27 Février 2024
« Elle lui ressemblait tellement. C'en était à pleurer. Le souvenir d'un fantôme : une femme qu'il n'avait jamais pu oublier et qui le hantait désormais depuis quarante-quatre ans. »
Publié en 2017 en Angleterre
En 2019 en France (pour la présente édition)
Titre original : Island in the East
Éditions Milady
450 pages
Résumé :
« Sans la tempête qui s'était abattue sur l'île ce matin-là, il y aurait probablement eu plus de monde au port pour voir l'Empress of India et sa curieuse cargaison. Depuis que l'on avait appris que Harriet et Mae Grafton, des orphelines sans le sou d'une vingtaine d'années en provenance d'Inde, venaient s'installer, on en parlait dans toute la ville. »
1897. A vingt ans, Harriet et Mae Grafton sont des jumelles nées d'une liaison scandaleuse. Rejetées par la bonne société, elles ne peuvent que compter l'une sur l'autre. Mais lorsque leur riche bienfaiteur les envoie à Singapour, elles font la connaissance du mystérieux Alex Blake, et leur relation se détériore, ce qui aura des conséquences dévastatrices...
1941. Petite-fille de Mae, Ivy Harcourt travaille à Londres et est affectée à Singapour, alors sous la menace d'une invasion japonaise. Même si Ivy redoute de vivre sur cette île qui lui est totalement étrangère, elle n'est pas du tout préparée à ce qui l'y attend : des inconnus surgissant du passé de sa grand-mère, une histoire d'amour inattendue et un secret qui ne demande qu'à être découvert...
Ma Note : ★★★★★★★★★★
Mon Avis :
En 1941, la jeune Ivy Harcourt a intégré les Wren’s (Women's Royal Naval Service) et participe à l’effort de guerre. Forte de sa bonne connaissance des langues, elle a été affectée aux renseignements et sa mission est d’écouter les échanges des pilotes qui survolent l’Angleterre. Mais après un choc, Ivy demande sa mutation : elle est exaucée au-delà de ses espérances puisque c’est vers Singapour que la jeune femme va être envoyée, pour espionner cette fois, non plus les pilotes allemands mais les Japonais, qui se font de plus en plus menaçants dans cette partie du monde.
C’est avec appréhension que Mae, sa grand-mère avec laquelle elle vit et qui a élevé Ivy après la mort prématurée de ses parents, voit la jeune femme s’en aller. Mais ses craintes sont-elles seulement liées à la guerre et aux dangers que son unique petite-fille peut courir dans le Pacifique ? Peut-être pas.
A Singapour en effet, Ivy va découvrir fortuitement des pans de son passé et de celui de sa grand-mère. En 1897, Mae et Harriet Grafton, des sœurs jumelles à la naissance trouble, arrivent à Singapour. Là, elles feront la connaissance de David Keeley et d’Alex Blake, pour le meilleur comme pour le pire. Le moins que l’on puisse dire, c’est que plus rien par la suite ne sera jamais comme avant. L’affectation d’Ivy sur l’île où sa grand-mère a passé quelques mois de sa jeunesse va forcer Mae à sortir de son silence et à déterrer de vieux secrets qu’elle pensait ne voir jamais ressurgir.
En parallèle, on découvre le quotidien d’Ivy à Singapour, dans les mois qui précèdent la prise de Pearl Harbor puis l’occupation de la Malaisie et les débuts de la bataille du Pacifique. Dans une atmosphère de touffeur permanente, au cœur de la jungle, les contingents anglais se préparent comme ils peuvent, avec les moyens qu’ils ont – autant dire très peu, quand les fronts d’Europe et d’Afrique les occupent presque tout entiers. Installée dans la maison d’une jeune Américaine engagée elle aussi dans les Wren’s, Ivy se fait des amies, découvre une nouvelle vie et lie connaissance avec un voisin, un certain…Alex Blake, tandis qu’un jeune soldat australien intrépide, Kit Langton, ne la laisse pas indifférente.
En 1942, les Britanniques cèdent l'île aux Japonais : une occupation de trois années commence
Vu le pitch, vous vous dites peut-être que Une île en Orient n’est rien de plus qu’une énième romance historique qui se passe en plus – ô surprise – en pleine Seconde guerre mondiale. En soi, vous n’avez ni tout à fait raison ni tout à fait tort : certes, vous lirez une romance historique dépaysante et légèrement prévisible. Mais il n’y a pas que cela non plus dans ce roman et c’est ce qui m’a agréablement surprise, je dois bien le dire. Si beaucoup de lecteurs ont apprécié, dans la double-temporalité, la partie la plus ancienne se passant en 1897, pour ma part – peut-être aussi parce que mon intérêt me pousse plus à m’intéresser à la période de la Seconde guerre mondiale -, c’est vraiment les chapitres consacrés à Ivy que j’ai préférés car dans son sillage, c’est tout l’avant et le pendant de la bataille du Pacifique que l’on découvre : car après avoir déferlé sur Pearl Harbor, les Japonais ne s’arrêtent pas en si bon chemin et Singapour, colonie britannique où vivent de nombreux civils, sera une cible de choix. On découvre l’impréparation des troupes britanniques, l’inquiétude latente de ceux qui sont sur place et comprennent qu’ils sont des laissés-pour-compte quand les fronts d’Afrique et d’Europe nécessitent l’envoi important de contingents…En même temps, les jeunes soldats et les unités féminines s’étourdissent dans de nombreuses fêtes, comme pour conjurer le mauvais sort, dans cette attente de plus en plus étouffante, comme le climat.
Je n’ai pas détesté la partie consacrée aux sœurs, Mae et Harriet, mais celle-ci est moins historique, on ne découvre finalement pas grand-chose sur la Singapour de 1897 et l’autrice se contente de suivre les quelques mois – assez tragiques d’ailleurs – que les deux sœurs vont passer sur l’île. Je n’ai pas forcément réussi à m’intéresser ni à m’attacher aux personnages, Mae et Harriet m’ont laissée assez indifférente et m’ont même parfois un peu tapé sur le système, même si je ne les ai pas détestées non plus. Je regrette un peu le manque d’éclaircissements sur leur passé, leurs secrets, même si on en apprend de plus en plus à mesure que l’on avance dans sa lecture. J’aurais aimé par exemple connaître les circonstances de leur naissance, alors que là, on ne peut que les imaginer…j’ai eu l’impression que l’autrice en disait trop et pas assez à la fois et que la fin du roman n’apporte peut-être pas suffisamment de clefs comme ce peut être le cas quand on lit un roman de Kate Morton, par exemple, où le secret de départ est complètement décortiqué, jusqu’à devenir limpide pour le lecteur.
Mais ce n’est qu’un tout petit bémol, qui ne m’a pas empêchée de passer un très bon moment avec cette lecture et de prendre un grand plaisir à suivre Ivy. J’attendais de ce roman une romance historique dépaysante et exotique et je l’ai eue, avec en plus une description du quotidien en Malaisie, notamment au moment de l’occupation japonaise et ce n’était vraiment pas mal du tout.
Des soldats du régiment Suffolk se rendant à la 25e armée nipponne
En Bref :
Les + : une romance historique, certes, mais pas que ! Grâce à ce roman j'ai pu découvrir une part, certes romancée mais sûrement proche de la réalité, de la bataille du Pacifique.
Les - : une double-temporalité un peu inégale à mon goût.
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