirabeau dardent leurs flèches contre le régime. En même temps, Paris se modernise et s'amuse ; les artistes français sont demandés dans toute l'Europe et les premières montgolfières prennent leur envol. Les espérances suscitées par l'avènement du jeune Louis XVI se dissipent vite. Des scandales éclatent et la reine devient la cible des pamphlétaires....

    Dans ce livre foisonnant, Evelyne Lever entraîne son lecteur de la Cour à la Ville dans un tourbillon d'émotions. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Au début du mois de janvier 1757, Louis XV, au pouvoir depuis quarante-deux ans, échappe de peu à la mort après avoir reçu un coup de couteau d'un déséquilibré, Damiens, qui ne manque son coup que parce que le roi portait plusieurs couches de vêtement du fait de la température rigoureuse.
    Rapidement, la blessure s'avère bénigne mais celle qui a atteint Louis XV au cœur ne cicatrisera jamais. L'âme du souverain est blessée car il comprend rapidement que cet attentat a eu lieu dans un contexte de désamour total du peuple envers son souverain. Le Bien-Aimé est devenu le « Bien Haï » et le peuple parisien, qui se pressait sous ses fenêtres lorsque, sous la Régence, le petit roi vivait aux Tuileries, ne s'émeut pas outre mesure de ce régicide. Au contraire, les Parisiens sont outrés de voir les supplices que l'on réserve à Damiens -les mêmes que ceux appliqués à Ravaillac en 1610-, pour un attentat qui a manqué et surtout, à une époque que l'on pourrait qualifier d'éclairée...Et pourtant, l'histoire avait bien commencé. Le peuple avait si bien accueilli ce petit roi de cinq ans, orphelin et qui succédait au trop long et brillant règne de son aïeul, Louis XIV, en 1715. Fils du duc et de la duchesse de Bourgogne, petits-enfants préférés du Roi-Soleil, le petit prince a vu mourir, en quelques semaines, ses deux parents et son frère aîné, le petit Dauphin, emportés par la rougeole. Le petit duc d'Anjou, devenu Dauphin après la mort de son aîné, est sauvé grâce à la présence d'esprit de sa gouvernante, madame de Ventadour, qui le soustrait aux mauvais soins des médecins et le protège de la contagion en l'enfermant dans ses appartements. Trois années plus tard, épuisé, atteint de la gangrène, Louis XIV s'éteint, dans l'indifférence générale. Son règne interminable a lassé les Français et les guerres désastreuses de la fin du règne ont saigné la France. On acclame cet enfant roi, si beau, installé dans la capitale par Philippe d'Orléans, devenu Régent. 
    Quarante ans plus tard, Louis XV n'est plus cet enfant que les Parisiens aimaient tant. Roi mystérieux, complexe, aux tendances dépressives certaines, il choque la France en multipliant les conquêtes et surtout, en prenant pour favorite une femme issue de la bourgeoisie financière, si méprisée à la Cour, en la personne de Jeanne-Antoinette d'Etiolles, qu'il titrera marquise de Pompadour. Les pamphlets moqueurs inondent la Cour et n’épargnent ni la favorite ni le roi.
    En 1774, de nouveau, on espère. Au début de mai, Louis XV est mort, à soixante-quatre ans, de la petite vérole, qui l'emporte en quelques semaines. Madame du Barry, sa dernière et sulfureuse favorite, sortie du ruisseau par un voyou peu scrupuleux qui en fera une courtisane de haut vol, est enfermée à l'abbaye de Pont-aux-Dames tandis qu'à Versailles, les courtisans s'inclinent devant les nouveaux souverains : le Dauphin, âgé de vingt ans, est devenu Louis XVI. Il est le petit-fils de Louis XV, malheureux fils du Dauphin Louis-Ferdinand et de Marie-Josèphe de Saxe, qui n'ont pas su l'aimer. Quatre ans plus tôt, en vertu de l'alliance inédite qui unit l'Autriche à la France, il a épousé la dernière enfant des souverains autrichiens, Madame Antoine, que l'on appellera en France Marie-Antoinette. Belle fille de dix-neuf ans, blonde aux yeux bleus, un teint de lait, Marie-Antoinette est ravissante et a su, dès son arrivée dans son nouveau pays, séduire le peuple avec sa grâce et malgré sa tête folle et sa frivolité puérile, mais qu'on lui excuse encore. On espère que ce règne qui commence apportera de nouveau prospérité et bonheur à la France. Et pourtant, le peuple déchantera vite. Louis XVI s'avère un roi, non dénué d'intelligence mais de fermeté, qui doute et hésite trop. Marie-Antoinette se perd en jeux, bals et toilettes de toutes sortes, se livrant à des dépenses inconsidérées alors que les finances du pays n'ont jamais été aussi mal. Et, comble de malchance, le couple royal restera stérile pendant sept ans, ce qui leur vaut la méfiance du peuple qui attend avec impatience la naissance d'un Dauphin -leur premier enfant, une fille, ne verra le jour qu'en 1778, huit ans après leurs noces. 

    Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789 ; Evelyne Lever   Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789 ; Evelyne Lever

    La marquise de Pompadour par Jean-Marc Nattier (XVIIIème siècle) et Louis XV par Quentin de la Tour (XVIIIème siècle)


    Entre scandales, libelles et pamphlets orduriers qui prennent la reine pour cible, la fin de la monarchie approche sans que personne ne s'en rende compte. Le cérémonial continue, immuable et pourtant, le monde, tout autour, change, sans que le roi et les courtisans, représentants de cet ancien monde, ne semblent -ou ne veulent- en prendre conscience. La banqueroute, combinée à des années aux rigueurs climatiques effroyables et au désenchantement occasionné par le comportement du roi et de la reine -surtout celui de la reine-, aura vite raison de cette monarchie millénaire mais qui vacille dangereusement sur ses bases, secouée par les progrès de ce que l'on appellera plus tard le Siècle des Lumières. Dans cette chronique, qui fait suite aux Temps des Illusions, Evelyne Lever se propose de brosser le portrait des trente-deux années qui séparent l'attentat de Damiens contre Louis XV et les journées d'octobre 1789 qui verront les poissardes de la Halle ramener triomphalement « le boulanger, la boulangère et le petit mitron », dans la capitale. Versailles, centre du pouvoir depuis Louis XIV, se voit pris d'assaut par le peuple de Paris qui triomphe sur le peuple de la Cour, ce peuple de courtisans obséquieux mais qui n'hésitera pas à abandonner le navire quand le danger deviendra trop grand...Pour la première fois depuis longtemps, c'est la Ville qui en impose à la Cour et aura le dernier mot. Après ces journées d'octobre, plus aucun souverain ne résidera à Versailles...
    Truffé d'anecdotes, ce livre, sans se lire comme un roman, est particulièrement plaisant à découvrir. Foisonnant, il est tout à fait captivant et c'est toujours avec intérêt qu'on le découvre petit à petit, page après page. Evelyne Lever nous livre ici un ouvrage scientifique, aux informations solide mais accessible à tous. Pour ceux qui connaissent déjà le style de l'auteure, vous ne serez pas dépaysé. Pour les autres, je suis sûre que ce sera une agréable découverte car Evelyne Lever fait partie de ces historiens qui savent captiver les foules. Alternant entre chroniques de la Ville -où l'on croise des tenancières de bordel, des courtisanes, des femmes éclairées animant les salons, des philosophes, des scientifiques-, et de la Cour -où l'on voisine avec des courtisans mielleux, une famille royale plus ou moins unie, des princes du sang rebelles-, Le Crépuscule des Rois monte progressivement en pression et passe de la liesse aux revendications hurlées avec colère contre un couple qu'on avait porté aux nues dix-neuf ans plus tôt. 

    Un livre à conseiller et à découvrir.

    Le Crépuscule des Rois, Chronique, 1757-1789 ; Evelyne Lever

    Louis XVI (Jason Schwarzenberg) et Marie-Antoinette (Kristen Dunst) dans le film Marie-Antoinette de Sofia Coppola (2006)

     

     

    En Bref : 

    Les + : un point de vue original ; un livre enlevé et captivant servi par des informations rigoureuses.
    Les - : 
    Aucun.

     


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  • Commentaires

    1
    Lundi 6 Octobre 2014 à 22:22

    Un livre qui pourrait ABSOLUMENT me plaire ;D

    2
    Jeudi 9 Octobre 2014 à 12:54

    Je l'ai vu en librairie et je demanderai sûrement à ce que l'on me l'offre. Il promet un grand et bon moment de lecture ! :-)

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