• Les Larmes de la Liberté ; Kathleen Grissom

    « Je ne suis pas innocent.Nous transportons tous le fardeau de notre passé,mais ce n'est pas aux autres de l'exploiter. »

    Les Larmes de la Liberté ; Kathleen Grissom

     

    Publié en 2016 aux Etats-Unis ; en 2017 en France (pour la présente édition)

    Titre original : Glory over Everything: Beyond The Kitchen House

    Editions Charleston 

    464 pages

    Résumé :

    En 1810, James Pyke, 13 ans, fils d'un planteur et d'une esclave, fuit sa Virginie natale. Vingt ans plus tard, le jeune homme, qui a toujours caché le secret de ses origines, a intégré la haute société de Philadelphie et vit une passion avec une ravissante aristocrate, Caroline. Mais celle-ci tombe enceinte et, rapidement, son père menace James. 
    C'est alors que Pan, serviteur et petit protégé du jeune homme, est enlevé et vendu comme esclave en Caroline. James décide de partir à sa recherche. Pourtant, dans cette Amérique sudiste impitoyable, il sait que sa tête est toujours mise à prix. Parviendra-t-il à sauver Pan au péril de sa vie ? Retrouvera-t-il Caroline, son grand amour et la mère de son enfant ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Jusqu'à présent, je n'ai jamais été déçue par les éditions Charleston et Les Larmes de la Liberté ne dérogent pas à la règle ! Si un jour un livre Charleston me déçoit, ce ne sera sûrement pas celui-là, que j'ai trouvé aussi bon que La Colline aux Esclaves, voire encore meilleure.
    Ma rencontre avec Kathleen Grissom date de décembre 2016, quand j'ai lu La Colline aux Esclaves, livre ajouté à ma PAL quelques mois plus tôt, un peu par hasard, j'avoue, ne connaissant rien de cette auteure canadienne installée en Virginie dans une ancienne plantation, qui lui a inspiré son roman : j'avais trouvé la démarche de l'auteure, expliquée à la fin du roman, extrêmement sincère et authentique et cela m'avait encore plus donné envie, si cela est possible, de lire son autre roman. J'ai aimé cette histoire qui se passe sur la plantation de Tall Oakes, en Virginie, entre la fin du XVIIIème siècle et le début du XIXème. Le roman se terminait sur une ouverture, annonçant déjà Les Larmes de la Liberté et, évidemment, j'ai été ravie de constater, quelques temps après avoir terminé cette lecture, qu'elle possédait une suite, dans laquelle le personnage de Jamie serait le héros.
    Le roman s'ouvre donc en 1830, à Philadelphie : James Burton a trente-trois ans. Bel homme, il possède une belle maison mais aussi l'importante orfèvrerie Burton, dont il a hérité à la mort de son père adoptif. Mais James est aussi un artiste de talent, qui n'aime rien tant qu'immortaliser les oiseaux. Son talent lui ayant ouvert les cercles les plus étroits de la bourgeoisie de Philadelphie, James rencontre un jour la très jolie Caroline Cardon, victime d'un mariage arrangé et malheureux et qui tombe amoureuse du beau et mystérieux orfèvre. Mais cette liaison interdite menace de faire ressortir le passé de James, qu'il s'est appliqué à dissimuler, au prix de beaucoup d'efforts et de détermination. Mais le jour où un de ces serviteurs, le jeune Pan, auquel il s'est très attaché, disparaît, enlevé par des marchands d'esclaves pour être vendu, les certitudes de James vacillent et, malgré la relative sécurité dont il jouit à Philadelphie, il est prêt à se mettre en danger pour sauver le jeune garçon. James quitte alors sa vie confortable et sans histoires pour la Caroline du Nord, où l'enfant a été emmené.
    Si vous avez lu La Colline aux Esclaves, vous savez quelle est l'ascendance de Jamie, noir par sa mère et blanc par son père. Blanc de peau, James a pu se construire une existence en apparence normale mais qui pourrait voler en éclats si on apprenait que sa mère est une esclave noire, dans un pays où l'esclavage est répandu, admis et qui constitue la base de l'économie des États du Sud. Et si, à trente ans de la Guerre de Sécession, il existe déjà des opinions divergentes, il n'est pas encore question de remettre en cause le système des plantations et de l'esclavage.
    Le bon ressenti que j'avais déjà éprouvé il y'a un an et demi à la lecture de La Colline aux Esclaves s'est vérifié aussi. Encore une fois, j'ai trouvé que l'auteure abordait un sujet vraiment pas simple avec beaucoup d'adresse. On est d'accord, traiter de l'esclavage dans un roman, c'est assez casse-gueule. Voilà un épisode de l'Histoire qu'il convient de prendre avec prudence afin d'éviter l'écueil du manichéisme, de la diabolisation et de la fausse pitié et qui est particulièrement brûlant : il n'y a qu'à voir la polémique créée l'an dernier après qu'on ait évoqué le retrait de statues de Robert Lee, général sudiste de la Guerre de Sécession.
    Mais, pour en revenir aux romans, justement, j'avais trouvé que La Colline aux Esclaves était un récit tout en nuances et Les Larmes de la Liberté l'est aussi. Kathleen Grissom aurait pu céder à la facilité en nous livrant un roman avec les pauvres esclaves noirs asservis et les méchants maîtres blancs, violents, inhumains et maltraitants. Eh bien, non. Tous les Blancs n'étaient pas propriétaires d'esclaves et partisans de l'esclavagisme et beaucoup de Noirs sont entrés en résistance, malgré les risques encourus, quittant les plantations et s'installant dans une vie clandestine. Tous les propriétaires d'esclaves ne les traitaient pas mal non plus. Cela dit, l'auteure décrit assez bien le cynisme et la froideur assez effrayante d'une société considérant des hommes comme du bétail, dont on peut disposer à l'envi. Les Larmes de la Liberté reflète bien ce que devait être le Sud esclavagiste au début du XIXème siècle, une société bancale mais qui ne se remet pas pour autant en question et qui, il faut bien l'avouer, en profite : les abus des régisseurs, les sévices, la peur, ne sont certainement pas de l'invention. Mais il existait aussi des Blancs qui aidèrent les Noirs à fuir, ou à devenir libres, comme les communautés quakers, motivées par leurs convictions religieuses. J'ai vraiment aimé que l'auteure fasse preuve d'autant d'objectivité, sans passer sous silence les horreurs qui avaient lieu dans les plantations mais sans mettre aussi tout le monde dans le même panier, un peu comme l'a fait Sarah McCoy dans Un Goût de Cannelle et d'Espoir.
    Un peu déçue au départ de ne pas retrouver Lavinia, l'héroïne de La Colline aux Esclaves, arrivée toute petite à Tall Oakes en 1791 de son Irlande natale, et que l'on quitte en 1810 alors qu'un tragique événement est en train d'anéantir la plantation des Pyke, je me suis finalement vite rendu compte que Jamie était un personnage attachant. Élevé par sa grand mère dans l'hostilité envers les Noirs, écartelé entre ses deux ascendances, qu'il rejette toutes deux pour diverses raisons, Jamie est fragile mais courageux. Je l'ai tout de suite beaucoup aimé, j'ai vraiment perçu son charisme. Jamie Burton est un de ces personnages qui en impose.
    J'ai beaucoup aimé que Les Larmes de la Liberté se distingue aussi de son prédécesseur, sans s'en émanciper totalement pour autant. J'ai apprécié que les rappels à La Colline aux Esclaves soient relativement subtils, permettant ainsi de lire Les Larmes de la Liberté comme un roman indépendant. Mais l'ambiance est la même dans les deux romans, malgré le changement de lieux, d'époque, de personnages. J'ai retrouvé dans ce deuxième roman ce que j'avais aimé dans le premier.
    Les Larmes de la Liberté est une grande fresque historique, qui se déroule dans les paysages grandioses et encore en partie sauvages de la Caroline du Nord et de la Virginie. Mené tambour battant, le roman n'ennuie jamais. On est parfois ému, parfois révolté, parfois terrifié, en même temps que les personnages. J'aime ces romans où le lecteur est vraiment partie prenante de sa lecture. Il n'y a rien de plus frustrant que lorsqu'on reste détaché d'un récit. En tant que lectrice, j'aime me sentir investie et j'aime qu'un récit fasse naître quelque chose, sinon, quel intérêt ?
    Les Larmes de la Liberté fait partie de ces romans que l'on dévore, dont on a envie de savoir la fin et, en même temps, on le referme avec un pincement au cœur, une vraie nostalgie parce qu'on quitte les personnages, parce que, ça y'est, c'est terminé. Ce sont des lectures qui comptent beaucoup dans une vie de lecteur, je crois, ces romans dont on se souviendra longtemps, qu'on a eu de la peine à refermer mais qui, on le sait, resteront comme une merveilleuse expérience de lecture. Pour moi, Les Larmes de la Liberté est de ceux-là, tout comme La Colline aux Esclaves et c'est a vécu beaucoup d'intérêt que je vais suivre l'actualité de Kathleen Grissom, en espérant qu'elle ne s'arrête pas là

