• « L'expérience m'a appris que même un fou a sa logique et qu'il n'y a jamais d'effet sans cause. »

    Une Enquête du Commissaire aux Morts Etranges, tome 1, Casanova et la Femme sans Visage ; Olivier Barde-Cabuçon

    Publié en 2013

    Editions Babel (collection Noir)

    443 pages

    Premier tome de la saga Une Enquête du Commissaire aux Morts Étranges

     

    Résumé :

    Après avoir sauvé Louis XV de la mort lors de l'attentat de Damiens, et malgré son peu de goût pour la monarchie, le jeune Volnay obtient du roi la charge de commissaire aux morts étranges dans la police parisienne. Aidé d'un moine aussi savant qu'hérétique et d'une pie qui parle, Volnay apparaît comme le précurseur de la police scientifique, appelé à élucider les meurtres les plus horribles ou les plus inexpliqués de son époque. Epris de justice, c'est aussi un homme au passé chargé de mystère, en révolte contre la société et son monarque qu'il hait profondément.
    Lorsque, en 1759, le cadavre d'une femme sans visage est retrouvé dans Paris, Volnay doit conduire une enquête sur le fil du rasoir avant que le meurtrier ne frappe de nouveau. Mais entre des alliés aussi incertains que le libertin Casanova et des adversaires redoutables, à qui le commissaire aux morts étranges peut-il se fier ?

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

     Mon Avis :

