• « Claire voulait connaître le nom des étoiles, Kathleen était décidée à décrocher la lune. »

    Lizzie et Michael, tome 1, Les Rives de la Terre Lointaine ; Sarah Lark

     

    Publié en 2010 en Allemagne ; en 2017 en France (pour la présente édition) 

    Titre original : Das Gold der Maori

    Editions Archipoche 

    710 pages 

    Premier tome de la saga Lizzie et Michael

     

    Résumé : 

    Hiver 1846. La famine est terrible en Irlande, où la maladie de la pomme de terre fait des ravages. Kathleen et Michael sont jeunes. Ils s'aiment et rêvent de partir en Amérique pour y faire fortune. 

    Mais ce projet s'effondre lorsque Michael est arrêté pour avoir volé de l'orge et du seigle. Condamné au bagne, il est envoyé en Australie pour y purger sa peine. 

    Un vendeur de bétail, Ian Coltrane, en profite pour demander Kathleen -enceinte de Michael- en mariage. Ses parents, pour éviter le déshonneur, acceptent sans hésiter. Bientôt, les jeunes époux embarquent pour les rives d'une terre lointaine, promesse d'espoir : la Nouvelle-Zélande. 

    Mais Kathleen n'a pas oublié Michael. Le destin saura-t-il les réunir ? Ou se jouera-t-il encore de leur passion ? De coups du sort en désillusions, la vie n'a pas fini de les surprendre. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Si vous me suivez depuis un moment, vous savez sûrement (et si vous ne le savez pas encore, je vous l'apprends) que j'aime beaucoup les romans d'évasion et plus particulièrement ceux de Sarah Lark. Pourquoi, je n'en sais rien, mais cette auteure a su me séduire avec sa saga Le Pays du Nuage Blanc, que j'ai dévorée. Les trois tomes m'avaient tous plu autant les uns que les autres et je n'avais refermé le dernier qu'à regret.
    J'étais bien sûr ravie de la retrouver avec Les Rives de la Terre Lointaine, une autre saga néo-zélandaise mettant en scène Lizzie et Michael, qui ont donné leur nom à la saga mais dans laquelle évoluent aussi pléthore de personnages.
    L'histoire démarre d'abord loin d'ici, dans un petit village irlandais en 1846. Michael et Mary Kathleen sont jeunes et amoureux et se sont promis l'un à l'autre. Seulement, dans les années 1840, les champs de pomme de terre sont décimés par une maladie qui fait pourrir les patates dans le sol et, comme il s'agit de la principale alimentation des plus modestes, cela entraîne une famine sans précédent : des millions d'Irlandais vont émigrer vers l'Amérique et c'est un doux rêve que caresse Michael : quitter l'Irlande, où il ne connaîtra jamais que la pauvreté et un labeur incessant au service d'un lord anglais et de son régisseur implacable et partir outre-Atlantique fonder une famille avec Mary Kathleen.
    Mais le jeune homme commet le faux-pas de trop : après avoir volé des sacs de grain chez le régisseur du domaine, qu'il transforme en whisky dans une distillerie clandestine, il est reconnu coupable, emprisonné puis chargé enchaîné sur un bateau avec d'autres condamnés, direction le Van Diemen's Land, l'actuelle Tasmanie, où la couronne britannique, à cette époque, déporte ses prisonniers, tout comme en Australie, d'ailleurs -c'est un peu l'équivalent britannique du bagne de Cayenne, au final. Terres vierges et inhospitalières, elles sont parfaites pour l'envoi sans retour de prisonniers qui finissent, une fois leur peine purgée, par devenir des colons.
    Séparés, Michael et Mary Kathleen vont alors vivre deux existences en parallèle, mais sans s'oublier. Le jeune homme, après une fuite rocambolesque, arrive en Nouvelle-Zélande, où il aimerait prendre un nouveau départ. Là, il retrouve la jeune Lizzie Owens, venue de Londres et déportée pour vol tandis que Mary Kathleen, mal mariée par ses parents avides d'argent et voulant cacher que la jeune fille était enceinte sans être mariée, subit la jalousie maladive d'un mari qu'elle n'aime pas et qui la maltraite. Ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'ils ne sont pas loin l'un de l'autre, Mary Kathleen et Ian, son mari, ayant émigré peu après leur mariage en Nouvelle-Zélande.
    Dans le cadre grandiose des deux îles de Nouvelle-Zélande, entre expansion des colonies et traditions maories, Sarah Lark déroule une saga haletante, digne des plus grands romans d'évasion !

     

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    Un paysage néo-zélandais typique, qui rappelle d'ailleurs parfois aux héros du roman leur Irlande natale...


    Je me plais à dire qu'elle est un peu aux romans d'évasion ce que Kate Morton est aux romans à secrets : avec les mêmes fils, elles parviennent pourtant à tisser des intrigues différentes mais toujours passionnantes. Dans Les Rives de la Terre Lointaine j'ai retrouvé Le Pays du Nuage Blanc mais pas que...j'ai retrouvé Anna Jacobs, Tamara McKinley, Colleen McCullough mais, je crois que, définitivement, Sarah Lark est la reine de ce genre qui ne cesse, ces dernières années, de gagner en succès. Entre romance, un peu d'Histoire, grande fresque familiale, elle nous tisse un récit cohérent et captivant. On sait qu'on va suivre sur plusieurs années et même plusieurs générations les mêmes personnages et les mêmes familles et on s'attache rapidement à eux. Ils sont tous importants et nécessaires au développement de l'intrigue, finalement. Et si, au départ, j'ai été assez attachée au premier personnage féminin, Mary Kathleen, je me suis rapidement sentie plus intéressée par Lizzie, l'autre femme du récit, qui prend de plus en plus d'importance à mesure que l'on avance dans l'intrigue et qui m'a parue peut-être un peu moins lisse, un peu plus complexe, certainement du fait de son passé peu évident.
    Je ne serais pas honnête si je vous disais que j'ai été captivée de bout en bout et que je n'ai pas ressenti de longueurs, parce que, effectivement, ce n'est pas le cas : le roman fait plus de sept cents pages. Les longueurs sont, peut-être pas inévitables, mais finalement assez justifiées dans un roman comme celui-ci, aussi dense. Ce n'est pas étonnant, je pense, de ressentir une petite baisse de régime en milieu de roman. L'important est que l'auteur réussissse à nous capter à nouveau et c'est ce que fait Sarah Lark. C'est comme les quelques petites facilités scénaristiques ici ou là : oui, je les ai vues, oui parfois je n'ai pas pu m'empêcher d'être sceptique mais, globalement, est-ce le plus important ? Dans la mesure où le roman est intéressant d'autre part, on est plus enclin à pardonner les petites faiblesses.
    Ce premier volume est un bon roman qui donne envie de découvrir la suite de la saga : l'auteure y aborde beaucoup de sujets intéressants, inhérents à l'époque ou plus universaux, nous fait découvrir la culture maorie avec beaucoup de précision. Bref, encore une fois, Sarah Lark nous fait nous immerger dans une histoire très travaillée, aboutie et la rencontre avec ses personnages est toujours un plaisir. 

