• «  Le monde se remet toujours debout. Quoi qu'il arrive, il renaît de ses cendres. Les catastrophes ont été de tous les temps. »

    Les Nuits Blanches de Lena ; Madeleine Mansiet-Berthaud

     

    Publié en 2016

    Editions Presses de la Cité

    493 pages 

    Résumé : 

    A la suite d'une déception amoureuse, Lena décide de tout quitter : Paris, son métier d'infirmière à l'Hôtel-Dieu. Encouragée en cela par sa mère, d'origine russe, la jeune femme part pour Saint-Pétersbourg au printemps 1914. Dans la famille du prince Noboranski, où elle est préceptrice, Lena découvre le faste et la misère de la Russie des tsars. En même temps qu'elle éprouve une attraction croissante pour ce pays qui fut celui de son arrière grand-père cosaque, elle voit venir les troubles annonciateurs d'une révolution. La jeune femme est en proie à de nombreux doutes. Saura-t-elle résister au charme du prince, dont les sentiments se révèlent au grand jour ? Qui est ce mystérieux docteur Anton rencontré à l'hôpital, que l'on dit proche des bolcheviks ? Devrait-elle fuir ce vieux monde qui bascule sous ses yeux ? Le courage et l'amour vont lui apporter les réponses qu'elle attend...

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Au printemps 1914, Lena est une jeune parisienne, infirmière à l'Hôtel-Dieu. Elle fait la connaissance d'un jeune homme mais, suite à une déception amoureuse, la jeune femme décide, sur un coup de tête, de quitter la France pour la Russie, dont sa mère est originaire et qui a gardé une véritable nostalgie des années passées là-bas.
    A Saint-Pétersbourg, la capitale des tsars, Lena devient préceptrice auprès des enfants du ministre de la Justice, Boris Noboranski. Elle découvre un monde incroyable, figé dans des traditions et des convenances séculaires mais qui vacillent déjà depuis plusieurs années sur leurs bases, car le temps de la Russie des tsars est compté. Quelques mois plus tard, à la suite de l'attentat de Sarajevo, les puissances européennes sont entraînées par le jeu des alliances dans un conflit sanglant sans précédent, un conflit qui va fragiliser encore le grand empire des steppes jusqu'à conduire à une révolution dont le régime tsariste ne se relèvera pas et qui jettera des milliers de Russes sur les routes de l'exil, pour certains définitif.
    Mais lorsque Lena arrive en Russie, elle découvre un pays immense, grandiose, superbe, qui la séduit entièrement : les grandes étendues, les hivers spectaculaires, les étés où le soleil ne se couche pas (les fameuses nuits blanches), la grande ville du tsar Pierre Ier construite dans le delta marécageux de la Neva, les immenses palais aux façades colorées, les églises aux bulbes dorés...un pays où rien ne semble pouvoir changer jamais...
    Auprès des Noboranski, elle découvre le train de vie d'une famille princière russe au début du XXème siècle, une famille qui mène grand train et possède une flopée de serviteurs dévoués et de biens, une famille qui n'a jamais appris à compter parce qu'elle n'en a pas besoin et qui est proche de la famille impériale...une famille qui, malgré cela, a aussi connu les revers de ce bonheur qui semble complet, parce que Gricha, le petit héritier dont Lena devient la préceptrice, a hérité d'une maladie incurable qui obscurcit de culpabilité et de tristesse l'avenir de ses parents, Boris et Natalya. Petit à petit, Lena se fait une place dans cette famille, s'attache aux enfants et leur enseigne le français, l'écriture et les chiffres.
    Mais les nuages noirs s'amoncellent et bientôt, les Noboranski se trouvent à la croisée des chemins, obligés de faire un choix et de sauver leur peau, quand la Révolution bolchevique éclate au début de l'année 1917. Partir et risquer de ne plus jamais revoir la mère patrue ou rester et mettre en danger sa vie, voilà la douloureuse alternative de bien des familles bourgeoises ou nobles, prises dans un tourbillon qui les dépasse. Lena découvre alors les failles de ce grand pays qui l'a séduite, l'impuissance du tsar, la maladie du petit tsarévitch Alexis, la nationalité de l'impératrice, allemande de naissance, ce qui provoque une certaine crispation en pleine guerre contre l'Allemagne, la pauvreté du peuple et le dénuement des paysans, certes délivrés du servage depuis 1861 mais laissés pour certains livrés à eux-mêmes dans une extrême pauvreté et souvent tributaires de leurs maîtres malgré leur liberté toute neuve... un pays à bout de souffle et au système obsolète et gangréné par les revendications d'un peuple prêt à tout. Alors, bien que Française, Lena devra elle aussi faire des choix, soutenir les Noboranski auxquels elle s'est attachée, mais aussi se sauver elle-même, ce qui ne sera pas évident, d'autant plus qu'en Russie, elle a posé les yeux sur le séduisant docteur Anton, qui est loin de la laisser indifférente et qui, par son mystère savemment cultivé, ne cesse de la faire s'interroger...

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    La ville de Saint-Pétersbourg sous la neige. 


    Les Nuits Blanches de Lena est un roman extrêmement dépaysant qui nous emmène à la rencontre d'un pays sur le point de basculer radicalement, un pays fragile mais encore grandiose, qui parvient à sauver la face jusqu'au bout, derrière les riches façades de ses palais et à l'ombre de ses églises richement décorées. Dans le sillage de l'héroïne, vraiment attachante, on découvre la vie de ces grands aristocrates qui, pour la plupart, ne voient pas le cataclysme qui les menace ou, pour les plus clairvoyants, le pressentent tout en étant impuissants. Au sein de la famille Noboranski, Lena côtoie le prince Boris, ministre de Nicolas II qui assiste aux premières loges au naufrage du tsar, miné par la maladie de son unique fils, sous l'influence de Raspoutine et incapable de mener à bien des réformes dont le pays aurait pourtant grand besoin et qui s'enlise en plus dans un conflit hors normes ; elle a aussi l'occasion d'échanger avec la princesse douairière, Anna, particulièrement fine et qui, sentant approcher la catastrophe, tente comme elle peut d'accoutumer les siens à une vie bien différente de celle qu'ils ont menée jusque là.
    Avec ce roman j'ai littéralement voyagé et j'ai eu l'impression moi aussi de découvrir cette Russie si proche et pourtant si différente, aux coutumes et traditions marquées par l'Orient comme par l'Europe. C'était dépaysant et en cela, le roman comble parfaitement bien nos attentes.
    Les personnages eux aussi sont attachants... Lena m'a beaucoup plu même si ce n'était pas forcément évident au départ. Finalement, son caractère s'affirme au fur et à mesure que se développe le récit et on découvre une jeune femme équilibrée, qui sait ce qu'elle veut et prend les bonnes décisions au bon moment. Les Noboranski eux aussi sont attachants à leur manière, même Natalya qui peut parfois se montrer excessive voire désagréable...j'ai aimé le personnage de Gricha, qui a sept ou huit ans quand Lena arrive en Russie mais qui aborde déjà la vie du haut d'une maturité que lui confère sa maladie, qu'il sait incurable et qui le handicape quotidiennement. J'ai trouvé ce petit garçon vraiment touchant et il incarne bien l'injustice de la maladie touchant un enfant condamné à ne jamais connaître l'insouciance propre à cet âge de la vie. J'ai beaucoup aimé Anna également, cette femme d'une autre époque mais qui est la seule à s'efforcer de modifier son train de vie et ses privilèges, pressentant que la classe aisée n'en profite plus pour bien longtemps. Quant au prince Boris, il ne laissera assurément pas indifférentes les lectrices de ce roman, comme il attire vaguement Lena à son arrivée sous son toit.
    J'ai été un peu moins séduite par le style de l'auteure, surtout les dialogues. J'aime quand ceux-ci sont fluides ce qui n'est pas vraiment le cas ici...on ressent beaucoup trop qu'ils sont écrits et on peine à les imaginer dans la bouche de quelqu'un, ils ne sont pas vraiment naturels, ce qui est dommage parce que cela m'a empêchée d'apprécier d'emblée ma lecture. Il m'a fallu un petit moment avant de m'habituer et de passer au-dessus de cette petite faiblesse.
    Dans l'ensemble cependant, Les Nuits Blanches de Lena est un roman historique comme je les aime et qui a en plus eu le mérite de me faire voyager. On sent que Madeleine Mansiet-Berthaud s'est documentée et renseignée pour nous livrer la meilleure description possible de Saint-Pétersbourg et du mode de vie de ses habitants au début du XXème siècle et les faits historiques ne sont pas laissés de côté, loin de là. On les vit avec ferveur, aux côtés des personnages. Je ne connais pas suffisamment l'histoire russe pour savoir si l'auteure a pris quelques libertés -dans l'ensemble je ne crois pas, à l'exception du prince Noboranski, ministre du tsar, alors que c'est un personnage fictif- ou des raccourcis, mais j'ai trouvé que cela apportait un plus au récit, une teneur certaine et bienvenue qui l'empêche justement de tomber dans le gros cliché de la romance historique un peu trop évidente. Je ne vais pas vous cacher que les sentiments des personnages sont malgré tout au centre du récit, mais celui-ci ne tourne pas qu'autour de ça ce qui est malgré tout appréciable. Il aurait été dommage que l'auteure ne se serve pas du contexte riche dans lequel elle situe son intrigue et qui la sert parfaitement bien.
    Ce roman n'a pas été un coup de cœur, il m'a manqué d'être immédiatement séduite par la plume de l'auteure mais j'ai trouvé ce récit vraiment très beau, plein de souffle et de vie. Il nous fait passer par tout un tas d'émotions, du début à la fin et là où Madeleine Mansiet-Berthaud aurait pu céder à la facilité, elle ne le fait pas, ce qui est tout à son honneur. Pour moi, ce roman est une réussite malgré quelques petites inégalités. Si vous aimez les romans historiques, comme moi et si vous aimez vous dépayser, alors ce roman est fait pour vous.

