• Louis II de Bavière ou le Roi Foudroyé ; Jean des Cars

    « A plus d'un titre, Louis II est un grand méconnu de l'Histoire. »

    Louis II de Bavière ou le Roi Foudroyé ; Jean des Cars

    Publié en 1975

    Editions Librairie Académique Perrin 

    316 pages

    Résumé :

    Grâce à une enquête minutieuse dans les archives du règne de Louis II de Bavière, Jean des Cars réussit à percer la personnalité de ce roi longtemps victime d'un réputation injustifiée.
    Il a édifié des châteaux fantastiques exaltant l'éthique de la chevalerie médiévale et le génie de la France du Grand Siècle. Il a sauvé de la faillite Richard Wagner, imposant son oeuvre mais contraint d'exiler le musicien au comportement intéressé. Il a été le premier mécène du festival de Bayreuth. Son homosexualité le révulsait et défrayait la chronique. Il fut cependant l'étrange confident de sa belle cousine, la célèbre Sissi, impératrice d'Autriche et reine de Hongrie. Il s'est battu pour défendre l'identité de son royaume, dans l'Empire allemand. Accablé par l'effondrement français en 1870, il se réfugia dans ses montagnes, construisant de fascinants palais et s'isolant dans un monde que personne ne pourrait atteindre ni détruire.
    Il est mort sur le rivage d'un lac, dans des circonstances énigmatiques. Accident ? Suicide ? Assassinat ? Louis II n'est pas seulement le plus célèbre des rois de Bavière, il est aussi le plus mystérieux. Grâce à une enquête minutieuse dans les archives et les dossiers de son règne, Jean des Cars réussit à expliquer la vie et la mort de ce monarque visionnaire, longtemps victime d'une réputation injustifiée parce qu'il percevait parfaitement les pulsions de son siècle.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Dernièrement, j'ai lu un article sur Louis II de Bavière, dans un vieux numéro de Secrets d'Histoire, qui commençait un peu comme ça : « Qui dit Louis II dit châteaux merveilleux et Wagner. » 
    Effectivement, c'est tout de suite ce que nous évoque le nom du roi de Bavière, mais c'est un peu réducteur.
    Qui est exactement Louis II ? Un fou génial ou un roi foudroyé ? Ou bien les deux à la fois ? Quelle a été exactement son destin, d'homme et de roi ? Peut-on réellement le réduire à sa passion pour les châteaux, son idolâtrie pour Wagner et sa mort mystérieuse ?
    C'est ce à quoi Jean des Cars s'attelle dans cette biographie, qui date certes un petit peu mais reste tout de même une valeur sûre. Passionné par l'histoire, bien souvent tragique des Habsbourg, Jean des Cars a beaucoup écrit sur eux et a même, dans les années 1980, rencontré l'impératrice Zita, qui lui révélera des informations inédites concernant le drame de Mayerling.
    Mais revenons-en à nos moutons, si vous le voulez bien... qui est-il justement, ce roi de Bavière mystérieux, au centre du récit ?
    Né en 1845, Louis II est le petit-fils de Louis Ier, deuxième roi de Bavière -c'est Napoléon Ier qui fait de la Bavière un royaume en 1805-, qui devra abdiquer suite à une passion un peu trop voyante pour une fausse danseuse espagnole, Lola Montez. Il est le fils de Maximilien II et de son épouse, la reine Louise, issue de la maison de Prusse. Ainsi, le sang des Wittelsbach et des Hohenzollern coule-t-il dans les veines de Louis.
    Roi à dix-huit ans, Louis sera certes toujours un peu fantasque mais, les premières années de son règne, le roi bénéficie d'une réelle popularité, qui ne se démentira jamais vraiment, en fait. Allure de jeune premier, proximité, Louis est adulé, surtout des femmes, qui ne sauront cependant jamais le séduire : il est avéré aujourd'hui que Louis II, bien que refoulant ses penchants, est un homosexuel notoire -il aura des favoris, ce qui tend à confirmer la thèse de l'homosexualité- et ses fiançailles avec sa cousine Sophie, la sœur de Sissi, se termineront de très malheureuse manière.
    Louis II ne sera pas toujours le roi fou errant dans les Alpes bavaroises, de châteaux en châteaux ou se promenant de nuit dans une fausse grotte évoquant les décors de l'opéra Lohengrin ! C'est effectivement l'image qu'on serait tenté de conserver de lui parce qu'elle a été très répandue, mais, encore une fois, on ne peut le réduire à ça. Le jeune Louis II fut un roi clairvoyant, assistant impuissant à l'unification allemande au profit de la Prusse. Francophile, cultivé, Louis II a été un roi dans lequel les déséquilibres futurs -héréditaires, même si la filiation n'explique pas tout- se distinguaient déjà mais que les qualités dominaient encore. Mécène -et notamment de Wagner, qui deviendra un vrai favori- comme son grand-père, bon administrateur doté d'un vrai sens politique, Louis II est assurément l'un des monarques de la fin du XIXème siècle les plus accomplis et les plus éclairés et, pour nous, l'un des plus fascinants, de part cette ambivalence toujours palpable chez lui, ce noir et ce blanc qui alternent constamment, jusqu'à ce que l'un finisse par l'emporter sur l'autre.