    En Bref :

    Les + : un univers chaleureux et familier, comme dans Le Pays du Nuage Blanc, nous emporte dès les premières pages. Sarah Lark, en utilisant la même démarche que dans sa fameuse première saga, nous dépayse avec ce roman d'évasion abouti et maîtrisé. 
    Les - : quelques longueurs en milieu de roman et des facilités scénaristiques qui l'impression que certains chapitres sont cousus de fil blanc... 


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  • « Si vous attendez que votre existence suive le cours que vous désirez la voir suivre, vous ne trouverez jamais le bonheur. Le bonheur, il faut lutter pour l'obtenir. Et dès lors que vous commencez à batailler pour quelque chose, eh bien, vous avez déjà remportez la victoire. Peu importe l'issue. »

    Si Près des Etoiles ; Kate Alcott

    Publié en 2015 aux Etats-Unis ; en 2019 en France (pour la présente édition)

    Titre original : A Touch of Stardust

    Editions de l'Archipel 

    324 pages 

    Résumé : 

    1938. Julie Crawford n'a qu'une idée en tête : devenir scénariste. Aussi quitte-t-elle sa ville natale de l'Indiana pour gagner Hollywood.

    Sur place, ses illusions se heurtent à la réalité des studios : réalisateurs irascibles, vedettes capricieuses...Par chance, la jeune femme croise la route d'une star : Carole Lombard, dont la liaison avec Clark Gable défraie la chronique. 

    Devenue l'assistance de Carole, Julie est aux premières loges de ce scandale qui pourrait nuire au film à succès que promet d'être Autant en emporte le vent, en cours de tournage. 

    Prise dans un tourbillon qui la dépasse, Julie réussira-t-elle à prendre son envol, ou verra-t-elle ses espoirs balayés par la prestigieuse usine à rêves ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Imaginez-vous propulsé quatre-vingts ans plus tôt, sur le plateau d'un des films cultes du XXème siècle, Autant en emporte le vent, avec Vivien Leigh dans le rôle de Scarlett O'Hara et Clark Gable dans celui de Rhett Butler.
    Nous sommes en 1938 et le monde du cinéma hollywoodien est en effervescence. Le producteur du film, Selznick, n'a lésiné sur aucun détail, bien déterminé à faire de ce film une légende. Pourtant, c'est mal parti et, si aujourd'hui, effectivement, l'adaptation cinématographique du fameux roman de Margaret Mitchell est mondialement connue, lors du tournage, on ne donne pas cher de ce long-métrage : trop long, trop laborieux, pas forcément toujours fidèle au roman de Mitchell, des réalisateurs qui se succèdent -d'abord Sam Wood et George Cukor qui seront ensuite remplacés par Victor Fleming-, des centaines d'actrices qui auditionnent pour le rôle de Scarlett, avant que la britannique Vivien Leigh ne soit engagée officiellement, des heurts entre Selznick et son beau-père, Louis B. Mayer, les caprices de star de Clark Gable...Bref, c'est un tournage difficile qui accouche finalement de plus de six cents kilomètres de bandes, dans lesquelles il va falloir couper et couper encore pour livrer un film de, quand même, deux heures quarante-cinq et qui rapportera contre toute attente plus de vingt-six millions de dollars... Tout est démesure sur le tournage de ce film extraordinaire et c'est dans cet intense fourmillement, assez extraordinaire pour l'époque, que Kate Alcott se propose de nous emmener, avec son nouveau roman Si Près des Etoiles.
    L'été dernier, j'ai découvert cette auteure que je ne connaissais absolument pas avec La Petite Couturière du Titanic où une jeune femme ordinaire, Tess Collins, pour échapper à une vie d'ennui en tant que femme de chambre, devient au pied levé l'assistante de Lucy Duff Gordon, styliste en vue. A travers elle, on découvre ce qui va se passer après le naufrage du Titanic, le procès organisé à New York et les scandales qui ne manquent pas de sortir au grand jour...
    Dans Si Près des Etoiles, de même, c'est une madame-tout-le-monde, comme la qualifie d'ailleurs l'auteure elle-même, mais sans connotation négative malgré tout, que nous suivons. Julie est une jeune femme débarquée de son Midwest natal : née dans l'Indiana, à Fort Wayne, elle a tout laissé derrière elle pour essayer de percer à Hollywood. Pas en tant qu'actrice, cependant, mais en tant que scénariste, ce qui est peut-être tout aussi difficile. Et elle n'a jamais, justement, été aussi près des étoiles, ces fameuses stars du cinéma, éphémères ou pas qu'elle croise tous les jours -du coup, je voulais souligner que j'ai trouvé très pertinent le titre français, ce qui n'est pas toujours le cas avec les traductions. Mais là, effectivement, j'ai trouvé qu'en peu de mots, il résumait assez bien toute l'intrigue du roman, en utilisant ce terme d'étoile, tellement consubstantiel au monde du cinéma. Fermeture de parenthèse.
    Donc, à la fin des années 30, Los Angeles est une ville grouillante, pleine de ferveur et d'effervescence, qui ne jure que par le cinéma. Là-bas s'y retrouvent tous ceux qui, éblouis par le septième art, veulent tenter leur chance : acteurs, réalisateurs ou scénaristes en herbe, comme Julie, chacun pose ses valises dans la capitale californienne avec des rêves plein la tête. Mais le cinéma, c'est un monde de requins, où aucun cadeau n'est fait, où le chacun pour soit et l'hypocrisie sont une religion. Certains parviennent à tirer leur épingle du jeu et à devenir quelqu'un tandis que d'autres -la grande majorité finalement- sont broyés par un système impitoyable.

