• « La vie. C'est comme si on ajoutait une touche jour après jour. Tu poses les couleurs les unes après les autres, en t'efforçant de faire quelque chose de joli avant qu'il n'y ait plus de place. »

     

    Couverture Les Suprêmes, tome 1

     

         Publié en 2013 aux Etats-Unis 

      En 2015 en France 

      Titre original : The supremes at Earl's all-you-      can-eat

      Editions Babel 

      414 pages 

      Premier tome de la saga Les Suprêmes

     

     

     

     

    Résumé :

    Elles se sont rencontrées à la fin des années 1960 et ne se sont plus quittées : tout le monde les appelle les Suprêmes, en référence au célèbre groupe de chanteuses des seventies. L'intrépide Odette converse avec les fantômes et soigne son cancer à la marijuana sur les conseils avisés de sa défunte mère, tandis que la saga Clarice endure les frasques de son volage époux pour gagner sa part de ciel. Toutes deux ont pris sous leur aile Barbara Jean, éternelle bombe sexuelle que l'existence n'a cessé de meurtrir. Complices dans le bonheur comme dans l'adversité, ces trois irrésistibles quinquas afro-américaines se retrouvent tous les dimanches dans l'un des restaurants de leur petite ville de l'Indiana : entre commérages et confidences, rire et larmes, elles se gavent de poulet de frit en élaborant leurs stratégies de survie. 
    Invitation à une lecture aussi décalée que féconde de la problématique raciale aux Etats-Unis, ce formidable roman de l'amitié et de la résilience s'affirme comme une exemplaire défense et illustration de l'humanisme conçu comme la plus réjouissante des insurrections. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Les Suprêmes est un magnifique roman d'amitié, dans l'Amérique des années 2000. Odette, Clarice et Barbara Jean se connaissent depuis leurs années lycée, à la fin des années 1960 : inspérables, on a fini par les surnommer les Suprêmes, en référence au fameux groupe de Diana Ross. Très différentes les unes des autres mais unies par un lien indéfectible, les trois amies ont traversé les années, connu des joies, des peines, des drames, des désillusions. Mais chacune a toujours trouvé le réconfort ou le soutien dont elle avait besoin dans l'écoute des deux autres. Dévouées les unes aux autres, les trois Suprêmes traversent la vie main dans la main.
    Odette, la narratrice, est décalée et possède un franc-parler qui effraie parfois : parlant avec les fantômes, elle découvre fin 2004 qu'elle est atteinte d'un cancer qu'elle va combattre à force de ténacité et grâce au soutien de son époux James et de ses deux amies (et d'un peu de cannabis, il est vrai).
    Clarice mène une vie lambda : mère de trois grands enfants qui ont fait leur vie aux quatre coins du pays, elle partage sa vie avec son grand amour de jeunesse, le beau Richmond et s'efforce de faire comme si elle ne voyait pas ses multiples incartades et infidélités.
    Enfin, Barbara Jean, qui a grandi dans un environnement malsain auprès d'une mère instable qui meurt trop jeune, épouse à la fin du lycée un homme plus âgé qu'elle mais qui lui assure le confort matériel dont elle a toujours manqué. Très belle et très attirante, toujours vêtue de manière extravagante et colorée, Barbara Jean n'en cache pas moins une tristesse terrible et une blessure qui ne cicatrisera jamais, conséquence d'un drame affreux survenu dans les années 1970 et qui l'a amputée d'une partie d'elle-même.
    Le roman démarre au milieu des années 2000, à Plainview, petite ville tranquille et sans histoire de l'Indiana. Odette, Clarice et Barbara Jean ont une cinquantaine d'années, une vie bien remplie derrière elles mais encore plein d'énergie et de bonne humeur à revendre. Le ton est décalé, plein d'humour, Odette, la narratrice principale ne se prend pas au sérieux et son phrasé percutant m'a rappelé celui des héroïnes de Kathryn Stockett dans La Couleur des Sentiments, notamment Minnie. J'ai souvent souri, j'ai même ri parfois devant ses uppercuts verbaux qui font toujours mouche ! J'ai aimé Clarice aussi, plus conventionnelle mais intéressante et Barbara Jean m'a attirée par sa fragilité, sa sensibilité à fleur de peau que l'on comprend petit à petit, à mesure que l'histoire se dévoile, attirant immanquablement la compassion et l'empathie du lecteur.
    En faisant de fréquents retours en arrière, l'auteur nous amène à comprendre comment le trio s'est formé en 1967, comment Clarice et Odette, qui se connaissaient déjà, ont fini par prendre la fragile Barbara Jean sous leur aile, après la mort de sa mère, nous amène aussi à comprendre comment leurs choix de jeunesse impactent encore leur vie actuelle (par exemple, Clarice, très amoureuse de Richmond, n'a pas voulu entendre les avertissements bienveillants de ses proches et doit, quarante ans plus tard, supporter en faisant comme si elle ne voyait rien, les nombreuses aventures d'un mari trop beau et trop volage mais qu'elle aime encore). Comédie légère et décalée, unique en son genre, Les Suprêmes, comme toute bonne comédie qui se respecte, n'en possède pas moins sa part de gravité et de drames. Les Suprêmes, comme le groupe de musique éponyme, sont trois Afro-américaines. Elles sont nées en 1950, elles étaient enfants quand Rosa Parks refuse de laisser sa place à un Blanc dans un bus de Montgomery, elles étaient adolescentes dans les années 1960 quand se développe la lutte pour les droits civiques, quand Martin Luther King est assassiné...
    Etat du Midwest, l'Indiana est, dans les années 1960, relativement conservateur. Les Blancs et les Noirs vivent dans les mêmes villes mais pas dans les mêmes quartiers et pas forcément en harmonie. Autrement dit, dans les années 1960/1970, être Noir à Plainview est dangereux : on s'expose au racisme verbal voire à la violence. Les couples mixtes sont mal vus et le mariage d'un Blanc et d'un Noir n'est pas toléré...
    On comprend rapidement que, derrière le discours en apparence relativement léger et plein d'humour il y'a en fait un message beaucoup plus sérieux et, malheureusement toujours d'actualité et qui n'est d'ailleurs pas propre aux Etats-Unis : le racisme est un fléau mondial et qui ne cesse de prendre de l'ampleur, il n'y a qu'à voir les actualités de ces dernières semaines. J'avais prévu de lire Les Suprêmes depuis longtemps, bien avant l'affaire George Floyd qui a enflammé le monde entier, mais j'ai trouvé ce roman particulièrement juste et actuel et du coup, assez salutaire. S'il y'a eu des avancées depuis les années 1960 elles ne sont pas, cependant, assez nombreuses, pour combattre les inégalités, les injustices et l'intolérance.
    Mais en même temps, Les Suprêmes est porteur d'espoir, c'est un roman positif qui donne le sourire. Une lecture pétillante mais pas trop, qui n'est jamais superficielle et cache, sous ses airs sautillants, un vrai message. Voilà pourquoi j'ai tant aimé ce roman, après avoir été extrêmement surprise par les premiers chapitres. Pour cette raison, ce ne sera pas un coup de cœur mais c'est une merveilleuse lecture, d'autant meilleure que je ne m'attendais pas à ça en la commençant. Vous savez quoi ? Je n'ai maintenant plus qu'une hâte : lire la suite

