• La Reine oubliée, tome 4, Le jardin de cendres ; Françoise Chandernagor

    « La vieillesse a l'avantage d'amortir les chocs : on ne sent plus aussi vivement, on est moins surpris. Les émotions, empruntant des nerfs usés à force d'avoir servi, mettent plus de temps pour parvenir jusqu'à l'esprit et redescendre au cœur... »

     

     

         Publié en 2018

      Éditions Albin Michel

      588 pages

      Quatrième tome de la saga La Reine oubliée

     

     

     

     

    Résumé :

    Avec ses grottes sombres, ses mosaïques noires, et ses statues fantomatiques, le jardin de Cendres évoque les mères endeuillées de la mythologie grecque. C'est là que Séléné, fille de Cléopâtre et reine de Maurétanie, a trouvé refuge après la mort de trois de ses enfants. Pourtant, elle ne renonce pas à engendrer de nouveau un fils, capable de venger des Romains sa famille assassinée. Délaissant son jardin de Césarée, elle fait le tour des sanctuaires propices à la fécondité : Grèce, Asie Mineure, Syrie, Palestine...Partout, Rome domine, opprime et crucifie.
    Quand naît enfin Ptolémée, l'héritier tant attendu, elle tremble d'abord pour lui. Mais lorsque, succédant au roi Juba son père, le jeune homme est couronné, c'est vers le nouvel empereur romain qu'elle tourne ses espoirs : Caius n'est-il pas le cousin de son fils ? Il n'a que vingt-quatre ans et, depuis l'enfance, on le surnomme affectueusement Caligula...