    En Bref :

    Les + : une belle histoire, dans le sillage d'une héroïne attachante, Lena, attachée à deux patries et qui découvre, fascinée, la grande Russie des tsars. Le roman est dépaysant, plein de souffle et de vie. 
    Les - :
    des dialogues pas vraiment naturels, des passages un peu lourds...

     

    Les Enquêtes de Quentin du Mesnil, Maître d'Hôtel à la Cour de François Ier, tome 1, Le Sang de l'Hermine ; Michèle Barrière 

    Thème de décembre, « Voyage chez Baba Yaga », 12/12


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  • «  Pour Milka, qui avait vécu presque toute sa vie derrière les grilles sculptées des fenêtre de la maison de Chernek, le Blecinga devint un pays enchanté où elle était entourée d'êtres dont elle n'avait jamais pu imaginer l'existence. »

    Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie ; Katarina Mazetti

     

    Publié en 2008 en Suède ; en 2015 en France (pour la présente édition) 

    Titre original : Blandat Blod 

    Editions Babel 

    304 pages 

    Résumé :

    Sur une île du Sud de la Suède au Xe siècle, un homme vit seul à la ferme avec ses deux fils. Le chemin de ceux-ci est tout tracé : naviguer au loin, pour guerroyer au-delà des mers à l'Ouest ou pour faire commerce sur les voies fluviales de l'Est. 
    De l'autre côté de la Baltique, à Kiev, vivent un marchand de soie et sa famille. Radoslav rêve de devenir soldat, sa sœur Milka est une jeune fille raffinée qui joue avec ses deux esclaves : Petite Marmite à la peau sombre et Poisson d'Or aux yeux bridés. Quand la belle ville d'Orient tombe aux mains des pillards, Milka et Radoslav trouvent refuge auprès de rustres navigateurs venus du Nord. Dès lors le destin des deux familles est à jamais mêlé. 
    Pour écrire ce roman historique plein de suspense, Katarina Mazetti s'est appuyée sur une documentation solide. Mêlant l'humour franc qu'on lui connaît à un goût pour la poésie et la légende qu'on lui découvre, elle réussit une enthousiasmante variation sur le choc des cultures. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Au Xème siècle, quelque part sur une petite île de Scandinavie, Säbjörn est un modeste fermier et constructeur de bateaux. Il a deux fils, Svarte et Kåre qui, une fois adolescents, quittent la ferme paternelle pour parcourir le vaste monde. Svarte, le fils aîné, qui a hérité de la beauté de sa mère, devient commerçant tandis que son cadet s'embarque un peu par hasard et connaîtra bien des revers avant de pouvoir revenir au bercail.
    De l'autre côté de la Baltique, il y'a quelques comptoirs boueux avec lesquels les Vikings font des échanges. En descendant plus dans les terres, au sud, on découvre le territoire de la Rus et la richissime ville de Kiev, sur les bords du Dniepr. C'est là que Svarte va rencontrer la fille d'un marchand de soieries, Milka, une petite brune au teint pâle qui le séduit immédiatement et qui a donné son nom au roman : la fille de soie.
    Très superficiellement, ce qui m'a d'abord attirée dans ce roman, c'est son titre et sa très jolie couverture qui évoque un vitrail. Ensuite, le résumé a fini de m'intriguer et a emporté mes dernières hésitations : ce voyage dans la Scandinavie du Xème siècle et sur la route des Varègues, qui s'enfonce alors dans les territoires d'Europe de l'est, ne pouvait que me plaire. Pensant que l'auteure, Katarina Mazetti, écrivait surtout des romans contemporains -j'avais en tête Le Mec de la Tombe d'à côté, par exemple-, j'ai été surprise de voir que Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie était un roman historique mais cela n'était pas pour me déplaire, au contraire.
    Je m'y suis plongée avec, sinon beaucoup d'attentes, du moins beaucoup de curiosité. Je sais que certains lecteurs ont été déçus et j'ai l'impression que ce livre suscite des avis assez tranchés. On aime, ou pas. En ce qui me concerne, j'ai vraiment beaucoup aimé ce roman qui n'est pas, pour moi, un roman historique comme les autres. Très onirique et dépaysant, ce roman est pour moi, un mélange entre une saga nordique et un conte oriental. Je me suis plongée dedans comme on s'immerge dans une histoire merveilleuse et, en même temps, Katarina Mazetti apporte un éclairage bienvenu sur la société de l'époque, ce qui est finalement typique du roman historique. Vous l'aurez compris, Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie est un livre hors normes et assez inclassable, à bien des égards. Pour autant, j'ai été absolument séduite par cette forme qui n'appartient finalement à aucun genre défini et qui nous fait naviguer un peu dans le flou. Et cela, finalement, correspond bien à une époque dont on ne sait que peu de choses et qui reste assez mystérieuse.
    Cela dit, c'est une société viking débarrassée de ses clichés que Katarina Mazetti nous présente, une société du début du Moyen Âge qui ne va pas tarder à se structurer et à se christianiser, notamment du fait des contacts nourris avec les peuples d'Europe de l'est, qui le sont déjà. Nous sommes dans les années 960-970 et à ce moment-là, en Occident, une dynastie d'origine scandinave règne sur la Normandie depuis 911. Les conquêtes s'arrêtent progressivement, les échanges commerciaux deviennent de plus en plus importants. En Scandinavie, les habitants ne sont pas tous d'imposants géants qui ne pensent qu'à se battre sur leurs drakkars, une hache à la main. On rencontre de modestes fermiers, qui cultivent leurs lopins de terre, des artisans, des marchands, des religieux (devins, prêtresses comme la mystérieuse Arnlög etc). La société viking n'est pas bien différente de celles des autres pays à l'époque, elle est en train de se développer doucement autour des mêmes couches sociales qu'ailleurs.
    Mais dans ce roman, fortement imprégné d'une culture et d'une époque, Katarina Mazetti aborde aussi des sujets bien plus universaux et qui ne concernent pas forcément les hommes du Xème siècle uniquement. Säbjörn le pauvre fermier doit faire face à l'absence de ses proches, parfois incomprise. Svarte et Kåre sont deux frères que la disparité d'affection des parents a fini par opposer, l'aîné cherchant à égaler le cadet qu'il sent plus choyé et plus écouté. Enfin, à travers les personnages de Milka et de ses deux petites esclaves, Petite Marmite et Poisson d'Or (qui sont respectivement originaires d'Afrique du Nord et d'Asie), le roman est l'occasion d'aborder l'arrachement à la terre natale et le manque que cela peut occasionner, le deuil pourrait-on dire, de ce qui a fait toute une vie et disparaît soudainement.
    Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie est un roman très vivant où tout un tas de cultures se rencontrent et se côtoient, loin de cet enclavement et de cette autarcie que l'on prête souvent au Moyen Âge. C'est aussi un roman bien plus universel qu'on ne pourrait le croire et qui peut trouver une certaine résonance chez nous, plus de mille ans plus tard, preuve que les préoccupations et les sentiments humains n'ont pas beaucoup changé depuis des siècles. C'est cela aussi qui m'a évoqué le conte, dans ce livre, l'impression qu'il a été écrit pour chacun d'entre nous tout en restant, aussi, un hommage à une civilisation qui a fini par se diluer progressivement dans une autre.
    Je peux comprendre que sa forme surprenne beaucoup et que le roman suscite des avis tranchés. On aime, ou pas mais l'essentiel est de le lire. Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie fera sortir chacun d'entre nous de notre zone de confort pour nous emporter dans un monde révolu mais que Katarina Mazetti, grâce à de longues et solides recherches, fait revivre dans ce roman. Pour moi, il est justement dosé, il n'en fallait pas plus, il n'en fallait pas moins et ce fut une bonne surprise, un point de départ, aussi : après cette lecture, j'ai très envie de découvrir les vraies sagas nordiques qui semblent avoir beaucoup inspiré l'auteure.
    Je peux donc dire que cette lecture a été une véritable réussite et ce n'est qu'à regret que j'ai quitté ses personnages et les paysages de cette Scandinavie très sauvage du début du Moyen Âge.

    En Bref :

    Les + : une histoire inclassable, pleine de magie mais en même temps appuyée sur des recherches historiques solides. 
    Les - : Aucun. 


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  • [CONSEILS LECTURE] Les livres lus en 2019 que je vous recommande

     

    [CONSEILS LECTURE] Les livres lus en 2019 que je vous recommande

     

     

    Couverture La vérité à propos d'Alice

     

     

     

     

     La vérité à propos d'Alice, Katherine Webb, 2016, 667 p.

     

     

     

     

    Lu entre la fin 2018 et les premiers jours de janvier, La Vérité à propos d'Alice a été une bonne surprise. Le livre dormait dans ma PAL depuis un bon moment, je ne me décidais pas à l'en sortir et j'ai bien eu tort. Quelle histoire ! J'avais déjà apprécié ma lecture de L'Héritage et de Pressentiments, mais La Vérité à propos d'Alice est certainement le meilleur de Katherine Webb... Le contexte historique m'a beaucoup plu, par exemple : on parle beaucoup de l'époque victorienne, mais nettement moins de l'époque géorgienne, qui la précède, hormis peut-être chez Jane Austen. Et justement, les paysages m'ont parfois évoqué ceux des grandes sagas « austenniennes », bien que les intrigues soient éloignées de mille lieues. Dans ce roman, il y'a des secrets, des non-dits, de l'amour et beaucoup d'émotion. Pour moi, c'est un roman excellent, qui m'a parfois mise un peu mal à l'aise (l'ambiance est lourde par moments) mais qui, dans l'ensemble, a su convaincre la lectrice avertie de romans à secrets que je suis. 

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    Résultat de recherche d'images pour "le ciel de darjeeling" 

     

     

     Le Ciel de Darjeeling, Nicole Vosseler, 2018, 427 p.