    Voilà, c'est fait !
    A mon tour, j'ai enfin découvert le commissaire aux morts étranges d'Olivier Barde-Cabuçon... Cette saga m'a été chaudement conseillée par Cellardoor, Isabeau Bellevue et June, du blog Histoire de plumes ! Toutes ont beaucoup aimé ce premier tome et ont eu envie de continuer... Elles ont piqué ma curiosité et je me suis dit que je ne pouvais pas passer à côté de cette saga...
    Le XVIIIème siècle, des enquêtes policières sur une trame historique passionnante... J'étais évidemment très impatiente de me lancer mais en même temps, je craignais malgré tout la comparaison qui, immanquablement allait arriver... Vous voyez de laquelle je veux parler ? Si vous me suivez depuis un moment, vous savez que j'aime énormément Nicolas Le Floch, le fameux enquêteur de Jean-François Parot... Lire une de ses enquêtes est toujours pour moi un grand plaisir : le contexte, la langue, les personnages... Tout me plaît, dans cette saga !
    Comme les deux sagas présentaient des points communs assez importants, je me suis dit que je n'allais pas pouvoir m'empêcher de comparer...
    Au final, ce sont deux univers assez difficilement comparables... Oui, il y'a des convergences entre Nicolas et Volnay mais aussi tellement de divergences que tout compte fait, j'ai lu Casanova et la Femme sans Visage sans réellement penser à établir des parallèles entre les deux ! Difficile aussi d'établir une comparaison entre les styles des auteurs, de qualité tous les deux mais tellement différents ! Si l'un colle au plus près de l'époque, l'autre est plus brut de décoffrage, par exemple... De même pour les personnages, d'ailleurs.
    Malgré tout, je crois que ma préférence va et restera à Nicolas mais j'ai cela dit aimé ce premier tome de Une Enquête du Commissaire aux Morts Étranges et je vais expliquer pourquoi...
    Le gros point fort de ce premier tome c'est, assurément, l'ambiance sombre et tortueuse dans laquelle on est plongé dès les premières pages ! Le personnage de Volnay est aussi intéressant, assez mystérieux et torturé : d'emblée, j'ai rapproché ce personnage du bourreau enquêteur de Japp, Hardouin cadet-Venelle. J'ai retrouvé chez Volnay ce même passé pas évident, qui est distillé page après page pour nous permettre de mieux comprendre le personnage et surtout cette soif d'égalité et de justice... S'il est d'un abord assez froid, finalement, c'est un personnage attachant dont la carapace se fend peu à peu.
    Dans ce premier tome, Olivier Barde-Cabuçon met en place un univers dense et abouti, avec des personnages maîtrisés et qui viennent se mêler à la grande cohorte des personnages authentiques, du roi Louis XV en passant par la favorite, Madame de Pompadour, les petites grisettes du Parc-aux-cerfs, le mystérieux comte de Saint-Germain ou encore, le lieutenant de police, Antoine de Sartine...
    Si le contexte est peut-être plus présent et plus utilisé chez Parot, Olivier Barde-Cabuçon est un passionné du XVIIIème siècle et son intérêt transparaît clairement dans son roman. Parfois, j'ai trouvé qu'il forcissait peut-être un peu le trait concernant Louis XV, un roi impopulaire certes mais dont les historiens nuancent aujourd'hui le règne mais, dans l'ensemble, son analyse de l'époque est fine et il en a bien saisi l'ambivalence et tous les paradoxes... Le XVIIIème siècle est une époque passionnante parce qu'elle est double, je crois que c'est ça qui me fascinera toujours : l'apogée de la monarchie française s'accompagne d'un essor culturel et philosophique sans pareil avec l'apparition de ceux que l'on appellera les Lumières, la perte de la foi en Dieu donne lieu à des croyances en des sciences occultes comme l'alchimie et la confiance qu'on n'accorde plus aux prêtres, on la donne à des personnages étranges et fascinants comme le comte de Saint-Germain, Cagliostro ou encore, Mesmer... En même temps, les persécutions contre les protestants n'ont jamais été aussi vives et des femmes et des enfants croupissent emprisonnés dans la tour de Constance à Aigues-Mortes... C'est une époque où on ne croit plus en rien, où les esprits s'aiguisent mais c'est aussi l'époque de l'affaire Calas ou celle du chevalier de La Barre, condamné à mort pour ne pas s'être découvert devant une procession de la fête-Dieu...
    Avec un style souple, fin et percutant, Olivier Barde-Cabuçon s'approprie l'époque et s'en sert extrêmement bien. C'est un XVIIIème siècle beaucoup plus sombre que celui de Parot mais c'est une vision très intéressante aussi de l'époque, avec une approche parfois un peu plus scientifique et philosophique, qui colle à l'émulation savante de ces années-là.
    Casanova et la Femme sans Visage est un bon roman, avec une enquête bien menée, même si j'y ai parfois décelé des longueurs. Le rythme est là malgré tout, assez fluide, c'est une lecture très agréable et, passés les premiers chapitres peut-être un peu abrupts, on se met à naviguer avec aisance dans l'ambiance particulière de ce premier tome. Il s'agit effectivement d'un roman qui aura une suite, on peut même dire, des suites et je me suis dit que les longeurs venaient peut-être de là, comme si l'auteur avait voulu prendre le temps de poser son intrigue mais aussi tout l'univers de Volnay, son commissaire aux morts étranges, ce qui n'est pas plus mal, à vrai dire. La fin m'a surprise et, sans me décevoir réellement, j'ai parfois trouvé qu'elle n'était pas toujours cohérente avec le reste de l'intrigue...peut-être est-elle un peu téléphonée et la résolution de l'enquête m'a un peu laissée sur ma faim, alors que j'attendais une révélation spectaculaire...mais je n'en dirais pas plus et la seule chose que je peux vous conseiller maintenant, eh bien c'est de lire le premier tome des Enquêtes du Commissaire aux Morts Étranges. Faites-vous votre propre idée mais surtout, venez apprécier cette plume, très agréable à lire et que j'ai pour ma part découverte avec plaisir ! ! Si vous aimez les romans historiques, le XVIIIème siècle des Liaisons Dangereuses, aux relents vénéneux et enfin, si vous aimez les résolutions logiques d'énigmes embrouillées, alors sans nul doute ce roman est fait pour vous !

    En Bref :

    Les + : un personnage principal intéressant, tout comme l'idée de départ, le style, souple et aiguisé, qui colle parfaitement au récit et le contexte passionnant, évidemment...
    Les - : 
    la fin peut-être un peu rocambolesque, quelques longueurs...


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  • Colis reçu le : 8 septembre 2018

    Aujourd'hui, je vous présente un colis un peu atypique qui n'est pas vraiment un swap mais qui, dans le principe, peut s'en rapprocher un peu. La seule différence, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'échange...mais on reçoit un colis chaque mois et c'est toujours la surprise à chaque fois, un peu comme pour les swaps ! ! Donc j'ai décidé que je vous présenterai mes Thé Box dans la catégorie des Swaps puisqu'il faut bien les classer quelque part !

    En septembre, c'est la force du tigre qui vous accompagnera, avec des breuvages énergisants et aux saveurs exotiques, qui nous emmènent tout droit en Asie. Alors c'est parti...

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La Box de septembre...La force du Tigre !

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La marque Teatower, une habituée de La Thé Box, nous propose ce mois-ci le thé Black Mango, un thé noir aux morceaux d'ananas, de raisin et bien sûr...de mangue, avec des pétales de roses et des fleurs de bleuet ; Tamia & Julia, les créatrices de La Thé Box, nous offrent Green, un Sencha de Chine, un thé vert, tout simplement.

