• Mes Soeurs et Moi ; Judith Lennox

    « Avoir quelque chose et le perdre vous fait languir de ce qui vous manque. »

    Mes Soeurs et Moi ; Judith Lennox

    Publié en 2013 en Angleterre ; en 2014 en France (pour la présente édition) 

    Titre original : All My Sisters

    Editions Archipoche (collection Romans Etrangers) 

    624 pages

    Résumé :

    A la veille de la Première Guerre Mondiale, à Sheffield, les quatre sœurs Maclise songent à leur avenir. 

    La belle et orgueilleuse Iris attend une demande en mariage qui tarde à venir ; la passionnée et timide Marianne s'éprend d'un homme d'affaires ; la vive Eva souhaite partir à Londres pour devenir artiste, tandis que Clémence, la benjamine, doit rester à la maison pour prendre soin de leur mère. 

    La guerre et ses tragédies vont séparer les quatre sœurs. Confrontées à des choix difficiles, elles doivent faire face à des responsabilités inattendues, mais découvrent une indépendance dont elles n'imaginaient pas la saveur. 

    Bientôt, le silence de Marianne, qui a suivi son époux en Inde, devient inquiétant. Jusqu'à ce qu'une lettre parvienne, qui contient une pierre précieuse pour chacune de ses sœurs...Seront-elles un jour à nouveau rassemblées ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Au début des années 1910, les sœurs Maclise, de Sheffield, entrent doucement dans l'âge adulte. L'aînée, Iris, séductrice -et séduisante-, papillonne et fait tourner la tête des garçons de la ville, sans tomber amoureuse pour autant. Une rencontre fortuite, consécutive à une chute de vélo, bouleversera sa vie et la changera. La cadette, Marianne, sera celle qui adoptera le chemin le plus conventionnel pour l'époque : un mariage satisfaisant mais qui finira mal. Elle connaîtra ensuite sa dose de tragédie. Eva, la troisième, est artiste dans l'âme, aspire à une vie de bohème et à être admise aux Beaux-Arts de Londres.
    Mais la guerre fera d'elle une femme de responsabilités, bien loin de la vie d'artiste qu'elle avait espérée plus jeune. Enfin, la dernière de la famille, Clémence, qui n'est pas la plus jolie se voit imposer d'office un destin qu'elle n'a pas choisi : celui de garde-malade pour sa mère et sa grand-tante. Mais les bouleversements de ce début de siècle vont entraîner dans leur sillage les sœurs Maclise, les éloigner considérablement les unes des autres et leur faire connaître drames, aventures et péripéties qu'elles n'auraient jamais envisagé.
    L'orgueilleuse Iris, confrontée par un homme qui ne la laisse pas indifférente, se remettra complètement en question ; Marianne se laisse entraîner dans une histoire sordide par un manipulateur ; Eva se rend compte que sa vocation d'artiste ne lui convient peut-être pas autant qu'elle l'avait pensé et s'accomplira finalement dans un univers bien différent ; Clémence, enfin, qui grandit, s'ouvre elle aussi à l'amour sans pouvoir malheureusement se dépêtrer du fil à la patte que lui a passé la maladie de sa mère, la famille s'attendant, tacitement, à ce que la benjamine prenne en charge l'organisation de la maison et leur mère malade. L'accession à l'âge adulte des sœurs Maclise ne se fera pas sans douleur ni sans larmes ; elles connaîtront bien des désillusions mais l'adversité leur permettra aussi, dans une certaine mesure, de grandir et de mûrir. La Première Guerre qui éclate et fait imploser la fratrie sera aussi pour elles une période cruelle mais pendant laquelle elles comprendront aussi bien des choses, sur elles, sur les leurs, sur ceux dont elles sont amoureuses...
    L'histoire est bien située dans son contexte : l'auteure a manifestement fait beaucoup de recherches sur la guerre, les privations en Angleterre, entraînées par le blocus maritime mais aussi sur la montée des contestations féminines, les militantes connues sous le nom de suffragettes réclamant avec de plus en plus de véhémence voire de violence, le droit de vote et l'égalité des sexes. Mais l'intrigue est surtout centrée sur l'humain, les interactions entre les différents protagonistes, membres de la famille Maclise ou non, sur les joies et les déceptions qu'elles peuvent entraîner, sur l'impact général qu'elles auront sur chacune des sœurs. Aucune, en effet, ne réagit de la même manière devant les événements qui leur arrivent et parfois, elles s'avèrent en effet surprenantes. Finalement, les quatre sœurs sont très changeantes et leur caractère initial s'avère très rapidement être voué à des changements notoires et irrévocables : Iris, qui peut paraître superficielle, est en fait une jeune femme sensible et qui recherche dans le regard des hommes une reconnaissance pour sa personne qu'elle n'a peut-être pas elle-même ; Eva, un peu perchée au début du roman et menant une vie de bohème dans le Londres de l'avant-guerre se révèle quand l'administration de l'usine familiale lui échoit, la douce Marianne, très conventionnelle au début du roman, celle qui se rapprochait le plus, comme je le disais plus haut, du cliché de la femme du début du XXème siècle, surprend finalement par la force inébranlable de son caractère, qui lui permettra d'ailleurs de mettre fin à un mariage toxique et sordide et la benjamine, volontiers considérée par les autres comme le bébé de la famille, rencontre finalement l'amour en une personne bien surprenante.
