• Guetter l'aurore ; Julie Printzac

    « Je crois que les émotions les plus fortes, les plus violentes, se transmettent de génération en génération, comme un héritage destructeur. Ma grand-mère crevait de peur pendant la guerre, et moi je crève de trouille ; ma mère aussi, à sa manière, elle qui s'est réfugiée toute sa vie dans le travail et a gardé ses distances avec ceux qu'elle aimait...Voilà ce qu'une guerre est capable de faire sur plusieurs générations : détruire l'espoir et la confiance. »

     

     

     

         Publié en 2023

      Éditions Pocket

      384 pages

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Été 1941. Les Brodsky, juifs, ont fui la zone occupée et la menace nazie pour se réfugier dans le sud de la France. Rattrapés par les nouvelles lois de Vichy, ils se retrouvent en résidence forcée au pied des Pyrénées, dans une grande demeure délabrée.
    Peu à peu, la vie s'organise. Esther, l'aînée des enfants, rencontre Clara. L'heure est à l'adolescence, aux premiers émois et aux grandes amitiés. C'est également le temps de l'engagement dans la Résistance, des luttes pour survivre, mais aussi des rafles. Dans la tourmente, Esther et Clara font tout pour rester maîtresses de leur destin. C'est compter sans la brutalité de l'Histoire...

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    En 1941, chassés par l’avancée allemande puis par les mesures discriminatoires du régime de Vichy, les Brodksy, juifs d’origine russe mais installés depuis longtemps à Paris, arrivent dans la petite ville ariégeoise de Saint-Girons, au pied des Pyrénées et à quelques encablures de l’Espagne – beaucoup traverseront d’ailleurs les montagnes pour gagner le pays frontalier et de là, l'Afrique du Nord ou bien Londres.
    Installés dans une vieille maison délabrée à la lisière du village, Leah, Mihaïl et leurs trois enfants tentent malgré la peur et l’incertitude, de recréer un semblant de vie normale. En dépit des risques, Mihaïl continue de courir les routes pour exercer son activité de pelletier, Leah grâce à son goût pour la littérature, se fait des connaissances et tisse des liens et les trois enfants sont scolarisés dans les écoles de la ville. Au collège, Esther se lie d’amitié avec la mystérieuse et révoltée Clara tandis que son frère Daniel entretient une relation plus trouble avec un garçon aux idées subversives et définitivement acquises à l’occupant.
    Mais bientôt, le contexte national se tend : l’occupation de la zone libre met en danger les familles juives qui avaient cru trouver une paix relative au sud de la Loire, on commence à entendre parler de rafles et de personnes déportées on ne sait où, les contrôles sont de plus en plus systématiques. Et dans une petite ville comme Saint-Girons où tout le monde se connaît, la judéité de certains n’est pas un secret et les collaborationnistes et antisémites sont une menace permanente
    De nos jours, Esther Brodksy est une vieille femme fragilisée, à qui la mémoire fait défaut. A Meudon, où elle vit avec sa fille Jeanne, elle retrouve sa petite-fille – la narratrice de cette partie contemporaine du roman – qui revient d’Italie. Deborah se trouve confrontée à la démence de sa grand-mère et l’entend soudainement, dans l’une de ses crises, parler de la guerre et d’une certaine Clara, dont ni elle, ni Jeanne n’ont jamais entendu parler auparavant. Pour la jeune femme, elle-même fragilisée et à la croisée des chemins, s’ouvre une quête familiale pour découvrir le passé d’Esther pendant la guerre. Une quête qui l’emmène jusqu’en Ariège, dans les pas de Brodsky et de toutes ces personnes de leur entourage, amies ou ennemies, qui ont jalonné ses cinq années de guerre et d’horreur.

    Ville de Saint-Girons (09200) - Site officiel - Récit de la libération de  la ville 20 août 1944

     

    Libération de la ville de Saint-Girons en 1944


    Roman assez classique, Guetter l’aurore a des qualités mais aussi des défauts qui m’ont empêchée d’apprécier pleinement ma lecture même si, globalement, j’ai apprécié cette lecture. Si la double-temporalité n’est pas désagréable car elle permet parfois de souffler après un chapitre assez intense, je ne pense pas qu’elle ait été essentielle au développement et à la compréhension du récit…mais le gros bémol pour moi, c’est vraiment le manque d’empathie envers les personnages : déjà, ils sont très nombreux et j’ai eu un peu de mal au départ à démêler qui était qui et enfin, malheureusement, je ne me suis pas forcément sentie proche d’eux ce qui me semble assez essentiel dans un roman tel que celui-ci, avec une charge émotionnelle forte. C’est par exemple ce que j’ai ressenti avec La carte postale, d’Anne Berest, ce qui a rendu ce roman si fort, si bouleversant pour moi. Là, même si j’ai apprécié suivre les personnages, je n’ai pas vibré pour eux et c’est dommage. Peut-être est-ce la façon dont ils sont dépeints, mais je n’ai pas ressenti vraiment de profondeur, de teneur et de relief. Enfin, l’amitié d’Esther et de Clara, qui semble pourtant vantée comme un élément clef du roman dans le résumé, ne m’a pas convaincue. Je l’ai trouvé parfois assez toxique et pour moi, c’est plus une relation dominante-dominée qu’une véritable amitié entre deux jeunes filles, qui se soutiennent sans condition dans une époque pas évidente à vivre, à plus forte raison pour des adolescentes qui découvrent aussi en même temps, les premiers émois amoureux, les premières libertés auxquelles ont aspire à ces âges-là.
    Pour autant, j’ai apprécié le fait que le roman soit nuancé : tout n’y est pas noir ni tout blanc et l’autrice évite l’écueil du manichéisme qui pourrait parfois être tentant dans une situation comme celle-ci…c’est pour cela que j’ai apprécié les personnages de Paul Landron ou encore Fernand Petit, apprécié non pas pour ce qu’ils sont mais pour ce qu’ils représentent dans ce roman : le fait que tout n’est pas toujours simple dans la vie, qu’on ne fait pas toujours des choix arrêtés et que la vie et les circonstances peuvent parfois remettre bien des convictions en question.
    Globalement, j’ai donc passé un très bon moment avec Guetter l’aurore, même si j’ai plus apprécié la seconde partie que la première, un peu plus brouillonne et durant laquelle il m’a fallu un peu de temps pour replacer tous les personnages dans le bon ordre et bien saisir tous les liens entre eux. J’ai apprécié découvrir le quotidien en temps de guerre d’une petite ville de province, entre antisémitisme ordinaire, résistance et collaborationnisme. Il y a des fulgurances dans ce roman, de joie, d’espérance mais aussi des moments plus tendus et surtout, plus sordides à l’heure des choix.
    Un roman qui ne me marquera pas d’une pierre blanche mais dont je garderai malgré tout un assez bon souvenir.

    En Bref :

    Les + : un récit nuancé d'une époque complexe, l'autrice évite assez bien de tomber dans un manichéisme facile et caricatural. Un roman appuyé par de solides recherches historiques qui le rendent vraisemblable.
    Les - : une confusion entre les personnages (j'ai par exemple souvent confondu Esther et Leah) un peu trop nombreux et pas toujours bien distincts les uns des autres, un manque flagrant d'empathie pour eux, dommage. 


    Guetter l'aurore ; Julie Printzac

     

     Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle  


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