• Romans Policiers /Cosy mystery/ Enquêtes Historiques / Thrillers

    Romans Policiers / Enquêtes Historiques / Thrillers

     

  • « Toute enquête criminelle policière met au jour davantage que le simple crime : multitude de petits péchés, de secrets douloureux, de peccadilles honteuses qui, une fois découverts, peuvent détruire l'amour ou l'amitié et anéantir une confiance mutuelle qui, en d'autres circonstances, aurait pu supporter toutes sortes d'épreuves. »

     

     

     Publié en 1987 en Angleterre

     En 2012 en France (pour la présente édition)

     Titre original : Cardington Crescent 

     Éditions 10/18 (collection Grands Détectives)

     384 pages 

     Huitième tome de la saga Les enquêtes de Charlotte   et Thomas Pitt

     

     

     

     

    Résumé :

    Dans l'élégante demeure de Cardington Crescent, le jour se lève sur la corruption. Et quand c'est un aristocrate volage qu'on assassine au petit matin, son épouse ne tarde pas à être accusée...Sauf qu'il s'agit d'Emily, la sœur de Charlotte Pitt. Et que le célèbre couple enquêteur, touché de plein fouet, est prêt à tout pour détourner les condamnations hâtives. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Après quelques enquêtes légèrement en demi-teinte, j'ai retrouvé ici un réel plaisir de lecture avec cette huitième enquête de Charlotte et Thomas Pitt, les héros peut-être plus connus d'Anne Perry. Dans l'atmosphère feutrée du Londres victorien, l'autrice met en scène un duo de prime abord improbable mais qui fonctionne bien : Charlotte, jeune femme issue de la bonne société mais non-conformiste est tombée amoureuse d'un inspecteur de la police métropolitaine, Thomas Pitt, d'une plus basse extraction ce qui, évidemment, dans les cercles de la bonne société londonienne, ne cesse de scandaliser.
    Depuis son mariage, aux premières loges d'une réalité bien plus sordide que celle qu'elle avait connue dans sa jeunesse, Charlotte n'hésite pas à prêter main-forte à Pitt lorsqu'elle en ressent la nécessité, parfois au grand dam de son époux car Charlotte n'a pas froid aux yeux et se met parfois en danger.
    Meurtres à Cardington Crescent commence loin des beaux quartiers, dans une zone plus populaire du Londres de 1887. Nous sommes au début de l'été lorsqu'une dame promenant son chien fait une macabre découverte dans un cimetière de la ville : un corps de jeune femme démembré, dont on ne tarde pas à retrouver les autres morceaux éparpillés dans le quartier de Bloomsbury. Mais l'enquête piétine vite et le légiste ne peut apporter que quelques éclaircissements à Pitt et ses enquêteurs : la victime était une femme jeune, peut-être une domestique et elle avait eu un enfant assez récemment.
    Au même moment, la soeur de Charlotte, Emily, s'apprête à passer quelques semaines chez des parents par alliance, les March, avec son époux, lord Aschcroft. Mais le séjour est compromis lorsque lady Ashcroft s'aperçoit que son mari fait une cour à peine dissimulée à la séduisante belle-fille de leur hôte, Eustace March. Malgré sa rancoeur, Emily est bien déterminée à ne pas laisser son mariage prendre une mauvaise tournure mais, un matin, elle découvre son mari mort, manifestement dans son sommeil d'un arrêt cardiaque. Mais le médecin qui constate le décès émet des doutes : il semblerait que George Ashcroft ait en réalité été assassiné...et quel meilleur mobile aurait une épouse bafouée pour assassiner son mari que de le voir flirter avec une autre ? Très vite, les regards se tournent vers Emily et le seul invité étranger à la famille, Jack Radley, qui, quant à lui, ne semblait pas indifférent au charme de la jolie lady Ashcroft...
    Appelé à Cardington Crescent, Thomas Pitt se retrouve donc devant un cas épineux : devoir enquêter sur un meurtre dont on peut accuser huit personnes et, parmi elles, sa belle-soeur et soeur bien-aimée de son épouse Charlotte....en désespoir de cause, le policier envoie cette dernière chez les March, non seulement pour veiller sur Emily, bouleversée par l'angoisse d'être accusée et convaincue du meurtre de son époux mais aussi pour ouvrir l'oeil...qui, chez les March, aurait pu vouloir la mort d'Aschcroft ? Le maître de maison, Eustace March, qui pérore sans cesse, sa mère, l'acide douairière jamais contente de rien, le séduisant Jack Radley, l'épouse bafouée, la jeune Tassie, qui semble pourtant avoir bien d'autres préoccupations que de trucider les invités de son père ou encore William March, qui, comme Emily, aurait eu bien des éléments pour assassiner George, dans la mesure où celui-ci comptait fleurette à sa propre épouse, Sybilla ?
    Bref, l’écheveau est tissé serré et il va falloir la jouer fine pour Pitt, qui découvre une maison où, soucieux de son rang et de son image, on rechigne à parler à la police et lorsqu'on y est contraint, on le fait de mauvaise grâce ou avec condescendance. Et, de fait, très vite, les choses vont se compliquer quand un nouveau meurtre est commis à Cardington Crescent, révélant une vérité sordide derrière les apparences les plus guindées...
    Comme d'habitude, Anne Perry excelle à nous raconter par le menu la société victorienne et ses travers, comme le ferait un auteur du XIXe siècle dans un roman social. Si l'époque victorienne s'accompagne d'une industrialisation galopante et donc de grands progrès, elle n'est pas exempte aussi d'une grande misère, dont la ville de Londres est un bon exemple, avec ses quartiers propres et cossus qui voisinent avec des zones beaucoup plus populaires voire miséreuses où les conditions de vie sont extrêmes et la mortalité fortement élevée : ici, l'autrice aborde par exemple le cas des éleveuses d'enfants, des femmes qui, moyennant finances, prenaient soin d'enfants confiés par leurs parents mais les laissant bien souvent livrés à eux-mêmes voire s'en débarrassant ou les vendant, orchestrant ainsi un véritable trafic d'êtres humains dans des quartiers tortuux et sombres, où la police s'aventure peu.
    Mais on se rend compte aussi que la haute société londonienne, qui se veut irréprochable n'en cache pas moins de sombres secrets et parfois, des plus sales. Le cas de la maison des March en est un bon exemple, avec un summum de cynisme et d'hypocrisie.
    Toujours aussi complémentaires, Charlotte et Thomas forment un duo qui fonctionne à merveille et qui se montre toujours doué pour résoudre les énigmes les plus embrouillées. Et, de fait, cette enquête recèle en plus une dimension plus personnelle puisque Charlotte est déterminée à faire innocenter sa sœur qui, si elle est convaincue du meurtre de son époux, risque rien de moins que la pendaison.
    Si vous aimez les romans policiers avec une ambiance historique bien restituée, vous pouvez vous laisser convaincre sans problème par cette série très agréable à lire. Il ne faut pas enchaîner les tomes, car les enquêtes en elles-mêmes sont toutes plus ou moins bâties sur le même schéma mais de temps en temps, c'est très agréable.
    Meurtres à Cardington Crescent est un roman policier passionnant qui mêle habilement intrigue, histoire et psychologie des personnages, dont j'avais toujours envie de reprendre la lecture : j'ai vraiment ressenti un grand plaisir à retrouver les personnages et l'intrigue, qui m'a tenue en haleine. Si vous souhaitez découvrir l'univers d'Anne Perry, sans nul doute Les enquêtes de Charlotte et Thomas Pitt sont faites pour vous.