    En Bref :

    Les + : belle histoire bien construite, pleine d'humour et de légèreté avec malgré tout un propos plus grave en arrière-plan, un propos encore d'actualité aujourd'hui. Les Suprêmes peut nous permettre de prendre conscience de beaucoup de choses, c'est certain. 
    Les - :
    des premiers chapitres un peu déroutant, qui m'ont donné le sentiment que je ne savais pas où j'allais...et puis la sensation se dissipe vite, pour notre plus grand plaisir !

     


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  • « Frida peint d'un seul tenant, comme on recouvre un petit mur blanc d'une fenêtre en trompe-l'oeil. Elle commence par le haut et déroule son tissu en vagues comme pour ajuster au regard des autres ce qu'elle voit dans sa tête. »

     

    Rien n'est Noir ; Claire Berest 

     

       Publié en 2019  

      Editions Stock (collection La Bleue) 

      250 pages 

     

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    « A force de vouloir m'abriter en toi, j'ai perdu de vue que c'était toi, l'orage. Que c'est de toi que j'aurais dû vouloir m'abriter. Mais qui a envie de vivre abrité des orages ?

    Et tout ça n'est pas triste, mi amor, parce que rien n'est noir, absolument rien. 

    Frida parle haut et fort, avec son corps fracassé par un accident de bus et ses manières excessives d'inviter la muerte et la vida dans chacun de ses gestes. Elle jure comme un charretier, boit des trempées de tequila, et elle ne voit pas où est le problème. Elle aime les manifestations politiques, mettre des fleurs dans les cheveux, parler de sexe crûment, et les fêtes à réveiller les squelettes. Et elle peint. 

    Frida aime par-dessus tout Diego, le peintre le plus célèbre du Mexique, son crapaud insatiable, fatal séducteur, qui couvre les murs de fresques gigantesques. »