     

     

     

     

     

    Qu'est-ce qui m'a plu dans ce roman ? Beaucoup de choses. Ce fut le premier coup de cœur de l'année et surtout, le premier depuis un bon moment. Je ne sais pas pourquoi je l'ai eu pour ce roman en particulier et pas pour un autre, mais ce qui m'a le plus plu dans le roman de Nicole Vosseler, c'est qu'il m'a vraiment fait voyager et il m'a dépaysée. J'affectionne les romans qui se passent en Inde, toutes époques confondues. Et ce roman ne m'a pas déçue, au contraire, d'autant plus que l'auteure ne se contente pas d'écrire une bête romance. Certes, il y'en a, je ne vais pas vous mentir, comme souvent dans ce genre de livres...mais Nicole Vosseler n'oublie pas de nous parler d'Histoire aussi et son roman nous montre bien toute la complexité de l'Inde coloniale, écartelée entre traditions ancestrales et coutumes britanniques souvent mal acceptées. Au milieu de cela, deux jeunes gens aux passés respectifs peu évidents se rencontrent et s'apprivoisent...la romance qui naît entre Ian et Helena n'est pas fleur bleue, elle n'est pas dégoulinante de bons sentiments. Ce roman m'a transportée. 

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    Le Chagrin des Vivants, Anna Hope, 2017, 432 p.

     

     

     

     

     

    Avec ce roman lu en début d'année, je découvrais Anna Hope, après tout le monde, comme c'est souvent le cas me concernant, d'ailleurs. Je me suis aperçue que je faisais partie de ces lecteurs qui se méfient du phénomène. Souvent, là où tout le monde a été conquis, je ne le suis pas...En général, j'aime laisser passer l’effervescence et tant pis si je me lance trois ou quatre ans après tout le monde. Avec Anna Hope et ce roman qui traite de l'après-guerre de Quatorze ans et notamment le rapatriement en Angleterre du Soldat Inconnu, en 1920, je me suis pris une claque monumentale. Quel roman : je l'ai lu d'une traite, en retenant mon souffle. Je n'ai pas vu les quatre-cent-trente pages passer, je les ai lues en vingt-quatre heures à peine. Je n'ai pas eu de véritable coup de cœur pour ce roman mais il fait assurément partie de ces livres lus en 2019 que j'ai envie de vous conseiller, si vous ne l'avez pas encore lu. C'est fort et intense et Anna Hope décrit merveilleusement bien le désarroi et la solitude de ceux qui restent, ce fameux chagrin des vivants qui donne son titre français au roman. Et c'est vrai, quand on y pense, on songe souvent, en cas de conflit, à ceux qui y laissent leur vie...mais ceux qui restent ou qui reviennent...de quoi est fait leur quotidien avec l'absence lancinante d'un être aimé, mort dans de telles circonstances ? Ce roman est poignant et, pour moi, c'est une petite bombe littéraire, ce genre de livres qui secoue et ne laisse pas indifférent. 

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    Couverture La lanterne des morts  

     

     

    La Lanterne des Morts, Frédéric H. Fajardie, 2007, 472 p.

     

     

     

     

     

    Et voici le deuxième coup de cœur de l'année, pour un roman historique atypique mais particulièrement bien mené, qui m'a séduite de bout en bout. Je lis peu de romans sur la Révolution française, parce que c'est une époque extrêmement complexe et qui est souvent traitée de manière manichéenne et très uniforme. Aujourd'hui encore, nous sommes influencés par cette époque-là, cette décennie qui a changé entièrement la physionomie de la France, monarchie millénaire et qui devient soudain une République. Aujourd'hui, on parle à tort et à travers de la Révolution, on la convoque pour tout et rien et souvent, on n'y comprend rien. J'avais été stupéfaite, en étudiant cette époque à la fac, du discours de mon professeur, tellement différent de celui auquel j'avais eu affaire jusqu'ici et fortement instrumentalisé... La Révolution est une période de notre Histoire avec laquelle je ne me sens pas très à l'aise, peut-être parce qu'on l'encense trop en oubliant ses parts d'ombres...Ici, Fredéric Fajardie nous plonge en plein cœur des guerres de Vendée, dans le sillage d'un personnage principal charismatique, Valençay d'Adana. Ce que j'ai aimé dans ce roman, c'est que l'auteur brouille les cartes...l'humanité et le cœur ne sont pas forcément du côté de ceux que l'on pense, il n'y a aucun manichéisme dans ses personnages et ceux-ci sont très bien travaillés. Ce roman se lit avec autant de facilité qu'un bon film se regarde. J'ai beaucoup aimé cette lecture et le recommande sans hésiter à tous les amoureux de romans historiques. 

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    Couverture La confidente des morts  

     

     

    Adelia Aguilar, tome 1, La Confidente des Morts, Ariana Franklin, 2015, 519 p.

     

     

     

     

     

    Peut-être le titre ne vous dit rien, mais il ne faut pas s'arrêter à cela, je vous assure. En ce qui me concerne, c'est d'abord la jolie couverture qui m'a attirée (et toute la saga d'Ariana Franklin est aussi bien illustrée chez 10/18 !) puis j'ai lu le résumé et là, j'ai été carrément emballée. Une enquête policière, de la médecine légale en plein Moyen Âge, c'est original et je me suis laissée tenter...pour mon plus grand plaisir parce que j'ai beaucoup aimé ce premier tome qui m'a rappelé, par exemple, la saga Les Mystères de Druon de Brévaux, d'Andrea H. Japp. J'adore le Moyen Âge depuis longtemps, c'est une époque fascinante et j'ai aimé l'angle d'attaque d'Ariana Franklin, dans cette saga...On découvre un personnage atypique, Adelia, qui est une femme médecin, ce qui constitue alors, en plein XIIème siècle, un énorme paradoxe dans bien des pays d'Europe, où la médecine est une discipline interdite aux femmes...et pourtant, l'université de Salerne, en Sicile, enseigne aussi cette science aux femmes et forme d'excellents praticiens, à l'image de cette Adelia, pas forcément attachante au premier abord mais assez fascinante. Ce premier tome m'a franchement convaincue et m'a donné envie de me lancer, évidemment, dans la suite de la saga, ce que je ne manquerai pas de faire en 2020. 

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    L'Île aux Mille Sources, Sarah Lark, 2019, 464 p.

     

     

     

     

     

    Si je vous dis que c'est peut-être le livre que j'attendais le plus cette année, vous me croyez ? Ca fait plusieurs années maintenant que je suis Sarah Lark, d'abord via sa trilogie Le Pays du Nuage Blanc puis, plus récemment, avec Les Rives de la Terre Lointaine. L'Île aux Mille Sources amorce une nouvelle saga dont la reine du roman d'évasion a le secret et, après l'Océanie du XIXème siècle, elle nous emmène dans les Caraïbes du XVIIIème siècle, ce qui a achevé de me convaincre que ce roman était fait pour moi. Et effectivement, quel bon moment j'ai passé en compagnie de Nora ! Ce roman était dépaysant et rafraîchissant, je l'ai beaucoup aimé. Encore une fois, romance et Histoire se mêle habilement et Sarah Lark aborde un pan peu glorieux de l'Histoire du monde, l'esclavage... Elle s'y prend plutôt bien et j'ai trouvé ce roman tout à fait pertinent et vraisemblable. Une très bonne lecture. 

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    Le Sans Dieu ; Virginie Caillé-Bastide  

     

     

    Le Sans Dieu, Virginie Caillé-Bastide, 2017, 336 p.

     

     

     

     

     

    Dans ce roman d'aventures et de piraterie, je suis repartie au cœur d'une époque que j'affectionne tout particulièrement, le XVIIIème siècle. J'ai dévoré ce roman, je l'ai beaucoup aimé et passée la première surprise occasionnée par la langue utilisée par l'auteure, j'ai été totalement emportée...Quelle histoire, franchement ! Ce roman est un superbe roman historique, enlevé, plein de fougue et plein de verve et qui, en plus, fait réfléchir sur l'humain. Ces marins solitaires, en dehors de toutes lois, de toute société et qui en recréent une bien à eux sur les mers, faisant parfois régner la terreur, qui sont-ils au fond, sinon des hommes qui parfois ont souffert et n'ont pas eu le choix ? Je recommande chaleureusement ce roman parce que c'est une lecture forte et qui ne laisse assurément pas indifférent. 

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    La Vallée des Poupées ; Jacqueline Susann 

     

     

    La Vallée des Poupées, Jacqueline Susann, 2016, 480 pages

     

     

     

     

     

    Au mois de juillet, la couverture estivale et légèrement rétro de ce roman m'a attirée, je me suis dit que c'était parfait pour la saison, tout ça...Mais attention...La Vallée des Poupées est un roman bien plus sombre et torturé que sa couverture ou même son titre peuvent le laisser supposer. Ces fameuses poupées, ce ne sont pas les jeunes femmes comme on pourrait le penser, mais les pilules et autres cachets avec lesquels elles s'étourdissent. Des années 1940 aux années 1960, c'est le destin de trois jeunes femmes, Anne, Nelly et Jennifer que nous raconte Jacqueline Susann. Elles sont de purs produits de cette jeunesse d'après-guerre, vivant dans un contexte économique florissant, jeunes, ne demandant qu'à brûler la vie par les deux bouts, ce qu'elles vont faire et bien faire. J'ai lu ce roman avec une certaine fascination parce que la vie des trois héroïnes est extraordinaire mais, en même temps, on n'en voudrait pour rien au monde ! Jacqueline Susann croque un portrait brut, cru et sans concession de sa propre génération. On découvre que ces années-là sous un autre jour, bien moins prude et réservé...le roman de Susann fut malgré tout censuré et on a l'impression, même encore aujourd'hui, de se plonger en quelque sorte dans l'interdit... J'ai aussi eu le sentiment de lire un classique du XXème siècle américain, un peu comme Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, par exemple. Un de ces romans qui est à lire au moins une fois. 

