• « Mais la guerre n'est-elle pas autant une affaire de chance que de raison ? »

    Couverture Récits du temps de Charles V, tome 1 : La rançon du roi Jean

     

     

     

       Publié en 2022

     Éditions Robert Laffont

     496 pages 

     Premier tome de la saga Récits du temps de Charles V

     

     

     

     

    Résumé :

    A l'approche des fêtes de la Nativité de l'an de grâce 1360, le roi de France Jean le Bon est enfin de retour à Paris après quatre années de captivité en Angleterre. En échange de sa libération définitive, Edouard III exige le versement d'une prodigieuse rançon.
    Durant l'absence du souverain, c'est au régent, le dauphin Charles, qu'il revient de rassembler la somme exigée, dont une partie est payée par Galéas Visconti, seigneur de Milan. Les coffres remplis de florins partent d'Italie sous la protection de Pietro da Sangallo - ancien condottiere et capitaine de la milice de Florence - de l'ambassadeur du prince milanais - le poète Pétrarque - et d'une imposante escorte.
    Pour rejoindre Paris, il va leur falloir déjouer les pièges tendus par le comte d'Evreux, Charles le Mauvais, qui brigue le trône de France et a tout intérêt à mettre la main sur le butin, mais aussi les trahisons et complots fomentés au sein même de la troupe. Le voyage sera long et périlleux. La légendaire bravoure du Florentin suffira-t-elle à garantir la stabilité du royaume ?

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    En 1356, suite à la désastreuse bataille de Poitiers, le roi Jean II le Bon doit non seulement affronter la défaite de ses troupes mais aussi se constituer prisonnier auprès du roi d'Angleterre, son vainqueur. Mais quatre ans plus tard, alors que les fêtes de la Nativité approchent, la colossale rançon demandée par Édouard III est sur le point d'être quasiment rassemblée et Jean II va pouvoir regagner son royaume où, pendant quatre ans, son fils aîné le Dauphin Charles a tenu les rênes du pouvoir avec plus ou moins de réussite : ainsi, deux ans plus tôt, le jeune homme a dû faire face à la révolte des Parisiens menée par le prévôt des marchands, Étienne Marcel et soutenu dans ses projets par le roi de Navarre, Charles le Mauvais, qui réclame aussi le trône de France en vertu de son ascendance : il est en effet un descendant du roi Philippe le Bel par sa mère, la reine Jeanne de Navarre.
    En cette fin d'année 1360, une proposition inespérée est arrivée de Milan : Galéas Visconti, en échange d'une alliance matrimoniale avec la France, a proposé une somme des plus importantes, qui permettrait à Jean II le Bon de solder une partie de sa rançon. Comme ambassadeur auprès du roi de France, le duc de Milan missionne le poète Pétrarque et pour commander la troupe armée censée protéger le convoi, Visconti contacte Pietro da Sangallo qui, quelques années plus tôt, s'est distingué dans une intrigue qui touchait la Provence et impliquait un célèbre chef d'une compagnie mercenaire, Arnaud de Cervole.
    Sans être réellement une suite, La rançon du roi Jean fait suite chronologiquement à L'archiprêtre et la cité des Tours, qui mettait déjà en scène le personnage de Pietro da Sangallo. Je l'ai lu il y a deux ans et ce n'est pas le roman de Jean d'Aillon qui m'avait le plus convaincue. Mais ce roman m'a été envoyé par les éditions Robert Laffont et le résumé était tout de même tentant. Et c'est vrai que l'intrigue n'est pas mal, c'est un bon récit d'aventures, à travers l'Italie et la France des années 1360.

     

    La bataille de Poitiers, en 1356, qui coûtera sa liberté au roi Jean II et ouvrira une période de troubles dans le royaume de France