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

     Frida et Diego. Diego et Frida. Dans ce roman d'un peu plus de deux cents pages, le couple est au centre du récit. Il est le récit. Couple hors norme et destructeur que se propose de nous raconter ici Claire Berest, l'arrière-petite-fille du peintre Francis Picabia qui avait déjà narré dans un précédent récit la vie passionnante et surréaliste (c'est bien le mot) de Gabriële Buffet, la muse et l'épouse de Francis, cette arrière-grand-mère qu'elle n'a jamais connue.
    Ici, on la retrouve dans le monde de la peinture. Encore, toujours et sans surprise, j'ai envie de dire, comme si raconter l'art pictural faisait écho à l'art bien réel de l'écrivain, que Claire Berest exerce avec brio. Je n'ai pas été surprise, l'an dernier, quand j'ai vu que son nouveau roman traitait de Frida Kahlo et si sa peinture ne m'a jamais spécialement parlé et que je ne connaissais que vaguement sa vie, ce roman s'est aussitôt retrouvé dans ma Wishlist puis dans ma PAL parce qu'il me semblait impensable de passer à côté. Mais, me direz-vous, si je n'ai pas spécialement d'intérêt pour Frida Kahlo, pourquoi avoir envie de lire ce livre à tout prix ? Déjà, pour en apprendre plus sur elle, d'une part. Et ensuite, parce qu'après avoir lu Gabriële en août dernier, il était assuré que je lirai de nouveau Claire Berest. Et le coup de foudre littéraire s'est vraiment confirmé avec Rien n'est Noir. Mon seul regret en terminant ce roman c'est qu'il soit déjà fini, j'en aurais encore lu des pages et des pages. Ils sont rares les auteurs qui maîtrisent si bien la langue et ne se laissent pas mener par elle mais l'emmènent bel et bien là où eux veulent en venir. Le style, la manière d'écrire de Claire Berest sont particuliers et surtout uniques. Si j'avais déjà aimé sa prose dans Gabriële, ici, mon plaisir de lectrice a été particulièrement contenté : ça saute, ça bondit, ça percute, ça redescend, ça chute et ça remonte, et ça re-pétille et ça sautille... Si le personnage de Frida Kahlo est indéniablement le gros point fort du livre -on n'a jamais autant parlé d'elle ni utilisé son image que ces dernières années-, la plume de l'auteure n'est pas en reste et fait de ce livre non pas un roman ordinaire mais un roman extraordinaire et particulièrement formidable, auquel j'ai adhéré dès le premier mot et jusqu'au dernier.
    Parlons maintenant du deuxième point fort du livre, Frida donc. Frida Kahlo dont le nom évoque immédiatement quelque chose à chacun d'entre nous : le physique particulier, la peinture tourmentée, la liaison avec Diego Rivera ou la Casa Azul, au choix.
    Pour moi, Frida Kahlo, c'est l'accident. L'Accident, d'ailleurs, avec un grand A dans le roman, cet accident de bus qui à dix-huit ans la détruit et détruit sa vie. Etudiante en médecine à La Preparatoria de Mexico, jeune femme ordinaire, Frida ne sera jamais plus la même et conservera toute sa vie des douleurs liées à cet accident dont elle ne se remettra jamais vraiment malgré les longs séjours à l'hôpital et les corsets qu'elle devra porter. Brisée, Frida, comme sa peinture ou du moins comme ce qu'elle insuffle dans sa toile et qui transpire profondément le désespoir, l'horreur, le corps prison et souffrant. Plus que sa peinture qui m'a toujours un peu dérangée, j'associais immédiatement Frida Kahlo à cet accident qui finalement la définit beaucoup parce qu'il impliquera sa vie d'artiste.
    Pour le reste, j'ai pas mal appris sur sa vie et notamment sur son union houleuse avec Diego Rivera, peintre mexicain et communiste spécialiste des murales, de grandes fresques qui caractérisent la peinture mexicaine du début du XXème siècle : Rivera reste d'ailleurs le chef de file de ce mouvement que l'on appelle le muralisme mexicain, à l'instar de José Clemente Orozco ou encore, David Alfaro Siqueiros. Ses oeuvres sont indissociables de ses convictions communistes et de son intérêt pour les civilisations du Mexique de l'époque pré hispanique, qu'il partage avec Frida.

