• Marie-Antoinette ou l'Insouciance Assassinée ; Jean-Marc Simon

    «Rien à présent ne peut plus me faire de mal . »

    Marie-Antoinette ou l'Insouciance Assassinée ; Jean-Marc Simon

    Publié en 2006

    Editions Bernard Giovanangeli (collection Biographies express)

    142 pages 

    Résumé :

    Dernière grande figure féminine de la monarchie française, Marie-Antoinette conserve une image bicéphale entre l'innocente bergère de Trianon et «l'Architigresse d'Autriche» trahissant la France pour les Habsbourg. Tandis que certains se laissent prendre au charme de cette reine du rococo qui fut la mode, d'autres ne voient en elle qu'une «Madame Déficit» au temps où la grande affaire du royaume était la dette publique.

    Épouse d'un mari faible, elle voulut combler de bienfaits la petite société faisandée de ses courtisans. Pire, elle prétendit se mêler des affaires de l'État pour obliger ses entours, le beau Fersen et plus encore ses parents de Vienne. Bouc émissaire d'un système social et fiscal à bout de souffle, cette naïve fut victime de son insouciance et de cette médisance qui, une fois mise au monde, s'emballe d'elle-même en fantasmes immondes.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Marie-Antoinette est un personnage qu'on ne présente plus, par ici. Tous mes lecteurs savent plus ou moins qu'elle est sinon, le préféré, du moins l'un de mes personnages historiques préférés. Si, peut-être bien qu'elle est ma favorite, si j'y réfléchis. Le personnage n'est pas exempt de défauts ni même d'erreurs mais justement, ces inégalités chez elle me la rendent infiniment proche et je crois que son destin ne pourra jamais cesser de m'émouvoir. A chaque livre que je lis sur elle, j'espère toujours très fort -et naïvement- que, peut-être, cette fois-ci, la fin sera différente. Elle ne le sera jamais et on ne peut pas réécrire l'Histoire mais d'un point de vue humain, j'avoue avoir du mal à ne pas m'attendrir sur Marie-Antoinette. A mon sens, quelles que soient les erreurs qu'elle ait pu commettre dans son existence, ses faux-pas, elle a subi un sort qu'elle ne méritait certainement pas. En Marie-Antoinette, c'est la frivolité et l'insouciance de la jeunesse qui furent punies et condamnées à mort. Seulement, on est moins enclin à laisser la bride sur le cou aux jeunes gens qui sont censés un jour administrer un pays et si l'insouciance et la légèreté de la jeunesse sont attendrissantes chez les autres, elles deviennent de mortels défauts pour les futures têtes couronnées. Et Marie-Antoinette fut peut-être coupable de n'en avoir pas pris la mesure, de n'avoir pas su, alors qu'il était encore temps.
    Si Louis XVI n'avait pas perdu ses parents jeune, c'est, à la mort de Louis XV, son père, Louis-Ferdinand, qui serait monté sur le trône. La France aurait eu un roi de quarante-cinq ans, avec une plus grande expérience du pouvoir que son jeune fils qui ceint la couronne de son grand-père, à la mort de ce dernier. Et, si on lui avait prêté vie, peut-être son héritier aurait-il, à l'ombre du trône et sa jeune épouse avec lui, appris tranquillement son métier de roi. Peut-être, d'ailleurs, si Louis-Ferdinand et son épouse Marie-Josèphe de Saxe étaient devenus souverains en 1774 n'y aurait-il jamais eu d'alliance matrimoniale avec l'Autriche, la mère de Louis XVI se montrant tout à fait hostile au parti autrichien. Et le destin de Marie-Antoinette aurit donc pu être tout autre...