     

    Clark Gable (Rhett Butler) et Vivien Leigh (Scarlett O'Hara) dans une scène d'Autant en emporte le vent 


    D'abord, Julie rencontre l'actrice Carole Lombard, maîtresse puis épouse de Clark Gable, qui campe le premier rôle masculin dans Autant en emporte le vent. Elle-même ne joue pas dans le film mais elle est, en 1938, l'actrice la mieux payée d'Hollywood et elle accompagne son compagnon, tout en continuant sa carrière en parallèle : car si Autant en emporte le vent est un tournage gigantesque, des centaines d'autres films continuent d'être tournés dans ce temple du cinéma.
    Les deux jeunes femmes, toutes deux originaires du Midwest, s'entendent bien aussitôt et Carole Lombard propose à Julie de devenir son assistante. Celle-ci va découvrir la vie de la star, ailleurs que sur les plateaux, dans son intimité avec Clark Gable, entre Bel Air et leur ranch d'Encino, où ils jouent aux fermiers, entourés de chiens, de chats et d'autres animaux. Une existence qui n'est pas privée, où l'on doit vendre le moindre scoop à la presse pour éviter qu'il ne soit déformé et ne nous échappe, où il faut se méfier de tout et de tout le monde. Une existence fragile et qui peut basculer d'un moment à l'autre, parce que la notoriété peut disparaître aussi vite qu'elle est venue. Carole Lombard, avec bienveillance, va mettre le pied à l'étrier de sa jeune assistante et la pousser à tenter sa chance : Julie deviendra-t-elle scénariste ? L'actrice, en tous cas, y croit et la pousse à persévérer dans cette voie qu'elle a choisie et qui la fait vibrer, cette voie qui l'a fait quitter son ancienne vie et lui a donné le courage de s'opposer à ses parents.
    Sur le plateau de Autant en emporte le vent, Julie a aussi rencontré l'amour, en la personne d'Andy, assistant de Selznick. Ce personnage est intéressant parce que c'est à travers lui que Kate Alcott va instiller dans ce monde très superficiel de strass et de paillettes une dose de gravité : n'oubliez pas à quelle époque Autant en emporte le vent est tourné... nous sommes en 1938 et, depuis quelques temps, un vent mauvais souffle d'Europe. Même si, aux Etats-Unis, on est encore loin de se douter qu'une guerre va éclater dans quelques mois, on se préoccupe malgré tout des décisions prises à Washington et la question qui est sur toutes les lèvres est la suivante : le président Roosevelt va-t-il annoncer, oui ou non, la neutralité des Etats-Unis dans l'éventualité d'une guerre européenne ?
    Andy est en premier lieu concerné par ce qui se passe en Europe parce qu'il est juif -et il n'est pas le seul dans le cinéma américain à cette époque- et a laissé à Berlin ses grands-parents et en France, son frère. Et, en Californie même, le jeune homme se heurte parfois à un antisémitisme à peine dissimulé. Finalement, derrière les décors en carton-pâte d'Hollywood, les nuages noirs s'amoncellent et l'orage s'apprête à tout balayer... Leslie Howard, qui incarne Ashley Wilkes dans Autant en emporte le vent, regagnera l'Angleterre dès le début du conflit et s'engagera dans l'armée britannique ; il trouvera la mort en 1943. Clark Gable, lui, s'engagera dans l'armée américaine, comme Carole Lombard, qui meurt dans un accident d'avion en 1942, à l'âge de trente-trois ans, brisant nette une carrière particulièrement prometteuse.
    Malgré le bouillonnement du monde hollywoodien, il n'a jamais paru, en cette fin des années 1930, aussi fragile, peut-être justement parce que tous ceux qui en font partie, hormis quelques uns, ne sont pas lucides et semblent complètement en dehors des réalités, oubliant tout ce qui ne tourne pas autour des films sur lesquels ils sont en train de travailler. Et pourtant, le danger est là, de plus en plus présent, de plus en plus tangible et j'ai eu l'impression que le personnage de Andy venait reconnecter finalement ce monde de faux-semblant, un peu artificiel, à une réalité un peu moins jolie mais tout aussi importante puisque, tôt ou tard, elle finira par le toucher de plein fouet. Et, quand explose en apothéose le succès d'Autant en emporte le vent, à la fin de l'année 1939, déjà le conflit a commencé. Deux ans plus tard, les Etats-Unis y entreront à leur tour, après l'attaque de Pearl Harbor.
    Si le roman se concentre avant tout sur le tournage du film, qui connaît revers sur revers avant de connaître finalement un succès complet et qui ne se dément toujours pas, ce que j'ai trouvé absolument passionnant d'ailleurs, j'ai aimé aussi que l'auteure ne passe pas sous silence le contexte de l'époque. Le contraire aurait été étonnant, en même temps : comment passer sous silence un événement aussi important que la Seconde Guerre Mondiale ? Et, finalement, petit à petit c'est un parallèle qui s'établit entre la Guerre de Sécession, au cœur du roman de Margaret Mitchell et donc de l'intrigue du film et ce conflit qui n'a pas encore éclaté mais dont on se rapproche de jour en jour et qui, comme le précédent, changera la face du monde.
    Si Près des Etoiles est un roman dense et abouti, certainement bien plus que La Petite Couturière du Titanic, que j'avais aimé mais qui avait peiné à me passionner. Ici, je me suis vraiment sentie captivée, je n'ai pas vu le temps passer. A aucun moment je n'ai senti un quelconque ennui et j'ai aimé cette immersion complète dans le cinéma hollywoodien du début du XXème siècle. Et vous savez le meilleur ? C'est que je ne suis absolument pas cinéphile ! Je ne vais jamais au cinéma, les Oscars et le festival de Cannes me laissent indifférente. C'est un univers qui ne me passionne absolument pas et pourtant, dans Si Près des Etoiles, je me suis sentie totalement investie. Peut-être justement parce que l'auteure met beaucoup de flamme, d'exaltation, de passion, dans son roman. Peut-être parce que découvrir l'envers du décor, les coulisses, m'a finalement bien plus plu que de me poser devant un écran et voir un produit fini.
    Donc, un conseil, si Kate Alcott a réussi à me captiver malgré mon manque d'intérêt pour l'univers du cinéma et si, au contraire de moi, c'est un domaine que vous aimez, alors jetez-vous sur ce roman qui, certainement, ne vous décevra pas ! Ce roman est vraiment une réussite, entre historique et romance, plutôt bien écrit malgré quelques passages plus faibles que d'autres.
    Je remercie donc chaleureusement les éditions de l'Archipel pour l'envoi de ce roman. Pour moi, c'était un coup de poker : je trouvais le résumé assez alléchant mais je ne savais pas du tout si j'allais aimer... Au final, ce coup de poker s'est avéré gagnant et je pense même que je peux considérer Si Près des Etoiles comme une des meilleures lectures de l'année 2019, sans aucun doute. J'ai passé un très bon moment et j'aime vraiment faire ce genre d'agréables découvertes livresques. Je crois même que Kate Alcott m'a donné envie de découvrir le roman culte de Margaret Mitchell que je n'ai toujours pas lu... 