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    Ce que le Jour doit à la Nuit, Yasmina Khadra, 2014, 441 p.

     

     

     

     

     

    La guerre d'Algérie est une époque que je connais mal et peu. C'est surtout une période sensible de notre Histoire, qui met fin dans le sang et les larmes à une politique de colonisation qui met mal à l'aise aujourd'hui et peut provoquer un sentiment de honte. Est-ce pour autant qu'il faut détourner le regard et faire comme si cela n'avait jamais existé ? La guerre d'Algérie est une tâche douloureuse, pour les Français comme pour les Algériens, qui ont cohabité durant des décennies, tant bien que mal, avant de se déchirer. Dans son roman, Yasmina Khadra raconte le destin du jeune Younès, né algérien, fils de paysans pauvres obligés de quitter leurs terres et de s'installer en ville. Mais élevé par son oncle, pharmacien à Oran, le jeune homme l'est comme un jeune Français et côtoie la forte communauté française de la ville. Quand éclate la guerre dans les années 1950, il se trouve écartelé entre sa fidélité viscérale à sa terre natale et son éducation presque coloniale. Ce roman est une fiction mais raconte un drame qui a dû être celui de centaines de gens. Yasmina Khadra ne diabolise pas, il n'encense pas non plus. Il raconte seulement une période peu évidente et franchement pas belle, comme toutes les guerres. Mais surtout, c'est d'une plume magnifique qu'il le fait et qui m'a entièrement chamboulée. Ce roman n'est pas un simple coup de cœur, c'est plus que ça. Il m'a extrêmement émue, il m'a profondément touchée et m'a fait verser des torrents de larmes, ce qui est rare pour moi, en général. Ce roman est magnifique, oui, n'ayons pas peur de le dire, aussi beau que son titre. J'en suis ressortie complètement bouleversée par cette intrigue qui, au départ, peut apparaître bien simple voire manichéenne mais qui n'est finalement, ni plus ni moins, que le récit d'un drame commun de deux nations qui n'ont plus jamais réussi à s'entendre par la suite. Un roman devenu culte, pour moi. 

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    Gabriële ; Anne et Claire Berest  

     

     

    Gabriële, Anne et Claire Berest, 2018, 480 p.

     

     

     

     

     

    Ce roman, c'est une aïeule inconnue racontée par ses arrière-petite-filles, parties sur ses traces une fois devenues adultes, alors qu'on leur a caché pendant leur enfance l'existence de cette femme, Gabriële Buffet, la mère de leur propre grand-père Vincenzo Picabia. Picabia ? Vous connaissez peut-être ce nom ou alors, il vous évoque vaguement quelque chose, comme à moi quand j'ai démarré cette lecture, dans l'été. Ce nom aux sonorités espagnoles, c'est celui du peintre surréaliste Francis Picabia, ami d’Apollinaire ou encore de Marcel Duchamp. Et son épouse s'appelait Gabriële Buffet. Anticonformiste, féministe, artiste dans l'âme, femme libre, Gabriële est un personnage étrange, une femme hors norme en ce début de XXème siècle. J'ai aimé la découvrir sous la plume d'Anne et Claire Berest, deux sœurs unies par une même motivation : partir à la recherche de leurs racines. Gabriêle est un roman assez particulier, qui n'est ni vraiment une biographie ni complètement un roman...s'il est inclassable, j'ai malgré tout passé un excellent moment et j'ai découvert avec intérêt et plaisir la plume de la romancière Claire Berest, que je ne connaissais pas et qui partage ici la plume avec sa sœur, Anne, moins connue. C'est aussi une expérience qui les a réunies qu'elles nous font partager et elles nous emmènent sur les traces de cette Gabriële Buffet, née à la fin du XIXème siècle et morte il n'y a pas si longtemps, en 1985, une femme qui a inspiré les artistes de cette époque d'émulation que furent les années 1910-1920... Une belle lecture à recommander à ceux qui s'intéressent à l'art, sans hésiter. Et autres aussi, bien sûr. 

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    Couverture L'Amie prodigieuse, tome 1 

     

     

     L'Amie Prodigieuse, Elena Ferrante, 2016, 430 p.

     

     

     

     

     

    Comme dit plus haut, je fais partie de ces lecteurs qui fuient le phénomène. En ce qui concerne L'Amie Prodigieuse, je n'ai pas changé mes habitudes et j'ai laissé passer un peu de temps avant de le lire à mon tour. Je l'ai vue des mois durant sur Instagram et sur les blogs, cette saga. J'ai ajouté le premier tome à ma PAL un peu par hasard, sans véritable désir de le lire, mais malgré tout curieuse, au vu de l'engouement soulevé par cette saga et le mystère qui entoure l’identité de son auteure. Je crois que ce qui m'a finalement totalement convaincue, c'est l'attirance que j'ai pour l'Italie et l'envie de lire autre chose que des romans se passant à la Renaissance ou à l'époque des Borgia. Là, c'est une histoire bien plus contemporaine que nous raconte Elena Ferrante, puisque les quatre tomes de sa saga s'échelonnent entre les années 1950 et les années 2000. J'ai lu ce roman rapidement, en quelques jours, avec facilité et plaisir parce que j'ai trouvé cette histoire touchante, mignonne et grave à la fois. L'enfance de Lila et Lenù, dans la Naples des années 1950, ni pauvre ni riche, est ancrée dans une époque, un pays et des traditions, mais c'est aussi l'enfance commune à tous, leurs préoccupations étant, somme toute, les mêmes que les nôtres. J'ai lu ce premier tome avec le sentiment d'être partie prenante de cette histoire. J'ai découvert une plume et un univers qui m'ont plu, m'ont vraiment séduite. 

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    Couverture Le ciel de la chapelle Sixtine 

     

     

    Le Ciel de la Chapelle Sixtine, Leon Morell, 2015, 609 p.

     

     

     

     

     

    Le Ciel de la Chapelle Sixtine est un roman qui saura séduire tous ceux qui aiment l'art et s'extasient devant les œuvres des grands maîtres. Dans ce roman très documenté de l'Allemand Leon Morell, on part à la découverte de l'une des œuvres majeures du grand Michel-Ange, le plafond de la chapelle Sixtine que le pape Jules II lui commande au début du XVIème siècle. Le héros n'est pas Michel-Ange à proprement parler mais un jeune apprenti, Aurelio, qui découvre, aussi fasciné que nous, l'étendue du talent de son maître. 
    J'ai trouvé ce roman absolument passionnant parce qu'il fait la part belle à la conception de cette oeuvre majeure et ambitieuse et nous permet de quasiment toucher du doigt la méthode de Michel-Ange, sculpteur de formation et qui devient fresquiste à la demande du souverain pontife. L'immense Jugement Dernier prend forme sous nos yeux fascinés et ce n'est qu'avec beaucoup de regret que l'on quitte un roman comme celui-ci qui, au-delà de cette oeuvre monumentale et qui fait partie de notre patrimoine à tous, ne néglige pas le contexte historique très riche de cette époque-là. 

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    Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie ; Katarina Mazetti 

     

     

    Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie, Katarina Mazetti, 2015, 304 p.

     

     

     

     

    Impossible de ne pas inclure ce livre dans ma liste de recommandations de l'année ! Le Viking qui voulait épouser la Fille de Soie est un roman absolument hors normes et inclassable, bien qu'il soit présenté comme un roman historique. Effectivement, il l'est, puisque l'auteure nous propose une intrigue qui se déroule sur une petite île perdue de Scandinavie, au Xème siècle. Nous sommes au Moyen Âge, à une époque où la société viking commence à se structurer doucement...les incursions à bord des fameux drakkars sont moins fréquentes et surtout, les Vikings se sont installés en Europe de l'Est, où ils ont fondé des comptoirs prospères, comme la future Novgorod. Entre la saga nordique et le conte oriental, ce roman m'a littéralement ravie. Pourquoi ? Comment ? Je n'en sais rien, je me suis contentée de me laisser porter mais ce fut une très bonne lecture que je ne peux pas ne pas recommander. 

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    [CONSEILS LECTURE] Les livres lus en 2019 que je vous recommande

     

     

     

     

     

    Marie-Antoinette l'Insoumise, Simone Bertière, 2003, 927 p.

     

     

     

     

     

    Vous connaissez mon intérêt, je devrais même dire ma passion pour la reine Marie-Antoinette, passion de laquelle découle mon amour absolu et inconditionnel pour le XVIIIème siècle. Il était donc obligatoire pour moi de lire cette biographie de référence écrite il y'a près de vingt ans par Simone Bertière, historienne qui a consacré une immense anthologie aux reines de France, d'Anne de Bretagne à Marie-Antoinette. Dans ce gros volume de près de mille pages, l'auteure, sans dénigrer mais sans encenser non plus, nous livre un portrait très humain d'une femme qui a été reine mais reste avant tout une femme, avec des qualités, des défauts, des failles et des limites. Cette biographie illustre bien les dangers de l’idolâtrie comme de la détestation qui, l'un comme l'autre, sont incompatibles avec le travail de l'historien. On sent bien sûr dans ce livre tout l'intérêt de Simone Bertière pour son objet d'étude et il est clair que Marie-Antoinette, à bien des égards, est un personnage fascinant. Mais l'auteure ne cherche pas à l'excuser ni à l'accuser de maux dont elle n'est pas coupable. C'est un portrait très juste qui nous est présenté de cette reine dont le destin tragique a forgé la légende. J'ai pris grand plaisir à lire cette biographie, même si elle n'est pas la première que je lis sur cette reine. Finalement, chaque auteur a son approche personnelle et celle de Simone Bertière est convaincante. Une lecture incontournable si vous aimez Marie-Antoinette et son époque. 