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La marque Bos (comme Rooibos) nous propose une canette de Rooibos glacé citron vert / gingembre, une boisson rafraîchissante et vraiment surprenante... Je n'ai pas l'habitude de consommer le rooibos comme ça et j'ai été agréablement surprise. Eat Natural, enfin, a glissé dans la Box de septembre cette barre de céréales amande et raisins secs. Et pour doser son thé en vrac, quoi de mieux que cette jolie cuillère en bois, un peu ethnique ?

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    Le thé vert Fruit du dragon, de la marque Thés de la Pagode, que je connais bien, est un thé vraiment agréable et surprenant, parfumé avec cet étrange fruit asiatique, le fruit du dragon. Quant à Sakura vert, c'est une création de la marque française Collection T. : il s'agit d'un thé vert aux arômes d'amande et de fleurs de cerisier. J'ai beaucoup aimé.

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La maison Palais des Thés nous propose un sachet de quatre de leurs créations : Détox Brésilienne est un thé vert de Chine ajouté à du maté brésilien, de l'açaï et du guarana, pour un cocktail énergisant et détox. Vive le thé ! est un thé vert de Chine aux arômes de gingembre et d'agrumes : j'ai hâte d'y goûter. Blue of London est un thé noir Earl Grey, dans la plus pure tradition britannique. Quand à Grand Yunnan Impérial, comme son nom l'indique, c'est un thé noir de Chine, un grand thé d'une qualité qui lui vaut le surnom de Moka des thés. Idéal pour le matin.

    La Thé Box, Septembre 2018 : Tigre

    La marque un peu plus connue Tetley nous propose trois créations : Twisty Mint est un thé vert Sencha aromatisé à la menthe fraîche, avec une légère touche de concombre. Sunset Safari nous emmène, grâce à ses notes rondes et chaudes, en pleine savane : un rooibos idéal pour le soir, avec des notes de gingembre, de cannelle et de cardamome avec un zeste d'orange. Indian Memories est un thé noir indien qui nous emmène dans un pays inconnu et peuplé de tigre...


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  • « On n'oublie jamais. On se contente de faire semblant. »

    Les Tisserands de la Licorne ; Françoise Bourdon

    Publié en 2007

    Editions Pocket

    320 pages

    Résumé :

    En 1869, le village de Saint-Blaise vit au rythme du tissage artisanal du drap. Joséphine, dix-sept ans, étouffe dans la maison familiale où le métier à tisser prend toute la place. Contre l'avis de son père, elle décide de partir pour Sedan.
    Là-bas, elle tombe amoureuse de Jérôme, le fils de la puissante famille Desprez, propriétaire d'une fabrique de draps depuis près de deux siècles. Très épris l'un de l'autre, ils projettent de se marier malgré l'opposition de la tyrannique mère du jeune homme.
    Mais la guerre de 1870 va bouleverser leur destin...

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    A la veille de la guerre de 1870, les Ardennes et notamment la ville de Sedan et les villages environnants, vivent au rythme des métiers à tisser. Les manufactures sedanaises tournent à plein régime et leurs draps sont envoyés partout en France et même au-delà. Joséphine, dix-sept ans, vit à Saint-Blaise, village tisserand, dans lequel elle étouffe : orpheline de mère, la jeune femme, comme ses frères et sœurs, doivent supporter la violence d'un père alcoolique. Sur un coup de tête, Joséphine quitte la maison familiale pour Sedan où elle est embauchée à la Licorne, une puissante usine de draps. Là, la jeune femme découvre le monde ouvrier et industriel à grande échelle, bien différent de celui, plus artisanal, qu'elle a connu jusque là dans son petit village. Un jour, dans la cour de la manufacture, elle rencontre Jérôme : il s'agit du fils unique et donc héritier de Charles et Félicité Desprez, les propriétaires de la Licorne. Tombés amoureux, les deux jeunes gens deviennent amants, au grand dam de Félicité, qui voue une haine à cette jeune femme qu'elle prend pour une arriviste. Elle va alors tout tenter pour les séparer mais l'Histoire va les rattraper : la Prusse menace la France et, en 1870, c'est à Sedan que meurt le Second Empire, après que Napoléon III ait été fait prisonnier. Occupées, les Ardennes sombrent dans un chaos dont elles ne sortiront que quelques années plus tard et les manufactures s'arrêtent.
    Entre grande Histoire et histoires individuelles, Françoise Bourdon signe là un roman intéressant, sur fond d’industrialisation et de guerre. Le personnage de Joséphine est, sinon attachant, du moins admirable pour son courage, sa détermination, sa volonté de s'en sortir, malgré les critiques, malgré les coups bas.
    Les Tisserands de la Licorne aborde beaucoup de sujets : la France industrielle, la modernisation galopante, le monde qui change, la guerre qui anéantit tout. Région frontalière, les Ardennes seront particulièrement touchées par les conflits de 1870, de 14-18 puis de 39-45. C'est aussi, comme le grand Est et le Nord, une région très industrialisée au contraire du reste du pays, qui reste encore très rural et agraire. Là-bas, on vit au rythme des mines, de charbon ou d'ardoise ou à celui, comme à Sedan, des métiers à tisser. Les drapiers sont des notables influents et font tourner les rouages de Sedan, avant que la guerre ne vienne enrayer la machine et ne marque le début d'une grande modernisation qui en laissera certains sur le carreau.