    En Bref :

    Les + : une enquête assez complexe mais qui tient en haleine. J'ai pris un grand plaisir à lire ce huitième tome. 
    Les - : une fin un peu expédiée et qui ne répond pas à toutes les interrogations. 


    Les enquêtes de Charlotte et Thomas Pitt, tome 8, Meurtres à Cardington Crescent ; Anne Perry

     

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle  

     

    • Alors, envie de partir avec Charlotte et Thomas en pleines affaires criminelles à l'époque victorienne ? Découvrez mes billets sur les six premiers tomes : 

     

    L'étrangleur de Cater Street 

    Le mystère de Callander Square

    Le crime de Paragon Walk

    Resurrection Row

    Rutland Place

    Le cadavre de Bluegate Fields

    Mort à Devil's Acre

     

     

     

     

     

     


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  • « Enfin, s'il n'était pas celui de Dieu, ce visage appartenait à l'Homme dans ce qu'il a de meilleur. Avec de minuscules fragments colorés, un Byzantin génial avait capturé la force, l'amour et la tendresse pour donner vie au Pantocrator qu'il vénérait, et qu'il avait raison de vénérer, car il était le souverain suprême dont la compassion sans distinction de race ou de foi s'étendait à l'homme, la femme et l'enfant. »

     

     

     Publié en 2010 en Angleterre 

     En 2018 en France (pour la présente édition)

     Titre original : A Murderous Procession / The   Assassin's Prayer

     Éditions 10/18 (collection Grands Détectives)

     432 pages 

     Quatrième tome de la saga Adelia Aguilar

     

     

     

    Résumé :