    Clark Gable et Carole Lombard en 1939

    En Bref :

    Les + : une belle découverte des coulisses de l'un des plus grands tournages du cinéma et de ce monde clinquant et un peu superficiel, dans le sillage d'une jeune femme qui pourrait être n'importe qui et qui, de fait, en devient attachante. Une vraie bonne découverte ! 
    Les - :
     pas vraiment de points négatifs à soulever dans ce roman !

     


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  • « Tôt ou tard, on a tous besoin de faire une halte. Ce n'est jamais une perte de temps. »

    Les Héritiers de Kervalon ; Inès de Kertanguy

     

    Publié en 2015  

    Editions Le Livre de Poche 

    712 pages 

    Résumé :

    Les Kervalon forment à l'aube du XXe siècle une grande famille, fière de ses valeurs et de ses traditions. Apolline n'a que dix ans lorsque sa mère, la baronne de Saint-Eliph, née Kervalon, meurt en couches en mettant au monde son troisième enfant. La fillette grandit entre Paris et le manoir familial, avec son frère et sa sœur, entourée de ses nombreux cousins, avant que la Première Guerre mondiale fasse d'elle une très jeune veuve. Elle élève ses deux enfants dans un monde où les repères s'effondrent et où les femmes apprennent enfin à vivre pour elles-mêmes. D'une guerre à l'autre, les Kervalon poursuivent tous des desseins très différents. Mais jamais ils n’oublient leurs racines. Jusqu'à la lecture du testament de l'oncle... Espérances déçues, batailles fratricides et secrets de famille : dans la tourmente d'un siècle en pleine mutation, Inès de Kertanguy brosse un passionnant tableau de l'aristocratie française.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Ce roman d'Inès de Kertanguy aurait pu être sous-titré : Chroniques de l'aristocratie française au début du XXème siècle, car c'est véritablement cela qu'elle nous propose, tout au long des sept cents pages que compte ce récit.
    Présent dans ma PAL depuis août 2017, Les Héritiers de Kervalon y est arrivé un peu par hasard, surtout parce que le résumé me rappelait Downton Abbey, en fait. Mais un Downton Abbey qui se passerait en France et cela a immédiatement fait tilt ! Les auteurs anglo-saxons sont très forts pour nous raconter cette époque-là, dans de grandes fresques historiques et familiales : je pense notamment à Barbara Taylor Bradford, avec sa saga Cavendon ou encore à Helen Simonson et son Été avant la Guerre. On pense moins aux auteurs français et pourtant, en premier lieu, après avoir songé à la fameuse série de Julian Fellowes, c'est la saga Les Semailles et les Moissons d'Henri Troyat qui m'est venue à l'esprit. Et, effectivement à la lecture des Héritiers de Kervalon, j'ai retrouvé un peu de cette ambiance que j'avais beaucoup aimée dans les quatre romans de Troyat, même si ses héros n'ont absolument rien à voir avec ceux d'Inès de Kertanguy.
    Déjà, commençons par poser l'intrigue : celle-ci va courir sur plus de quarante ans et démarre au tout début du XXème siècle, en 1906 très exactement. Nous sommes à Paris, où le baron et la baronne de Saint-Eliph s'apprêtent à accueillir leur troisième enfant. Seulement, la baronne Aurore de Saint-Eliph meurt des suites de son accouchement, laissant la nouvelle-née, Anne-Sophie mais aussi deux enfants plus grands, Apolline, dix ans et Auguste, douze. C'est un grand bouleversement, comme on peut s'en douter, dans la vie des deux enfants mais aussi dans celle de leur père. Leur existence va alors se partager régulièrement entre Paris, où le baron possède son usine de chapeaux, qu'il dirige et la Normandie, où Apolline et Auguste, auprès de leur oncle Anastase et de leur tante Jeanne ainsi que leurs cousins, vont retrouver un semblant d'équilibre, dans une ambiance familiale, aimante et chaleureuse.
    C'est donc à travers le prisme de ces deux familles, les Kervalon -de bonne et ancienne noblesse bretonne- et les Saint-Eliph -de noblesse plus récente puisque d'Empire-, que nous allons travers les premières décennies du XXème siècle, riches en événements et bouleversements de toutes sortes. Les générations se succèdent et les enfants d'hier deviennent les adultes d'aujourd'hui tandis que les enfants d'aujourd'hui seront les enfants de demain et préfigurent l'avenir. Sur plus de quarante ans se déroulent les existences parallèles des différents personnages : je n'ai pas vraiment eu l'impression qu'il y'ait un héros ou une héroïne qui se démarquent du lot...certes, on suit beaucoup Apolline puis Apolline et ses enfants mais j'ai eu l'impression que l'auteure privilégiait chacun de ses personnages et cet attachement que j'ai ressenti rapidement pour Apolline, je l'ai aussi ressenti pour les autres personnages. Ils m'ont tous plu parce qu'ils sont tous différents, abordent et vivent les événements de diverses manières, pensent aussi l'avenir de manière conservatrice ou alors, au contraire, totalement nouvelle et avant-gardiste.
