• « La première mauvaise impression est toujours la bonne ! »

    Couverture Au service secret de Marie-Antoinette, tome 3 : La Mariée était en Rose Bertin

     

     

      Publié en 2020

      Éditions La Martinière

      312 pages

      Troisième tome de la saga Au service secret de        Marie-Antoinette

     

     

     

     

     Résumé :

    La reine Marie-Antoinette reçoit la visite de son frère adoré, l'empereur Joseph II. Mais les retrouvailles sont de courte durée. Un code secret permettant d'entrer en contact avec les espions du royaume a été dérobé ! Et le voleur se serait enfui... accoutré d'une robe de mariée ! Une création de Rose Bertin, la modiste de la Reine ! À Versailles, rien ne tourne plus rond.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    1777. La reine Marie-Antoinette s’apprête à recevoir à Versailles son frère aîné, l’austère empereur Joseph II. Mais la jeune reine de France a aussi d’autres préoccupations : on vient en effet de lui rapporter qu’un ancien membre du Cabinet noir de Louis XV, le comte de Broglie, présentement relégué dans son château charentais bien loin de la Cour, s’est fait dérober un code par une intrigante. Et, alors que Marie-Antoinette voit avec joie et inquiétude mêlées arriver son frère l’Empereur, sa modiste est elle-même aux prises avec sa famille fraîchement débarquée d’Abbeville avec des us et des coutumes un peu moyenâgeux pour une modiste royale.
    Afin de récupérer le code égaré, Marie-Antoinette charge donc ses deux fins limiers de l’ombre, Rose Bertin et Léonard Autier, de retrouver le code et, tant qu’à faire, la voleuse…traque qui les mettra sur les pas d’un parfumeur aux tendances quelque peu mélancoliques, d’un commissaire de quartier désœuvré, d’une femme taillée comme une armoire à glace et surtout…d’un squelette plongé dans un bac de chaux vive et vêtue d’une robe de mariée ayant appartenu à la fameuse espionne disparue et que Rose et Léonard doivent retrouver…robe que Rose reconnaît sans mal puisque c’est elle qui l’avait conçue quelques temps plus tôt pour…une certaine Suzelle Olivier, fiancée d’un parfumeur et qui pourrait bien être leur espionne !
    A ce problème familial s’adjoint donc une enquête des plus complexes qui va emmener nos deux détectives improvisés sur une plante glissante : comment se frotter à de véritables espions quand on est avant tout modiste et coiffeur ? Et bien sûr, on s’en doute, Léonard et Rose s’entendent toujours comme chien et chat et tentent subtilement de se débarrasser l’un de l’autre.
    Pourtant, ils vont unir leurs forces pour démasquer cette femme aux mille visages, qui leur glisse sans cesse entre les doigts : qui est donc cette Suzelle Olivier, promise du parfumeur Guermain qui s'avère être aussi une espionne ? Pour qui travaille-t-elle et quels sont ses liens avec Perline Despoisses, que son époux navré a reconnu dans le squelette vêtu d’une robe de noces ? Et avec Montaine de Maronval, qui se rêverait plutôt grenadier que courtisane en robe à traîne ?
    Comme d’habitude avec Frédéric Lenormand, l’humour et la légèreté prennent le pas sur l’enquête mais pour moi, cela n’est pas dérangeant, au contraire. D’ailleurs, j’ai eu l’impression que la tendance s’inversait un peu dans ce tome, où les traits d’humour sont toujours présents, mais pas que… On suit aussi bien plus Marie-Antoinette et son hôte impérial et l’on découvre certains rouages de la Cour (notamment les repas pris en public par la famille royale et le Grand coucher du roi, deux indispensables de l’étiquette édictée par Louis XIV). Pour certains lecteurs, ce troisième tome est le plus abouti, c’est peut-être le cas mais j’avoue avoir préféré, pour le moment, les deux précédents, même si j’ai encore une fois passé un excellent moment de lecture. C’est frais, c’est léger, on rit souvent et on ne se prend pas au sérieux. C’est une autre manière de voir l’Histoire mais Frédéric Lenormand a aussi pour lui de bien connaître son contexte et cela aide beaucoup à mon sens. Ainsi, cette saga n’est pas qu’une banale saga d’humour, elle a un petit plus et un appui solide : les connaissances de l’auteur, qu’il utilise toujours intelligemment et à bon escient.
    Effectivement, si vous aimez les intrigues policières et que vous souhaitez lire cette saga uniquement pour ça, je vous conseillerais de passer votre chemin : peut-être aimerez-vous malgré tout mais vous risquez d’être déçus. Si, au contraire, vous aimez les cosy murder avec un petit quelque chose de différent, tournez-vous vers l’univers de Frédéric Lenormand, qui manie l’humour et l’ironie avec brio et sans overdose.

    En Bref :

    Les + : la passionnée du XVIIIème siècle que je suis continue de trouver son compte dans cette saga, que j'aime autant que les Voltaire mène l'enquête. C'est drôle, c'est frais et ça ne se prend pas au sérieux.
    Les - :
    j'ai eu l'impression d'un tome peut-être un peu moins enlevé que les précédents mais je me demande si cela ne vient pas de mon rythme de lecture un peu plus lent ces derniers jours. 