    A dix ans, la princesse Jeanne, fille d'Henri II d'Angleterre, est envoyée en Sicile afin d'y épouser le roi. Adelia Aguilar, la seule médecin en laquelle Henri II ait confiance, accompagne la princesse dans son voyage jusqu'à Palerme. C'est ainsi qu'Adelia fait voile vers le sud de l'Italie aux côtés de la fastueuse procession de nobles, musiciens, serviteurs et femmes de chambre. Mais quand les membres de la délégation commencent à mourir dans des circonstances suspects, des accusations de sorcellerie s'élèvent à l'encontre de la brillante femme médecin. 
    Pendant ce temps, l'un des voyageurs, dissimulé sous un déguisement ingénieux et animé d'un redoutable désir de vengeance, observe attentivement Adelia. S'il la veut morte, il préférerait d'abord la voir souffrir. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    1178, en Angleterre. Un grand départ se prépare : celui de la fille du roi, la petite Jeanne, âgée de dix ans, qui doit aller jusqu'en Sicile épouser le roi Guillaume. Dans l'immense cortège qui doit rallier le port de Saint-Gilles sur la Méditerranée, en passant par les terres continentales des Plantagenêts (Normandie, Anjou, Poitou, Aquitaine), se trouvent Adelia, médecin et enquêtrice du roi et son acolyte Mansur. Pour eux, ce voyage est un retour aux sources puisque c'est de la lointaine île méditerranéenne qu'ils viennent tous deux. Mansur est un Maure de Sicile tandis qu'Adelia, recueillie bébé sur les pentes du Vésuve, a été élevée par deux médecins de l'école de Salerne, avant d'y étudier elle-même. En Angleterre, elle est devenue la condifente des morts, une sorte de médecin légiste qui détecte sur les cadavres les causes de la mort. Mais ce voyage est aussi un déchirement pour Adelia, qui doit laisser en Angleterre sa fille, la petite Allie, âgée de six ans, qui reste aux bons soins de sa nourrice Gyltha et de la reine Aliénor, toujours gardée à vue à Sarum, après la révolte de ses fils, à laquelle elle a pris une part importante.
    A la fin de l'été, l'immense convoi s'ébranle, afin de traverser la France vers la Méditerranée et la lointaine Sicile, où Adelia espère bien sûr retrouver ses parents adoptifs, Gershom et Lucia : tous deux symbolisent bien cette Sicile médiévale tolérante puisque l'un est juif et l'autre catholique. Surtout, les parents d'Adelia vivent ensemble sans être mariés et sa mère enseigne la médecine à l'université de Salerne, au même titre que son mari.
    Mais en attendant de retrouver la terre de son enfance, Adelia va connaître bien des aventures. Sur le port de Southampton, elle est avertie de la présence inquiétante dans le cortège royal d'un individu qui lui en voudrait à mort. En effet, quelques mois plus tôt, Adelia, dans une sombre forêt près de Glastonbury a, pour protéger sa vie et celle de ses compagnons, occis un brigand qui se faisait appeler Le Loup...et l'un de ses compagnons a juré de venger sa mort...mais pour Adelia, cela est impossible : le roi Henri II n'a-t-il pas ordonné à l'un de ses capitaines de nettoyer la forêt de ses malandrins ? C'est donc sans y croire que la médecin du roi d'Angleterre embarque pour le continent. Mais, bientôt, des faits étranges surviennent, ajoutant à la méfiance qu'Adelia et Mansur suscitent dans l'entourage de la petite princesse. Des morts étranges semblent jalonner leur sillage et le mot de sorcellerie commence à être prononcé. Loin d'Angleterre, la protection et la confiance dont Adelia jouit auprès du couple royal ne compte plus. Et son ennemi est bien présent, tapi dans l'ombre. Il fera tout ce qui est en son pouvoir pour se débarrasser d'Adelia...
    Dans le même temps, l'ancienne étudiante de l'école de Salerne, des terres occitanes jusqu'en Sicile, découvre avec effarement les changements d'un monde à son apogée, qui a connu son âge d'or mais commence, aussi, à replonger dans l'obscurité : dans les terres toulousaines et languedociennes, le clergé combat l'hérésie cathare qui se diffuse de plus en plus tandis que la Sicile cosmopolite de l'enfance d'Adelia n'est plus qu'un vieux souvenir. Et, si les habitants chrétiens, musulmans ou juifs continuent à vivre en relative bonne intelligence, les femmes ne peuvent déjà plus étudier la médecine comme Adelia en avait eu la possibilité quelques années plus tôt et le roi normand Guillaume d'Hauteville, contrairement à ses ancêtres qui protégeaient tous les Siciliens quelle que soit leur origine, commence à favoriser de manière visible les chrétiens, au détriment des Maures et des Juifs...
    Mais bientôt, Adelia a bien d'autres chats à fouetter : car dans la fourmilière de Palerme, tandis que se préparent les festivités du mariage de la petite Jeanne avec le roi Guillaume, Scarry, son ennemi irréductible, l'a retrouvée...et il est bien déterminé à ne pas la laisser échapper.
    La prière de l'assassin est que le quatrième tome de la saga Adelia Aguilar. Découverte dans La confidente des morts, Adelia est un personnage assez étrange, un peu anachronique aussi : si l'université de Salerne formait effectivement au XIIe siècle des femmes à la médecine, ce qui n'était pas le cas dans les universités plus au nord de l'Europe, la notion de médecine légale n'existe évidemment pas à l'époque. C'est bien plus tard, au XIXe siècle, que se développera une réelle police scientifique, qui utilisera notamment la médecine légale dans ses enquêtes. Mais cette entorse assumée n'a pas été pour me déplaire, au contraire, puisque cela fonctionne parfaitement bien.
    Comme l'a souligné un autre lecteur, avec Ariana Franklin, il ne faut pas s'attendre à des romans vraiment fiables historiquement. L'autrice pas mal de petites libertés, mais cela n'est pas gênant, d'autant plus que ses parti-pris sont expliqués en fin d'ouvrage.
    Ici, plus qu'une véritable enquête policière, nous sommes plutôt dans un roman d'aventures, une sorte de « road-trip » médiéval au cours duquel vont arriver divers événements, mais Adelia ici n'enquête pas à proprement parler. Pour autant, j'ai trouvé La prière de l'assassin très agréable à lire, peut-être parce que nous voyageons un peu plus que dans les tomes précédents, plus statiques. Ici, l'intrigue commence en Angleterre pour se terminer sous le soleil palermitain et c'était très agréable de sillonner les territoires de l'Europe de l'ouest de l'Europe du Sud, si différentes l'une de l'autre, en ce XIIe siècle.
    Le mariage de la petite princesse Plantagenêt en Sicile est une réalité, mais Ariana Franklin s'est accordé de le décaler de deux ans : alors que le roman se déroule en 1178-1179,, c'est en 1176 que Jeanne Plantagenêt est partie pour Palerme, où elle a épousé Guillaume d'Hauteville. Leur mariage restera stérile et, à la mort de son époux, Jeanne se remariera avec le comte de Toulouse. Elle mourra en couches en septembre 1199 avant d'être inhumée à Fontevraud.
    Je regrette presque que le roman n'ait pas été plus long car j'ai été très heureuse de retrouver l'univers de cette série atypique mais séduisante. A ce jour, aucun autre tome n'est traduit : il existe un cinquième tome publié au Royaume-Uni mais qui n'a pas été traduit en France et j'ignore si sera le cas un jour. Je me dis donc que j'ai fait mes adieux à Adelia Aguilar avec la lecture de La prière de l'assassin. Il est vrai que ce tome, notamment par la prescience assez sombre de l'avenir qui se profile, sonne bien comme un point final. Et en cela, il est plutôt efficace.
    A lire si vous aimez les romans policiers et historiques mais si vous n'êtes pas allergique aux petites libertés des romanciers - et ici, avec un plaisir visiblement non dissimulé

