• Magnificat ; François-Henri Soulié

    « L'or et les armes ne sont que des outils. Ils peuvent servir à imposer un État. Ils ne lui donneront jamais une âme. »

    Couverture Magnificat

     

     

     Publié en 2021

     Éditions 10/18

     570 pages 

     Deuxième tome de la saga Occitania

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Janvier 1177. Dernière de sa dynastie, Ermengarde de Narbonne est en danger. Les riches marchands de la ville veulent faire du comté une république.
    Dans un palais déserté de sa cour et assiégé par la neige, Ermengarde assiste aux meurtres de ses derniers appuis et ne voit qu'une solution pour rallier le peuple à sa cause : confier la création d'un spectacle au troubadour Guilhem de Malpas.
    Mais l'art saura-t-il triompher de la violence et de la cupidité ?

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Hiver 1177. La ville de Narbonne est prise dans les glaces d’un hiver extrêmement rigoureux. Au palais comtal, la comtesse Ermengarde de Narbonne se trouve par la force des choses confinée avec sa « cour » : Aloïs, sa dame d’atours et lectrice, le fils adoptif de cette dernière, le jeune troubadour Guilhem de Malpas, à qui la comtesse a commandé la création d’un grand spectacle édifiant pour le peuple de la cité – Guilhem qui a retrouvé sa jeune sœur, belle comme le jour –, Odin Glumsson, le capitaine dévoué de sa garde, originaire des lointaines Orcades…
    Mais Narbonne, malgré son manteau de neige est en ébullition et le pouvoir de la comtesse remis en cause par les marchands de la ville qui cherchent le soutien de Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse. A cette occasion, ceux-ci ont reçu le soutien de l’évêque Pons d’Arsac qui n’hésite pas à mettre la main au complot et qui, par ce biais entend bien lutter lui aussi pied à pied contre le pouvoir séculier de la comtesse et son indulgence pour ceux qui se font appeler les Vrais Chrétiens (autrement dit, les cathares), tout en veillant à ce que les commerçants ne prennent pas un pouvoir exagéré qui ne leur revient pas.
    Narbonne est donc une poudrière qui n’attend plus que le signal convenu pour imploser et mettre à bas les anciennes coutumes. La comtesse Ermengarde parviendra-t-elle à déjouer les plans de ses adversaires et à se tirer de leurs griffes ?
    Magnificat (1177) fait suite de peu à Angélus (1165) et précède Requiem (1210) mais les livres peuvent être lus indépendamment les uns des autres sans que cela ne pose un problème. Dans ce volume, l’enquête policière a laissé la place aux complots politiques, ce qui peut expliquer le bandeau apposé par l’éditeur en première de couverture : L’Occitanie aussi a son trône de fer. J’avoue que j’ai ressenti une petite pointe de déconvenue lorsque je me suis rendu compte que, non, nous ne suivrions pas à l’instar d’Angélus une véritable enquête policière et médiévale mais plutôt les mécanismes de mise en place d’un complot dans le cadre d’une affirmation de pouvoir local. Pour autant, ça reste intéressant car ce que raconte l’auteur est vrai : en 1177, la comtesse de Narbonne va devoir faire face aux velléités de son puissant voisin, le comte de Toulouse qui va l’obliger à quitter la ville, où elle ne reviendra qu’en 1179, avec son neveu et héritier, Pedro de Lara.
    Née vers 1129, figure marquante de l’Occitanie médiévale, Ermengarde est une contemporaine de la puissante duchesse d’Aquitaine Aliénor, avec laquelle elle partage pas mal de points communs à commencer par celui d’avoir été des gouvernantes de plein droit sur des terres héritées de leurs pères et d’avoir été des mécènes, protectrices des arts et des lettres et notamment des troubadours, qui ont fait du sud de la France du XIIème siècle le creuset d’une émulation culturelle et artistique qui pourrait presque s’apparenter à une renaissance avant la lettre.
    C’est ce sud de la France florissant du Moyen Âge central que se plaît à mettre en scène l’auteur dans son roman, comme dans Angélus, mais l’ambiance thriller en moins. Ici, j’ai ressenti plusieurs inspirations : dans ce palais prisonnier des glaces, où ses occupants sont confinés par la force des choses, on ne peut s’empêcher de penser aux moines d’Eco, prisonniers de leur abbaye de Ligurie dans Le nom de la rose. La geste chevaleresque de ce Moyen Âge courtois, mâtiné de fin’amor, qui peut rappeler aussi un peu les valeurs véhiculées par la légende arthurienne, est aussi très présente : l’abnégation plutôt que l’égoïsme, le rachat de la faute qui conduit à la rédemption, l’amour qui peut tout guérir, même ceux qui sont revenus de tout quand, au contraire, elle peut détruire ceux qu’elle a déçus et qui n’ont pas le cœur pur. Enfin, comme dans Angélus, il est souvent question des Vrais Chrétiens, ces adeptes d’une doctrine séditieuse à l’église de Rome, partisans d’un monde manichéen et qui adoptent un mode de vie frugal et simple. Ceux que l’Histoire retiendra sous le nom de « cathares » ou d’ « Albigeois » seront pourchassés lors d’une grande croisade levée par le pape, avec l’aide des seigneurs du Nord de la France, qui viendront conquérir les terres méridionales des Saint-Gilles ou encore, des Trencavel. Pour le moment, les Vrais Chrétiens vivent en bonne intelligence avec les populations, souvent protégés par leurs seigneurs qui se montrent indulgents avec eux, à l’image de la duchesse Ermengarde, qui n’hésite pas à missionner son troubadour Guilhem de Malpas pour monter un spectacle au discours dangereusement séditieux.
    Au-delà de ça, ce qui fait vraiment toute la force de ce roman, comme pour Angélus d’ailleurs, c’est le style de l’auteur : la plume de Soulié sait se faire douce, alerte, caressante ou plus triviale et violente lorsqu’il le faut. A l’image de Jean d’Aillon dans ses romans historiques ou encore de Christine Machureau dans sa série Mémoire froissée, l’auteur puise dans le lexique ancien pour saupoudrer son texte de mots médiévaux qui lui donnent relief et authenticité.
    Je n’ai pas eu le coup de cœur que j’attendais un petit peu. J’avoue qu’après celui ressenti au moment de la lecture d’Angélus, je me plaisais à croire que l’essai pouvait être transformé. Ce ne fut pas le cas et j’avoue que si la première partie du roman – un peu plate – m’avait plus captivée, j’aurais sûrement pu dire dans cette chronique que j’avais vraiment beaucoup aimé ce roman. A la place, je peux dire que j’ai beaucoup aimé et que j’ai passé un très bon moment de lecture : entre nous, ce n’est déjà pas si mal, non ? Et même si je juge Magnificat un peu en-dessous d’Angélus, il a réussi à me surprendre et j’attends déjà avec impatience Requiem.

    En Bref :

    Les + : heureusement, après un début en demi-teinte, ça bouge dans la deuxième partie et le roman se termine dans une flamboyance d'événements qui se bousculent en cascade. 
    Les- :
     j'ai trouvé la première partie du roman un peu plate, pas forcément très entraînante et je m'attendais à ce que l'aspect policier soit aussi présent que dans Angélus, ce qui n'est pas le cas.


    Magnificat ; François-Henri Soulié

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Découvrez mon avis sur Angélus, premier tome d'Occitaniajuste ici

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