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Le salon des précieuses

L'île des oubliés ; Victoria Hislop

« Ce n'est jamais une mauvaise chose de se satisfaire du présent. »

Couverture L'île des oubliés

 

 

  Publié en 2006 en Angleterre

  En 2021 en France (pour la présente édition)

  Titre original : The Island

  Éditions Le Livre de Poche

  552 pages

 

 

 

 

Résumé :

L'été s'achève à Plaka, un village sur la côte nord de la Crète. Alexis, une jeune Anglais diplômée d'archéologie, a choisi de s'y rendre parce que c'est là que sa mère est née et a vécu jusqu'à ses dix-huit ans. Une terrible découverte attend Alexis qui ignore tout de l'histoire de sa famille : de 1903 à 1957, Spinalonga, l'île qui fait face à Plaka et ressemblent tant à un animal alangui allongé sur le dos, était une colonie de lépreux...et son arrière-grand-mère y aurait péri. Quels mystères effrayants recèle cette île que surplombent les ruines d'une forteresse vénitienne ? Pourquoi Sophia, la mère d'Alexis, a-t-elle si violemment rompu avec son passé ? La jeune femme est bien décidée à lever le voile sur la déchirante destinée de ses aïeules et sur leurs sombres secrets...
Bouleversant plaidoyer contre l'exclusion, L'île des oubliés, traduit dans vingt-cinq pays, a conquis le monde entier.

Ma Note : ★★★★★★★★★ 

Mon Avis :

Un jour de printemps 1939, un homme emmène sa femme jusqu’à l’île de Spinalonga, au large de la Crète : pour Eleni, encore jeune, passionnée par son métier d’institutrice et mère de deux jeunes filles et en apparente bonne santé, c’est un départ sans aucun espoir de retour…peu de temps auparavant, elle a découvert sur sa peau une lésion qui, en cette fin des années 1930 en Crète est une véritable condamnation. Eleni a la lèpre, une sévère maladie dermatologique qui n’a alors pas encore de traitement. Les malades grecs sont relégués depuis 1903 sur une petite île au nord de la Crète, Spinalonga, où une véritable société parallèle s’est constituée. Car l’île que découvre Eleni n’est pas un mouroir, bien au contraire : Spinalonga est un village dynamique, fleuri de géraniums, avec des commerces, une pharmacie, une église et même une école car malheureusement la maladie n’est pas sectaire et touche même les plus jeunes. Surtout, cette vie de village a été rendue possible grâce à des personnes déterminées à vivre malgré tout, certaines formes de lèpre n’évoluant que lentement et permettant ainsi aux malades de vivre relativement normalement pendant de longues années.
Mais si la vie à Spinalonga s’avère finalement plus douce qu’il n’y paraissait, à Plaka, le village de pêcheurs en face de l’île où vivent le mari d’Eleni et ses deux filles adolescentes, Anna et Maria, une vie différente doit s’organiser, l’époux et les filles devant faire face au deuil compliqué d’une personne encore vivante et avec laquelle ils n’auront plus de contacts, ou presque.
Moins de vingt ans plus tard, grâce à la détermination du médecin de la colonie et de l’un de ses collègues, la lèpre devient une maladie parfaitement curable, grâce à la mise en place d’une antibiothérapie. Dès lors, la colonie de Spinalonga n’a plus lieu d’être. Elle sera progressivement démantelée jusqu’au départ du dernier occupant, un pope, en 1962.
Au début des années 2000, la jeune Alexis Fielding part passer les dernières semaines de l’été en Crète avec son compagnon. Mais surtout, pour la jeune femme, c’est une occasion de partir sur les traces de l’histoire familiale de sa mère, Sophia qui, avant d’épouser un Anglais et de venir vivre à Londres, a passé sa jeunesse en Crète, élevée par un oncle et une tante. Mais Alexis n’a jamais réussi à faire parler sa mère et sait qu’il existe des secrets et des zones d’ombre qu’elle espère bien pouvoir lever au cours de ce voyage crétois.
A Plaka, elle traverse à son tour le bras de mer séparant la Crète de Spinalonga, désormais déserte, où elle découvre une île paisible et balayée par les vents, devenue un discret lieu touristique. En interrogeant une habitante de Plaka, ancienne connaissance de Sophia, Alexis va alors découvrir que son destin est bien plus lié à l’ancienne colonie de lépreux qu’elle n’aurait pu le croire…