    En Bref :

    Les + : un roman plein d'aventures, entre l'Angleterre et la Sicile, prenant et rythmé.
    Les - : pas vraiment de points négatifs à soulever, hormis une fin un peu expédiée.

     


     Adelia Aguilar, tome 4, La prière de l'assassin ; Ariana Franklin 

      Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Retrouvez mes avis sur les trois premiers tomes d'Adelia Aguilar

    La confidente des morts 

    La morte dans le labyrinthe

    Le secret des tombes 


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  • « Jamais je ne devine, mon père. C'est une habitude détestable, qui détruit la faculté de raisonner. J'observe seulement de petits faits et j'en tire de grandes déductions. »

    Couverture La danse macabre

     

     

         Publié en 2019

      Éditions 10/18 (collection Grands Détectives)

      544 pages 

      Sixième tome de la saga Les chroniques d'Edward        Holmes et Gower Watson

     

     

     

     

     

    Résumé :

    1425 : la maudite guerre entre les Armagnacs et les Bourguignons provoque tant de misère et de malheurs que le pauvre ne songe plus qu'à la mort et se presse à Paris pour honorer les sinistres fresques de la Danse macabre. Le clerc anglais Edward Holmes s'y rend lui aussi et y fait une singulière observation, qui ne sera pas sans lien avec l'affaire qu'on lui confie : retrouver une jouvencelle de sang royal, la fille d'Odette de Champdivers, dernière maîtresse de Charles VI qui s'est trouvée impliquée dans un complot d'espions au profit du roi de Bourges. Pour cette enquête, Holmes et Watson vont devoir se rendre à Dijon, sans savoir que s'y trouve déjà l'un de leurs pires ennemis : le Jules César du crime, James Moriarty...