    Mais je ressors de cette lecture malgré tout assez déçue et un peu en colère parce que le livre est truffé de coquilles : une ou deux passent encore, après tout, je suis la première à dire que l'erreur est humaine. Ça m'arrive aussi de faire des fautes, d'orthographe ou de syntaxe parce que je ne suis pas un robot et les auteurs et les correcteurs non plus. Mais quand ça se reproduit plusieurs fois, que les simples coquilles s'ajoutent à des mots absents ou à des tournures de phrases un peu boiteuses, on finit par se demander ce qu'il s'est passé au moment de la correction et même, s'il y en a eu une ! Passons sur les noms qui ne sont jamais orthographiés pareil, sur une Marguerite de Bourgogne qui devient une Jeanne et sur le fait que Charles le Mauvais est successivement présenté comme le fils de Jeanne de Navarre (véridique) ou comme son petit-fils (là, c'est nettement moins vrai). A nouveau, je me dis que l'auteur ne peut pas tout voir car, dans le feu de l'action de l'écriture, ce genre de coquilles ou d'approximations peut passer à la trappe : combien de fois cela nous arrive-t-il d'avoir une idée qui va plus vite que nos doigts et de se retrouver avec une phrase, au mieux boiteuse, au pire qui ne veut absolument rien dire ? Mais justement, les relecteurs et correcteurs ne sont-ils pas là pour supporter le travail de création de l'auteur et déceler ces erreurs ? Le roman en grand format est vendu près de 23 euros et franchement, ce n'est pas possible de proposer un produit fini comme celui-là, je suis désolée : j'ai parfois eu l'impression de lire une épreuve non corrigée mais cela n'est mentionné nulle part sur le livre, donc je pense que ça n'est pas le cas.
    Je n'ai pas l'habitude de râler comme ça et j'essaie de fermer les yeux sur les petites erreurs : quand il y en a peu, honnêtement je le fais volontiers. Mais là, vraiment, j'ai fulminé ! Je voulais quand même aller au bout de cette lecture, même si je me suis un peu ennuyée parfois, juste pour savoir comment l'intrigue allait évoluer, d'autant plus qu'elle n'est pas mauvaise - même si l'auteur a tendance parfois à se perdre dans des détails et là, pour le coup, ça n'était pas forcément nécessaire.
    Je ressors donc de cette lecture assez mitigée. C'est vrai que L'archiprêtre et la cité des Tours n'avait pas été mon roman préféré de Jean d'Aillon, comme je vous le dis plus haut. Je n'ai donc pas été surprise de constater que j'aimais moins ce roman que sa saga Guilhem d'Ussel ou Les chroniques d'Edward Holmes car elle se situe dans le même univers. Il est vrai également que la situation politique complexe du royaume de France, entre les années 1350 et 1360, dans un contexte de conflit de succession avec l'Angleterre, n'est pas évidente non plus à suivre et qu'il faut s'accrocher pour bien tout saisir. Cela avait déjà été le cas avec L'archiprêtre et la cité des Tours.
    Globalement, ça n'était pas une lecture désagréable au contraire. Moi qui aime bien l'univers aventurier et historique de Jean d'Aillon, je l'ai retrouvé ici sans peine, mais gros bémol sur la forme qui dessert le fond, avec ce travail de correction bâclé. Dommage.

    En mai 1358 a lieu la Grande Jacquerie, une grande révolte de la paysannerie du nord du royaume dans le contexte de la lutte du Dauphin et d’Étienne Marcel

    En Bref :

    Les  + : un récit plein d'aventures et de périls dans l'Italie et la France du Moyen Âge...
    Les - : ...cela dit, je ne sais pas si je lirai la suite, car je ressors de cette lecture assez déçue des très nombreuses coquilles ou approximations historiques qui ont passé le cap de la correction éditoriale. Cela a quelque peu gâché ma lecture, dommage. 


    Récits du temps de Charles V, tome 1, La rançon du roi Jean ; Jean d'Aillon 

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     


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  • « Prenant du recul, Delilah entrevit les possibilités défiler dans son esprit. A voir au-delà de ce qui était visible... »

    Couverture Les détectives du Yorkshire, tome 8 : Rendez-vous avec le diable

     

     Publié en 2022 (en Angleterre)

     En 2022 en France (pour la présente édition)

     Titre original : The Dales Detective Series, book   8, Date with Evil 

     Éditions Robert Laffont (collection La Bête Noire)

     445 pages 

     Huitième tome de la saga Les Détectives du Yorkshire

     

     

     

     

    Résumé :