    Jean des Cars décrit le lent et long processus qui transformera cet homme pas dénué d'un certain bon sens en insensé incapable de régner -ou du moins est-ce pour cela qu'on le fera passer. Peut-être le monde dans lequel Louis vivait n'était pas à sa mesure, peut-être était - il trop grand et trop triste, trop bas aussi, en regard des pures aspirations du roi, qui se réfugiera alors dans un monde artificiel.
    On ne peut s'empêcher de penser, en lisant ce livre, que le drame de Maximilien II et de la reine Marie fut d'engendrer deux seuls enfants qui, tous deux, mourront fous. Comme des personnages de roman, les différents protagonistes de l'histoire sont tous attachants à leur manière, on ne peut pas ne pas ressentir un peu d'empathie et se sentir proche devient alors très facile.
    Jean des Cars décrit habilement la progressive modification qui s'opère chez le roi, subtile mais irrémédiable. A la lente décrépitude mentale s'ajoute aussi une dégradation physique flagrante, rendue encore plus spectaculaire grâce aux clichés que l'on conserve du roi, entre ses vingt ans et l'année de sa mort, 1886. Les chantiers de plus en plus colossaux se multiplient, les pages de ses carnets intimes deviennent de plus en plus incohérentes et Louis II finira par sombrer dans un décor de carton pâte où il convoque alternativement les esprits de Louis XIV et Marie-Antoinette, qu'il admire.
    Louis II s'enfermera dans une attitude de plus en plus incompréhensible et dans une cage de verre dont il ne sortira plus, jusqu'au drame encore inexpliqué de sa mort, survenue quelques jours après son internement, au mois de juin 1886. Jean des Cars a su capter cette montée en tension dramatique et surtout, la restituer étonnamment bien,tout en alliant à ce style unique une vraie rigueur d'historien.
    Louis II m'a toujours fascinée, comme sa cousine Sissi, d'ailleurs. Il est de ces personnages un peu crépusculaires, au destin foudroyé certes, mais aussi tellement intéressant ! Comme pour Sissi, dont j'ai lu une biographie il y'a quelques années, j'ai tendance à rester hantée, habitée par le personnage, bien après la fin de ma lecture. Louis II prend beaucoup de place, il est un de ces personnages historiques qui marquent, au même titre qu'un héros de roman.
    Louis II est bien plus complexe au demeurant que l'image qui nous vient en premier lieu à l'esprit et c'est justement cette image là que l'auteur nuance dans son récit : rien que pour cela, cette biographie est à lire. La légende tue l'Histoire et il est intéressant de retrouver les personnages que l'on croit si bien connaître débarrassés de ce vernis de légende, noire ou pas. Cela ne les en rend pas moins attachants, du moins est-ce le cas pour Louis II.
    Biographie si chaleureuse qu'on croirait lire un roman, elle se dévore, littéralement. Je n'ai ressenti aucun ennui, aucune difficulté, cette lecture s'est déroulée devant moi et cela, pour mon plus grand plaisir ! Redécouvrir ce personnage au travers de la plume et du talent de Jean des Cars est forcément intéressant, que dis-je, c'est passionnant ! Que dire, que conseiller, hormis de lire cette biographie et vite ! Si vous aimez l'Histoire et si, comme moi, l'impératrice Sissi et sa famille vous fascine, alors lancez-vous vous ne serez pas déçu !

    L'acteur Helmut Berger interprète Louis II dans Ludwig ou le crépuscule des dieux de Luchino Visconti (1972)

    En Bref :

    Les + : une biographie rigoureuse mais chaleureuse comme un roman.Elle rend son objet d'étude encore plus fascinant !
    Les - : 
    quelques coquilles d'impression qui ne peuvent évidemment pas être imputables à l'auteur et n'enlèvent rien à la qualité du propos. 


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  • Commentaires

    1
    Mercredi 29 Août 2018 à 15:54

    Je possède ce livre mais je ne comptais pas le lire en priorité. De Louis II je n'en sais que la folie des grandeurs mais j'aimerai justement creuser cette simple idée que je me fais de lui. Tu m'as donné un bel aperçu de la lecture qui m'attend :-))

      • Vendredi 31 Août 2018 à 13:40

        C'est vrai que c'est la première chose qui nous vient à l'esprit quand on pense à Louis II de Bavière : sa folie. Au final, il est bien plus que ça. Cette folie, qu'il a sûrement toujours portée en lui, ne se manifeste réellement qu'à la fin de sa vie et au début de son règne, c'est un jeune monarque clairvoyant, l'un des rares par exemple à s'inquiéter de la puissance montante du moment : la Prusse, l'un des seuls aussi à ne pas vouloir se rallier à elle. Les historiens minorent aujourd'hui cette image grandiloquente du roi, même si, effectivement, il fit preuve parfois d'instabilité (ses fiançailles ratées avec la soeur de Sissi, ses immenses et riches demeures qu'il n'habita presque jamais ^^). J'ai trouvé cette biographie vraiment intéressante, pour tout un tas de raisons. J'espère que tu aimeras.

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