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Nous sommes en 1425 et Edward Holmes, le clerc anglais installé à Paris et que nous avions découvert dans Une étude en écarlate, est appelé sur une nouvelle enquête. Alors que le jeune homme rumine sa déception amoureuse avec Marie de Savoisy, la séduisante chambellane de la reine Isabeau de Bavière, il se dit qu'une nouvelle mission ne pourrait pas lui faire de mal et pourrait même l'aider à se tirer de la torpeur dans laquelle il se trouve depuis quelques semaines. Un jour de mars 1425, alors que son ami Gower Watson et la bonne amie de celui-ci, Constance Bonacieux, sont allés admirer les fresques de la Danse macabre du cimetière des Saints-Innocents, Holmes reçoit la visite d'une connaissance, Guyot de Champdivers, venu lui demander son aide. L'homme voudrait en effet que le clerc, dont l'esprit de déduction est réputé, retrouve sa nièce Marguerite : cette dernière est la fille d'Odette de Champdivers, soeur de Guyot et dernière maîtresse de Charles VI. La jouvencelle est donc de sang royal et par ailleurs soeur du roi Charles VII, qui n'a pas encore réussi en ce milieu des années 1420, à récupérer la totalité de son royaume et ne règne que sur des territoires loyaux autour de Bourges et de l'Anjou - d'où son surnom de roi de Bourges.
    Voilà donc Edward et son compère Gower Watson, archer ayant guerroyé sur le champ de bataille d'Azincourt, lancés sur les routes de Bourgogne où, après avoir dénoncé un complot contre Charles VII, Odette est gardée à vue par le duc Philippe le Bon. Mais d'autres périls approchent et du côté anglais, un complot est ourdi contre le duc bourguignon, pour lequel l'alliance avec l'Angleterre ne compte plus autant. Et à Dijon, Holmes pourrait retrouver l'un de ses ennemis irréductibles, James Murtaugh, alias Moriarty...
    Holmes, Watson, Moriarty...des noms qui vous évoquent peut-être quelque chose, si vous avez déjà lu les romans policiers de Sir Arthur Conan Doyle. Cette série policière et historique de Jean d'Aillon est d'ailleurs censée lui rendre hommage : il s'agit certes d'un pastiche mais d'un pastiche respectueux et qui fonctionne d'ailleurs plutôt bien. L'auteur est passionné d'Histoire et nous la transmet à travers ses mots et ses intrigues. Ici, Jean d'Aillon, après avoir exploré les XIIe et XIIIe siècles avec Guilhem d'Ussel, les Guerres de Religion avec Olivier Hauteville ou encore l'époque de Louis XIV avec Louis Fronsac (dont le duo avec le flamboyant Gaston de Tilly peut d'ailleurs nous évoquer le duo formé par Holmes et Watson), s'intéresse à une époque qui est peu mise en avant dans les romans, peut-être parce qu'elle est assez complexe : il s'agit en effet de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons, qui commence avec l'assassinat du frère du roi, Louis d'Orléans, en novembre 1407. Ce conflit va endeuiller le royaume de France, déjà en proie à un conflit avec l'Angleterre, depuis 1337. C'est dans ce contexte que la ville de Paris est livrée aux Bourguignons en 1418, plutôt d'obédience anglaise tandis que les Armagnacs soutiennent le pouvoir royal et le jeune Dauphin Charles, réfugié dès 1418 au sud de la Loire. En 1419, le duc de Bourgogne Jean sans Peur est assassiné par un fidèle de Charles, faisant définitivement basculer la Bourgogne dans le camp anglais et influençant la ratification du traité de Troyes de 1420 qui voit la couronne de France promise au roi d'Angleterre Henri V en même temps que la main d'une princesse Valois, Catherine, la fille d'Isabeau de Bavière et de Charles VI. Ce contexte historique est assez complexe à suivre car les alliances fluctuent beaucoup et, justement, en ce milieu des années 1420, les relations entre le fils de Jean sans Peur et le pouvoir anglais se sont rafraîchies, notamment parce que le duc de Gloucester poursuit des ambitions en Flandres et en Hainaut que le duc de Bourgogne voit d'un mauvais œil. A tel point que le très turbulent frère de feu le roi Henri V songe à une manière radicale de se débarrasser du caillou dans sa chaussure que représente le duc Philippe...
    Le titre de ce cinquième tome fait référence aux fresques de la Danse macabre du cimetière des Saints-Innocents, qui sont en train d'être peintes, en l'honneur de Louis d'Orléans, le frère assassiné de Charles VI. Il semblerait que ce soit l'une des premières réalisées. Motif assez courant à la fin du Moyen Âge, les danses macabres se nourrissent des inquiétudes du temps (maladies, guerres, famines) et y répondent par la force de l'imaginaire, ces sarabandes qui mêlent morts et vivants de toutes conditions sont censées frapper les esprits et susciter une certaine crainte. Leçon morale adressée aux vivants, la danse macabre les appelle à réfléchir à notre condition de mortel : elle console les pauvres tout en rappelant aux plus grands que personne n'est au-dessus des lois et, à plus forte raison, au-dessus de la Mort.
    C'était une lecture assez agréable, malgré un début un peu confus, car ce n'est pas une, mais trois intrigues qui se mettent en place dans les premiers chapitres avant de se rejoindre, comme une corde que l'on tresserait de plus en plus serré. Mais j'avoue que j'ai parfois eu l'impression de louper quelque chose et je suis revenue en arrière pour être sûre que ce n'était pas le cas. Par chance, ce sentiment de confusion s'est assez vite dissipé et on le noeud se délie assez vite, à mesure que nos personnages poursuivent leur but. Comme d'habitude, il y a beaucoup d'intrigues et d'aventures, c'est palpitant et bien documenté. Seul bémol, beaucoup de petites incohérences ou coquilles historiques qui ne sont pas bien graves en soi mais enlèvent un peu de crédibilité au récit, qui se veut pourtant précis par ailleurs. Je trouve que c'est dommage qu'elles aient passé la correction, surtout que cela revient assez souvent.

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    Gravure d'un des panneaux du cimetière des Saints-Innocents (XIVe siècle)

     

    En Bref :

    Les + : une enquête palpitante et aventureuse, assez complexe de prime abord mais bien menée.
    Les - : beaucoup trop de coquilles et d'incohérences historiques, c'est dommage d'autant que le roman se veut assez précis par ailleurs. 


     Les chroniques d'Edward Holmes et Gower Watson, tome 6, Le Danse macabre ; Jean d'Aillon

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Découvrez mes billets sur les tomes précédents :

    Une étude en écarlate

    Le chien des Basqueville

    La ville de la peur

    Les exploits d'Edward Holmes 

    Le pont de Montereau

     


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  • « La contradiction n’est-elle pas le meilleur moteur de la réflexion, laquelle mène alors à la connaissance ? »

    Les Disparus de Blackmore | Henri Loevenbruck | Pocket

     

     

     