    Un vent de panique souffle sur Bruncliffe : plusieurs vols sont recensés et un terrible incendie provoque l'explosion d'une caravane.
    Pour couronner le tout, Mme Lister débarque à l'Agence de recherche des Vallons pour déclarer la disparition de son fils Stuart. 
    Incendie criminel, vols, disparition inexpliquée : tous ces incidents convergent vers un dangereux multirécidiviste. Samson et Delilah, les deux détectives les plus respectés des Vallons, mènent l'enquête. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    L'été arrive à Bruncliffe et dans les Vallons et, avec lui pourrait-on penser, la légèreté de la belle saison (et aussi les ouragans estivaux). Mais Delilah Metcalfe et Samson O'Brien n'ont jamais été aussi proches de résoudre la plus périlleuse de leurs enquêtes, une enquête qui touche le crime organisé et pourrait peut-être impliquer un enfant du pays.
    Rendez-vous avec le diable, huitième tome des Détectives du Yorkshire, autrement dit huitième enquête de nos fins limiers des Vallons, est le point d'orgue d'une affaire dont on suit les rouages depuis un moment déjà, le lecteur ayant d'ailleurs des clefs en main que même les personnages n'ont pas. On sait que le dénouement est proche et bien évidemment, c'est ce qui rend ce tome haletant car jusqu'au bout, on se demande si Samson et Delilah vont réussir à dénouer les fils de cette enquête très très embrouillée, qui démarre notamment avec le signalement de la disparition de Stuart, l'employé de l'agence immobilière Taylor...pourquoi ce jeune homme en apparence sans histoire a-t-il quitté du jour au lendemain son emploi et son appartement, envoyant une carte postale du bout du monde à sa mère pour la rassurer, carte postale qui pourtant s'avère un faux ? Et que se passe-t-il chez les Capstick qui parvienne à faire sortir George, le frère d'Ida, de son monde intérieur ?
    Moins palpitant que le tome précédent qui était une  véritable course-contre-la-montre, ce huitième tome n'en est pas moins très intéressant car c'est peut-être ici que nous prenons véritablement la mesure de cette série : les Détectives du Yorkshire est certes une série de cosy mystery, parfois légère, avec des personnages même parfois un peu parodiques ou très drôles mais qui peut aussi traiter de sujets graves et qui surfent sur l'actualité - et pas la plus belle, autant vous le dire. Cela apporte un véritable relief à cette série et lui donne une teneur bienvenue qui n'en fait pas juste une lecture légère et sans prise de tête mais peut aussi nous amener à réfléchir sur le monde dans lequel nous vivons et que même les lieux qui paraissent les plus accueillants peuvent receler une part d'ombre.
    Pour autant, c'est toujours un plaisir de revenir à Bruncliffe. J'adore vraiment cet univers et tous les personnages qui la peuplent, de nos deux limiers bien évidemment (dont la relation prend depuis quelques temps un tour nouveau et qui va probablement se développer jusqu'à la fin de la série, nécessitant sûrement des personnages de prendre des décisions ou faire des concessions), en passant par Calimero, les retraités de Fellside Court, toujours prêts à mener leurs propres investigations de leur côté, le jeune constable Dany Bradley qui ne paye pas de mine mais s'avère être en fait un policier de terrain efficace et chevronné, Lucy qui régale toujours les habitants de ses délicieuses pâtisseries, Ida et son thé made in Bruncliffe qui pourrait réveiller une momie égyptienne...
    J'adore retrouver des univers agréables et chaleureux, comme si on retrouvait la famille ou de vieux amis et c'est vraiment ce qui se passe avec les Détectives. Pour autant, je sens bien que cette série approche de son dénouement et le fait que cette enquête mette fin à une intrigue qui prend corps depuis plusieurs volumes déjà laisse évidemment présager un dénouement plus général et un dénouement de plus en plus proche. Le fait que la relation entre Delilah et Samson se développe aussi. Mais quelque part, c'est bien : savoir s'arrêter avant que ça ne s'essouffle, même si cela doit frustrer le lectorat. Ne vaut-il pas mieux cela que de le décevoir ? J'imagine que les deux tomes suivants vont revenir à des enquêtes plus traditionnelles mais cela n'est pas pour me déplaire pour autant. Je suis d'ores et déjà ravie de retrouver Bruncliffe dans deux enquêtes même si déjà un peu triste de les quitter tous.