    Mais tout ceci n'est que conjectures et, c'est bien connu, on ne fait pas l'Histoire avec des si. Quoi qu'il en soit, la préparation du jeune couple est médiocre voire inexistante et il se voit brutalement propulsé sur le trône après les dix jours de maladie de Louis XV. Louis et Marie-Antoinette se retrouvent seuls et désemparés, devant une tâche bien trop grande pour leurs jeunes épaules. Et il est avéré que la jeune reine, à dix-neuf ans, n'a pas su prendre la mesure de la tâche qui lui incombait désormais et, très rapidement, elle sera la cible de critiques, d'abord peu virulentes puis devenant de plus en plus acerbes et dégoûtantes, en visant par exemple une hypothétique sexualité débridée à Marie-Antoinette, qui aurait accumulé amants et liaisons saphiques avec ses favorites, Madame de Lamballe puis la comtesse de Polignac. Avec un besoin inconscient d'amour et de reconnaissance, la jeune reine, malheureuse dans son couple auprès d'un homme timide et qui ne lui témoigne rien d'autre que respect et estime -c'est déjà bien, il est vrai, mais la jeune femme avait besoin d'autre chose-, elle va s'entourer d'une coterie qui va profiter d'elle et elle commettra un jour l'erreur de se séparer de ceux qui étaient, dans leurs amitiés, sûrement les plus sincères, comme Madame de Lamballe pour se concentrer sur des amitiés qui ne valaient certainement pas son intérêt et qui vont profiter de son bon cœur.
    Il y'a également sous le règne de Louis XVI une notion qui mérite d'être soulignée et qui resurgit avec lui : l'absence de favorite royale. Louis XV en eut, Louis XIV avant lui également et on peut compter sur les doigts d'une main les rois de France qui, depuis Charles VII n'ont pas installé, en parallèle de leur couple légitime, une maîtresse qui devenait rapidement la seconde femme voire, la première dans le cœur du roi. Or, Louis XVI, qui fut suffisamment, du vivant de son grand-père, scandalisé par sa vie sentimentale et qui n'avait de toute façon aucun penchant sensuel, au contraire de son aïeul, n'aura jamais de maîtresse. Il prive donc en quelque sorte son épouse du paravent dont les autres reines avaient bénéficié, paravent symbolisé par la favorite qui cristallisait toutes les haines et toutes les critiques. Il est vrai aussi que Marie-Antoinette n'aura pas le caractère instinctivement effacé de certaines, comme Marie Leszczynska ou Marie-Thérèse, l'épouse de Louis XIV, qui parviendront toujours à rester à l'écart des critiques en se cantonnant dans leur rôle traditionnel de reine : celui d'être des ambassadrices de leur pays d'adoption en donnant des enfants légitimes à leur époux et, de préférence, des fils. Et là-dessus aussi, Marie-Antoinette ne remplit pas sa mission, qui doit la faire adopter mais aussi renforcer l'alliance de la France et de l'Autriche qui n'était pas naturelle : il était absolument impératif que la jeune femme donne un fils à son époux. Seulement leur mariage ne sera consommé complètement qu'en 1777, sept ans après que l'union ait été célébrée, leur premier enfant naîtra l'année suivante mais ce sera une fille -la future duchesse d'Angoulême- et le premier fils du couple ne verra le jour qu'en 1781. Puis, lorsque Marie-Antoinette aura enfin mis des enfants au monde, l'opinion tournera les yeux vers d'autres défauts de la reine : ses dépenses, sa frivolité, sa légèreté blâmables. Et ces piques-là, autrefois, étaient réservées aux favorites accusées de pervertir le roi, de le rendre faibles et de ruiner le royaume. Désormais, c'est la reine qui devient l'objet des ressentiments, ressentiments qui participent certainement, à une désacralisation progressive des personnes royales jusqu'à ce que l'irréparable ne soit voté : la mort du roi, puis celle de la reine, à neuf mois d'intervalle, en 1793.
    Malgré tout, on ne peut que penser que Louis XVI et Marie-Antoinette furent emportés par le tourbillon des événements. Ils ne furent certainement pas, ni l'un ni l'autre, exempts d'erreur et de faux pas, au contraire, même. Peut-être Louis XVI aurait-il eu besoin d'un peu plus de fermeté et d'une meilleure préparation, qu'on ne daignera pas lui donner dans sa jeunesse et Marie-Antoinette, elle, aurait peut-être trouvé un bénéfice dans une maturité acquise plus tôt. En cassant volontairement les codes de la monarchie, en bouleversant la hiérarchie, en n'écoutant pas les conseils de ceux qui pouvaient faire s'améliorer sa conduite, assurément qu'elle a eu tort. Mais ils ne furent pas des tyrans et Louis XVI essaya, sincèrement, sans y parvenir, à améliorer l'existence de ses sujets. Ils paieront de leur vie le mécontentement et le détâchement progressif du peuple français envers ces rois, désamour qui s'était amorcé dès le XVIIème siècle avec les troubles de la Fronde.