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    Couverture Le sceptre et le sang 

     

     

     

    Le Sceptre et le Sang : Rois et Reines dans la tourmente des deux guerres mondiales. Jean des Cars, 2014, 475 p.

     

     

     

     

    Il est difficile de concilier le travail rigoureux de l'historien et la chaleur du romancier mais je trouve que Jean des Cars concilie les deux avec brio. Le Sceptre et le Sang est encore une fois un coup de maître, qui nous fait découvrir les deux conflits mondiaux à travers un prisme inédit : celui des royautés européennes du début du XXème siècle, royautés qui vont basculer et vaciller et pour certaines, ne jamais se relever. Ce livre est ardu et technique mais passionnant pour tout ceux qui se passionnent pour l'Histoire. Volume particulièrement dense et riche qui ne laisse rien au hasard, servi par une bibliographie fiable et sérieuse, ce livre a au moins le mérite de ressusciter des Etats et des personnages entièrement oubliés, pour certains. C'est aussi retrouver la grandeur de la Russie des tsars, qui vit ses derniers moments, assister à la création de nouveaux états sur les cendres de monarchie pluriséculaires, comme l'Empire austro-hongrois. J'ai trouvé que c'était une bonne idée de parler des deux guerres mondiales de cette manière, en soulignant également l'implication forte et personnelle de certains monarques, comme les Windsor pendant la Seconde Guerre Mondiale, qui s'associent spontanément à la douleur du peuple britannique. A ne peut-être pas mettre entre toutes les mains : si vous n'êtes pas spécialement intéressé par l'Histoire, vous allez sûrement trouver ça barbant. Pour les autres, n'ayez pas peur si vous devez garder non loin de vous une généalogie européenne de l'époque, pour bien comprendre les liens familiaux entre les différents monarques : c'est nécessaire. Mais une fois tout bien assimilé, ce livre offre une lecture captivante et fluide. 

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  • [POUR ATTENDRE NOËL] #Gourmandises d'Europe : les desserts de Noël traditionnels

     

    [POUR ATTENDRE NOËL] #Gourmandises d'Europe : les desserts de Noël traditionnels

     

     

    Pour ce dernier dimanche avant Noël, je vous propose un article gourmand, avec un tour d'Europe des desserts d'Europe et, en prime, une recette de pain d'épices, parce que c'est trop bon et de saison... 

    ALLEMAGNE

    [POUR ATTENDRE NOËL] #Gourmandises d'Europe : les desserts de Noël traditionnels

    Le Christstollen : c'est le gâteau traditionnel allemand, dont l'origine est très ancienne. Le stollen est un gâteau traditionnellement consommé durant la période de l'Avent en Allemagne. Il s'agit en fait d'un pain garni de fruits secs et confits et farci d'une pâte d'amande.
    La première mention du stollen daterait de 1330, ce qui remonte à relativement loin, et pourtant ! La tradition du stollen remonterait à encore plus loin au Moyen Âge, ce qui en fait un gâteau très ancien. En effet, il servait déjà de symbole lors des fêtes païennes. A la suite de la christianisation de l'Europe il est devenu un symbole chrétien et a été parfois rebaptisé Christstollen, sa forme rappelant, pour certains, l'enfant Jésus nouveau-né dans ses langes. Les villes allemandes revendiquant la paternité du stollen sont nombreuses et ont même une version à leur nom, par exemple, le Dresdner Stollen ou encore, le Kölner Stollen.
    La recette originale ne comporte que de la farine, de l'eau, de la levure et de l'huile. Aujourd'hui, elle a évolué mais ceci s'est fait progressivement, au fil du temps. Ainsi, la découverte de nouveaux territoires, le commerce et les approvisionneents souvent incertains ont fait se greffer à la recette originale des épices et des fruits divers. La variété des ingrédients du stollen a souvent été liée, également, à la richesse de la famille qui le préparait.
    Comme aujourd'hui on peut trouver toute l'année un large panel de fruits confits on peut donc acheter des stollen farcis de citrons et oranges confits, de raisins secs macérés dans du rhum, des amandes effilées et entières, de la muscade, de la cannelle, de la vanille...En ce qui concerne la pâte d'amande, on la choisit de préférence très riche en fruit. Une partie de la pâte sert à faire le gâteau à proprement parler tandis que l'autre sert à le farcir.
    Bien que fabriqué, parfois, dès le mois de septembre, les puristes ne consommeront le stollen qu'à partir du mois de décembre uniquement. Le stollen peut se servir froid ou alors, tiédi au toaster, mais toujours coupé en très fines tranches.

    FRANCE

    [POUR ATTENDRE NOËL] #Gourmandises d'Europe : les desserts de Noël traditionnels

    La bûche de Noël : en France, mais aussi dans les pays francophones en général comme le Québec, le Liban, la Belgique, le Vietnam, on consomme à Noël la traditionnelle bûche de Noël. Cette tradition culinaire reproduit en fait un autre rite lié à la célébration du solstice d'hiver. C'est donc un héritage païen, attesté au Moyen Âge et qui s'est ensuite répandu dans toute l'Europe. Au Moyen Âge, également, on faisait brûler dans la cheminée une bûche, généralement très grosse, qui allait donc se consumer lentement. Avant d'être brûlée, cette bûche était bénie avec une brance de buis ou de laurier, conservée depuis la fête des Rameaux au début de l'année. L'idéal, c'était que cette bûche puisse brûler les douze jours du cycle, c'est-à-dire, jusqu'au Nouvel An (même si, au Moyen Âge, on ne fête pas le Premier de l'An le 1er janvier mais le jour de Pâques). Pour garantir une bonne récolte, on faisait parfois brûler une bûche issue d'un arbre fruitier et pour s'assurer de bonnes vendanges, on pouvait arroser la bûche, pendant sa combustion, avec du vin ou alorsn avec du sel, pour se prémunir des sorcières. On peut penser que le gâteau découle de ce rite-là également.
    En patois, dans certaines régions on disait en l'allumant «Cachafio, Bouto Fio», ce qui signifie « Cache le feu (ancien), allume le feu (nouveau); Dieu nous comble d'allégresse ». Le membre le plus ancien de la famille arrosait alors le bois soit de lait, soit de miel, en souvenir des délices de l'Eden, soit de vin, en souvenir de la vigne cultivée par Noé lors de la Rénovation du Monde.À Marseille, en portant la bûche de Noël, on ne cessait de crier en patois : « Noël vient, tout bien vient ». Ensuite, le plus âgé de la famille s'approchait de la bûche pour la bénir, y verser le vin en invoquant la Sainte-Trinité...et enfin, il y mettait le feu. En Bourgogne, avant d'allumer le feu, le père de famille ordonnait à l'un de ses enfants d'aller dans un coin de la chambre prier Dieu que la souche « donne des bonbons ». Pendant que l'enfant priait, les parents disposaient au bas de chaque bout de la bûche des petits paquets de sucreries et de confiseries que les enfants découvraient, émerveillés, pensant réellement que la souche avait donné ces sucreries. Le vigneron ou le paysan qui n'avaient pas de quoi offrir des bonbons à leurs enfants disposaient marrons, noix ou pruneaux sous la bûche.
    La disparition des grands âtres met fin à la coutume des grosses bûches qui y étaient brûlées pendant douze jours. La date de naissance du dessert qui les a remplacées reste par contre inconnue mais on suppose qu'elle est plutôt récente puisque certains évoquent la création de ce desser par un pâtissier en 1945 mais le gâteau roulé est tout de même traditionnel, du moins dans certaines région comme le Poitou-Charentes, depuis le XIXème siècle.
    La tradition veut qu'une véritable bûche de Noël soit réalisée avec de la crème au beurre mais depuis quelques années, la bûche glacée a fait sa grande apparition et séduit de plus en plus de gourmands. Pour ce qui est des parfums principaux, on retrouve la vanille, le praliné, la liqueur de Grand Marnier, le café, le chocolat et la fraise. La bûche, glacée ou non, doit petre décorée de divers attributs rappelant le folklore de Noël comme des petits Père Noël, des scies, des haches, des lutins, des champignons, en sucre ou en plastique.
    Selon les régions, on consomme aussi des desserts typiques, comme le kouglof alsacien, que la reine Marie-Antoinette aurait mis à la mode en devenant l'épouse du dauphin Louis-Auguste en 1770. En effet, c'était un gâteau très célèbre en Autriche mais dans d'autres pays de l'Est également. Et on ne peut pas ne pas parler de la tradition provençale des treize desserts (calenos). On retrouve également cette tradition des treize desserts au Portugal. En Provence, ils sont servis à la fin d'un gros repas servi lors de la vigile de la fête de Noël. Sont ainsi servis du nougat, de la fougasse, des dattes, des pâtes de fruits, des fruits confits...