    La manufacture royale de draps du Dijonval à Sedan


    J'ai trouvé que Françoise Bourdon prenait très bien la mesure de l'époque dans laquelle elle situe son roman : les revendications syndicales, l'organisation des entreprises, l'occupation prussienne après 1870 mais aussi la passion, profonde, qui fait de leur métier, pour beaucoup de tisserands, un compagnon de vie à part entière. Enfin, c'est la seconde moitié du XIXème siècle, un monde en plein mutation, qui revit ici sous nos yeux.
    A travers Joséphine, ce sont aussi les premiers combats des femmes pour leur reconnaissance qui sont abordés, ou même à travers Félicité Desprez, véritable gestionnaire. C'est le combat de femmes qui veulent enfin être reconnues autrement que comme des mères et des épouses et prouvent au monde entier qu'elles sont suffisamment intelligentes pour savoir, comme les hommes, mener leur barque, faire des choix, voire diriger et avec beaucoup d'à-propos d'ailleurs, des entreprises ou des usines, bref, à être des patronnes.
    Le seul bémol que je soulèverais, comme pour Le Maître Ardoisier, c'est que Les Tisserands de la Licorne est parfois un peu trop rapide. J'ai trouvé que les premiers chapitres ne nous permettaient ni de bien connaître les personnages ni de bien nous installer dans l'intrigue. On sait le principal sur Joséphine mais je crois que le mot, quitte à être un peu plus long, aurait mérité d'être parfois un peu plus développé...C'est difficile de traiter plus de vingt ans en un peu plus de 300 pages et je comprends bien sûr que l'auteure, parfois, ne se soit pas attardée...C'est sûr qu'on ne peut pas reprocher au roman d'être plein de longueurs... ! Mais parfois, c'est bien aussi de prendre le temps, surtout au début...sans tomber bien sûr dans l'excès inverse avec des pages et des pages, des tonnes et des tonnes de descriptions ! A part ça, le reste du roman est intéressant et j'en ai beaucoup appris sur le métier de drapier et de tisserand -même si certains termes auraient peut-être mérité d'être expliqués. Françoise Bourdon décrit aussi très bien et avec beaucoup d'affection cette région des Ardennes, qu'elle avait déjà utilisée comme cadre de son roman Le Maître Ardoisier : d'ailleurs, j'ai trouvé que le personnage de Joséphine ressemblait à celui de Benjamine Warlet, qui se bat pour les ardoisières familiales, avec beaucoup de force et de détermination.
    Ce court roman, entre Histoire et traditions, saura sûrement trouver son public ! ! Pour ma part, si je n'ai pas été convaincue par tout, j'ai trouvé que Les Tisserands de la Licorne était un bon livre et l'auteure a fait de bonnes et solides recherches pour restituer une époque dans toute sa richesse et sa complexité mais aussi sur l'industrie drapière et ses particularités. Entre roman historique et destin de femme, Les Tisserands de la Licorne nous emmène au cœur de ce XIXème siècle entre traditions et modernité. 

    En Bref :

    Les + : un roman historique et de terroir entre histoires individuelles et grande Histoire, dans un contexte d'industrialisation en pleine expansion.
    Les - :
    un début un peu trop rapide et quelques termes techniques qui auraient peut-être mérité d'être expliqués...