    En Bref :

    Les + : tout se débloque dans ce tome 8 et des infos distillées depuis le premier tome se justifient ici. Ce huitième volume est assurément un tome-charnière de la série, trait d'union entre son début et sa fin qui se profile à l'horizon.
    Les - : pour moi, aucun, même si ce huitième tome est moins palpitant que le précédent.


     Les Détectives du Yorkshire, tome 8, Rendez-vous avec le diable ; Julia Chapman

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Retrouvez ci-dessous mes avis sur les sept premiers tomes :

    Rendez-vous avec le crime

    Rendez-vous avec le mal (pour un cosy murder 100% Noël)

    Rendez-vous avec le mystère

    Rendez-vous avec le poison

    Rendez-vous avec le danger

    Rendez-vous avec la ruse

    Rendez-vous avec la menace


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  • « L'or et les armes ne sont que des outils. Ils peuvent servir à imposer un État. Ils ne lui donneront jamais une âme. »

    Couverture Magnificat

     

     

     Publié en 2021

     Éditions 10/18

     570 pages 

     Deuxième tome de la saga Occitania

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Janvier 1177. Dernière de sa dynastie, Ermengarde de Narbonne est en danger. Les riches marchands de la ville veulent faire du comté une république.
    Dans un palais déserté de sa cour et assiégé par la neige, Ermengarde assiste aux meurtres de ses derniers appuis et ne voit qu'une solution pour rallier le peuple à sa cause : confier la création d'un spectacle au troubadour Guilhem de Malpas.
    Mais l'art saura-t-il triompher de la violence et de la cupidité ?