    Et finalement, c'est intéressant que l'auteure ait choisi de mettre en scène dans son récit deux familles nobles, certes d'extraction différente mais qui connaissent les mêmes bouleversements et, par certains aspects, la même remise en cause de leur mode de vie : les grands domaines deviennent des gouffres financiers, les coutumes ancestrales de la noblesse française sont mises à mal par la modernité galopante qui gagne l'Europe dans cette première moitié du XXème siècle. Les femmes s'émancipent, les plus jeunes veulent voir du pays, on se met à travailler... Et là-dessus viennent se greffer les deux grands conflits de 14-18 et 39-45, qui vont faucher la jeunesse et ses rêves, laissant des centaines de veuves et d'orphelins. Aucune famille ne sera épargnée ni par la première ni par la seconde Guerre Mondiale et les épreuves traversées par les Saint-Eliph comme par les Kervalon sont identiques à celles de nos propres familles... Les joies aussi, d'ailleurs, les peines, les déceptions sont les mêmes... Au-delà de ce portrait circonstancié de l'aristocratie française du début du XXème siècle, c'est surtout une grande et belle description de cette France qui n'existe plus aujourd'hui mais qui a tant de charme -les prénoms délicieusement surannés des différents protagonistes nous font dès les premières pages plonger dans une époque révolue.
    J'ai trouvé cette lecture belle et bien souvent émouvante. Cette France disparue, c'était celle de nos grand-parents, de nos arrière-grand-parents...C'est évidemment un récit qui fait sens et qui fait écho en nous : quand on suit le mari d'Apolline, son frère et ses cousins, dans les tranchées de Verdun ou de la Somme, c'est aussi dans le sillage de nos aïeux que nous nous trouvons ; les prisonniers de 39-45 sont nos grand-pères, nos arrière-grand-pères... Cherchez bien dans votre arbre généalogique mais vous avez certainement un ancêtre qui a fait 14-18, un autre qui a été prisonnier ou a été résistant dans les années 40... Les femmes qui font front et se battent à leur manière à l'arrière, elles aussi, sont nos grand-mères, ces femmes et ces mères qui sont devenues soutien de famille, ont élevé les enfants, tenu les maisons et peu importe le milieu d'où elles viennent, finalement, puisque les événements sont les mêmes pour tout le monde. C'est peut-être ce côté assez universel qui m'a fait me sentir si proche des héros d'Inès de Kertanguy, au-delà, bien sûr, de leurs qualités propres.
    J'ai apprécié les voyages incessants entre les différents domaines, entre Paris et la province, j'ai aimé aussi que l'auteure ne laisse pas de côté la grande Histoire mais, au contraire, l'intègre parfaitement à son récit et fasse interagir ses différents personnages avec elle et jamais de manière trop facile. Sa vision nuancée de la Seconde Guerre Mondiale par exemple m'a vite convaincue.
    Inès de Kertanguy a insufflé beaucoup de vie et de chaleur à ses personnages et donc, de fait, à son récit qui en gagne en teneur. On quitte les personnages à l'issue des sept cents pages que compte le roman avec un peu de tristesse, une certaine nostalgie, comme une envie diffuse de découvrir ou redécouvrir sa propre histoire familiale... Leur existence est décrite avec pudeur et, même si on rentre dans leur intimité, ils gardent une part de mystère bienvenue. Peut-être la fin va-t-elle un peu vite... J'aurais presque aimé un deuxième tome pour connaître la destinée des plus jeunes qu'on laisse, à la fin du roman, à l'aube d'une ère de paix -du moins l'espère-t-on très fort- et d'une vie nouvelle.
    Ce n'est qu'à regret que j'ai tourné les dernières pages du roman. Ce n'est qu'à regret que j'ai laissé partir les personnages et c'est avec un sentiment particulier que j'achève cette lecture, avec le sentiment d'avoir été à la rencontre de personnages que je connaissais ou que j'aurais aimé connaître, comme ces aïeux que l'on voit sur les vieilles photos de famille et dont on se plaît à imaginer le destin.
    Les Héritiers de Kervalon est une grande et belle saga historique et familiale qui saura, j'en suis sûre, ravir tous les amoureux du genre. Personnellement, j'ai été absolument conquise. 

    En Bref :

    Les + : Un roman historique comme, vraiment, je les aime, ce Downton Abbey à la française ne m'a pas déçue, bien au contraire. Courant sur plusieurs décennies, Les héritiers de Kervalon nous fait découvrir des personnages attachants et sympathiques et l'auteure a travaillé son sujet, ce qui ne gâche rien
    Les - : pas vraiment de points négatifs à soulever, bien au contraire. 