       Publié en 2024

      Éditions Pocket

      560 pages 

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Octobre 1925. A Blackmore, une île coupée du monde au large de Guernesey, meurtres et disparitions sèment la terreur. Alors que la police piétine, Lorraine Chapelle, première femme diplômée de l'Institut de criminologie de Paris, est appelée en renfort. Cette cartésienne irréductible va devoir mener l'enquête aux côtés d'Edward Pierce, qui se présente comme détective de l'étrange. 
    Ensemble, ils devront affronter les plus sombres secrets de Blackmore : les statues énigmatiques disséminées sur l'île, la rumeur d'un culte maléfique, et ce vent lancinant, le murmure des brumes, qui ne cesse jamais. Entre mensonges et confidences, ce duo improbable va devoir démêler le vrai du faux dans une course contre la montre diabolique. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Par une froide et tempétueuse journée d'automne 1925, la jeune criminologue Lorraine Chapelle, fraîchement diplômée, arrive sur l'île anglo-normande de Blackmore où d'étranges choses se passent. Appelée par Sir Ronald Waldon, un des notables de l'île, qu'elle a connu lorsqu'elle était enfant, Lorraine est chargée par le vieil homme d'enquêter sur la mystérieuse disparition de sa petite-fille Margaret, qui s'est volatilisée un soir de début octobre en rentrant du travail, sans laisser de traces.
    Lorraine découvre une petite communauté vivant presque en autarcie, repliée sur elle-même par la force des choses, Blackmore étant perdue au milieu de la Manche. Dépendant des autres îles de l'archipel, plus grandes, plus dynamiques, Blackmore offre un spectacle mystérieux et un peu inquiétant en cet automne pluvieux et sombre.
    Lorraine fait alors la connaissance d'un jeune détective britannique, Edward Pierce, appelé lui aussi par l'un de ses amis vivant sur l'île, le père Pat Molloy, qui semble vouloir partager avec lui des informations surprenantes. Mais, lorsqu'Edward arrive à Blackmore, le prêtre a disparu lui aussi, sans laisser de traces derrière lui hormis quelques notes mystérieuses et des livres traitant d'anciennes croyances celtiques et druidiques. Que se passe-t-il donc à Blackmore ? Une simple affaire criminelle ou quelque chose de plus surprenant encore ?
    Pour Edward et Lorraine commence alors une enquête à la frontière de l'étrange : pourquoi certains habitants de l'île présentent-ils tous une particularité anatomique, à savoir, un cercle marron autour de l'iris de l'oeil ? Quelles sont ses mystérieuses sculptures réalisées dans une pierre inconnue et qui représentent les quatre attributs d'une puissante divinité celtique ? Pour quelle raison les militaires britanniques cantonnés dans un fort de l'île ont-ils tous mystérieusement disparu au XIXe siècle, tout comme d'autres habitants au cours des siècles qui ont précédé ? Pourquoi certains habitants font-ils référence à Croatoan, une mystérieuse déité venue du fond des âges et dont le nom avait été retrouvé gravé dans le bois dans la colonie britannique de Roanoke au large des Etats-Unis actuels ? Une colonie établie à la fin du XVIe siècle et dont les habitants arrivés d'Angleterre disparurent tous mystérieusement sans qu'on sache jamais ce qui leur était arrivé ?
    Pour Lorraine, la cartésienne qui ne travaille qu'à partir de faits concrets et cherche avant tout le mobile criminel, l'enquête s'annonce rude, surtout quand son acolyte se présente comme détective de l'étrange et tout prêt à souscrire aux thèses quelque peu ésotériques qui leur sont présentées.
    Toujours est-il que le temps presse et alors que Blackmore s'apprête à célébrer la Blackmore Week, une semaine de célébrations qui prend fin au moment de la fête d'Halloween (l'ancien Samhain des Celtes), Lorraine et Edward vont devoir découvrir ce qui se cache derrière ces mystérieuses disparitions et les non-dits des habitants. Et quand des témoins se retrouvent brutalement assassinés après avoir collaboré avec eux, leurs investigations deviennent de plus en plus périlleuses.
    Ce roman était le tout premier que je lisais d'Henri Lœvenbruck et je dois dire que j'ai été agréablement surprise. Moi qui ne lis pas beaucoup de thrillers, je ne savais pas trop à quoi m'attendre, d'autant plus que si j'aime les intrigues avec de la tension, du suspense, je n'aime pas quand ça tourne au gore et à l'horrifique...ici, rien de tout cela. Nous naviguons dans une ambiance étrange, surprenante, où la frontière entre raison et croyances anciennes est ténue, mais cela ne m'a pas dérangée, au contraire. Je pense même que si l'auteur avait encore davantage forcé le trait, ça ne m'aurait pas dérangée du tout ! Mais enfin, faisons preuve de continence pour ne pas risquer aussi de tomber dans l'opposé et dans le « trop », car ce n'est pas non plus rendre service à une intrigue.
    J'ai donc été captivée par l'enquête et totalement convaincue par le duo d'enquêteurs, qui fonctionne super bien : l'auteur se débarrasse des poncifs attendus lorsqu'on se trouve en présence d'un tel tandem. Pas de jeu de séduction, ni même de concurrence...Lorraine et Edward travaillent en bonne intelligence et s'entendent bien très vite, ce que j'ai apprécié. Ils sont très complémentaires, même si finalement on n'en sait pas beaucoup sur eux. Au début, Lorraine m'a fait un peu peur : n'ayant pas sa langue dans sa poche, directe et altière, je me suis dit que je n'allais pas l'aimer. Finalement, si elle n'est pas particulièrement attachante, j'ai apprécié la suivre dans son enquête. Elle est le pendant parfait, cartésien, raisonnable d'Edward Pierce, beaucoup plus perméable aux croyances anciennes, aux mystères ésotériques tandis que la jeune femme n'étudie que les faits purs, débarrassée de toute croyance, de tout préjugé, de toute superstition.
    Cette lecture est absolument idéale pour l'automne : l'aurais-je lu à une autre période de l'année, peut-être ne l'aurais-je pas autant appréciée car là, vraiment, j'étais totalement dans l'ambiance. Imaginez une petite île isolée, battue par les embruns de la Manche, balayée par un vent lancinant et permanent...le huis-clos apporte évidemment une certaine tension à l'intrigue puisque, une fois le pied posé sur Blackmore, Lorraine et Edward ne peuvent plus s'en échapper, à moins de résoudre leur enquête. Le temps est bas, souvent nuageux voire tempétueux et cela apporte évidemment une ambiance brumeuse bienvenue, qui colle complètement à l'intrigue sombre. On a presque l'impression d'imaginer Blackmore en clair-obscur, comme si l'île était délavée, grise, dans l'obscurité de l'automne - et cela en rajoute un peu au malaise que l'on peut ressentir par moments.
    J'ai passé un très agréable moment de lecture. C'était bien écrit, fluide, les personnages étaient efficaces. Peut-être un lecture averti de thrillers plus noirs ou plus complexes trouvera-t-il ce roman trop facile, ou trop lisse. Pour ma part, ça a fonctionné parfaitement et je le recommande chaudement