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Hiver 1177. La ville de Narbonne est prise dans les glaces d’un hiver extrêmement rigoureux. Au palais comtal, la comtesse Ermengarde de Narbonne se trouve par la force des choses confinée avec sa « cour » : Aloïs, sa dame d’atours et lectrice, le fils adoptif de cette dernière, le jeune troubadour Guilhem de Malpas, à qui la comtesse a commandé la création d’un grand spectacle édifiant pour le peuple de la cité – Guilhem qui a retrouvé sa jeune sœur, belle comme le jour –, Odin Glumsson, le capitaine dévoué de sa garde, originaire des lointaines Orcades…
    Mais Narbonne, malgré son manteau de neige est en ébullition et le pouvoir de la comtesse remis en cause par les marchands de la ville qui cherchent le soutien de Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse. A cette occasion, ceux-ci ont reçu le soutien de l’évêque Pons d’Arsac qui n’hésite pas à mettre la main au complot et qui, par ce biais entend bien lutter lui aussi pied à pied contre le pouvoir séculier de la comtesse et son indulgence pour ceux qui se font appeler les Vrais Chrétiens (autrement dit, les cathares), tout en veillant à ce que les commerçants ne prennent pas un pouvoir exagéré qui ne leur revient pas.
    Narbonne est donc une poudrière qui n’attend plus que le signal convenu pour imploser et mettre à bas les anciennes coutumes. La comtesse Ermengarde parviendra-t-elle à déjouer les plans de ses adversaires et à se tirer de leurs griffes ?
    Magnificat (1177) fait suite de peu à Angélus (1165) et précède Requiem (1210) mais les livres peuvent être lus indépendamment les uns des autres sans que cela ne pose un problème. Dans ce volume, l’enquête policière a laissé la place aux complots politiques, ce qui peut expliquer le bandeau apposé par l’éditeur en première de couverture : L’Occitanie aussi a son trône de fer. J’avoue que j’ai ressenti une petite pointe de déconvenue lorsque je me suis rendu compte que, non, nous ne suivrions pas à l’instar d’Angélus une véritable enquête policière et médiévale mais plutôt les mécanismes de mise en place d’un complot dans le cadre d’une affirmation de pouvoir local. Pour autant, ça reste intéressant car ce que raconte l’auteur est vrai : en 1177, la comtesse de Narbonne va devoir faire face aux velléités de son puissant voisin, le comte de Toulouse qui va l’obliger à quitter la ville, où elle ne reviendra qu’en 1179, avec son neveu et héritier, Pedro de Lara.
    Née vers 1129, figure marquante de l’Occitanie médiévale, Ermengarde est une contemporaine de la puissante duchesse d’Aquitaine Aliénor, avec laquelle elle partage pas mal de points communs à commencer par celui d’avoir été des gouvernantes de plein droit sur des terres héritées de leurs pères et d’avoir été des mécènes, protectrices des arts et des lettres et notamment des troubadours, qui ont fait du sud de la France du XIIème siècle le creuset d’une émulation culturelle et artistique qui pourrait presque s’apparenter à une renaissance avant la lettre.
    C’est ce sud de la France florissant du Moyen Âge central que se plaît à mettre en scène l’auteur dans son roman, comme dans Angélus, mais l’ambiance thriller en moins. Ici, j’ai ressenti plusieurs inspirations : dans ce palais prisonnier des glaces, où ses occupants sont confinés par la force des choses, on ne peut s’empêcher de penser aux moines d’Eco, prisonniers de leur abbaye de Ligurie dans Le nom de la rose. La geste chevaleresque de ce Moyen Âge courtois, mâtiné de fin’amor, qui peut rappeler aussi un peu les valeurs véhiculées par la légende arthurienne, est aussi très présente : l’abnégation plutôt que l’égoïsme, le rachat de la faute qui conduit à la rédemption, l’amour qui peut tout guérir, même ceux qui sont revenus de tout quand, au contraire, elle peut détruire ceux qu’elle a déçus et qui n’ont pas le cœur pur. Enfin, comme dans Angélus, il est souvent question des Vrais Chrétiens, ces adeptes d’une doctrine séditieuse à l’église de Rome, partisans d’un monde manichéen et qui adoptent un mode de vie frugal et simple. Ceux que l’Histoire retiendra sous le nom de « cathares » ou d’ « Albigeois » seront pourchassés lors d’une grande croisade levée par le pape, avec l’aide des seigneurs du Nord de la France, qui viendront conquérir les terres méridionales des Saint-Gilles ou encore, des Trencavel. Pour le moment, les Vrais Chrétiens vivent en bonne intelligence avec les populations, souvent protégés par leurs seigneurs qui se montrent indulgents avec eux, à l’image de la duchesse Ermengarde, qui n’hésite pas à missionner son troubadour Guilhem de Malpas pour monter un spectacle au discours dangereusement séditieux.
    Au-delà de ça, ce qui fait vraiment toute la force de ce roman, comme pour Angélus d’ailleurs, c’est le style de l’auteur : la plume de Soulié sait se faire douce, alerte, caressante ou plus triviale et violente lorsqu’il le faut. A l’image de Jean d’Aillon dans ses romans historiques ou encore de Christine Machureau dans sa série Mémoire froissée, l’auteur puise dans le lexique ancien pour saupoudrer son texte de mots médiévaux qui lui donnent relief et authenticité.
    Je n’ai pas eu le coup de cœur que j’attendais un petit peu. J’avoue qu’après celui ressenti au moment de la lecture d’Angélus, je me plaisais à croire que l’essai pouvait être transformé. Ce ne fut pas le cas et j’avoue que si la première partie du roman – un peu plate – m’avait plus captivée, j’aurais sûrement pu dire dans cette chronique que j’avais vraiment beaucoup aimé ce roman. A la place, je peux dire que j’ai beaucoup aimé et que j’ai passé un très bon moment de lecture : entre nous, ce n’est déjà pas si mal, non ? Et même si je juge Magnificat un peu en-dessous d’Angélus, il a réussi à me surprendre et j’attends déjà avec impatience Requiem.

    En Bref :

    Les + : heureusement, après un début en demi-teinte, ça bouge dans la deuxième partie et le roman se termine dans une flamboyance d'événements qui se bousculent en cascade. 
    Les- :
     j'ai trouvé la première partie du roman un peu plate, pas forcément très entraînante et je m'attendais à ce que l'aspect policier soit aussi présent que dans Angélus, ce qui n'est pas le cas.


    Magnificat ; François-Henri Soulié

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Découvrez mon avis sur Angélus, premier tome d'Occitaniajuste ici

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  • «  C'est le problème quand on convoque des démons, voyez-vous. Tôt ou tard, quelqu'un d'autre les dresse contre vous. »

     

     

     

     Publié en 2020 en Angleterre

     En 2023 en France (pour la présente édition)

     Éditions 10/18

     624 pages

     

     

     

     

    Résumé :

    1634. Le Saardam quitte les Indes orientales pour Amsterdam. À son bord : le gouverneur de l'île de Batavia, sa femme et sa fille. Au fond de la cale, un prisonnier : le célèbre détective Samuel Pipps, victime d'une sombre affaire. Alors que la traversée s'avère difficile et périlleuse, les voyageurs doivent faire face à d'étranges événements. Un symbole de cendres apparaît sur la grand-voile, une voix terrifiante se fait entendre dans la nuit, et les phénomènes surnaturels se multiplient. Le bateau serait-il hanté, ses occupants maudits ? Aucune explication rationnelle ne semble possible. Et l'enquête s'avère particulièrement délicate, entre les superstitions des uns et les secrets des autres.