D'Agia Varvara à Spinalonga - Vies et morts d'un Crétois lépreux

La communauté des lépreux de Spinalonga avant sa fermeture en 1957


C’est au début des années 2000, lors d’un séjour estival en famille en Crète que Victoria Hislop découvre l’histoire de Spinalonga et l’histoire de sa colonie de lépreux. Les informations qu’elle collecte par la suite vont lui donner l’idée d’un roman historique avec une double-temporalité et l’histoire d’une jeune patiente qui, dans les années 1950, s’éprend sans aucun espoir – du moins le croit-elle – du médecin qui a pris en charge son traitement. Car le roman L’île des oubliés est basé sur des faits réels et Victoria Hislop va, à l’occasion de la rédaction de ce roman et les recherches historiques qu’il nécessite, déconstruire bien des mythes concernant la lèpre, souvent considérée comme la plus vieille maladie du monde. Lorsqu’on l’évoque, ce sont souvent des images médiévales qui nous viennent à l’esprit, la vision de lépreux aux visages déformés par de monstrueux nodules et les membres mutilés, vêtus de haillons et tenant à la main une crécelle censée prévenir de loin leur approche ou parqués dans des léproseries sans hygiène et sans soins. Cette notion d’impureté, confondue avec une contagion violente – ce qui en réalité est faux – a été véhiculée par la Bible, où la lèpre est mentionnée dans le Lévitique et associée à une la souillure.
En réalité, la lèpre est une maladie dermatologique sévère, certes, dont le traitement n’a été découvert que récemment, un peu plus de soixante ans, mais qui n’est pas aussi spectaculaire qu’on ne le croit bien souvent et l’image du lépreux telle que les textes et l’histoire l’ont forgée est en réalité largement exagérée car il existait bon nombre de malades touchés par une forme lente de la maladie et qui ne développaient pas les manifestations les plus spectaculaires de la maladie. La lèpre peut en effet se manifester par de simples ulcérations de la peau et le malade semble, en apparence, en bonne santé. Il ne faut pas pour autant minimiser les souffrances de ceux affectés par la forme « lépromateuse » qui touchait tant la peau que les muqueuses et pouvait donc aussi se développer en interne. Éradiquée en Europe, elle existe encore toutefois dans certaines régions du monde, notamment en Inde et au Bangladesh.
Dans ce roman, il y a du très bon comme du moins bon, c’est ce que nous allons voir maintenant.
Evidemment, je l’ai avant tout choisi pour son sujet, assez surprenant. Avant de lire L’île des oubliés, je n’avais jamais entendu parler de la communauté de Spinalonga et j’ai été surprise de découvrir que la lèpre n’était pas la maladie aussi horrible que je ne le croyais, comme beaucoup d’entre nous, je pense. Puis, en en parlant avec d’autres lecteurs, la plupart des avis qui sont revenus étaient que le roman était très beau, plein d’émotion et bouleversant, ce qui en soi, n’est pas faux. Pourtant, j’ai trouvé que cet aspect du roman arrivait un peu trop tard. Sur un peu plus de cinq cents pages, ce n’est finalement qu’à la moitié du roman environ que j’ai commencé à me sentir vraiment investie dans cette histoire. Si le début du roman m’a moins convaincue, cela tient en partie à l’exaspération qu’a fait naître en moi le personnage d’Anna, adolescente rebelle certes, mais aussi tout à fait imbuvable, alors que je me suis attachée fortement aux personnages de Giorgis et Maria, qui forment un duo bouleversant et magnifique, d’une abnégation filiale absolument extraordinaire. Anna m’a sérieusement tapé sur les nerfs et j’avoue que j’ai commencé à me sentir à peu près captivée lorsqu’elle a disparu au profit de sa sœur Maria, beaucoup plus humaine, beaucoup plus douce.
Autre chose – mais ceci est tout à fait subjectif – je n’ai pas toujours été séduite par la plume de l’autrice qui, bien souvent, ne m’a pas transportée alors que la charge émotionnelle du sujet est incontestable et j’ai trouvé ça dommage. Je ne m’attarderai pas non plus sur la fin qui m’a convaincue à moitié, dans la mesure où le roman est doté d’une sorte de « suite » je pense que les ultimes chapitres de L’île des oubliés y auraient eu toute leur place car on s’éloigne brutalement du sujet initial, de Spinalonga et des lépreux et j’ai trouvé ça dommage. J’aurais aimé que l’autrice aborde un peu plus le retour à la vie normale et la manière dont cela a été géré médicalement, à une époque où la prise en charge psychologique était moins prise au sérieux qu’aujourd’hui.
Quant à la double-temporalité qui, en général, est un gros point fort pour moi et quelque chose que j’aime beaucoup dans les romans, elle n’aurait pas été là que ça ne m’aurait pas dérangée du tout. Je l’ai trouvée relativement anecdotique même si j’ai apprécié le personnage d’Alexis : en somme, elle n'apporte pas particulièrement de plus-value au roman.
Alors, après cela, qu’y a-t-il de bon dans ce roman me direz-vous ? En réalité, beaucoup de choses. Comme je le mentionnais plus haut, la force de ce roman, c’est son sujet, que je n’avais jamais vu abordé dans aucun roman jusqu’ici. Découvrir cette communauté de Spinalonga était riche d’enseignements. Le duo Giorgis/Maria est aussi bouleversant d’humanité et c’est les chapitres où ils sont au centre de l’intrigue qui m’ont le plus touchée, le plus émue. J’ai éprouvé beaucoup d’affection pour Maria, pleine du sens de l’honneur, quitte à en souffrir elle aussi dans sa chair, au contraire d’Anna, qui est une jouisseuse dans l’âme et fait passer sa propre personne avant tout. Giorgis m’a aussi inspiré beaucoup de peine et de pitié et j’ai trouvé le personnage de cet homme, pêcheur modeste qui doit affronter plusieurs drames terribles, parfaitement bien traité.
Ce roman a des atouts et ne manquera probablement pas de séduire un lectorat vaste, je n’en doute pas. Même si j’en ressors mitigée, je crois que cela est essentiellement dû au fait que le roman ne m’a pas offert exactement ce que j’attendais avant de le lire mais il est fort possible que cela ne soit pas le cas pour vous et je ne peux donc que vous le conseiller si vous aimez les récit qui sortent de l’ordinaire, avec une trame historique bien documentée.

Spinalonga, voyage au cœur d'une île fascinante en Crète

De nos jours Spinalonga, ancienne colonie vénitienne puis turque, n'est plus du tout occupée mais elle peut se visiter, en partance du village de Plaka, juste en face

En Bref :

Les + : Je ressors de cette lecture avec beaucoup d'informations sur la colonie de Spinalonga et cet aspect historique m'a beaucoup plu. Mention spéciale aussi au duo formé par Giorgis et sa fille Maria...ces deux personnages m'ont beaucoup plu tous les deux. 
Les - : l'aspect bouleversant du livre arrive assez tard, après un début très long et sans beaucoup d'intérêt en soi tout comme la fin malheureusement. 


L'île des oubliés ; Victoria Hislop

  Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle  

 

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