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  • « En politique, elle ne savait qu'une chose : le sort des princesses, soumises aux volontés de leur père, transplantées d'un pays à l'autre contre leur gré, mariées de force à de parfaits inconnus, sacrifiées au bien de leur Etat, n'était guère enviable. »

    Madame l’Étrangère : La Princesse Palatine ; Jacqueline Duchêne

    Publié en 2001

    Editions JC Lattès 

    285 pages 

    Résumé : 

    1671. La princesse Palatine Elisabeth-Charlotte de Bavière arrive en France pour épouser le duc d'Orléans, Monsieur, frère du roi. Elle sait qu'elle aura, au cœur de la cour la plus brillante d'Europe, le titre prestigieux de Madame, mais que l'homme à qui elle est promise n'aime pas les femmes.
    La Palatine devra lutter. Contre la mélancolie de l'expatriation, contre les complots des favoris de son mari. Subir aussi la volonté de Louvois, décidé à détruire « son » Palatinat. Affronter l'hostilité de la Maintenon qui intrigue, contre les enfants de Liselotte, en faveur des bâtards de la Montespan.
    Au milieu de tous ces tourments, la complicité de Louis XIV est le seul rayon de soleil de la Palatine. Le franc-parler de l'étrangère, son insolence, son goût de la chasse et de la vie plaisent infiniment au monarque, quand il n'est pas contraint par ses maîtresses de prendre ses distances avec elle.
    La Palatine vit, la Palatine résiste et surtout, la Palatine écrit des centaines de lettres pleines d'esprit et témoignant d'un sens aigu de l'observation. Et c'est à partir de cette correspondance mordante que Jacqueline Duchêne a construit ce roman d'une belle intensité, qui met en lumière l'une des femmes les plus attachantes du Grand Siècle - et la plus surprenante.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1671, Élisabeth-Charlotte de Bavière, fille de l'électeur palatin, arrive en France pour y épouser Philippe, dit Monsieur, le frère unique de Louis XIV. Veuf depuis dix-huit mois d'Henriette d'Angleterre, il est urgent pour le prince de se remarier pour avoir enfin des fils.
    C'est dans un monde étrange que débarque la jeune femme de dix-neuf ans : guindée à outrance, la Cour de France est dépaysante et même un peu effrayante pour une jeune femme simple qui n'aime rien tant que la chasse, la bière et le chou ! Dans cette Cour où tous ses faits et gestes sont scrutés, décortiqués, commentés, où les louanges hypocrites le disputent aux critiques les plus assassines il va falloir à celle que l'on surnomme la Palatine ou Liselotte beaucoup de courage surtout que son mari Philippe est assujetti à des favoris qui ont la haute main sur sa maison et voient arriver sa deuxième femme comme une intruse. Heureusement, Madame pourra compter sur son beau-frère, le roi, avec qui elle entretiendra toujours de bonnes relations, le roi dont elle fut peut-être un peu secrètement amoureuse.
    La Palatine est un personnage historique que j'aime beaucoup, peut-être la seule personne qui, dans l'entourage du Roi-Soleil, fit preuve de sincérité et de spontanéité dans un monde où on se déchire sans cesse pour la moindre prébende, la moindre prérogative.
    J'ai cherché en vain une édition complète de sa fameuse correspondance, malheureusement la plupart de ses lettres sont encore aujourd'hui censurées et certainement le resteront, ce qui est dommage, parce que finalement, il n'y a pas meilleur moyen de cerner un caractère qu'en le lisant.
    Car la princesse Palatine, en plus d'être un éminent personnage historique, témoin de premier plan du siècle de Louis XIV, est aussi une épistolière de renom, une véritable conteuse, dotée d'un style de qualité et unique.
    Pour moi, elle est attachante pour plein de raisons : cette sincérité à toute épreuve au milieu d'une mer de fausseté et d'hypocrisie, d'une part ; son amour presque juvénile pour le roi et qui ne se démentira jamais, d'autre part ; enfin pour cette droiture qu'elle gardera toute sa vie malgré tout ce qu'elle a traversé au cours de sa longue existence.
    Née en 1652, à Heidelberg, fille de l'électeur palatin Charles-Louis de Bavière, séparée toute jeune d'une mère peu aimante et relativement indifférente, mise en concurrence avec les nombreux bâtards de son père, souvent à son désavantage, mariée à dix-neuf à un homme de douze ans son aîné et homosexuel notoire, arrachée à son pays natal et à sa tante bien-aimée Sophie -la mère du futur roi d'Angleterre George Ier-, puis en butte à la Cour aux jalousies et aux hostilités de coteries en tout genre, on ne peut pas dire que la longue existence de la Palatine fut une promenade de santé, bien au contraire et c'est ce qu'illustre assez bien ce roman : à croire que la place de belle-sœur du roi est maudit et vouée, pour celle qui l'occupe, au malheur.

     

    Description de cette image, également commentée ci-après

     

    Madame, belle-soeur de Louis XIV en 1713 (Hyacinthe Rigaud et atelier)