    En Bref : 

    Les + : l'intrigue, l'ambiance du roman qui m'a énormément rappelé La Colline aux Esclaves, le style de l'auteur. Je me suis sentie happée par cette lecture. 
    Les - : j'aurais presque aimé que le livre soit plus long ! ^^ Mais est-ce vraiment un point négatif, dans ce cas là ? Je ne crois pas ! 

     


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 5 Juillet 2018 à 07:53

    Si je comprends bien il vaudrait mieux lire "La Colline aux Esclaves" auparavant, ce qui n'est pas du tout un problème. L'été revient, je me lancerai sans doute dans la lecture d'un Charleston, mais je ne sais pas encore si ce sera l'un de ceux-là ou un autre :-)

      • Jeudi 5 Juillet 2018 à 15:45

        Oui, en effet. C'est une question de choix, je pense que les deux romans peuvent être lus indépendamment mais, pour ma part, j'ai lu d'abord La Colline aux Esclaves et je crois que cela permet de mieux saisir ensuite Les Larmes de la Liberté : on comprend mieux qui est Jamie, on sait son passé, son histoire. 

        Personnellement, je te conseille de lire d'abord La Colline aux Esclaves qui, en plus de ça, est vraiment très bon ! cool Je suis sûre qu'il te plaira. Les Larmes de la Liberté est un très bon roman aussi mais j'ai vraiment préféré son prédécesseur, qui m'avait vraiment fait forte impression. 

        Quoi qu'il en soit, je te conseille les deux ! happy

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