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    1634. A Batavia (l’actuelle Jakarta), le Saardam, navire de la Compagnie des Indes orientales s’apprête à appareiller, direction Amsterdam. A son bord, de nombreux passagers, notamment le lieutenant général de la ville et sa famille - ce dernier s'apprête à regagner la métropole pour intégrer les Gentlemen 17, les très puissants dirigeants de la Compagnie des Indes, principale compagnie commerciale néerlandaise de 1602 à 1799 -, ainsi que le détective privé Samuel Pipps et son acolyte Arent, ancien mercenaire. Étrangement, le fameux détective est aux fers, emprisonné dans la cale du Saardam et doit compter sur les yeux et les oreilles de son compagnon, Arent Hayes, pour tenter de résoudre le mystère du navire maudit.
    Car, alors que l’équipage s’apprête à hisser les voiles, un étrange personnage maudit le Saardam. Une fois en mer, un étrange et effrayant signe de cendre apparaît sur la grand-voile, une inquiétante lanterne rouge s’allume sur les flots et une voix désincarnée murmure à l’oreille des passagers et des marins. De là à ce que la psychose se propage comme une traînée de poudre, il n’y a qu’un pas et quand des événements mystérieux surviennent, le Saardam devient le point de convergence de peurs irréfléchies et superstitieuses, dans un contexte de chasse aux démons et leurs sbires.
    De là va naître la question que l’on se pose tout au long du roman : le navire est-il véritablement victime d’une malédiction surnaturelle ou seulement la proie d’un être humain particulièrement malfaisant ? Et donc : lit-on un simple thriller, inquiétant notamment du fait de l’isolement du navire au milieu de l’océan et des événements qui surviennent en série ou bien L’étrange traversée du Saardam est-il un roman mâtiné de fantastique assumé ?
    Brumeux, ce roman a d’indéniables qualités et atouts et je l’ai beaucoup apprécié, malgré un début laborieux, des personnages non pas pléthoriques mais tout de même suffisamment nombreux pour que je les confonde au départ…et forcément, il a pour lui son ambiance assez particulière et la sensation d’oppression qui naît à mesure que le roman se déroule, car L’étrange traversée du Saardam est un véritable huis-clos maritime, où toute échappatoire est impossible.
    Comme dans n’importe quel roman policier, l’auteur nous balade d’une hypothèse à l’autre, sans jamais véritablement nous fixer sur l’une ou sur l’autre. En tout cas, une chose est sûre, la révélation finale ne m’était absolument pas venue à l’esprit au départ et l’auteur, là-dessus, parvient à préserver habilement son suspense.
    Pour moi, le gros bémol de ce roman, c’est sa fin qui est bâclée et c’est vraiment dommage : j’ai eu l’impression que l’auteur l’avait un peu torchée, comme s’il était pressé d’en finir, alors que les dernières révélations font naître pas mal de questionnements chez le lecteur. J’avoue que je n’ai pas eu de réponse et que j’ai terminé ce roman, finalement très bon, avec un arrière-goût de frustration, parce qu’il s'achève un peu en queue-de-poisson et on se dit : ah, mais c’est déjà fini ? Du coup, tout ça pour ça ?
    J’avoue que c’est un petit défaut qui m’aura pas mal gênée, sans pour autant avoir une incidence sur mon ressenti global qui est, il faut bien l’avouer, plutôt bon. Je ne connaissais pas Stuart Turton et j’ai beaucoup aimé le découvrir avec ce roman assez unique en son genre, même si à la lecture du résumé, je m’attendais à quelque chose de plus terrifiant. Finalement, on peut en conclure que nos peurs les plus enfouies et les superstitions les plus tenaces, de nos jours ou dans les années 1630, sont probablement celles qui nous effraient le plus.