    ANGLETERRE

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    Le Christmas Pudding : le gâteau emblématique anglais est le Christmas Pudding. Il est consommé le jour de Noël en Angleterre mais aussi en Irlande. Cela dit, il est originaire d'Angleterre et est parfois nommé « plum pudding », terme plus général qui peut désigner toutes sortes de puddings bouillis et contenant des fruits secs.
    Le pudding a pris sa forme finale dans l'Angleterre victorienne mais il existait depuis la fin du Moyen Âge, les années 1420 pour être précis. Le pudding ne fut d'abord pas une confiserie ou un dessert mais un moyen de préserver la viande à la fin de la saison. A cause des pénuries de fourrage, le bétail en surplus était abattu à la fin de l'été ou en début d'automne et la viande était alors stockée dans de grands plats à gâteaux remplis de fruits séchés qui agissaient alors comme des conservateurs pour la viande. On obtenait alors de grandes tartes de viande hachée et ces dernières pouvaient être utilisées pour nourrir un bon nombre de personnes, particulièrement à la période des fêtes. Cependant, l'ancêtre du pudding moderne était le Plum pottage, un brouet composé d'un mélange de viandes et de légumes, qui datait de l'époque romaine ! Ce brouet était préparé dans un grand chaudron et les ingrédients étaient mis à cuire longuement, avec des fruits séchés, du sucre et des épices.
    Les plus anciennes références au standing pottage remontent à 1420 et désignaient alors un plat à base de veau, de mouton, de poulet confit, épaissi avec du pain et rougi avec du bois de santal et des groseilles. Sous le règne d'Elizabeth Ière, des pruneaux furent ajoutés au plat originel. La recette devint si populaire que ce mets fut désormais connu sous le nom de « Plum pottage », « plum » signifiant « pruneaux » en anglais.
    Au XVIIIème siècle, les techniques de conservation des viandes ayant évolué, les ingrédients salés de la tarte de viande hachée et du Plum Pudding ont diminué tandis que le contenu plus doux et sucré a, lui, augmenté. On s'approche doucement du Pudding sucré qui se fixera sous l'ère victorienne, au XIXème siècle. Si la tarte de viande hachée a gardé son nom, le brouet originel, lui, se voit de plus en plus appelé « plum pudding ». Ce plat a toujours été servi lors de célébration mais, à l'origine, c'était lors de la Fête de la Moisson (Harvest Festival) et non pour les fêtes de Noël. Ce n'est qu'à partir des années 1830 que cette boule de farine, de graisse de rognon, de sucre et d'épices, rehaussée de houx, prit son apparence définitive et fut de plus en plus associée à Noël, qui retrouvait alors toute son importance en Angleterre, après un grand désamour de la population envers cette fête trop catholique, trop papiste. C'est Elisa Acton qui fut la première à le désigner comme Christmas Pudding dans son livre de cuisine.
    En ce qui concerne la recette actuelle, de nombreuses familles ont la leur propre et celles qui procurent le plus de fierté sont bien sûr celles qui ont été transmises de génération en génération. Ces recettes utilisent des ingrédients qui étaient traditionnellement chers et luxueux comme les aromates doux, qui sont particulièrement importants pour développer l'arôme si particulier du Christmas Pudding. Ce dernier est un pudding lourd, cuit à la vapeur avec des fruits secs, des noix et généralement conçu avec de la graisse de rognon ( ! ). Il a souvent une apparence sombre voire complètement noire, conséquence de l'utilisation, dans l'élaboration du gâteau, du sucre brun et de mélasse noire. Le mélange peut être humidifié avec du jus d'agrumes, du Cognac ou d'autres alcools (certaines recettes utilisent de la bière, par exemple).
    Traditionnellement, le pudding était bouillis dans un tissus et étaient bien souvent ronds mais, depuis le début du XXème siècle, ils sont le plus souvent préparés dans des jattes. Généralement, on commence à préparer le Christmas Pudding durant le Stir-up Sunday, le dimanche du mélange, cinq semaines avant Noël. Il demande plusieurs heures de cuisson à la vapeur, mais cette durée peut être raccourcie si l'on utilise une cocotte-minute et sans altérer la qualité du dessert. Ensuite, au moment des fêtes et juste avant le service, le gâteau est réchauffé à la vapeur et servi avec du cognac flambé. Il est traditionnellement décoré de feuilles de houx.
    Le pudding est entouré de traditions...il doit être préparé cinq semaines avant la célébration de Noël, chaque membre de la famille doit le remuer ou tout au moins, chaque enfant, et faire un voeu par la même occasion, et, parfois, on incluait au pudding des petites pièces de monnaie qui étaient ensuite conservées par celui qui les trouvaient dans sa part de gâteau. La pièce de monnaie trouvée dans le Christmas Pudding était sensée apporter la richesse dans l'année à venir. Mais cette pratique a ensuite disparu car, lorsque les pièces d'argent véritables se sont faites plus rares, on craignait que les pièces faites en alliage ne viennent gâter le dessert. D'autres petits symboles de bonne fortune pouvaient être inclus au gâteau comme un petit os de poulet en forme de V (le bréchet, qui porte bonheur), un dé à coudre en argent ou une ancre, pour symboliser le retour au port en toute sécurité.
    Il est très facile de conserver le pudding et, dans certaines familles, on conserve ce gâteau de Noël pour le manger à un autre moment de l'année, à Pâques, par exemple.

    ITALIE

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    Le panettone : il s'agit d'une brioche fourrée de raisins secs, fruits confits et zestes d'agrumes. C'est le gâteau traditionnel des habitants de la Lombardie, mais aussi du Milanais et du Piémont. Sa dégustation fait partie des traditions de Noël en Italie. Ce gâteau est en forme de dôme et mesure entre 12 et 15 cm de hauteur. Il est servi en tranches verticales et accompagné de vins doux comme l'asti spumante ou le moscato ou encore, des vins plus corsés comme le Recioto della Valpolicella ou Gattinara. Le vin peut être aussi remplacé par des boissons chaudes.
    Le panettone se mange de différentes façons : on peut en effet couper les tranches fines ou épaisses et elles sont soit servies au petit-déjeuner ou en dessert, à la fin du repas, donc. Le panettone est aussi consommé aux Etats-Unis où, là, il est servi grillé, pour le petit-déjeuner, nappé de sauces, recouvert de crème ou fourré.
    L'origine de ce gâteau reste un grand mystère et il fait d'ailleurs l'objet de nombreuses légendes. Ainsi, certains pensent que le panettone a été inventé dans le Milanias aux alentours du XVème siècle. Mais, dès le XIIIème siècle, on connaît à Vérone, en Vénétie, un gâteau analogue, appelée le nadalin. Il sera ramené par des pâtissiers vénitiens à la cour royale des Habsbourg, à Vienne. Il semble que ce soit ce gâteau médiéval qui soit à l'origine du panettone mais le mystère demeure.
    Selon une autre légende, le panettone aurait été servi à la cour du duc de Milan, Ludovico Sforza dit le More (1452-1508), au moment des fêtes de Noël. Le chef cuisinier se trouvait alors à court de dessert et il eut l'idée de servir la brioche préparée par un simple marmiton, du nom de Toni. Le gâteau ayant plu à la cour du duc de Milan, le chef cuisinier ne s'appropria pas pour autant le succès de la recette et en rendit tout le mérite au jeune marmiton. La brioche fut nommée : le Pan del Ton ou le pain de Toni.
    Au début du XXème siècle, la préparation des panettone s'industrialise et les plus grand fabricants sont Angelo Motta, Ruggiero Bauli, Gioacchino Alemagna et Le tre Marie. D'ailleurs, le nom de Motta est synonyme de panettone, en Italie ! Aujourd'hui, c'est un produit d'exportation pour l'industrie alimentaire italienne qui a rapporté environ 560 000 millions d'euros en 2002, ce qui est tout de même exceptionnel.
    La technique de fabrication traditionnelle a été modifiée il y'a peu, afin de se conformer aux directives de l'Autorité européenne de sécurité des aliments. En effet, l'élaboration traditionnelle de cette brioche demandait deux périodes de levage ainsi qu'une période de cuisson courte afin que le gâteau garde toute sa mollesse. Il fallait également faire fermenter les raisins.
    En raison de la forte diaspora italienne en Amérique, la consommation du panettone s'est diffusée dans de nombreux pays, notamment les Etats-Unis mais aussi le Pérou, par exemple, où l'on ne peut concevoir une table de Noël sans panetón.

    SUÈDE

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    Le porridge de Noël et autres douceurs : en Suède, à Noël, la coutume veut que l'on déguste un porridge. Il s'agit en fait d'un riz au lait saupoudré de cannelle et servi avec du lait glacé. On peut aussi y glisser une amande. Celui qui trouve l'amande doit faire un voeu. Mais, comme en Suède, on est friand de confiseries, on les inclut elles aussi au repas de Noël. Les plus populaires sont les knäck et les ischoklad. Les knäck sont des caramels tendre fabriqués avec du scure, du sirop et de la crème ; les ischoklad sont, eux, des bonbons fondants au chocolat.
    Avec les restes du porridge de Noël, les Suédois confectionnent ensuite le riz à la Malta ou ris à la Malta, en suédois. Il suffit tout simplement de saupoudrer le porridge avec du sucre en poudre, du sucre en poudre, d'ajouter un peu de crème et de bien mélanger le tout. On consomme aussi, mais là, dans toute la Scandinavie, des Joulutortut, des petites tartelettes à la confiture de prune. Dans le Nord, on déguste aussi les traditionnels pains d'épices.

    NORVÈGE

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    La crème de riz et autres desserts : traditionnellement, le dessert est une crème de riz servie avec une sauce à base de baies rouges : on l'appelle le Risalamande, du français riz à l'amande. A Noël, les enfants dégustent aussi une boisson rouge et pétillante, sorte de limonade, qui leur est réservée.
    Que ce soit à Noël ou non, les Norvégiens sont très friands du flan au caramel, qui est aussi servi pour les fêtes. En ce qui concerne les friandises typiques de Noël, on trouve le pain de Noël aux raisins et aux écorces confites ainsi que plusieurs variétés de petits gâteaux secs. Certaines recettes remontent au Moyen Âge et sont toujours aussi populaires, comme les craque-pains dont le « flatbrød », le cousin du pain azyme.
    Autre tradition norvégienne, la maison de pain d'épices (« pepperkaker »). C'est le temps fort de la pâtisserie de Noël dans le pays et une idée-cadeau originale.

    FINLANDE

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    Le pain d'épices et le pain de Noël : la maison en pain d'épices, comme en Norvège, est une pièce phare des pâtisseries de Noël finlandaises. Les Finlandais consomment aussi un pain de Noël appelé Joululeipä, à base de froment et de seigle. Pour sa conception, on utilise du petit-lait, de la levure, de la melasse, des zestes d'orange confits et des grains de cumin moulus, entre autres. Le résultat est une sorte de brioche que l'on pourrait rapprocher du panettone italien.
    Les Finlandais dégustent aussi les Piparkakut, les biscuits de grand-mère, découpés à l'emporte-pièce et, comme les Norvégiens et les Suédois, les fameux Joulutortut, petites tartes à la confiture de prune.