    Le couple photographié en 1932


    Beaucoup plus jeune que lui, celle-ci est née en juillet 1907. Plus tard, elle changera sa date de naissance en 7 juillet 1910 pour la faire coïncider avec le début de la révolution au Mexique. Frida est mexicaine par sa mère, Matilde Calderón y González et allemande par son père, Guillermo Kahlo né Carl Wilhelm Kahlo, qui changera de nom à son arrivée au Mexique à l'âge de dix-neuf ans. Une fois adulte, Frida hispanise le prénom germanique Frieda en enlevant le e et utilise aussi son deuxième prénom, Carmen. Elle grandit au milieu d'une fratrie uniquement féminine, composée de quatre autres sœurs. A six ans, Frida est victime de la poliomyélite, qui la laisse boiteuse d'une jambe. Douze ans plus tard, le terrible accident de bus qui faillit lui coûter la vie la laisse handicapée à vie : multiples fractures, abdomen percé d'une barre de fer qui entraînera plus tard un syndrome d'Asherman se traduisant par des adhérences utérines qui l'empêcheront de mener à terme ses grossesses...
    Frida est un corps et une âme souffrants. Mais paradoxalement, ces blessures vont la nourrir et nourrir sa peinture. Son accident est quasi omniprésent dans son oeuvre, elle se représente cassée, cabossée comme dans La Colonne Brisée, où sa poitrine ouverte révèle une colonne antique brisée qui sert de colonne vertébrale : c'est éloquent, non ? Sa relation houleuse et chaotique avec Rivera dont elle divorcera avant de l'épouser une seconde fois la nourrit aussi tout en la détruisant : l'amour qu'elle porte à Diego est fou, passionnel, jaloux alors que lui continue à papillonner et à accumuler les conquêtes. Cette relation est au centre du récit de Claire Berest comme elle est au centre de la vie de Frida, comme elle lui devient nécessaire au fil des années malgré l'amertume qu'elle en tire, plus que de la satisfaction d'ailleurs. Consubstantielle à son existence, cette relation qui semble fragile durera jusqu'au bout, jusqu'à la mort de Frida. La solidité dans la fragilité. Consubstantialité aussi de la peinture et de l'âme torturée de l'artiste...et cela nous donne un récit brillant, lumineux et coloré comme les titres des chapitres choisi avec à-propos par Claire Berest.
    Vous l'aurez sûrement compris, j'ai beaucoup aimé ce roman. Je suis presque déjà à attendre le prochain roman de Claire Berest, car finalement plus que Frida Kahlo, c'est vraiment la plume de l'auteure que j'ai aimée dans ce roman, une plume merveilleuse et que j'ai envie de suivre.
    Pour ce qui est du personnage de Frida Kahlo, j'ai apprécié d'en savoir un peu plus sur elle, c'est sûr, même si sa peinture ne m'attire toujours pas et me dérange même un peu. Décalée, affranchie des normes de son époque, un peu à part, excentrique, Frida Kahlo dans Rien n'est Noir m'a fait penser à La Casati, par exemple où à ces femmes extravagantes du début du XXème siècle. J'ai compris pourquoi elle est une icône pour beaucoup de gens, même si en ce qui me concerne, je n'arrive pas à me retrouver en elle. Une icône féministe aussi. Claire Berest a réussi la prouesse de me passionner pour un destin qui, au départ, ne m'intéressait pas plus que ça. Bref, je termine ce roman totalement enchantée par ma lecture

    The Broken Column.jpg

    La Colonne Brisée (1944) l'une des œuvres les plus connues de Frida Kahlo

     

    En Bref :

    Les + : merveilleuse évocation de la vie d'une artiste hors normes, servie par le style unique et absolument parfait d'une auteure talentueuse et que je ne vais pas cesser de suivre de sitôt !
    Les - :
    absolument aucun ! Ce roman a été un coup de cœur, un coup de foudre.

     

     

    Coup de cœur 

     

     

     

     


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  • « Il faut parfois savoir se contenter d’une médecine bien approximative, a-t-il soupiré. Celle qui ne guérit pas, mais qui écoute… et qui soulage au mieux. »

    De Battre la Chamade ; Sophie Tal Men

     

     

     Publié en 2019

     Editions Le Livre de Poche 

     288 pages 

     Troisième tome de la saga Les Yeux Couleur de Pluie

     

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    En commençant son internat de médecine à Quimper, Marie-Lou est très vite happée par le tumulte de l'hôpital. Un concentré d'humanité où les rencontres, les émotions, les disparitions aussi, font grandir, mûrir. Plus qu'un apprentissage, c'est une prise de conscience, sur soi et sur le monde. C'est là que bat le coeur de la vie. 
    Côté sentimental, les choses ne sont pas moins compliquées...Comment retenir l'instable et insaisissable Matthieu, parti à la recherche de son père disparu ? 
    Dans ce roman à deux voix, on retrouve toute l'énergie et la fraîcheur des Yeux couleur de pluie et d'Entre mes doigts coule le sable. Un chassé-croisé amoureux sans répit, un portrait sans fard du monde hospitalier, des histoires d'amitié, beaucoup de résilience...et une vraie surprise.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Quel plaisir ce fut de retrouver une troisième fois les personnages si sincères, authentiques et attachants de Sophie Tal Men !
    De battre la chamade est le troisième tome de la saga Les Yeux Couleur de Pluie qui raconte l'arrivée de Marie-Lou, jeune étudiante en médecine, en Bretagne. Originaire de Haute-Savoie, elle quitte ses montagnes natales pour découvrir les senteurs iodées et vivifiantes de la Bretagne où elle va devoir se créer un nouvel univers et apprendre à sauver des vies.
    Dans ce troisième tome, Marie-Lou quitte avec un peu de nostalgie Brest pour Quimper, où elle va passer sa deuxième année d'internat en neurologie, tandis que son bel O.R.L, Matthieu, est parti de l'autre côté du monde sur les traces d'un père avec lequel il a quelques comptes à régler.
    Ce troisième tome est rythmé et plein de surprises. Comme les deux premiers, je l'ai dévoré en quelques heures, sans ennui aucun, au contraire. J'ai retrouvé avec joie Marie-Lou, héroïne attachante et simple, que l'on suit depuis le début et à laquelle on s'attache si facilement. C'est très plaisant aussi de retrouver Matthieu, son beau médecin et marin taiseux, si difficile à suivre et en même temps, toujours désarmant et charmant. On retrouve aussi d'autres têtes connues et en découvre d'autres, les internes de Quimper, à commencer par Marie, la féministe de la bande qui devient l'amie et la confidente de Marie-Lou.
    Tout ce petit monde nous entraîne dans un quotidien rythmé par les soirées où l'on décompresse en faisant la fête ou en mangeant des pizzas devant un film, un quotidien où l'on soigne aussi et où l'on donne de son temps pour soulager les autres, un métier prenant et envahissant qui pourrait presque s'apparenter à un sacerdoce et qui ne laisse aucun répit.
    La grande force de cette saga et qui en fait autre chose qu'une simple saga feel good, c'est justement ce cadre médical bien décrit par l'auteure, elle-même médecin et qui nourrit assurément ses romans de sa propre expérience. Loin des séries télévisées un peu aseptisées, la médecine des héros de Sophie Tal Men est telle qu'on l'imagine dans nos hôpitaux, mais on la voit de l'intérieur, à travers les yeux de ces jeunes médecins motivés, pleins d'espoir et qui découvrent petit à petit tous les aspects et enjeux de leur métier : la joie de guérir ou soulager un patient, l'amertume de l'erreur, la culpabilité, ou la tristesse à la mort d'un patient, l'impuissance aussi.
    Et puis les personnages grandissent, mûrissent, deviennent des adultes et font des choix : et souvent ils grandissent et mûrissent en faisant ces choix, justement. Comme nous tous au final.
    Ce troisième tome m'a captivée dès les premières pages. J'ai ri et souri mais pas que... C'est léger mais pas toujours et Sophie Tal Men a le don de mettre des mots simples et justes sur les questionnements humains qui nous font nous sentir proches de ses héros qui ne sont ni plus ni moins que des hommes et des femmes d'aujourd'hui !
    De Battre la Chamade clôture une saga contemporaine qui aura su me surprendre et me séduire : je lis peu ce genre de romans mais quand un résumé m'interpelle et me donne envie, en général, c'est une bonne pioche ! Et Sophie Tal Men est une auteure sincère que j'ai envie de suivre : il est sûr que ce roman ne sera pas le dernier de l'auteure que je lirais !  