    Le premier quart du roman m'a fait très peur car il ne s'y passait pas grand-chose : nous assistons surtout à un récit détaillé du passage de l'adolescence à l'âge adulte des sœurs Maclise. Chacune grandit, commence à songer à ce qui serait bon pour elle, tâtonne, fait parfois de mauvais choix...sans dire que ce début d'intrigue était sans intérêt, car ce n'est pas le cas, j'avoue n'avoir pas été transcendée, comme si je naviguais au-dessus de l'histoire sans forcément me sentir concernée. Oui, les sœurs sont sympas, l'histoire pas mal parce que j'aime bien l'ambiance cosy de la bonne société anglaise du début du XXème siècle, qui me rappelle un peu Downton Abbey, mais ça s'arrête là. Le début m'a un peu déroutée également, car je pensais que le roman serait en forme de flash-backs alors qu'il ne l'est finalement pas : mais l'introduction nous donne pourtant ce sentiment et j'ai cru un moment que l'une des sœurs, devenue âgée, se rappelle justement de ses jeunes années, de ses sœurs, de leur séparation etc... alors que ce n'est finalement pas le cas. Il a fallu que j'attende que l'histoire prenne un tournant, avec notamment le départ de Marianne pour l'Inde et toute l'horreur de son mariage qui se révèle peu à peu et les désillusions en série d'Iris, soumise à une adversité bien cruelle et qui semble lui faire payer ses œillades de jeunesse et les déceptions qu'elle a occasionnées à bien des garçons, pour commencer à ressentir un vrai intérêt pour ces jeunes femmes qui s'ouvrent alors, comme si la lumière était faite soudain sur elles et nous incite à nous intéresser plus sérieusement, plus profondément à elles. Chacune dévoile un peu de son intimité, de ses failles et c'est cela qui intéressant, finalement : les héros qui portent des armures, qui vont bien tout le temps et se sortent de toutes les situations sans déranger leur brushing, ça marche peut-être, mais ça n'a aucune authenticité. Et même si on lit pour s'évader, cela ne signifie pas pour autant qu'il faut écarter toute vraisemblance des récits, bien au contraire : la vie quotidienne peut s'avérer triviale, c'est vrai, mais un roman suffisamment abouti peut justement nous amener à nous interroger ou nous livrer une analyse simple de l'humain, de ses bons et mauvais côtés et c'est ça aussi, la littérature. Et comme des nouvelles têtes que l'on apprend à connaître puis à apprécier jusqu'à s'en faire des amies, les sœurs Maclise deviennent rapidement des figures habituelles que l'on retrouve avec plaisir dès que l'on rouvre le roman. On sent en fait l'amour que l'auteure porte à ses personnages qui sont comme ses enfants qu'elle fait grandir au fil des pages, avec beaucoup de tendresse et en les entourant de beaucoup de soins... Pour ma part, j'ai beaucoup aimé Iris après l'avoir trouvée un peu trop superficielle et agaçante au début du roman alors qu'elle est en fait très touchante et Marianne, trop lisse et qui se cisèle, se patine subtilement au fil des pages jusqu'à susciter chez le lecteur une réelle admiration pour tout le pouvoir insoupçonné qu'elle a en elle. Marianne fait partie de ces êtres effacés et qui ont pourtant une force intérieure immense qui leur permet de se dépasser et de passer au travers des obstacles comme au travers des murs au besoin. La jeune Clémence, aide-soignante sans grand éclat d'une mère tyrannique est celle qui, certainement, avec Eva, épouse avec le plus de ferveur les bouleversements qui favorisent les femmes et bouleversent leur façon de voir les choses en ce début de XXème siècle.
    Le style m'a convaincue ; pas spectaculaire, mais juste et fluide, il est agréable à lire. Je déplorerai seulement des coquilles, c'est un peu dommage car malheureusement, il y'en a pas mal. Dommage aussi que la fin soit si abrupte et que l'auteure n'ait pas plus développé les histoires de Clémence et d'Eva, qui s'étoffent en fin d'ouvrage et semblent devenir des personnes surprenantes. Heureusement que l'intrigue est suffisamment à la hauteur pour compenser ces petits bémols. Mes Sœurs et Moi est un roman historique et une chronique de mœurs efficaces que je conseille à tous les amateurs de romans historiques et à ceux qui aiment l'ambiance bien particulière des romans anglais, classiques ou plus contemporains.

