17 Septembre 2022
« Le Whistle Stop Café était le foyer de tous ceux qui n'en avaient pas, c'était là qu'on se retrouvait tous, c'était là qu'était la vie. »
Publié en 1987 aux États-Unis
En 2022 en France (pour la présente édition)
Titre original : Fried Green Tomatoes at the Whistle Stop Café
Éditions J'ai Lu
480 pages
Premier tome de la saga Whistle Stop Café
Résumé :
Dans le sud profond des Etats-Unis, en Alabama, un café, le Whistle Stop, au bord d'une voie ferrée...
Nous sommes dans les années 1980. Ninny, fringante octogénaire, se souvient des incroyables histoires de la petite ville où elle vit toujours et les raconte à Evelyn, une femme au foyer à l'existence monotone, qui vient lui tenir compagnie.
Grâce à l'adorable vieille dame et à ses récits chaleureux et enlevés, Evelyn, qui vit très mal l'approche de la cinquantaine, va peu à peu s'affirmer et reprendre goût à la vie.
Une chronique nostalgique, tendre et vibrante, pleine de saveur et d'humour. L'histoire d'une amitié entre deux femmes qu'une génération sépare. Un roman culte.
Ma Note : ★★★★★★★★★★
Mon Avis :
En commençant ce roman, classique contemporain (oui, c’est un peu paradoxal mais c’est effectivement ce qu’est ce roman, paru en 1987 : un véritable classique) de la littérature américaine, je ne m’attendais pas à grand-chose. J’y suis allée sans aucun a priori, ni positif ni négatif, ni aucune attente. A la lecture du résumé, je m’attendais à quelque chose entre Les Suprêmes d’Edward Kelsey Moore et Harper Lee. Et j’ai retrouvé aussi un petit peu, dans l’ambiance, le Peyton Place de Grace Metallious qui était aussi la chronique d'une bourgade de l'Amérique rurale dans les années 1940 et l’univers doux et gourmand du roman Petites recettes du bonheur pour les temps difficiles, de Susan Hayes et Loretta Nyhan.
Laissez-moi vous replacer dans le contexte : dans les années 1980, à Birmingham en Alabama, Evelyn Couch, femme au foyer accompagne son époux à la maison de retraite de Rose Terrace afin de rendre visite à sa belle-mère. Elle y rencontre Ninny Threadgoode, une pétulante vieille dame un peu seule, qui se prend d’amitié pour Evelyn et finit par lui raconter tout ce qui s’est passé dans la ville où elle a passé sa jeunesse : Whistle Stop. Evelyn, qui voit approcher la cinquantaine avec terreur et se retourne avec amertume sur sa vie qu’elle estime gâchée, s’attache elle aussi à Ninny et trouve, dans les récits nostalgiques de la vieille dame, un dérivatif à sa propre détresse.
Roman choral (et c'est peu de le dire) et étrangement construit tout à la fois, Beignets de tomates vertes nous fait découvrir l’Amérique profonde et rurale du sud, au début du XXème siècle. Dans la petite bourgade de Whistle Stop, la vie s’organise autour de son café, tenu par Idgie Threadgoode et Ruth Jamison. Ainsi, grâce à des chapitres très courts (qui prennent parfois l’aspect d’une chronique de la ville de Whistle Stop, rédigée par la postière et j’ai vraiment beaucoup aimé cela) et qui nous font naviguer d’une époque à l’autre (sans aucune logique pourrait-on dire, parce qu’on peut passer des années 1950 pour revenir aux années 1920 et repartir dans les années 1970), nous découvrons la vie des habitants de Whistle Stop. S’il est parfois difficile de s’y retrouver au milieu de cette myriade de personnages (sur lesquels l'autrice ne prend pas le temps de s'appesantir, il faut vraiment que vous vous concentriez bien sur votre lecture pour comprendre au fur et à mesure de la lecture qui est qui et les liens qui s'établissent entre les différents personnages) et de cette chronologie parfois un peu fantaisiste (d’ailleurs je l’ai trouvée parfois un peu confuse, c’est le seul bémol que je peux soulever concernant ce roman), malgré tout le plaisir de lecture est au rendez-vous et assez évident. J’ai beaucoup aimé la plume de Fannie Flagg, même si je la découvre au travers d’une traduction : par exemple, j’ai beaucoup aimé l’humour de Ninny et le langage assez vert des habitants de Whistle Stop qui m’a souvent fait sourire.
En 1991, le roman est adapté au cinéma par Jon Avnet : les actrices Kathy Bates et Jessica Tandy, au premier plan, incarnent respectivement Evelyn Couch et Ninny Threadgoode
Beignets de tomates vertes est un roman d’une étonnante modernité : il est vrai que, même s’il raconte à merveille la première moitié du XXème siècle, le roman n’a qu’un peu plus de trente ans. Mais quand même : la question du racisme aux États-Unis et notamment dans les anciens états de la Confédération, dont fait partie l’Alabama, connu pour son passé esclavagiste, place de la population noire dans la société, féminisme et homosexualité y tiennent une place de choix et je dois dire que j’ai beaucoup aimé que tous ses sujets, qui restent encore aujourd’hui sensibles, soient abordés avec tant de naturel dans le roman.
J’ai frôlé le coup de cœur parce que ce roman d'une originalité détonante m'a paru aussi d'une étonnante fraîcheur : j'ai eu l'impression de ne jamais avoir rien lu de pareil . Comme je le soulève un peu plus haut, j’ai été un peu gênée par la chronologie parfois un peu confuse (j’avoue que les dates, parfois, ne semblaient pas forcément correspondre aux âges des personnages et moi qui accorde quand même pas mal d’importance aux bornes chronologiques dans mes lectures, je dois avouer que cela m’a parfois un peu perturbée) et je crois que c’est ce qui m’a empêchée d’apprécier pleinement cette lecture, qui malgré tout, a été une très belle et très agréable surprise, d’autant plus savoureuse qu’elle était inattendue. Honnêtement, je ne pensais pas aimer autant Beignets de tomates vertes, que j’ai lu en quelques jours. Oui, vraiment c’était bien : non seulement la forme du roman est originale, mais la teneur du récit, malgré son apparence un peu décousue et la plume de l’autrice sont aussi vraiment dignes d’intérêt. Quant aux sujets qui y sont abordés, ils sont d'intérêt public et malheureusement, encore d'actualité aujourd'hui, que ce soit la question raciale ou bien les droits des femmes (et ce roman peut résonner aujourd'hui au regard de l'actualité aux Etats-Unis après Black lives matter ou la révocation de l'amendement Roe vs. Wade en juin dernier).
En tous les cas, j’ai déjà hâte de lire le deuxième tome et de revenir à Whistle Stop !
En Bref :
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