    Avec cette évocation magistrale de l'Empire romain, Françoise Chandernagor achève la saga de Séléné. Après Les Enfants d'Alexandrie, Les Dames de Rome et L'Homme de Césarée, elle fait revivre les mœurs sanglantes de la société impériale sous Tibère et Caligula. Entre splendeurs et cruauté, une fresque puissante.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Avec Le Jardin de Cendres, Françoise Chandernagor met un point final à sa monumentale saga historique consacrée à la reine Cléopâtre-Séléné.
    Née en Egypte au Ier siècle avant notre ère, Cléopâtre-Séléné est la fille de la dernière reine d’Egypte, Cléopâtre VII et de son époux romain Marc-Antoine. Elle est la demi-sœur de Ptolémée Césarion, le fils de la reine égyptienne et de Jules César et la sœur d’Alexandre-Hélios – son jumeau – et du petit Ptolémée-Philadelphe, les autres enfants d’Antoine. Les dix premières années de Cléopâtre-Séléné se passe dans le luxe des palais royaux d’Alexandrie, où elle est élevée en princesse. Mais tout bascule en -31, quand ses parents perdent la bataille d’Actium contre Octave, qui se pose en futur homme fort de Rome. En -30, l’Egypte est annexée et devient province romaine : vaincus, humiliés, Cléopâtre et Marc-Antoine se suicident, laissant leurs enfants être capturés par les Romains pour leur Triomphe. En quelques mois, Cléopâtre-Séléné a vu tout son univers familier disparaître, pulvérisé dans les sangs, les larmes et la violence. Mais elle n’est pas au bout de ses peines : de la dernière reine d’Egypte, elle sera la seule descendante survivante. A Rome, ses deux frères disparaissent plus ou moins de temps après le Triomphe. La petite quant à elle est confiée à la sœur d’Octave, la douce Octavie, qui fut aussi l’épouse de Marc-Antoine. La jeune princesse égyptienne s’y découvre une nouvelle famille, des demi-sœurs et des demi-frères mais aussi des cousins et des cousines, au sein même de la famille des Julio-Claudiens. Cléopâtre-Séléné est aux premières loges pour voir la République sombrer, au profit du Principat et du pouvoir d’un seul homme, le vainqueur d’Actium, que l’on n’appellera bientôt plus que Auguste. Malgré une vie relativement facile à Rome, où elle ne manque de rien, Cléopâtre-Séléné est pourtant une victime de guerre, traumatisée, victime d’un stress post-traumatique violent…mais si elle reste en vie, c’est parce qu’elle brûle de se venger, mais aussi les siens. Toute sa vie sera portée et conditionnée par se désir de se faire justice.
    Adolescente, Cléopâtre-Séléné est promise en mariage à un ancien otage de Rome, le roi Juba II de Maurétanie. La Maurétanie antique correspond à peu près aux actuels Algérie et Maroc et sa capitale, Césarée, est l’actuelle Chercell, en Algérie. Le mariage de la jeune Egyptienne romanisée et du descendant des rois Numides, lui aussi empreint de culture latine, est plutôt harmonieux et même, se révèle amoureux. Juba et Séléné sont tous deux intelligents, cultivés et ils s’entendent bien.
    A la fin de L’homme de Césarée, nous avions laissé le couple sous le choc de la disparition simultanée de plusieurs de leurs enfants. N’ayant plus qu’une seule fille, Séléné a bientôt une obsession : donner enfin un héritier mâle à son époux Juba, qui vieillit et qui guerroie beaucoup. Il faut donc assurer la succession maurétanienne, au risque de voir le royaume, riche et puissant, annexé par Rome. Or, malgré son affection pour ses sœurs romaines – Prima et Antonia, les deux filles de Marc-Antoine et Octavie – et leurs descendants ou encore Tibère, futur empereur et fils secret de la dangereuse Livie, ses nombreux voyages dans la capitale de l’Empire, Séléné n’a jamais abandonné le sinistre dessein qui la porte : tenir la dragée haute à Rome et se venger enfin des horreurs et des deuils de son enfance.
    Quand vient enfin au monde l’héritier tant désiré, Ptolémée, Séléné croit enfin tenir l’instrument de sa vengeance. Elle fera en sorte que son fils maintienne une Maurétanie forte, puissante mais surtout, loin des appétits de Rome…mais l’Histoire et le destin sont souvent capricieux et tout ne se passe pas toujours comme prévu.
    Ultime tome d’une imposante quadrilogie commencée avec Les Enfants d’Alexandrie, Le Jardin de Cendres couvre un peu plus de trente ans, de la fin du règne d’Auguste, jusqu’à la fin du règne de son descendant Caligula, au début des années 40 de notre ère. Pour Séléné et ses sœurs romaines, toutes à peu près contemporaines à quelques années près, c’est aussi l’arrivée de la maturité, puis le début de la vieillesse. Dans cet espace-temps naissent leurs derniers enfants puis leurs premiers petits-enfants. Pour Séléné, c’est aussi la période des deuils, d’autres deuils : ceux de ses enfants emportés par la maladie et celui de son époux Juba, qu’elle voit diminuer. Pour la vieille reine, le temps des épreuves n’est pas terminé et ne semble pas avoir de fin, comme un éternel recommencement. Ou bien Rome est-il un bien trop gros morceau auquel s’attaquer ? Très vite, Séléné s’aperçoit en effet que Rome et ses dirigeants, comme une hydre qui se dévore et dévore les siens, convulsent dans une valse lente, sanguinaire et violente, où se côtoient assassinats de couloir, complots, exils et suicides arbitraires.
    C’est avec un plaisir sincère que j’ai lu ce quatrième tome, dans lequel je déplorais de ne pas avancer assez vite et que j’aurais aimé faire durer pourtant – mais je pense qu’en tant que lecteur, vous comprenez tout à fait cette sensation. J’ai beaucoup aimé cette saga, comme tous les romans de Françoise Chandernagor, depuis ma découverte de L’allée du roi, assurément son roman le plus magistral. Mais la saga La Reine oubliée n’a pourtant rien à lui envier. J’y ai tout aimé : cette époque romaine m’a passionnée, véritablement captivée alors que l’Histoire ancienne n’est pas mon époque de prédilection en général, le style de l’autrice et même la forme du roman – des chapitres romancés alternant avec des extraits de catalogues de ventes aux enchères, ce qui est assez surprenant de prime abord mais pas incohérent non plus.
    Menée de main de maître, cette série mêle très habilement faits historiques avérés et imagination, le romancier pouvant sans dissimuler son plaisir combler les lacunes de l’Histoire et avancer là où l’historien s’arrête, faute de preuves. Ainsi, nous ne savons pas par exemple exactement quand la reine Cléopâtre-Séléné de Maurétanie : ici, Françoise Chandernagor décide de la faire survivre à son époux. La vieille reine devient donc en quelque sorte le mentor et l’éminence grise de son fils Ptolémée, encore jeune au moment de son accession au trône. La romancière s’est également permise d’autre petites entorses à l’Histoire établie mais cela n’est absolument pas gênant.
    Pour ma part, je ne peux que recommander mille et mille fois cette saga. J’ai véritablement eu un coup de cœur global pour cette quadrilogie et, malgré quelques longueurs dans ce quatrième tome – peut-être du fait de sa densité – je ne me suis pas ennuyée une seule seconde. C’est avec émotion d’ailleurs que j’ai tourné la dernière page, en me disant que le point final était là, sous mes yeux. Cette saga m’accompagne maintenant depuis 2011 et je dois avouer que ce n’est pas sans une certaine nostalgie que j’en quitte l’univers et les personnages. Je termine donc cette chronique en remerciant vraiment du fond du cœur Françoise Chandernagor de m’avoir fait vivre, en treize ans, une aussi belle expérience littéraire, que je ne suis pas près d’oublier, c’est certain.

    En Bref :

    Les + : quel bonheur d'avoir retrouvé une ultime fois Cléopâtre-Séléné et l'univers très riche de cette série. Je la finis un peu émue de la laisser derrière moi car je dois dire que j'ai eu un véritable coup de cœur pour cette quadrilogie menée de main de maître. 
    Les - : aucun. Absolument aucun.  


    La Reine oubliée, tome 4, Le jardin de cendres ; Françoise Chandernagor

       Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

    • Pour découvrir mon avis sur les trois premiers tomes, c'est par ici :

    Les enfants d'Alexandrie

    Les dames de Rome

    L'homme de Césarée


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