    En Bref :

    Les + : le cadre médical qui donne de la teneur à la saga, les personnages simples et authentiques, l'univers dans lesquels ils évoluent, particulièrement chaleureux. Les romans de Sophie Tal Men sont de petits bonbons qu'on savoure. 
    Les - :
    je dirais que c'est toujours trop court ! Mais ce n'est pas vraiment un point négatif, non, quand on en veut plus ? ;)


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  • « Pendant vingt ans, notre vie a été une parodie de bonheur. Je veux épanouir ma personnalité, être libre, comme les autres femmes, vivre ma propre vie. »

    Le Petit Sapin de Noël ; Stella Gibbons

     

    Publié en 2018

    Titre original : Christmas at Cold Comfort Farm and others stories

    Date de publication originale : 1940

    Editions Héloïse d'Ormesson 

    304 pages 

    Résumé :

    N’avez-vous jamais rêvé d’échapper à un quotidien étriqué ? Lorgné avec envie le salon si accueillant de votre voisine ? Voulu croire un instant encore à l’illusion de liberté de votre prime jeunesse ? Et si… Et si vous redescendiez sur terre ! Stella Gibbons, reine du coup de griffe dans la morale corsetée, prend un malin plaisir à confronter ses pairs à leur reflet bien souvent mensonger.
     