    En Bref :

    Les + : une lecture assez immersive et idéale pour l'automne.
    Les - : des premiers chapitres assez laborieux et une fin un peu expédiée, qui ne répond pas forcément aux questions qui ont pu naître au cours de la lecture. 


    L'étrange traversée du Saardam ; Stuart Turton

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     


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  • « Il est des intérêts supérieurs devant lesquels tout doit s'incliner. La fin alors justifie les moyens. »

    Couverture Le bureau des affaires occultes, tome 1

     

     

         Publié en 2022

      Editions Le Livre de Poche

      432 pages 

      Premier tome de la saga Le bureau des affaires        occultes 

     

     

     

     

     

    Résumé :

    1830. Dans un Paris fiévreux encore sous le choc des Journées révolutionnaires de juillet, le gouvernement de Louis-Philippe, nouveau roi des Français, tente de juguler une opposition divisée mais virulente. Le jeune inspecteur Valentin Verne est muté à la brigade de sûreté, fondée quelques années plus tôt par le fameux Vidocq. Il doit élucider une série de morts étranges susceptible de déstabiliser le régime. Car la science qui progresse, mêlée à l'ésotérisme alors en vogue, inspire un nouveau type de criminalité. Féru de chimie et de médecine, cultivant un goût pour l'irrationnel. Valentin sait en décrypter les codes. Nommée à la tête du bureau des affaires occultes, un service spécial chargé de traquer ces malfaiteurs modernes, il va donner la preuve de ses extraordinaires compétences. 
    Mais qui est vraiment ce policier solitaire, obsédé par la traque d'un criminel insaisissable connu sous le surnom du Vicaire ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    A l’automne 1830, la France vient, encore une fois, de changer de régime : en juillet, les Trois Glorieuses ont eu raison de Charles X et de son règne commencé en 1824. Le roi, contraint d'abdiquer et laisser son trône à son cousin Orléans, Louis-Philippe Ier, devenu roi des Français.
    C’est dans un contexte politique complexe et fiévreux que survient l’étrange suicide du fils d’un député : qu’est-ce qui a pu pousser le jeune homme à mettre fin à ses jours alors que ses parents s’apprêtaient à annoncer ses fiançailles ?
    C’est un jeune inspecteur de la Sûreté, Valentin Verne, solitaire et taiseux qui est chargé de l’enquête par ses supérieurs. Historiquement, la brigade de sûreté a été dirigée l'ancien bagnard Eugène-François Vidocq et employait des repris de justice censés s'infiltrer dans les milieux criminels de la capitale. Le Service de la Sûreté quant à lui sera créé le 15 novembre 1832 par le préfet de police Henri Gisquet afin de la remplacer. 
    Le jeune homme, malgré un caractère ombrageux, est une bonne recrue mais il est rongé par un combat obsessionnel et plus intime : sa lutte contre un prédateur de l’ombre, surnommé le Vicaire. 
    Ce premier tome lance la nouvelle série policière d’Eric Fouassier, Le bureau des affaires occultes, qui en compte trois pour le moment.
    L’auteur situe son intrigue dans un contexte intéressant : les débuts de la Monarchie de Juillet, marqués par une grande instabilité sociale et politique. 
    L'année dernière, à peu près à la même époque, je découvrais Les Francs Royaumes, une duologie que j'ai beaucoup aimée. Elle prenait corps dans un contexte historique tout aussi intéressant et qui est peu représenté dans les romans : la faide royale des VIème et VIIème siècles, marquées notamment par les figures majeures de deux reines, Frédégonde et Brunehaut. Tout naturellement, j'ai eu envie de découvrir d'autres romans d'Eric Fouassier, dont l'univers policier et historique correspond entièrement à mes goûts littéraires