     

     

    Brooklyn ; Colm Tóibín

     Thème de septembre, « Nos régions ont du talent », 9/12


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  • In My Mail Box - Août, Septembre 2018

     

    Le Temps de l'Amour ; Colleen McCullough

    Editions de l'Archipel

    Date de parution : 2018

    Sujet : Australie, Histoire, Saga familiale, XIXème siècle

    * * *

    La Fiancée de Lammermoor ; Walter Scott

    Editions Archipoche

    Date de parution : 2018

    Sujet : Drame, Classiques, XVIIIème siècle, Écosse, XIXème siècle

    * * *

    Le Chardon et le Tartan (Outlander), tome 8, Partie I, A l'Encre de mon Cœur ; Diana Gabaldon

    Editions J'ai Lu

    Date de parution :

    Sujet : Voyage dans le temps, XVIIIème siècle, Écosse, États-Unis, Drame, Romance

    * * *

    Le Chardon et le Tartan (Outlander), tome 8, Partie II, A l'Encre de mon Cœur ; Diana Gabaldon

    Editions J'ai Lu

    Date de parution : 2016

    Sujet : Voyage dans le temps, XVIIIème siècle, Écosse, États-Unis, Drame, Romance

    * * *

    Concours pour le Paradis ; Clélia Renucci

    Editions Albin Michel

    Date de parution : 2018

    Sujet : Histoire, Histoire de l'Art, XVIème siècle, Peinture


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  • « De la vie, on ne garde que quelques étreintes fugaces et la lumière d'un paysage. »

    Amours ; Léonor de Récondo

    Publié en 2016

    Editions Points

    216 pages

    Résumé :

    Tandis que son épouse dort paisiblement, Anselme le notaire abuse de Céleste, la jeune bonne, qui tombe enceinte. Pour sauver l’honneur de tous, Victoire décide d’adopter l’enfant. Mais elle n’a pas la fibre maternelle, et le nouveau-né dépérit. En cachette, Céleste va tendrement prendre soin de son petit. Une nuit, Victoire les rejoint dans la chambre sous les combles…