    Avec un humour so british, qu’elle manie avec doigté et malice, elle détricote, en quinze nouvelles, les us et coutumes de la bonne société anglaise à la fin des années 1930.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Dans ce recueil de nouvelles caustiques et jubilatoires, Stella Gibbons se plaît à égratigner la société britannique du début du XXème siècle, corsetée et bien-pensante, encore empreinte de principes victoriens. Née en 1902, l'auteure a une vingtaine d'années dans les années 1920, elle est déjà une femme mûre pendant la Seconde guerre mondiale. Elle a trente-huit ans quand elle publie ce recueil en 1940. Autant dire qu'elle commence à avoir le recul suffisant et nécessaire pour écrire des nouvelles pleines d'ironie qui épinglent, mais sans méchanceté, une société qui a été la sienne, celle de sa jeunesse et de sa prime adolescence. Avec un style bien à elle, que certains ont comparé à Jane Austen, notamment pour l'utilisation commune d'une ironie savamment dosée, Stella Gibbons nous régale de plusieurs histoires qui se déroulent pendant l'entre-deux-guerres et abordent toutes des sujets de société : le célibat des femmes, les filles-mères, le qu'en dira-t-on, la morale et le respect de cette dernière.
    Je lis peu de recueils de nouvelles parce que je n'aime pas la juxtaposition de plusieurs histoires, plusieurs univers dans un même ouvrage...j'aime pouvoir me plonger dans une ambiance, la découvrir petit à petit, m'attacher aux personnages. Cela dit, le résumé de ce livre m'a interpellée, m'a intriguée...je m'attendais à quelque chose de vaguement décalé, de très britannique, d'irrévérencieux et effectivement, je n'ai pas été déçue. L'ironie saute aux yeux rapidement, elle est féroce et on sent que l'auteure s'est vraiment plu à pointer du doigt les travers d'une société qui punit sans pitié ceux qui s'écartent du chemin tracé par la morale mais qui peut aussi se montrer très excentrique (on est en Angleterre, non ?). Entre hypocrisie et sourires mielleux, mots acérés et jugements rapides, on se plaît à détester ses personnages et on se fait souvent la réflexion que, quand même, ils exagèrent mais en même temps on en redemande parce que si ces personnages ont défaut, on ne peut pas leur reprocher d'être lisses, au contraire.
    Ce livre est un petit condensé d'une société toute entière, la prise sur le vif de moments de vie certes romancés mais plausibles et qui nous font découvrir les années 1920-1930 en Angleterre de l'intérieur. On se plaît à naviguer d'une nouvelle à l'autre et on s'étonne, par moments, de la grande modernité de personnages imaginés il y'a plus de soixante-dix ans.
    Le lien avec Noël n'est que ténu, pour moi et ce serait peut-être la seule déconvenue que ce livre m'ait occasionné. Une belle couverture, un titre évocateur, une sortie l'année dernière au moment des fêtes : on se dit qu'on va se plonger dans des nouvelles qui sentent bon la cannelle et les aiguilles de pin car après tout, les réjouissances de fin d'année sont propices pour un auteur qui souhaiterait exercer sa férocité et son humour corrosif... Et finalement, à part dans la première nouvelle, qui porte le même titre que le recueil en français (Le Petit Sapin de Noël), Noël n'est pas ou presque pas évoqué. Du coup, j'ai été un peu surprise parce que je m'attendais à ce que cette fête soit un peu plus présente tout au long du recueil.
    A part cela, j'ai passé un bon moment. J'ai été surprise et il est sûr que cette lecture m'a fait sortir de ma zone de confort. Pour autant, j'y ai retrouvé aussi l'atmosphère familière de ces romans britanniques qui se passent au début du XXème siècle et qui me plaisent tout particulièrement. Si je partais en terre inconnue en démarrant cette lecture, au final j'ai retrouvé une atmosphère familière qui m'a plu. C'est distrayant et féroce et on sourit souvent devant ces moments saisis par l'auteure dans toute leur vivacité. Stella Gibbons ne s'embarrasse pas de licence poétique et se moque du qu'en dira-t-on comme de sa dernière chemise et c'est assez jubilatoire.
    A lire si vous aimez la littérature britannique et son humour bien particulier ! 

    En Bref :

    Les + : un humour corrosif et un peu caustique, une ironie très fine qui rappelle un peu Jane Austen, effectivement. Une lecture plutôt sympathique, même si je n'aime pas vraiment les nouvelles.
    Les - :
     une couverture à laquelle il ne faut pas s'arrêter parce que ce recueil de nouvelles ne parle finalement pas beaucoup de Noël !


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  • « C'est une ruse de la mémoire que de garder exclusivement les bons souvenirs, comme cela, on peut vieillir en se disant qu'on n'a pas trop raté sa vie. »

    La Casati ; Camille de Peretti

    Publié en 2012

    Editions Le Livre de Poche 

    288 pages 

    Résumé :