    Le livre de Jean-Marc Simon est très court, on se demande même comment il a pu synthétiser en même pas 150 pages le destin de Marie-Antoinette ! Et pourtant, l'essentiel est là. Ce que j'ai aimé, c'est que le livre soit vraiment centrée sur elle, sans les digressions géopolitiques ou militaires que l'on trouve en général dans toute biographie historique. Le propos tourne vraiment autour de la reine, de sa famille, de ses engagements politiques mais sans entrer trop dans les détails non plus : on sent que l'auteur a voulu se concentrer essentiellement sur le mode de vie de Marie-Antoinette...Sans minimiser ni passer sous silence ses erreurs, au contraire, l'auteur n'en est pas moins bienveillant avec l'objet de son étude. En cela, il ne s'éloigne pas de l'historiographie moderne, qui fait de Marie-Antoinette, certes une victime, mais une jeune femme qui a commis des faux-pas qu'elle n'a pas su rattraper et qui a fini par en payer cher le prix. Sans diaboliser le personnage comme cela fut faix pendant et après la Révolution, sans faire non plus de son livre un martyrologe ou une hagiographie, Jean-Marc Simon parvient, si cela n'est pas déjà le cas, à faire se lever chez son lecteur une certaine empathie pour le personnage. Humainement effectivement, on ne peut pas considérer froidement les dernières semaines de la reine, malade, minée par très certainement par un cancer de l'utérus, ni même les dernières années qui précédèrent sa condamnation à mort et celle du roi, car elles furent un véritable chemin de croix pour elle.
    Je regrette que le livre recèle quelques erreurs...c'est dommage, pas grave en soi, mais c'est vrai que ça dénature un peu le propos...je ne sais pas vraiment si ce sont de véritables erreurs, ceci dit, ou bien des coquilles, ce qui arrive assez régulièrement.
    Quoi qu'il en soit, le livre est vraiment une bonne introduction et plus abordable, pour ceux qui ne savent pas par quoi commencer, que les travaux d'Evelyne Lever ou Antonia Fraser, qui nous ont livré des livres très complets, donc très denses et qui peuvent faire hésiter -malgré leurs qualités-, quand on ne connaît pas le personnage et qu'on veut en apprendre un peu plus sans se perdre dans une démonstration historique un peu plus vaste plutôt que dans un portrait plus intimiste. J'ai aussi aimé cette approche pour ma part.

    En Bref :

    Les + : une biographie synthétique mais complète, très centrée sur l'analyse de la personne de Marie-Antoinette, avec moins de considérations politiques.
    Les - :
    quelques erreurs, dommage. 


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 11 Août 2016 à 18:43

    Je note forcément ce titre (c'était déjà fait dès que j'ai vu le livre je ne sais où). J'étais cependant curieuse de lire ta chronique cependant et je suis assez enthousiasmé, même si ce livre servira plutôt de rappels qu'autre chose. 

    Quand tu parles au début, j'ai l'impression que c'est moi qui écrit ! Je ressens les mêmes choses : MA n'était pas parfaite mais je l'en apprécie d'autant plus. Vive MA ! :-D

      • Jeudi 11 Août 2016 à 19:14

        Effectivement, comme je le dis dans ma chronique, ce petit livre peut-être une très bonne introduction pour un lecteur ne connaissant pas grand-chose au personnage mais voulant en apprendre un peu plus sans se prendre la tête pour autant avec une somme plus compliquée ! ! cool

        Pour des fans comme nous, par contre, ce sera plus un rappel qu'autre chose, tu as complètement raison mais j'ai bien aimé quand même ! ! yes

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