    Malgré tout, Madame ne s'en tirera pas trop mal. Remplaçant souvent auprès du roi la reine Marie-Thérèse, qui ne fut jamais à la hauteur de son rôle, Madame fut à plusieurs reprises représentante et première dame du royaume. Elle sut s'attirer une amitié sincère et durable de la part du roi, enfin, elle donna à son époux le fils tant attendu, le futur Régent (Philippe d'Orléans). Par ses enfants, elle est l'ancêtre directe de la branche des Orléans donc de l'actuelle famille prétendante au trône de France mais aussi des Habsbourg d'Autriche et donc de Marie-Antoinette et de tous les descendants de la fameuse Marie-Thérèse. Issue d'une puissante famille du Saint-Empire, elle est cousine avec la famille de Hanovre qui hérite en 1714 de l'Angleterre. Madame est un personnage incontournable, finalement quand on y pense. Dans le roman, le récit démarre en Alsace à la fin de l'année 1671, quand Liselotte arrive en France. On va la suivre ensuite jusqu'à l'automne de sa vie, exactement jusqu'en 1715, juste après la mort du roi. Quand on pense à elle, en général -en tous cas c'est le cas pour moi- c'est le tableau de Rigaud qui vient à l'esprit, où l'on peut y voir une femme d'un certain âge, imposante, bien vêtue mais pas vraiment belle, le teint marqué par les chasses au grand air et une petite vérole tardive, les cheveux blanchis... J'ai aimé du coup la découvrir jeune, toute nouvelle dans un royaume qu'elle ne connaît pas et dont elle va devoir apprivoiser les codes. On la découvre ensuite jeune épouse, pas vraiment heureuse puis jeune mère, attentive à ses enfants comme de ses belle-filles, les filles de Monsieur et d'Henriette d'Angleterre, dont elle se séparera à regret.
    Quand on lit ce roman, ce qui ressort surtout de la personnalité de Madame, c'est une simplicité sans affectation, une véritable authenticité et un besoin assez irrépressible d'aimer et d'être aimée en retour, conséquence peut-être d'une enfance relativement solitaire et de l'absence de ses parents.
    Madame a une personnalité, une présence mais elle est foncièrement sympathique. On peut avoir de l'intérêt pour Louis XIV, pour Madame de Maintenon, pour Madame de Montespan et j'en passe...mais ce ne sont pas des personnages que l'on va trouver forcément sympathiques...Ils en imposent et une certaine distance s'installe, que même l'Histoire ne transcende pas, au contraire. Pour la princesse Palatine, c'est autre chose : elle est accessible, proche de nous. Elle a ce côté avenant qui ne la fige pas et ne la rend pas convenue.
    Peut-être Jacqueline Duchêne, par moments, ne s'est pas assez départie de la rigueur de l'historienne et n'a pas recréé, de sa plume, ce cocon chaleureux propre au roman et qui est, souvent, tellement agréable. Mais au final, le personnage de Madame se suffit assez bien à lui-même : elle est attachante envers et contre tous. Elle est forte, parfois un peu fantasque, pleine d'un naturel désarmant et d'un furieux besoin de rendre ce qu'on lui donne. L'hostilité dont elle a pu être la cible à la Cour serre le coeur par moment parce qu'on se dit que Madame n'était pas mauvaise. Certes, elle avait coutume de dire -et surtout d'écrire- ce qu'elle pensait, ce qui souvent, attire des ennemis, on le sait. Pour autant, avec le recul, on ne peut s'empêcher de penser que Madame était peut-être, dans toute cette foule grouillante et compassée, rampant avec servilité aux pieds du monarque, de ses maîtresses puis de la toute-puissante Madame de Maintenon -que Madame surnommait avec beaucoup d'amitié et de chaleur « la vieille conne » ou encore « la vieille guenipe »-, la seule personne suffisamment lucide pour voir les limites et les contradictions du monde courtisan. D'ailleurs, elle n'en fera jamais vraiment partie et c'est ce qui fait d'elle un personnage différent et intéressant.
    Son expérience d'historienne a évidemment permis à Jacqueline Duchêne de saisir ce personnage dans toute sa complexité et de la repositionner dans un contexte qui, de part sa position éminente dans la famille royale, la concerne au premier chef, que ce soit les ravages de son Palatinat natal par les troupes françaises jusqu'au coup d'Etat de son fils, Philippe, pour prendre en mains la régence du jeune Louis XV, en 1715.
    Ce roman m'a donné envie de me plonger dans une biographie de la princesse Palatine. C'est une très bonne introduction et une fiction historique de qualité, servie évidemment par la formation initiale de son auteure : je ne doutais pas, en commençant ce roman, d'être absolument satisfaite...c'est tellement agréable de lire un roman historique sans erreur ni approximation (parce que malheureusement, ils sont légion). Pour autant, étant donné que c'est un roman justement, l'auteure n'a pas toujours pu développer ni expliciter. Cette lecture va me permettre de rebondir sur un ouvrage peut-être plus scientifique mais Madame l’Étrangère permet cependant d'aborder dans son ensemble ce personnage étonnant qu'est la Princesse Palatine.
    Mon amour des romans historiques n'a, au cours de cette lecture, absolument pas été déçu

    En Bref : 

    Les + : roman historique plaisant et bien écrit, Madame l’Étrangère nous fait découvrir l'intimité et les pensées les plus secrètes de cette princesse allemande devenue l'une des premières dames de France à l'époque du Roi-Soleil. 
    Les - : Aucun. 


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  • « Et tout d'un coup, le souvenir m'est apparu. Ce goût, c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. »

    Couverture Du côté de chez Swann

    Publié en 2011

    Date de parution originale : 1913

    Editions Le Livre de Poche (collection Les Classiques de Poche)

    478 pages 

    Premier tome de la saga A la Recherche du Temps Perdu 

     

    Résumé : 