    En Bref :

    Les + : un contexte historique passionnant, des histoires humaines riches et intéressantes ; un style fluide.
    Les - : des coquilles, un début un peu longuet et une fin abrupte qui appellerait une suite ou au moins une explication. 


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 26 Mai 2016 à 16:27

    D'après tes derniers mots, ce livre pourrait bien me convenir. Il faut dire que ce genre de couverture attire toujours mon oeil. Je le note ! Merci pour la découverte :-)

      • Jeudi 26 Mai 2016 à 19:35

        Ah ça c'est clair, la couverture attire énormément ! Celle des éditions de L'Archipel, la première, était moins tentante, plus sombre, bref, elle n'attirait pas l'oeil...je sais bien qu'il ne faut pas se fier aux couvertures mais c'est quand même super important, parfois, un livre peut attirer rien qu'avec son visuel et c'est justement cela qui va nous pousser à nous y intéresser ou non ! En tous cas, moi, je fonctionne comme ça et il y'a beaucoup de livres qui ont rejoint ma PAL parce que j'ai d'abord trouvé la couverture vraiment jolie et que le résumé m'a plu ensuite...ça a été le cas de Mes Soeurs et Moi, qui est sorti dans la recherche intelligente du site où je commande habituellement mes livres et qui me fait donc des propositions en rapport avec ce que j'ai vu précédemment ou mes précédentes commandes. Et je dois dire qu'ils sont tombés dans le mille avec le roman de Judith Lennox...j'ai eu très peur, le dé&but ne m'a pas passionnée et finalement, j'ai été emballée par cette histoire ! 

        Du coup, je te conseille le roman...vraiment ! Je ne peux pas faire autrement ! happy

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    2
    Samedi 4 Juin 2016 à 16:30

    Lorsque j'avais vu sur twitter que tu le lisais, j'avais envie de savoir ce que tu allais en penser et figure toi que tu me donnes encore plus envie de me le procurer ! Les petites coquilles me font un peu peur du coup, je me demande si c'est à cause de la version française ou simplement une erreur de l'auteure ? Car si c'est juste la version française, je le lirai en anglais ;)

      • Dimanche 5 Juin 2016 à 19:59

        Je ne peux pas vraiment te répondre de façon certaine, mais je pense que les coquilles proviennent de la traduction française ou, du moins, de l'impression des éditions... erf Alors c'est vrai que c'est un peu gênant mais en général c'est une substitution d'un mot pour un autre ou un prénom interverti avec un autre...que des choses habituelles, mais bon, c'est vrai que c'est un peu gênant quand ça revient de façon récurrente...

        A part l'histoire est belle et je dois avouer que je ne m'attendais pas forcément au tour grave que l'auteure donne à son roman, je ne m'attendais pas à quelque chose de léger, compte tenu du contexte traité etc mais le fait que Judith Lennox aborde la perversité manipulatrice dans le couple m'a surprise...Cela dit, elle le fait très bien donc le roman reste très intéressant à lire  ! 

        Je te le conseille, Aurélie ! yes

    3
    Samedi 4 Juin 2016 à 18:21

    Je suis tout à fait d'accord avec toi. Les couvertures peuvent attirer mon oeil, surtout les couvertures en lien avec le XVIIIe siècle (une de mes périodes favorites). Je l'ai noté donc je le lirai, pour sûr ! :-)

      • Mardi 28 Février 2017 à 21:29

        Ah là là, je prêche une convertie, alors ! Qu'est-ce que les couvertures des livres traitant du XVIIIème siècle peuvent être belles, tu as bien raison ! sarcastic

        Bon, celui-là se passe bien plus près de nous, puisque c'est le début du XXème siècle, les dernières années avant la Première Guerre Mondiale puis une relation du conflit, mais ça reste un roman efficace avec une ambiance anglaise plutôt pas mal restituée ! 

    4
    Cathy
    Mardi 28 Février 2017 à 20:57

    Il faudrait une suite à "Mes Sœurs et Moi" car ca manque!!!yes

     

      • Mardi 28 Février 2017 à 21:30

        Je suis d'accord avec toi, ça serait bien une suite. Dommage, je ne crois pas que ce soit en projet ! Mais c'est un livre que je lirais avec plaisir s'il existait. ^^

    5
    Marthe
    Dimanche 8 Juillet 2018 à 19:59

    Je voudrais savoir si Judith Lennox a écrit une suite au livre : "Mes soeurs et moi". Il mérite une suite car nous restons sur notre faim en fermant le livre !!! Merci

      • Lundi 9 Juillet 2018 à 11:19

        Oui, en effet... J'avais ressenti la même chose en fermant le livre : c'était presque une ouverture, qui appelait autre chose mais, à ma connaissance, il n'y a pas de suite à ce roman. Pourtant, ça pourrait être super sympa ! yes

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