    La marquise Casati avait eu des chaussures en diamant, teint ses cheveux en vert, fréquenté les plus grands artistes, pris toutes les drogues possibles, organisé des bals spectaculaires, aimé un boa constrictor, défrayé la chroniqué et habité au Ritz...
    Elle offrait désormais le spectacle terrifiant d'une reine déchue, d'une femme qui a connu toutes les splendeurs de ce monde et fini dans la misère. S vie ressemble à un conte de fées qui vire au drame : née héritière de l'une des plus grosses fortunes d'Italie, elle mourut clocharde. C'est peut-être cela qui m'a le plus attirée, le vertige de la perte. Moi qui suis si raisonnable. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Un jour de 2004, la romancière Camille de Peretti découvre le personnage de la Casati, une marquise italienne du début du XXème siècle. Elle ne le sait pas encore, mais ce personnage fera l'objet d'un roman et deviendra pour elle une muse, une icône.
    La Casati, c'est Luisa Adele Rosa Maria von Amann de son vrai nom, née à Milan en 1881. Elle est la seconde fille d'un riche industriel italien d'origine autrichienne, Alberto von Amann. Orpheline jeune de ses deux parents, elle grandit en compagnie de sa sœur aînée, Francesca, dans un relatif isolement. Petite fille choyée puis adolescente négligée, Luisa se marie à dix-neuf ans avec Camillo Casati Stampa di Soncino. Ils auront ensemble une fille, qui naît en 1901 et sera rapidement délaissée par sa mère. Mondaine et excentrique, celle qui deviendra bientôt la Casati, ce qui personnifie en soi tout le phénomène, anime cette première moitié du XXème siècle, entre horreur de la guerre de Quatorze et ferveur des Années Folles. La Casati est un personnage à part : ce n'est pas une jolie femme, elle a des yeux trop grands, des traits trop marqués et pourtant, elle fait tourner toutes les têtes. Elle sera la maîtresse du poète et écrivain italien Gabriele D'Annunzio, par exemple. A Paris, à l'instar de Colette, sa contemporaine, elle aura des relations lesbiennes avec une artiste peintre qui finira par la quitter. Luisa, dans une fuite en avant éperdue, s’enivre de la vie et joue avec...tout ce qu'elle veut, c'est la croquer à pleines dents, elle aime l'originalité et tant pis si elle passe pour une illuminée : ainsi, jeune mariée, elle fait accrocher le squelette d'un dinosaure au plafond du salon de la villa qu'elle partage avec Camillo...elle possède des serpents et notamment un boa constrictor qu'elle promène enroulé autour de son cou et de ses bras. Droguée et opiomane, adepte des sciences occultes, on a l'impression que Luisa Casati navigue dans une dimension étrangère à la nôtre, bien au-dessus d'un monde trop fade et collet-monté à son goût. Et on ressent alors pour elle un mélange d'admiration incrédule et de répulsion.
    La Casati va connaître des années fastes : elle fera la pluie et le beau temps à Paris, à Londres, en Italie...elle semble entièrement déconnectée de la réalité, diva qui veut exaucer ses moindres désirs, jette l'argent par les fenêtres et exige des autres qu'ils s'exécutent immédiatement. Plus dure sera la chute...et effectivement, pour la Casati, qui meurt en 1957, réduite à la mendicité, la fin est amère. Elle n'est plus que l'ombre d'elle-même, un personnage caricatural, une vieille femme diminuée aux yeux cerclés de charbon parce qu'elle n'a plus les moyens de se payer du khôl, qui a fui dettes et créanciers et vit dans un logement miteux de Londres. On dit que, pour survivre, elle sera obligée de fouiller les poubelles des grands magasins à la recherche d'objets ou chutes de tissu à vendre pour assurer son quotidien.
    Quand Camille de Peretti découvre Luisa Casati, c'est une jeune femme, elle a une vingtaine d'années. Enlisée dans un mariage raté mais malgré tout toujours très amoureuse de son mari, elle est encore fragilisée par l'anorexie mentale dont elle a souffert plusieurs années plus tôt et dont elle s'est remise tant bien que mal (elle a raconté cet épisode de sa vie dans le livre Thornytorinx). Ayant des désirs de jouer la comédie, rêvant de devenir actrice, elle s'est laissée convaincre par Henry, un réalisateur new-yorkais raté, de venir tourner pour lui un film à petit budget, dans un appartement glauque de la Grosse Pomme. C'est cet Henry, soit-disant plus ou moins amoureux d'elle et qui veut absolument faire d'elle son actrice principale, qui lui parle de la Casati. Rentrée en France, Camille se lance sur ses traces pour écrire ce livre, qui est...qui est quoi, d'ailleurs ? On a tendance à tout ranger dans des cases, on est bien d'accord et on le fait aussi pour les livres : roman historique, roman policier, romance, biographie, essai...des genres littéraires, il y'en a à la pelle...Et ce livre-là est assez inclassable...je me demande d'ailleurs si ce n'est pas pour cette raison qu'il a suscité parfois des avis particulièrement secs et péremptoires, comme celui d'une lectrice, lu sur internet, qui n'a pas du tout aimé le livre et conclut son avis par « un on m'a vendu la biographie de La Casati et non de Camille de Peretti !! » qui a au moins le mérite d'être clair. C'est vrai que le résumé est assez trompeur et je n'aurais pas lu l'avis de cette lectrice avant de me lancer, pour sûr, j'aurais été aussi très surprise parce ce qui semble être, de prime abord, la biographie -à la limite, la biographie romancée- de Luisa Casati, et qui est en fait un livre assez étrange, où tout se mélange...car Camille de Peretti, loin de se contenter de raconter le destin extraordinaire de cette femme, parle d'elle. Beaucoup. Et notamment de ce mariage raté avec un peintre raté qui se prend pour un grand artiste et tyrannise ses proches et notamment sa jeune femme soumise et silencieuse qui n'arrive pas à s'imposer et supporte jusqu'à finalement tout envoyer balader. J'étais prévenue, donc je n'ai pas été surprise par cette approche pour le moins étrange : cela dit, si je n'ai pas été forcément étonnée et que, au fond, je n'ai pas détesté ce parti-pris, je dois avouer que je ne l'ai pas spécialement compris. Que l'auteure, éventuellement, nous parle dans une préface de son intérêt pour le personnage, de ce qui l'a emmenée à s'intéresser à la Casati, pourquoi pas ? Mais qu'elle insère des passages entiers dans le livre, des blocs devrais-je dire, où elle raconte sa vie...n'étant pas du tout à l'aise avec ces grands déballages dont notre société est coutumière et friande, des plateaux de télés jusqu'aux bouquins où l'on étale et décortique notre vie privée, j'avoue que j'ai parfois eu la désagréable impression d'être une voyeuse, de lire quelque chose qui ne m'appartient pas et qui ne devrait pas m'appartenir, jamais. Ce qui s'est passé dans la vie de Camille de Peretti ne me concerne pas et en soi, je n'avais pas spécialement envie de l'être, concernée, justement...