    Alors que le narrateur a pris désormais l'habitude de s'endormir tard, le livre s'ouvre sur un premier souvenir : « Longtemps, je me suis couché de bonne heure ». Mais la pensée qu'il était temps de chercher le sommeil le réveillait bientôt, et tandis qu'il attendait de se rendormir, il passait la plus grande partie de la nuit à se rappeler la vie de son enfance à Combray - une vie dont il va nous offrir le récit. 
    Dès ce premier volume de la Recherche que Proust fait paraître en 1913, bien des personnages de son grand roman apparaissent, en particulier Charles Swann : c'est du côté de sa propriété que s'orientent souvent les promenades de Combray, et c'est de son amour pour Odette de Crécy que nous lisons ensuite le récit. Swann, plus tard, donnera au héros le désir d'aller à Balbec, et, au moment de commencer à écrire, le narrateur du Temps Retrouvé nous reconduira de son côté encore lorsqu'il confiera : « La matière de mon expérience laquelle serait la matière de mon livre venait de Swann ». 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Quand j'ai posé les doigts sur le clavier pour commencer à rédiger cette chronique, immédiatement la question a été : Mais comment chroniquer un livre comme celui-ci qui nous fait nous sentir si petit ? Comment poser ses propres mots, qui seront forcément inférieurs à ceux de Proust, sur une oeuvre comme celle-là ? Comment décrire un ressenti qui sera tellement différent des ressentis habituels que font naître la littérature et qui, en lui-même, est si complexe parce que, dans mon cas, absolument pas tranché ? 
    Car oui, comme beaucoup je pense, j'ai un peu de mal à me positionner quant à cette lecture. Difficile de dire, comme pour certains autres livres, j'aime ou ne n'aime pas parce que je crois que ça ne reflète en rien ce qu'on ressent au cours d'une lecture pareille. On est au-delà de ça et il n'est pas question d'aimer ou pas un roman comme celui-ci. Mais nous y reviendrons... Commençons d'abord par présenter l'oeuvre... 
    En utilisant le roman et l'imaginaire pour raconter, pudiquement, des souvenirs d'enfance, Proust remonte dans le temps à la recherche de ce temps perdu des jeunes années. Du Côté de chez Swann est le premier tome d'une vaste saga, qui est composée de sept volumes. Avec un style très personnel, l'auteur, en utilisant un narrateur anonyme mais qu'on devine être son alter ego, relate maints souvenirs d'enfance et d'adolescence : la maison familiale de Combray, en Champagne, la découverte de la littérature, les premiers émois amoureux, la vie parisienne... On retrouve dans ces pages des personnages dont le nom nous est familier -les Guermantes, Monsieur Swan-, même sans avoir lu Proust, ce qui prouve qu'il fait partie de notre patrimoine, à part entière. 
    Alors, en démarrant une lecture comme celle-là, on tomberait presque dans la facilité, le confort de se dire qu'on va retrouver un univers familier et douillet... Et finalement il s'avère que ce n'est pas le cas. Proust fait partie des auteurs inclassables... Ça ressemble à plein d'autres univers et ça ne ressemble à rien d'autre en même temps. C'est la France de Zola, de Balzac, de Colette mais racontée d'une toute manière et ce style, surtout, que dire d'un style comme celui-là à part que celui à qui il appartient est forcément un génie ? Maîtriser à tel point la langue est assez extraordinaire, quand même, surtout que le français n'est pas évident, on le sait bien. 

    Description de cette image, également commentée ci-après

    Portrait photographique de Marcel Proust vers 1895


    Mais, pour le lecteur, c'est un style ardu, excessivement difficile et je bénis presque mes profs de lycée de n'avoir jamais eu l'idée de nous faire lire Proust ! Ma lecture résultait d'une démarche personnelle, d'une curiosité motivée par mon amour de la littérature, des mots et des classiques : il me paraissait, pas obligatoire parce que le mot est fort mais évident que je lirai un jour Proust. Et de cette démarche, a résulté une lecture très dense, très riche mais aussi très laborieuse. En le terminant, le premier mot qui m'est venu est : enfin ! Il est venu instinctivement, machinalement. Oui, je l'avoue, j'ai ressenti du soulagement à l'idée d'avoir terminé ce livre mais aussi beaucoup de satisfaction... peut-on mesurer, en n'ayant, comme j'avais pu le faire jusqu'ici, seulement lu quelques citations de Proust, très connues mais sorties de leur contexte, l'immense, l'incommensurable maîtrise de la langue, poussée à son plus haut niveau ? Je ne crois pas. Lire un texte comme celui-ci et certainement les suivants aussi est difficile mais c'est une expérience littéraire. Vous aimerez, vous adorerez peut-être et c'est tout ce que je vous souhaite...Ou alors vous vous ennuierez et vous ne comprendrez peut-être pas tout, comme moi et je n'ai pas honte de l'avouer. Mais malgré tout, parce que si vous vous lancez dans une lecture comme celle - là c'est que, déjà, vous avez un amour certain de la littérature, vous serez sensible à la beauté des mots subtilement agencés comme on coud des perles sur un corsage, comme on exécute des pas de danse. Ils sont rares ces auteurs qui parviennent à un si haut niveau, qu'on pourrait presque qualifier de géniaux dans leur genre. Je crois que la plume de Proust est au-delà du talent, c'est encore plus haut, c'est encore plus grand. Effectivement en ce qui me concerne, ces mots magnifiques ne m'ont pas empêchée de m'ennuyer ferme par moments et je crois même que les nombreuses considérations philosophiques de l'auteur m'ont irrémédiablement perdue mais je garderai de ce roman, Du Côté de chez Swann, émaillé de souvenirs personnels qui ajoutent à la sincérité de l'oeuvre, un souvenir qui ne sera pas mauvais. Dois-je vous recommander ce livre ? A mon avis, c'est une appréciation toute personnelle mais si vous aimez les classiques, peut-être est-il intéressant de prendre le risque. 
    Je ne pense pas lire les autres volumes de A la Recherche du Temps Perdu mais c'est malgré tout un sentiment assez positif qui perdure à la fin de cette lecture peut-être parce que j'ai retrouvé cette France - et son mode de vie- délicieusement rétro et surannée qui a définitivement disparu mais qui n'est pas si vieille pour autant et qu'il est agréable de faire revivre le temps d'une lecture.  

     

    Tableau de Gustave Caillebotte qui pourrait illustrer l'ambiance calme et campagnarde de Combray

    En Bref :

    Les + : la grande maîtrise de la langue par l'auteur ; les souvenirs d'enfance sans doute inspirés par les siens propres et qui donnent beaucoup d'authenticité et de personnalité à un récit sinon relativement ardu, philosophique et parfois un peu froid.
    Les - : beaucoup de passages vraiment complexes, un peu détachés du récit et que j'ai trouvés très complexes. 

     

    Les Enquêtes de Quentin du Mesnil, Maître d'Hôtel à la Cour de François Ier, tome 1, Le Sang de l'Hermine ; Michèle Barrière 

    Thème d'avril, « Ménage de printemps », 4/12


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