    Est-ce que ce premier tome du Bureau des affaires occultes a été une bonne découverte ? Assurément, oui ! J'ai vraiment beaucoup aimé. C'est avec plaisir que j'ai retrouvé l'écriture de l'auteur, entre langage littéraire et argotique du Paris des années 1800 et j'ai été très intéressée par ce nouveau personnage de policier : Valentin Verne. Je me rends compte que ce sont des personnages que j'aime beaucoup dans les romans, que ce soit Nicolas Le Floch, le chevalier de Volnay (Le commissaire aux morts étranges d'Olivier Barde-Cabuçon), Ben Ross ou Thomas Pitt (dans les romans victoriens d'Ann Granger et Anne Perry). Valentin a assurément sa place dans ce panthéon. Malgré son jeune âge, c'est un très bon « flic » mais l'on ressent une part de noirceur chez lui, une fêlure qui est peu à peu expliquée au cours du roman, afin de comprendre sa personnalité assez atypique, taiseuse, solitaire, se liant peu et n'accordant pas sa confiance facilement. On comprend assez vite que Valentin n'est peut-être pas exactement la personne qu'il dit être et que concilier sa profession et sa vie relativement luxueuse dans un quartier aisé de la capitale est en fait le moindre de ses paradoxes. 
    Cette première enquête de Valentin nous immerge complètement dans le contexte de la fin de l'année 1830 : la Monarchie de Juillet est toute jeune et les troubles politiques n'ont pas cessé avec l'abdication de Charles X puis son exil et celui de sa famille. Si son cousin Louis-Philippe, qui lui a succédé, se veut un roi libéral, proche de son peuple et presque bourgeois, il ne s'en heurte pas moins à une opposition virulente, articulée notamment autour des courants républicains qui se sont vus dépouiller de la Révolution de juillet et le parti bonapartiste qui continue d'être très actif et influent. A Vincennes, les anciens ministres de Charles X, parmi lesquels le prince de Polignac, à l'origine des ordonnances du 25 juillet qui ont coûté son trône au frère de Louis XVI, attendent leur jugement, que les républicains espèrent bien manipuler à leur profit, afin de discréditer le nouveau régime. 
    Parmi les plus radicaux, certains sont prêts à tout pour plonger la France de Louis-Philippe dans le chaos : et s'il faut pour cela manipuler les esprits pour en venir à leurs fins, ils ne reculeront devant rien, ce qui fait que Valentin va se heurter à des ennemis particulièrement acharnés à rester dans l'ombre pour continuer de saper les bases du nouveau régime. 
    Très immersif, ce premier volume est aussi assez visuel : j'avais l'impression tout du long de suivre une série ou un film et les images générées par les mots de l'auteur étaient très précises. C'est quelque chose que j'aime beaucoup dans mes lectures : pouvoir me projeter dans un univers que je visualise vraiment. Ce roman m'a rappelé un peu la série Police Paris 1900 même si cette dernière est chronologiquement postérieure. 
    Finalement, moi qui ne suis pas de base une passionnée du XIXème siècle, j'ai été complètement embarquée. Le roman a des accents de roman social, avec une description ponctuelle de ce Paris des années 1830, une ville en totale expansion ce qui implique forcément une part de terrible pauvreté. Le Paris des débuts de la Monarchie de Juillet n'est pas encore la ville assainie, aux grandes artères, du Second Empire. C'est une ville tentaculaire, qui tend sans cesse à s'agrandir vers ses faubourgs encore très ruraux, aux ruelles médiévales, aux quartiers déshérités où subsistent des ouvriers sans le sou, des prostituées, des enfants abandonnés et qui doivent subvenir comme ils peuvent à leurs besoins....
    Pour un premier tome, c'est vraiment prometteur. Certes, l'intrigue se pose et on fait connaissance avec les personnages principaux, avec l'univers mais cela ne se fait pas au détriment de l'intrigue policière. 
    Une chose est sûre, je n'ai désormais qu'une hâte : lire la suite et continuer de découvrir les enquêtes de ce nouveau personnage que je découvre avec intérêt ! 

    En Bref :

    Les + : un super roman, avec une ambiance particulière toute en clairs-obscurs et zones d'ombre que l'on se plaît à écarter à mesure qu'on avance dans sa lecture. Le personnage principal est très charismatique et l'intrigue toute entière servie par les style précis de l'auteur.
    Les - : pas de points négatifs à soulever.


    Le bureau des affaires occultes, tome 1 ; Eric Fouassier  

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     

    • Envie de découvrir d'autres livres d'Eric Fouassier ? Vous pourrez trouver ici ma chronique sur sa duologie médiévale Les Francs Royaumes

    Les Francs Royaumes (Par deux fois tu mourras / La fureur de Frédégonde)

     


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