    Portrait photographique de Luisa Casati, intitulé « Pearls », par Adolf de Meyer 


    Cela dit, une fois habituée, je dois dire que je n'ai pas passé un mauvais moment et j'ai trouvé qu'elle écrivait très bien, cette auteure que je ne connaissais pas...c'est peut-être parfois un peu affecté, oui...mais dans l'ensemble, c'est d'une plume fluide et bien dosée que Camille de Peretti construit son récit. Cette Luisa, qui devient sa muse, une idole, reste entourée de bien parts d'ombres. On ne sait pas exactement qui est la Casati, elle qui s'est plu à brouiller les pistes, à tel point que si vous lisez sa biographie sur Wikipédia, vous verrez qu'on lui attribue deux dates de mort, l'une en 1957 et l'autre en 1983 ! L'auteure émet des hypothèses, avec des si et des peut-être...elle ne prétend pas raconter la vérité vraie d'une femme qui, elle-même très certainement, ne la connaissait pas. Nous sommes plus dans une biographie romancée que dans une véritable biographie rigoureuse, basée sur des sources, des recherches... Camille de Peretti a suivi la trace de la Casati, notamment en Italie, visitant la villa Amalia, où elle a vécu enfant puis adolescente. Ayant résidé un temps à Londres, elle s'est rendue sur sa tombe, dans le cimetière de Brompton...mais ce qu'elle a voulu restituer avant tout, du moins je le vois comme ça, c'est une Luisa Casati de chair et de sang. Un peu comme l'ont fait les deux sœurs Anne et Claire Berest dans le roman Gabriële, où elles partent à la rencontre de cette femme mystérieuse (leur arrière-grand-mère) et qu'elles racontent, en acceptant que des parts de mystère ne soient jamais élucidées et disparues à jamais dans les brumes du passé. Alors, le travail du romancier, c'est de se dire : et si ? Et Camille de Peretti le fait très bien. Cette Casati dont elle brosse le portrait devient très vraisemblable. Peut-être la vraie marquise n'était-elle pas, de son vivant, exactement telle que la décrit ici Camille de Peretti...peut-être celle-ci a-t-elle mis d'elle-même dans son personnage, de ses propres expériences...et alors ? Au final, la marquise de Casati a été un personnage tellement hors normes qu'on croit volontiers tout ce que l'on peut lire sur elle dans ce livre ! Après tout, on ne prête qu'aux riches, comme on dit...
    Ce livre a été un roman extrêmement surprenant et s'il m'a laissée perplexe parfois, dans l'ensemble, j'ai aimé découvrir cette femme que je ne connaissais absolument pas auparavant...je n'avais jamais entendu parler de la Casati, je n'ai jamais même lu son nom mentionné dans un livre, un roman, comme si on l'avait complètement oubliée. Cette mondaine qui est la contemporaine de tout un monde -Sarah Bernhardt, Liane de Pougy, Man Ray, De Meyer, les surréalistes- semble avoir été engloutie par l'Histoire. Et Camille de Peretti, dans ce roman, lui rend sa voix et lui redonne un peu de visibilité. Rien que pour cela, en tant que lectrice, je ne peux que me féliciter qu'elle l'ait fait et peu importe, au final, comment elle l'a fait. Bien sûr, le livre aurait été absolument horrible à lire, je ne vous dirais pas ça...mais même si on ne comprend pas vraiment pourquoi l'auteure a tenu absolument à se raconter en même temps qu'elle raconte Luisa, si parfois ce déballage intime met un peu mal à l'aise, pour ma part, j'ai surtout envie de me souvenir des chapitres concentrés sur la Casati et je me dis que son travail d'auteure a été bien mené par Camille de Peretti. Elle trouve les mots justes et son style est agréable. La Casati sera peut-être pour moi la lecture la plus surprenante de l'année mais sûrement pas une déception. J'ai voyagé au début de ce XXème siècle plein de fougue et de fièvre, dans un monde révolu et qui nous fait ouvrir de grands yeux ronds. Nos aïeux étaient bien plus extravagants et vivants que toutes les photos sépia que l'on conserve d'eux peuvent nous le laisser croire ! Si vous aimez les livres qui sortent du lot, les livres inclassables mais qui vous font vous interroger, alors lisez La Casati, en n'oubliant pas que ce n'est pas un récit entièrement centré sur elle et que, peut-être, le résumé induit légèrement en erreur et alors, j'espère que comme moi, vous saurez vous laisser convaincre. 

    En Bref :

    Les + : une approche intéressante, un personnage central intéressant parce que tellement hors normes et excentrique et une plume fluide et agréable à lire. 
    Les - :
    le résumé un peu trompeur qui nous laisse penser qu'on va lire une biographie alors que ce livre est assez inclassable. 


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