• Les Enquêtes de M. Justice de Mortagne, bourreau, tome 3, Le Tour d'Abandon ; Andrea H. Japp

    « On n’a le droit de sombrer dans le désespoir que lorsque aucune issue ne demeure. » 

    Les Enquêtes de M. Justice de Mortagne, bourreau, tome 3, Le Tour d'Abandon ; Andrea H. Japp

    Publié en 2014

    Editions Flammarion (collection Romans Historiques) 

    416 pages

    Troisième tome de la saga Les Enquêtes de M. de Mortagne, bourreau

     

    Résumé :

    Début du XIVe siècle. Bel homme cultivé et fort riche, Hardouin cadet-Venelle, bourreau, n'a jamais porté sa charge comme un fardeau jusqu'à à ce qu'il sangle sur le brasier Marie de Salvin, une innocente. Une quête n'anime depuis : faire vraie justice. Persuadé de l'innocence de Mahaut de Vigonrin, accusée d'avoir empoisonné son beau-père et son mari, il veut tout tenter pour la sauver du bûcher. Mais la destinée de Mahaut est entre les mains du bailli, Louis d'Avre, fraîchement nommé dans cette seigneurie bretonne, alors que la grogne monte dans le royaume après le renchérissement de la monnaie royale.
    Pire : d'étranges méfaits surviennent. Des enfants confiés aux tours d'abandons de la ville disparaissent, deux jeunes femmes sont assassinées et un garçonnet est tué en pleine forêt...Louis d'Avre demande l'aide d'Hardouin. Certain que justice ne sera rendue à l'identique à deux servantes trépassées et à la maîtresse installée d'un noble jouissant de puissantes protections sauf s'il s'en mêle, il accepte.
    M. Justice de Mortagne ne reculera devant rien, ni la férocité, ni la ruse, ni l'amour, ignorant que le plus blessant des trois n'est pas celui qu'il croit.

     

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Nous continuons, dans ce troisième tome, à suivre les pérégrinations d'Hardouin cadet-Venelle, bourreau de Mortagne-au-Perche, qui s'est brusquement transformé en enquêteur après avoir brûlé vive une jeune femme, Marie de Salvin, qui s'avéra être innocente du crime dont on l'accusait. Après avoir résolu une enquête sur des petits miséreux mystérieusement assassinés dans les rues de Nogent-le-Rotrou, celle sur l'assassinat d'Henriette de Tisans, la fille aînée et très aimée du sous-bailli de Mortagne, messire Arnaud de Tisans, voilà que M. de Justice de Mortagne va seconder le bailli de Nogent, Louis d'Avre, ancien compagne d'armes de Charles de Valois, le frère du roi, pour résoudre une nouvelle -et sinistre- affaire. En effet, après avoir été secouée par les ignominieux assassinats de ces petits nécessiteux, voilà que la seigneurie de Nogent voit maintenant ses enfants disparaître et se volatiliser de bien étranges manières. Des nouveaux-nés sont arrachés aux tours d'abandons des églises où des mères désespérées les ont laissés, d'autres encore sont quasiment arrachés d'entre les bras de leur mère...En parallèle, Hardouin continue ses investigations pour prouver l'innocent de madame Mahaut de Vigonrin, jeune baronne de vingt-trois ans, accusée par sa belle-famille de multiples enherbements et, notamment, celui de son époux.
    Bourreau, messire Venelle a une place tout à fait particulière dans la société de son époque et, de bien des façons, très paradoxale. En effet, le bourreau était une pièce charnière dans la hiérarchie judiciaire de l'époque, étant chargé de mettre à exécution -c'est le cas de le dire-, les sentences prononcées par les juges. C'était lui, aussi, qui était chargé d'administrer la Question aux prévenus avant de les mener ensuite à l'échafaud. Mais, pour la population, le bourreau restait un personnage sinistre, traînant le sang et la mort après lui et, de fait, il était souvent mis au ban de la société, ne vivant pas en ville mais hors les murs et devant se marier avec les filles d'autres bourreaux car jamais au grand jamais on n'aurait marié sa fille au bourreau, aussi riche fût-il. De véritables dynasties de bourreaux naquirent ainsi, toutes plus ou moins unies par les liens du sang du fait de cette obligation de se marier entre eux exclusivement. Hardouin, lui, n'aurait pas dû devenir bourreau mais, à la mort de son frère aîné, il est devenu l'héritier de son père et commença son office à l'âge de quatorze ans. Sa charge de bourreau ne fut jamais pour lui un fardeau jusqu'à l'exécution de la belle Marie de Salvin, dont le souvenir ne le quitte plus...
    Ce troisième tome -je ne sais pas si ce sera le dernier vu qu'il est sorti il y'a peu- est tout à fait convaincant. Nous retrouvons donc le très charismatique bourreau de Mortagne, Hardouin, transformé en Sherlock Holmes du XIVème siècle, en plein cœur du Perche qui, une nouvelle fois, va devoir se pencher sur des affaires concernant des enfants. On peut déplorer l'analogie faite avec le premier tome, où le bourreau enquêtait déjà sur des assassinats et sévices commis sur des jeunes enfants des rues, le manque d'originalité de cette enquête, mais, en même temps, elle est suffisamment bien ficelée pour donner envie au lecteur de la lire jusqu'au bout. Mais, en parallèle, Hardouin continue également de s'échiner à prouver l'innocence d'une toute jeune femme qui l'a charmé, Mahaut de Vigonrin, qui, sous ses airs de colombe pourrait bien cacher une noire vipère...Ce sont donc deux investigations que le rusé bourreau mène pour le compte de messire Louis d'Avre, le tout nouveau bailli de Nogent-le-Rotrou, nommé récemment, deux investigations qui se complètement tout à fait bien et donnent au livre au intérêt certain -cela permet d'atténuer aussi le sentiment de réchauffé que l'on peut avoir après avoir déjà suivi l'enquête du premier tome, Le Brasier de Justice.
    Hormis cela, on retrouve encore une fois des personnages très bien travaillés -on s'attache de plus en plus à Hardouin, un personnage complexe à la psychologie fine et accomplie-, un contexte historique bien restitué, appuyé par des recherches rigoureuses. Le Moyen Âge revit sous nos yeux, un Moyen Âge pas forcément flamboyant mais, du coup, tout à fait plausible. On est carrément loin de ce Moyen Âge légendaire que l'on a pu trouver chez les auteurs classiques par exemple et que les tableaux de Waterhouse personnifient si bien. Non, chez Japp, on est dans quelque chose de beaucoup plus sombre et poisseux, dans un monde sans concessionassassinats violents se mêlent aux plus vils calculs politiques. Le style de cette saga est peut-être un peu moins enlevé, un peu moins percutant que celui de La Dame sans Terre, par exemple, mais sert particulièrement bien le récit, notamment grâce à des dialogues ciselés, percutants et, parfois, truffés d'humour.
    Je ne sais pas si ce troisième tome sera le dernier de la série mais, pour le moment, il la clôt de façon plutôt efficace, avec des enquêtes bien ficelées, imbriquées les unes dans les autres et servies par des recherches historiques tout à fait sérieuses et solides.

     

    En Bref :

    Les + : les personnages et l'intrigue en général.
    Les - :
    la trop grande analogie avec le premier tome ; je déplore un sentiment de déjà-vu même si l'enquête sur ces enfants enlevés est tout à fait intéressante.


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