    PORTUGAL

    [POUR ATTENDRE NOËL] #Gourmandises d'Europe : les desserts de Noël traditionnels

    Les treize desserts : on retrouve au Portugal la même tradition qu'en Provence et, là-bas, le moment le plus copieux du repas de Noël, c'est le dessert, où l'on ne sert pas moins de treize douceurs en même temps ! A minuit, les fidèles se rendent à l'église pour célébrer la « La Missa do Gallo » ou Messe du Coq et ce n'est que bien plus tard dans la nuit qu'ils vont déguster toutes ces spécialités...parmi elles, on trouve le Bolo rei, gâteau des rois en forme de couronne composé" de fruits secs et de fruits cristallisés. Autrefois, les Portugais servaient cette pâtisserie le 6 janvier, le jour des Rois, qui commémore, chez les catholiques, la visite rendue par les Rois Mages à l'enfant Jésus. Le 6 janvier fut d'ailleurs, pendant longtemps, le jour où l'on échangeait des cadeaux. Aujourd'hui, la consommation de ce gâteau des rois s'est étendue à toute la période de Noël.
    Entre autres, le Portugais dégustent aussi l'Arroz doce, ou riz au lait portugais, qui fait partie des desserts typiques de la gastronomie nationale. Il est légèrement aromatisé au citron et on le décore toujours avec de la cannelle. Parmi les treize desserts, on trouve aussi les Filhós, de gros beignets à base d'un pâte proche de la pâte à pain et souvent parfumée à l'aguardente (littéralement, eau ardente), l'eau de vie locale, ainsi qu'à l'orange. Afin de les savourer chauds, on prépare généralement la pâte avant le repas, pour qu'elle ait le temps de lever convenablement, et les beignets sont frits une fois que les gens sont rentrés de la messe. On les saupoudre de sucre et de cannelle au dernier moment pour que les beignets ne ramollissent pas. Il existe plusieurs variantes du Filhós, dont une, notamment, est préparée à base de potiron.
    On trouve aussi les Rabanadas, aussi appelées fatias douradas. Ce sont des petites sucreries proche du pain perdu, confectionnées avec des tranches de pain rassis, plongées dans du lait puis frites. Elles sont ensuite parsemées de cannelle et de sucre. Le Doce de aletria est une sorte de riz au lait au vermicelle. Les desserts varient aussi selon les régions...par exemple, les Ovos moles sont la spécialité de la ville d'Aveiro. Les Sonhos (rêves), de petits beignets frits ou encore, le Pão-de-ló, gâteau riche en œuf, aromatisé à l’orange ou au citron, sont des spécialités régionales.

    ESPAGNE

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    Une multitude de petits desserts : en Espagne, on peut dire qu'il y'a autant de spécialités de Noël que de régions ! Cela en fait donc un nombre assez conséquent. La gastronomie espagnole est encore très marquée, aujourd'hui, par la présence arabe, qui a tout de même duré huit siècles et laissé pas mal de traces, comme la consommation du riz, des oranges, des amandes ou encore du safran, dans les desserts. Les Arabes ont aussi laissé leur savoir-faire dans le domaine des confiseries.
    En Espagne, pendant les fêtes, on déguste des petits gâteaux à base de miel, d'amande ou de cannelle mais aussi le Turrón, une sorte de nougat, traditionnellement fabriqué avec des amandes et du miel, mais que les commerçant déclinent aujourd'hui de multiples façons : avec du chocolat, par exemple, mais aussi de la noix coco, des fruits confits...Les Turrón les plus authentiques se trouvent aujourd'hui à Alicante et Jijona.
    Les Espagnols dégustent aussi, au moment de Noël, le Mazapán, que l'on peut facilement traduire en Massepain en français. Ce sont de petits biscuits ronds fabriqués avec des amandes, du sucre et des blancs d’œufs. Le plus fameux est celui de la ville de Tolède. On trouve aussi les Polvorones, des sablés aromatisés d'amandes moulues, de citron râpé et de cannelle.
    En Espagne, on a aussi la tradition des paniers garnis. En effet, autrefois, dans les villages espagnols, la tradition voulait que l'on offre aux voisins qui nous avait aidé, un panier en osier remli de produits régionaux comme les amandes, le chorizo, l'huile d'olives, les fruits secs...Aujourd'hui, pendant la période des fêtes de fin d'année, les magasins proposent des paniers garnis des meilleurs produits régionaux du pays. Ces Cestas de Navidad se composent généralement de Cava, un vin pétillant produit en Catalogne, de marrons glacés de Galice, des asperges de Navarre, de jambon d'Andalousie, de Manchego, un fromage de brebis produit en Castille.
    Cependant les produits phares de la période de Noël restent les confiseries encore aujourd'hui préparées, souvent, dans les couvents par les religieuses.

    AUTRICHE

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    La Linzer Torte et le Strudel : ces gâteaux se consomment toute l'année mais aussi, à l'époque de Noël. La Linzer Torte, littéralement « tarte de Linz », est une recette à base de confiture de fruits rouges (ou fruits des bois). Pour la pâte, on utilise du sucre, du beurre, des amandes ou des noisettes ainsi que de la farine. On mélange ensuite à cette pâte de la cannelle ou des clous de girofle. Pour farcir la tarte, on utilise généralement de la confiture de framboise pour la farce. On tartine la confiture sur la pâte, on réalise un treillis avec le reste de pâte et on enfourne. Ce gâteau existe depuis 1653.
    En Autriche, comme en Alsace et autres pays de culture germanique on déguste aussi le Strudel. Ce gâteau a été popularisé en France par Marie-Antoinette. C'est un gâteau parfumé à la cannelle, composée de plusieurs couches de pâte filo beurrées au pinceau et qui entourent une garniture, pour former un cylindre qui sera ensuite doré au four (le mot strudel dérive du Moyen haut-allemand et signifie « tourbillon »). Cette garniture se compose généralement de pommes hachées et de fruits secs comme des raisins ou des amandes. L'Apfelstrudel est un strudel aux pommes. Parfois, il peut aussi être garni d'une base de fromage blanc. On peut aussi garnir le Strudel non pas avec des pommes mais avec des cerises : il s'agit du Kirschenstrudel.

     

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    Le pain d'épices est une spécialité que l'on retrouve dans beaucoup de pays, notamment en Europe du nord mais aussi en Espagne et en France (en Alsace, le pain d'épices a même son musée, à Gertwiller).

    Voici une recette de ce produit incontournable des tables de fêtes, apprécié comme une gourmandise sucrée ou avec un foie gras en sucré/salé. 

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    Ingrédients :

    - 250 g de miel
    - 250 g de farine
    - 100 g de sucre en poudre
    - 1 sachet de levure chimique
    - 1 sachet de sucre vanillé
    - 1 cuillère à café d'anis vert
    - 1 cuillère à café de muscade râpée
    - 1 cuillère à café de cannelle en poudre
    - 1 cuillère à café de gingembre en poudre
    - 1 cuillère à café de quatre épices
    - 2 œufs
    - 10 cl de lait

    Préparation :


    1. Faire chauffer 250 g de miel à la casserole ou au micro-ondes, puis le verser bien chaud dans un saladier sur 250 g de farine, mélangée à 1 paquet de levure chimique, les deux sucres et 1 cuillère à café de chaque épice : anis vert, muscade râpée, cannelle, gingembre.

    2. En remuant cette préparation avec une cuillère en bois, incorporer petit à petit 2 œufs, puis un peu de lait juste tiède pour amalgamer le tout.

    3. Préchauffer le four à thermostat 5/6 (160°C).

    4. Verser la préparation dans un moule à cake bien beurré et fariné.

    5. Enfourner et laisser cuire pendant 1h à 1h15.

    6. Démouler le pain d'épice lorsqu'il a totalement refroidi. Attendez 24 heures au minimum avant de le déguster.

    7. Il se garde une semaine, enveloppé dans du papier d'aluminium.


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  • « Si tout récit de vie est une traversée, celle de Louise Elisabeth Vigée Le Brun l'est à plusieurs titres : périples à travers l'Europe, grand écart d'un siècle à l'autre dans un esprit de curiosité infinie. »

    Louise Elisabeth Vigée Le Brun : Histoire d'un regard ; Geneviève Haroche-Bouzinac

    Publié en 2011

    Editions Flammarion (collection Grandes Biographies)

    688 pages 

    Résumé :

    « Entre deux siècles comme au confluent de deux fleuves » : ces mots de Chateaubriand semblent avoir été écrits pour elle. Née sous le règne de Louis XV, Louise Elisabeth Vigée Le Brun est témoin des prémices de la Révolution, connaît l'Empire et la Restauration, avant de s'éteindre sous la monarchie de Juillet, dans sa quatre-vingt-septième année. Une longévité exceptionnelle qui accompagne une destinée hors du commun. Artiste précoce et talentueuse, elle pénètre, malgré les obstacles, dans le cercle prestigieux de l'Académie royale de peinture ; ses cachets sont parmi les plus élevés de son temps. Les troubles de la Révolution font d'elle une voyageuse : de l'Italie à la Russie en passant par l'Autriche, dans une Europe dont le français est la langue, elle conquiert à la force du poignet une clientèle princière. Mais les succès ne compensent pas les peines privées : sa fille chérie, Julie, s'oppose à elle, son frère la déçoit, son époux endetté réclame son aide.

