• Colette et les siennes ; Dominique Bona

    « Du même âge, à quelques mois près (sauf pour l’une d’elles), elles sont romancières, journalistes, comédiennes, et dans le cas de Colette, tout cela à la fois. Elles appartiennent au monde marginal, sulfureux, de la littérature et du spectacle. Mariées, démariées, remariées ou en compagnonnage, leur existence à de quoi étonner, voire choquer une époque encore très bourgeoise. Elles ont souvent enfreint l’ordre moral et défié les bonnes mœurs. Elles les défient toujours. »

    Couverture Colette et les siennes

     

     

     

       Publié en 2018

      Editions Le Livre de Poche

      480 pages 

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Août 1914. Dans un joli chalet du XVIe arrondissement, Colette, la romancière, la journaliste célèbre, fait venir ses amies les plus proches. Il y'a Marguerite Moreno, la comédienne ; Annie de Pène, la chroniqueuse et presque soeur ; Musidora, dite Musi, bientôt la première vamp du cinéma. Ces quatre femmes libres qui portent les cheveux courts et délaissent le corset n'oublient pas le ciel de Paris où passent les dirigeables, ni leur travail, ni les hommes. Elles vont vers l'être aimé, quel qu'il soit. Au coeur de l'histoire, sanglante et sauvage, elles affirment leur personnalité, leur amitié et leur insoumission. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Eté 1914. La mobilisation générale vide la France de sa population masculine. A Paris, rue Cortambert, l’écrivaine Colette se réfugie avec un cercle d’amies dans un chalet appartenant à son époux Henry de Jouvenel : il y’a là l’actrice Marguerite Moreno, la romancière et journaliste Annie de Pène et la jeune Musidora (surnommée « le petit Musi »), qui sera un jour la première vamp du cinéma français. Elles se sont rencontrées, trouvées au gré de leurs pérégrinations d’avant la guerre. Le monde du spectacle ou celui des lettres les ont rapprochées.
    La Belle Epoque se termine, une nouvelle ère se profile. Elle va naître dans l’horreur et dans le sang des tranchées de la Grande Guerre. Pour Dominique Bona, dont la réputation de biographe n’est plus à faire, c’est le point départ d’une biographie « chorale », centrée sur Colette certes, mais qui fait aussi la part belle à ses trois amies, qu’on redécouvre ou qu’on découvre, tout simplement. Personnellement, je ne connaissais ni Annie de Pène (dont l’œuvre, relativement réputée de son vivant, est aujourd’hui tombée dans l’oubli), ni Marguerite Moreno qui joua notamment dans Le Capitaine Fracasse d’Alberto Cavalcanti en 1929 ou incarna la reine Anne d’Autriche dans Vingt ans après d’Henri Diamant-Berger en 1922. Quant à Musidora, la plus jeune du quatuor, celle que les trois autres considèrent presque « maternellement » (elle a seize ans de moins que Colette), élevée par un père artiste et une mère aux idées féministes déjà bien affirmées, elle fera carrière au cinéma et connaîtra la gloire avec le film Les Vampires de Louis Feuillade ou encore, Judex, film muet tourné en 1916.
    Dominique Bona aborde tous les aspects des vies hors-normes de ces quatre femmes. Est-il encore besoin de présenter Colette ? Sur certains aspects de sa vie, oui. Par exemple, je ne connaissais pas du tout l’épisode de la rue Cortambert et j’ai apprécié de découvrir l’existence de ce cénacle féminin, soudé par les épreuves et qui tente de tromper l’angoisse et la peine dans une certaine routine du quotidien. Pour le reste, c’est avec plaisir que j’ai retrouvé la petite sauvageonne de Saint-Sauveur devenue, par son mariage avec Willy, une parfaite parisienne. Devenue romancière et journaliste, mariée à Henry de Jouvenel, dont elle a eu une fille (la petite Colette, surnommée « Bel-Gazou », qui ne parviendra jamais à tisser de vrais liens avec sa mère), Colette est une femme déjà mûre qui a goûté aux plaisirs de la vie : amours féminines, amants, spectacles de music-hall (en compagnie de Missy qui fut peut-être son plus grand amour) où elle apparaît à moitié nue ou grimée en momie, rien ne l’a effrayée. Mais Colette, contrairement à ce que l’on pourrait croire, peut-être à cause d’un contresens trop contemporain, n’est pas féministe et sera toujours farouchement opposée au mouvement des suffragettes contre lequel elle n’aura jamais de mots assez durs. Colette est une bonne vivante, une amoureuse de la vie et de ses plaisirs, voilà tout. Ses compagnes ne sont pas en reste non plus. Amitié, vie maritale, maternité, tout est abordé du point de vue de l’une ou de l’autre. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ces quatre femmes n’ont pas un destin banal. Déjà, elles connaissent toutes la notoriété : pour leur plume (Colette et Annie) ou pour leur talent de comédienne (Musidora et Marguerite). Elles ont également une existence à rebours de celle des femmes de l’époque : insoumises, libres, ne répugnant ni aux amantes ni aux maîtresses (contrairement à l'homosexualité masculine, le lesbianisme n'est pas mal vu au début du XXème siècle), osant avouer sans fards que la maternité est une corvée et ne les fait pas rêver ou que le mariage n'est pas une fin en soi. La Première Guerre Mondiale et l’onde de choc qu’elle entraîne changeront bien des choses et la Belle Epoque laissera place aux Années Folles, pour le meilleur et pour le pire. Pour les quatre amies, rien ne sera jamais plus comme avant : pour Colette, c’est le temps des désillusions amoureuses, de la vieillesse qui arrive et qu’elle accepte si mal au point de se consoler dans les bras d’un très jeune homme (comme dans Chéri, un roman au souffle de scandale mettant en scène l’histoire d’amour de Léa de Lonval, que l’on qualifierait aujourd’hui de « cougar » avec un jeune homme qui a l’âge d’être son fils) pour Marguerite Moreno, celui des deuils. Pour Musidora, après le succès cinématographique, les temps de vaches maigres arrivent, la galère aussi. Elles ne pourront jamais retrouver leur ancien mode de vie ni leur ancien train de vie, surtout. Après la folie de la jeunesse, l’étourdissement d’un monde burlesque et quasi décadent, le temps de la nostalgie, des souvenirs, de la maturité et de la vieillesse arrive…Pour Annie de Pène, l'histoire s'arrête brutalement en pleine épidémie de grippe espagnole, en 1918, laissant Colette orpheline de celle qu'elle appelait affectueusement « mon  Annie d'enfance » avec laquelle elle partageait sa passion de l'écriture. 
    J’ai aimé la forme de cette biographie, qui n’est pas vraiment chronologique ni très linéaire. Étrangement, alors que le sujet me passionnait (et m’a passionnée, cela va sans dire, en amoureuse de Colette que je suis), je n’ai pourtant pas lu aussi vite que je le pensais. J’ai eu l’impression que mon rythme de lecture se calquait un peu à la narration, qui est finalement relativement lente mais sans que cela ne me lasse. Au contraire : j’ai aimé découvrir alternativement les trois amies, j’ai retrouvé avec nostalgie Colette, que j’ai découverte au lycée (son univers me rappellera toujours une France d’antan disparue, celle de Claudine et de la Belle Epoque mais aussi des souvenirs très personnels), j’ai lu avec intérêt les chapitres consacrés aux trois autres, qui ne sont pas en reste.
    En résumé, Colette et les siennes m’a beaucoup plu. Un livre que j’ai trouvé original, différent de ce que l’on a l’habitude de lire. Une biographie qui n’est pas qu’une biographie, la chaleur du roman se couplant à une analyse fine et documentée. Je ne connaissais pas Dominique Bona et je ne regrette pas la découverte : ce ne sera probablement pas le dernier livre d’elle que je lirai, ça c’est certain et c’est avec joie et enthousiasme, enrichie d’une mine d’informations, que j’ai refermé ce livre.

    UN QUATUOR EN FEMMES MAJEURES : COLETTE ET LES SIENNES

    Les quatre femmes de la rue Cortambert : Colette, Annie de Pène, Marguerite Moreno et Musidora, la plus jeune du quatuor, considérée par les autres comme une fille de substitution. 

    En Bref :

    Les + : une biographie chorale qui part d'un événement en particulier (la déclaration de guerre) pour dérouler, en amont et en aval de cet événement, les destinées hors du commun de quatre femmes qui ont marqué les esprits de leur temps.
    Les - :
    pas vraiment de points négatifs à soulever...il m'a juste fallu un peu de temps pour m'habituer au récit un peu lent qui caractérise cette biographie.


    Colette et les siennes ; Dominique Bona

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     

     


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