    En Bref :

    Les + : dès lors qu'il y a du mystère, des croyances celtiques et des mystères ésotériques, je suis assez bon public. Ce n'était pas aussi flippant que je ne le croyais, mais j'ai pris plaisir à suivre Lorraine et Edward dans leur enquête, somme toute assez policée, mais intéressante tout de même.
    Les - : pas vraiment de points négatifs à soulever.


    Les disparus de Blackmore ; Henri Lœvenbruck

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 


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  • « Une résurrection, bougonna-t-il, des disparitions, une ressuscitée, des vampires, des morts étranges, de faibles chances de succès...Rien que de très naturel pour nous ! Qu'est-ce qu'on attend ? Bien sûr que nous acceptons cette enquête ! »

     

    Couverture Le commissaire aux morts étranges, tome 7 : Le carnaval des vampires

     

     

       Publié en 2020

      Éditions Babel (collection Noir)

      484 pages

      Septième tome de la saga Une enquête du              commissaire aux morts étranges

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Forcés de fuir Paris, le chevalier de Volnay et le moine hérétique se réfugient à Venise. Ils y retrouvent la jeune Violetta, devenue intendante d'un palais abandonné où de curieux événements se produisent la nuit venue. 
    Cependant, des faits bien plus étranges ont cours dans la cité d'ombres et de lumières. Au petit matin, des corps sont découverts vidés de leur sang. Paniquée, la population profane les cimetières pour brûler des cadavres après leur avoir percé le cœur. Les pouvoirs en place s'inquiètent d'autant plus que le carnaval va débuter...
    Experte en vampirisme, la belle Maddalena Corvinus en est convaincue : les créatures de la nuit ont envahi la Sérénissime. Dans une Venise fantomatique et sa lagune crépusculaire, Olivier Barde-Cabuçon trousse un roman d'atmosphère gothique, original et haletant, et jette ses deux enquêteurs dans leur affaire la plus sanglante. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Mai 1760 : Volnay et le moine hérétique arrivent à Venise après avoir dû quitter la France, où le moine s'est désagréablement fait remarquer par le pouvoir royal. Là-bas, ils retrouvent Violetta, la petite comédienne que le moine considère comme sa fille de cœur. Installés dans un vieux palais au cœur de Venise, les deux enquêteurs sont vite missionnés par un procurateur de Saint-Marc, Apostolino Cordolina - dont la fille Flavia avait quelque peu troublé le chevalier quelques mois plus tôt, dans Humeur noire à Venise - pour mener quelques investigations. En effet, il semblerait que la Sérénissime soit en proie à une véritable fièvre vampirique : une petite fille déclarée morte puis ressuscitée, des tombes profanées et un pauvre bougre retrouvé à l'aube vidé de son sang, portant des traces apparentes de morsure au cou...tout porte à croire que des vampires ont envahi la lagune et sèment la terreur dans la population. Or Venise s'apprête à entrer de nouveau en carnaval, à l'occasion des fêtes de l'Ascension. Et Volnay et le moine n'ont que quelques jours pour faire la lumière sur cette intrigante affaire, qui mêle des intérêts bien terre à terre et des croyances immémoriales qui continuent de terrifier un siècle qui se pique pourquoi de sa rationalité.
    Avec Le carnaval des vampires, nous en sommes déjà à la septième enquête du chevalier de Volnay, commissaire aux morts étranges et de son acolyte, le moine hérétique. Quelques mois après l'avoir quittée, les voilà de retour dans une Venise crépusculaire et qui est l'ombre d'elle-même : toujours grandiose, la capitale de la Vénétie n'est pourtant, en ce milieu de XVIIIe siècle, que l'ombre de ce qu'elle fut des siècles plus tôt. De la grande puissance commerçante et guerrière d'antan, il ne reste que peu de choses et la ville semble s'endormir dans une douce léthargie, repliée sur elle-même et de plus en plus isolée. Alors, quand dans ce contexte éclate une affaire criminelle qui semble convoquer des créatures de la nuit, redoutables mais aussi insaisissables et qu'une terreur superstitieuse semble sur le point de s'emparer de la population, il est temps d'agir et de trouver une explication, car peut-être il en va de l'avenir de la ville : et si Venise n'est pas menacée par de véritables vampires, il se pourrait bien que des menaces plus grandes qu'elle finissent par boire son sang et se nourrir de son fluide vital.