    La postérité a retenu l'image du peintre gracieux de Marie-Antoinette ; on sait moins qu'au XIXe siècle, mue par un esprit de curiosité infinie, Mme Vigée Le Brun ouvrit grand son salon à la jeune génération romantique. Exploitant archives, lettres et carnets inédits qui éclairent la vie privée et publique de l'artiste, accordant toute sa place à son oeuvre peint, cette biographie retrace le destin de l'un des plus grands peintres de son époque.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Appréhender Louise Elisabeth Vigée Le Brun à l'aune de sa carrière de portraitiste de la reine Marie-Antoinette serait réducteur et pourtant, ce sont ces œuvres-là qui nous viennent spontanément à l'esprit quand on évoque l'artiste : Marie-Antoinette en robe de gaulle immaculée jouant à la bergère, Marie-Antoinette portant une toilette bleue et tenant une rose dans la main ou encore, le majestueux tableau Marie-Antoinette et ses enfants où la reine de France, quelques années seulement avant la Révolution, pose en robe rouge près d'un berceau vide et accompagnée de ses enfants survivants. Ces années auprès de la reine et des grands de ce monde -elle portraiture la favorite de Marie-Antoinette, Yolande de Polignac, la sœur du roi, Madame Elisabeth, le comte de Provence, l'ancienne favorite de Louis XV, Madame du Barry- ne représentent finalement qu'une décennie et qu'est-ce que dix ans dans une vie, surtout celle de Madame Vigée Le Brun, qui prend fin à près de quatre-vingt-dix ans ? Dix ans, c'est une parenthèse. Mais une parenthèse qui va conditionner toute sa carrière future et modeler la réputation qu'elle se fera au cours des siècles suivants : Elisabeth Vigée-Lebrun est la portraitiste de la reine Marie-Antoinette et, rarement, on va voir plus loin. Ce qui est dommage, parce que quand on prend la peine de s'intéresser à elle, elle est n'est pas que cela, au contraire : elle est bien plus que cela.
    Louise Elisabeth Vigée voit le jour à Paris en 1755, la même année que la reine. Elle est la fille d'un peintre modeste, Louis Vigée et de Jeanne Maissin. Elle a un frère, Etienne, qui sera poète. Placée en nourrice avant de retrouver ses parents à cinq ans puis de suivre une petite scolarité au couvent avant de revenir dans sa famille, où elle va commencer à s'exercer à la peinture, Louise Elisabeth est une issue d'un milieu modeste, la bohème artiste comme le dit Geneviève Haroche-Bouzinac dans sa biographie. Mariée à dix-neuf ans à Jean-Baptiste Pierre Lebrun, marchands de tableaux, elle aura une fille, Julie, avec laquelle elle s'est souvent représentée, sur des tableaux à l'inspiration antique.
    Mais surtout, ce qu'elle aura, c'est une carrière. Et une carrière comme rarement on peut en rêver quand on est une femme et surtout, une femme du XVIIIème siècle. Car la société française est alors encore fortement patriarcale, les femmes sont des mineures, soumises au père, éventuellement au frère puis au mari. Souvent, une femme est considérée à l'aune de la profession de son époux et elle en est entièrement dépendante. Certes, il y'a des femmes instruites et cultivées, les salonnières, par exemple, comme Mmes de Genlis ou de Tencin. La fille du financier Necker, Germaine, connaître la célébrité au début du XIXème siècle avec son roman Corinne ou l'Italie. Mais, contrairement à elles, l'activité de Mme Lebrun est une activité professionnelle...elle est peintre de métier. Et va immanquablement se heurter à la misogynie instinctive qui place les femmes, même les plus talentueuses, au-dessous de leurs confrères masculins.

    Louise Elisabeth Vigée Le Brun : Histoire d'un regard ; Geneviève Haroche-Bouzinac  

    Détail du tableau dit Marie-Antoinette à la rose, peint en 1783


    Pourtant, on ne peut nier le talent d'Elisabeth Louise. On ne peut pas dire qu'elle est une mauvaise peintre, au contraire et, à l'instar de ses confrères masculins, elle a laissé à la postérité une oeuvre importante, de part la diversité et le nombre de tableaux et un regard, une manière de faire qui nous éclairent ce que c'était que d'être un peintre à la fin du XVIIIème siècle et dans les premières décennies du XIXème.
    De Louise Elisabeth Vigée Le Brun, jusqu'ici, je n'avais lu aucune biographie. Elle était un personnage certes important mais que je croisais surtout, au détour d'une biographie de Marie-Antoinette, entre les pages d'un livre plus général sur le XVIIIème siècle...Du coup, même si je savais déjà que son oeuvre ne se résumait effectivement pas qu'à ses portraits de la reine ou de la famille royale, je n'en savais pas grand chose non plus. Grâce à ce livre, j'ai découvert son milieu de naissance, un milieu somme toute assez modeste et qui ne la prédestine pas forcément à devenir un jour le peintre de prédilection de la reine de France. J'ai découvert aussi que son talent n'a pas suffi à faire d'elle ce qu'elle est devenue, parce que Louise Elisabeth Vigée Le Brun était une femme et qu'elle partait déjà avec un lourd handicap, celui de devoir prouver, sans arrêt, parce que la notoriété et la talent féminins ne vont jamais de soi. J'ai découvert une femme bien de son temps, attachée à des convictions dont elle ne variera jamais -certains diront que c'est de la raideur, de l'intransigeance, on peut aussi considérer cela comme de la constance-, une femme à la vie bien remplie, de bonheurs, comme de malheurs et de désillusions. Elisabeth Vigée Le Brun est un destin à part entière, une femme à part entière et non un faire-valoir ; elle méritait une biographie de cette dimension, plutôt de rester éternellement cachée derrière le prestige de ses commanditaires royaux.
    Cette biographie très dense et riche nous emmène en effet du début jusqu'à la fin, de 1755 à 1842. C'est une longue période, pas tout à fait un siècle mais presque. Et c'est justement pile l'époque où il va se passer tant de choses en France que cela en donnerait presque le tournis ! C'est la fin d'un pays aux institutions séculaires et le début d'un autre, en devenir, le nôtre. Elisabeth Vigée Le Brun, comme beaucoup d'autres, sera aux premières loges et cette place à cheval entre deux siècles, deux époques si différentes l'une de l'autre, presque comme deux univers, n'est pas facile et elle en est une bonne incarnation. Le seconde partie de sa vie sera d'ailleurs marquée par l'amertume et la nostalgie d'un monde disparu et sans cesse recherché par cette femme d'Ancien Régime, touchée désagréablement par sa disparition et le changement d'un pays qu'elle a quitté pendant une douzaine d'années, au moment de la Révolution. Dans le sillage de Louise Elisabeth, on découvre toute l'Europe du siècle finissant, de Rome en passant par Vienne, la Russie ou l'Angleterre. Cet exil forcé lui donnera le goût des voyages et lui fera découvrir avec intérêt de nouveaux pays et de nouvelles manières de vivre qui influenceront sa peinture. Même hors de France, Mme Vigée Le Brun restera le peintre des grands de ce monde, en portraiturant notamment le tsar Alexandre Ier et son épouse et les grands aristocrates russes.
    Ce serait mentir que de vous dire que vous lirez ce livre comme un roman si d'aventure vous vous lancez dans sa lecture. Mais, malgré tout, j'ai lu des biographies parfois plus difficiles d'accès. Geneviève Haroche-Bouzinac ne laisse pas de côté la qualité littéraire au profit de la rigueur historique, au contraire, elle allie les deux avec efficacités, ce qui fait qu'on ne s'ennuie pas en lisant un tel livre. Cela dit, certains passages sont peut-être plus ardus que d'autres et il faut alors accepter d'avancer moins vite, de lire moins vite pendant un moment...la vitesse de croisière revient rapidement, croyez-moi.
    Pour moi qui suis en admiration absolue devant le XVIIIème siècle, cette biographie a été un plaisir et j'ai été ravie de découvrir Louise Elisabeth Vigée Le Brun autrement qu'en premier peintre de la reine, dans l'ombre de cette figure écrasante et tragique qu'est celle de la reine exécutée. Geneviève Haroche-Bouzinac lui rend une vraie place, sa place, celle d'une artiste talentueuse et accomplie qui n'avait rien à envier à ses confrères masculins mais qui devra toute sa vie se battre pour justifier sa peinture, jugée trop ceci ou trop cela parce qu'elle sortait du pinceau d'une femme.
    Loin d'une quelconque analyse féministe ou orientée, cette biographie s'émancipe des témoignages à charge, de l'éclairage biaisé des souvenirs de Vigée Le Brun, qui furent pendant longtemps la source d'inspiration principale de ses biographes avant que ses Mémoires ne soient remis en question, de l'Histoire misogyne et faite par les hommes au XIXème siècle pour nous révéler une femme, épouse et mère qui fut aussi une professionnelle de la peinture, une artiste reconnue qui toute sa vie s’exerça pour rester à la hauteur de la réputation qu'elle se forgea au fil des ans et qui ne doit sa réussite qu'à elle-même et à sa constance. Les sentiments et sensations qui peuvent naître en nous, cent soixante-dix ans après sa mort lorsque l'on regarde ses toiles, qu'elles soient grandioses parce qu'elles reflètent la grandeur et la majesté royales ou plus authentiques parce qu'elles ne font que représenter le quotidien d'une société qui se pique de simplicité, de robe fleuries et de chapeau en paille, sont peut-être les meilleures gratifications de l'oeuvre d'une battante, une femme qu'on réduit trop souvent à son rôle de peintre de Cour en oubliant que Louise Elisabeth Vigée Le Brun n'était pas que cela, bien au contraire.
     

    Buste de Louise Elisabeth Vigée Le Brun par le sculpteur Augustin Pajou (1785). 

    En Bref :

    Les + : Il y'a tout dans ce livre, ni plus ni moins. Geneviève Haroche-Bouzinac, l'auteure, saisit bien les complexités de la personnalité de celle que l'on a trop souvent considérée uniquement comme la peintre de Marie-Antoinette, alors qu'elle est plus que cela.
    Les - :
    Aucun. Pour moi, cette biographie est parfaite.


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