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1908, quelque part en Touraine, la maison du notaire Anselme de Boisvaillant est une maison bourgeoise comme il y'en a tant. Une solide maison de tuffeau surmontée d'un toit d'ardoises grises, sise dans le village fictif de Saint-Ferreux-sur-Cher. Une maison où cohabitent les serviteurs, deux bonnes et un cocher et le couple de maîtres, Anselme et sa jeune épouse, Victoire. Un duo, entre lequel n'est jamais venu se glisser aucun enfant, une absence qui gangrène petit à petit le ménage... Victoire ne dit rien mais elle est minée par cette stérilité qu'on lui reproche et qu'on lui impute, parfois à mots couverts, parfois plus brutalement. Et pendant ce temps, Anselme couche avec la bonne, Céleste. Ou plutôt, pendant ce temps, Anselme viole la bonne, car dans cette relation n'entre aucune notion de désir, de plaisir et encore moins de consentement.
    Et Céleste tombe enceinte... Elle ne sera pas la première ni la dernière domestique à mettre au monde un enfant du maître. Mais comme le couple Boisvaillant n'a pas d'enfant, Victoire décide d'adopter le bébé et de le faire passer pour sien. Seulement la jeune femme n'a pas la fibre maternelle et elle peine à s'attacher à cet enfant qui n'est pas né d'elle et le petit dépérit. Alors, une nuit, la jeune Céleste descend de sa soupente jusque dans la chambre de Victoire et y reprend son bébé. Une autre nuit, Victoire se réveille et découvre le nourrisson avec sa mère. Commence alors une relation étrange et feutrée entre les deux jeunes femmes, entre lesquelles le petit Adrien devient un trait d'union. Une relation où les différences sociales, les différences de statut n'ont plus cours, où chacune comble ses carences affectives comme elle peut et se console de ses blessures et de ses désillusions : Céleste d'avoir été une parmi d'autres dans une famille modeste qui n'a pas le temps d'élever ses enfants, Victoire d'avoir été mariée à un homme qu'elle n'aime pas et de ne pas trouver dans son couple le bonheur, la stabilité et l'affection dont elle a désespérément besoin.
    Dans ce roman, j'ai retrouvé ce que j'avais aimé dans Pietra Viva, le premier livre de Léonor de Récondo que j'ai lu en 2013 : la pureté sincère et sans tapage d'un style de qualité, sa douceur aussi. S'il y'a bien une chose que l'on peut porter au crédit de Léonor de Récondo, c'est qu'elle écrit très bien et fait partie de ces auteurs qui ont une manière bien à eux mais en même temps extrêmement parlante, d'analyser les êtres et la société. Je me suis délectée de ce roman, peut-être avant même l'histoire, pour son style, la manière dont son auteure l'a amené, pour ce qu'elle en a fait... Il y'a du madame Bovary dans ce roman, il y'a de la beauté, et quelque chose de plus sale aussi, de plus vil. En lisant ce roman, j'ai parfois eu comme un sentiment de déréliction, comme si le monde bourgeois personnifié par les Boisvaillant dans ce roman était en train de doucement tomber en lambeaux, comme si, à six ans du grand bouleversement que représentera la Première guerre mondiale, déjà, tout un monde était en train de changer et de disparaître, comme si la solide maison de tuffeau derrière les murs de laquelle se déroule toute l'histoire n'était déjà plus rien, qu'une façade abandonnée. Finalement, malgré l'arrivée d'un enfant, un amour naissant, j'ai toujours eu l'impression au cours de ma lecture, qu'un relent de pessimisme et de malheur flottait au dessus des personnages, une impression qu'ils sont tous condamnés, d'une certaine manière : au silence, à l'indifférence, aux non-dits, aux questionnements sans réponse.
    La prouesse de Léonor de Récondo, c'est d'avoir réussi à placer tous ses personnages sur un pied d'égalité : pas social ou intellectuel, non. Mais une égalité dans leur humanité même et dans l'attachement que chacun va faire naître chez le lecteur. Même Anselme, on ne peut le détester... Car on sent chez lui une extrême détresse, une blessure terrifiante, comme on ne peut détester Victoire, pas toujours très aimable mais marquée elle aussi par des déceptions et des attentes non formulées. Oui, j'ai vraiment retrouvé en elle une Emma Bovary : et l'attachement que j'ai eu pour l'héroïne de Flaubert, je l'ai transposé sur Victoire, que j'ai considérée avec amitié, compréhension et parfois un peu de pitié.
    Comme Pietra Viva, Amours n'est pas un roman comme les autres. Le premier, qui avait pour héros Michel-Ange, n'était pas vraiment un roman historique, du moins ce n'est pas comme ça que je l'avais perçu, même si Léonor de Récondo nous baladait dans l'Italie du XVIème siècle. Il y'avait quelque chose d'autre qui faisait de cette histoire quelque chose de bien plus universel qu'un simple roman historique. Il y'avait autre chose, voilà. Quoi, je ne sais pas, mais il y'avait autre chose. Et j'ai retrouvé ça dans Amours. Certes, l'auteure situe son intrigue au début du XXème siècle, donc il y'a quand même un aspect historique dans ce roman mais ce n'est au final pas ce qui compte le plus. Ce qui compte, c'est l'histoire qui se trame derrière les murs de l'étude Boisvaillant, cette histoire profondément humaine et universelle qui unit ces êtres là à tel moment mais pourrait en unir d'autres à différentes époques. L'histoire est cela dit marquée par des convenances et des conventions peut-être un peu surannées pour notre époque mais qui caractérisent bien les années 1900, entre tradition et modernité, dans une société encore trop bien-pensante et volontiers accusatrice.
    Amours est un roman court et que l'on ne voit d'ailleurs pas passer, mais je crois qu'il n'en aurait pas fallu plus. L'intérêt de ce roman réside aussi dans sa brièveté, je crois. Plus de pages l'auraient peut-être rendu moins intense, son intrigue en aurait été diluée. Je me suis plongée avec délicatesse et j'ai aimé cette histoire... Sans réellement m'identifier aux personnages, je les ai aimés et je crois que je les ai compris. Moi aussi, pendant ces quelques pages, j'ai été une habitante de la maison, invisible et silencieuse, qui a regardé les autres se débattre dans leur vie. Chacun a ses problèmes, sa conscience, ses questionnements. Une vie ne s'écoule jamais sans heurts. Même dans les romans. Même chez les bourgeois où l'on apprend à corseter les sentiments et les mots comme les femmes corsètent leur poitrine et leur taille fine.
    Amours est un roman peut-être plein de douceur mais aussi plein de mots tus et de rendez-vous ratés. Amours est le roman des sentiments, maternels, conjugaux, familiaux, amicaux. Mais il est aussi plus que ça, il porte en lui beaucoup d'émotion. Léonor de Récondo a le talent d'avoir restitué tout ça en quelques deux cents pages. Pour s'en rendre compte, il faut le lire, tout simplement.

    En Bref :

    Les + : un roman doux et touchant, de toute beauté, une belle expression de sentiments profondément humains.
    Les - :
    Aucun.


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