    Encore une fois, cette nouvelle enquête nous fait flirter avec les limites du surnaturel et Olivier Barde-Cabuçon convoque ici l'une des croyances les plus anciennes de l'humanité : celle des vampires. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'en ces années 1760, elle est des plus vivaces, notamment en Europe centrale et orientale, qui fut le théâtre de guerres successives et rapprochées (de la Guerre de Trente Ans à la guerre de Succession d'Autriche) qui peuvent expliquer cette résurgence de croyances qui remontent pour la plupart à l'Antiquité. Le mythe du vampire découle des premiers rituels d'inhumation imaginés par les humains pour rendre hommage à leurs défunts dans l'au-delà : on retrouve ainsi des mentions à des créatures plus ou moins proches de l'image que nous nous faisons du vampire aujourd'hui, buveuses de sang et toujours liées dans l'esprit des contemporains, à des rituels bâclés, une mauvaise inhumation ou une mort violente, dans des textes très anciens en Inde comme en Perse. Les Grecs et les Romains ne sont pas exempts de leurs vampires, tout comme le Moyen Âge. L'époque moderne, ère où croît la pensée philosophique des Lumières, marquée par la raison, la rationalité, ne se débarrasse pas pour autant du vampire. Le XVIIIe siècle, époque ô combien paradoxale, voit ainsi cohabiter une pensée épurée, remettant en cause les superstitions religieuses comme les croyances et les dogmes religieux et des fièvres vampires qui peuvent embraser toute une région, conduisant les habitants à profaner les tombes de ceux qu'ils considèrent comme des vampires, susceptibles de revenir hanter les vivants et de se nourrir de leur sang...c'est pourquoi l'archéologie retrouve aujourd'hui, à l'occasion de la fouille d'un cimetière ancien, des squelettes aux membres liés, dont la cage thoracique est piégée par une sorte de cage les clouant au sol de leur tombeau, ou une pierre dans la bouche...
    J'ai beaucoup aimé ce septième volume, même s'il y a quelques longueurs. Encore une fois, on se laisse prendre au jeu même si on sait que notre duo d'enquêteurs, le moine en tête, saura déjouer tous les pièges et apporter une réponse tout à fait cartésienne à une enquête qui, au départ, semble dépasser l'entendement humain.
    On retrouve avec plaisir des personnages, comme Violetta, attachante et douce; avec plus de réserve certains autres comme la hautaine et froide patricienne, Flavia Cordolina, aussi belle que peu aimable. Et nous faisons aussi la connaissance d'une mystérieuse historienne des vampires, Maddalena Corvinus, aux faux-airs d'Eva Green dans Penny Dreadful.
    Bref, j'ai passé un bon moment avec ce tome, dans l'ambiance assez étouffante d'une ville grouillante, décrépite et prête à s'embraser pour de bon. On retrouve toujours avec joie nos héros et l'ambiance vénitienne si particulière et surtout, très bien décrite par l'auteur, dont on sent tout l'amour pour cette ville transparaître dans ses mots. Olivier Barde-Cabuçon ne s'est manifestement pas contenté de se renseigner au mieux sur la Venise des années 1760. Non, il la fait véritablement revivre.
    Alors que j'avais peur qu'elle ne s'essouffle un peu, je trouve que la série gagne en relief de tome en tome. Je pense qu'elle a encore de beaux jours devant elle et c'est avec joie que je me réjouis de retrouver encore une fois le chevalier de Volnay et le moine dans au moins deux autres enquêtes - en espérant qu'elles ne seront pas les dernières. 

    En Bref :

    Les + : C'est toujours un plaisir de retrouver Volnay et le moine hérétique, même si j'ai ressenti quelques longueurs dans cette enquête vénitienne et...vampirique. Ce dernier aspect m'a assez captivée : il était intéressant de découvrir les croyances ancestrales qui ont donné naissance au mythe du vampire.
    Les - : deux ou trois longueurs, mais sans conséquence.


    Une enquête du commissaire aux morts étranges, tome 7, Le carnaval des vampires ; Olivier Barde-Cabuçon

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 

     

    • Envie de découvrir d'autres enquêtes de Volnay et du moine hérétique ? Retrouvez ici mes avis sur les six premiers tomes : 

    Casanova et la femme sans visage (tome 1)

    Messe noire (tome 2) 

    Tuez qui vous voulez (tome 3)

    Humeur noire à Venise (tome 4)

    Entretien avec le diable (tome 5)

    Le moine et le singe-roi (tome 6)

     


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