    Au service secret de Marie-Antoinette, tome 3, La mariée était en Rose Bertin ; Frédéric Lenormand

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     

     Retrouvez mes billets sur les deux premiers tomes : 

    L'enquête du Barry (t1) 

    Pas de répit pour la reine (t2) 


    votre commentaire
  • « Les douze Césars s'inscrivent dans une histoire de famille particulièrement complexe. Ils ne peuvent être réduits à une succession de biographies se chevauchant plus ou moins. Ils forment ensemble la fresque humaine la plus cynique du Haut-Empire et sans doute l'une des plus captivantes de l'histoire de l'Occident. »

    Couverture La véritable histoire des douze Césars

     

     

     

      Publié en 2019

      Éditions Pocket (collection Documents et Essais)

      480 pages

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Sous le principat d'Hadrien, l'historiographe Suétone écrit les biographies des premiers Césars, de Jules César à Domitien, retraçant ainsi près de cent-cinquante ans d'histoire. Virginie Girod, forte de sa connaissance intime de la période, met avec talent ses pas dans ceux de Suétone et raconte la véritable saga des douze Césars faite de trahisons, de manipulations et d'amours déçues.
    Comment Auguste et Vespasien ont-ils pris Rome en passant pour des modèles de vertu ? Pourquoi Tibère, Caligula et Néron ont-ils sombré dans la tyrannie ? Claude était-il un idiot ou un administrateur génial ? De chapitre en chapitre, les mythes sur les Césars volent en éclats, laissant place à leur humanité dans toute sa complexité.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Au début du IIème siècle de notre ère, l’historiographe Suétone, sous le principat d’Hadrien, rédige une vie des Douze Césars (De vita duodecim Caesarum), racontant ainsi les destinées de douze dirigeants romains, de Jules César à Domitien. Scindé en huit livres et publié entre 119 et 122, La vie des Douze Césars de Suétone inaugure un nouveau genre littéraire historique qui inspirera d’autres historiens (Hérodien, Aurelius Victor) et d’autres travaux comme L’histoire Auguste.
    C’est sur ce texte devenu une référence pour l’étude de l’Antiquité romaine, que la jeune historienne Virginie Girod, spécialiste de l’histoire des femmes et notamment de la sexualité sous la Rome antique, s’appuie pour rédiger à son tour ses Vies des douze Césars, forte d’une méthodologie différente et actualisé. Car si Suétone a le mérite d’être le premier à dresser les portraits de ces dirigeants de Rome qui, un jour, deviendront mythiques, il cède malgré tout assez souvent à l’anecdote, sans forcément vérifier ni étayer son propos.
    De la Rome Antique, on retient souvent des images issues de la bande dessinée, de la fiction, des films… Les gladiateurs, les courses de char, les grands banquets et les orgies, les heures interminables aux thermes, la décadence… Tout n’y est pas vrai mais tout n’est pas faux non plus, loin de là et on s’en rend compte en lisant le texte de Virginie Girod. Quels dirigeants incarnent mieux l’ivresse du pouvoir et la décadence qu’il peut entraîner que les Césars ? De Jules César, qui n'est pas empereur mais dans les pas duquel se placera par la suite Auguste, son petit-neveu, jusqu’à Domitien, second fils de Vespasien, c’est plus de cent ans d’histoire romaine brossée dans ce volume. Les premiers empereurs ont imprimé durablement leur marque, créant ou développant un nouveau mode de gouvernement. Chacun s’appropriera le pouvoir à sa manière et le modèlera. Il y a ceux dont l’Histoire conserve un souvenir positif, pour leur justesse, leur intelligence politique, leur exercice nuancé du pouvoir : c’est le cas d’Auguste ou encore, de Vespasien, le premier des Flaviens. D’autres incarnent bien ce mythe de la Rome antique ivre de sang, de violence, de sexe et d’exagération : Tibère, Caligula, Néron, Vitellius, Domitien…
    De la seconde moitié du Ier siècle av. J-C jusqu’au début du IIème siècle de notre ère, Virginie Girod nous amène à la rencontre de chacun d’entre eux. Loin de relater uniquement leur principat, que leur bilan soit positif ou négatif, l’auteure remonte à l’enfance de tous ces empereurs, apportant aussi une dimension psychologique à son récit : et si les événements traversés dans le jeune âge avaient eu une influence sur la conception et l’exercice du pouvoir pour tous ces hommes devenus adultes et dirigeants ? La concurrence entre Domitien et son aîné Titus a-t-elle conditionné le second, le plaçant sans cesse dans une infériorité douloureuse, comme l’absence d’intérêt connue par Tibère dans ses jeunes années a pu générer le manque de confiance ressenti par l’empereur, le poussant à se retirer sans cesse loin du pouvoir ? Le malheur brutal enduré par la famille de Caligula après des années florissantes a-t-il aussi induit la violence du jeune empereur, dont les excès semblent sans limites ? En « analysant » ses Césars, essayant de les comprendre sans les excuser pour autant, ni les juger, Virginie Girod les rend plus humains, malgré leurs côtés les plus déplaisants : oui, il est quand même difficile de trouver Néron, matricide avoué, sympathique… pour autant, les empereurs de Rome ne sont pas plus monstrueux ni plus dégénérés que d’autres. L’époque contemporaine n’a-t-elle pas elle aussi son lot de dirigeants violents, cyniques et sinistres, à l’instar des dictateurs du XXème siècle ?

    La mort de Néron par Vasiliy Smirnov (1888)


    Malgré des redites et des répétitions (forcément, les destins des Césars se fondent les uns dans les autres et un même événement se retrouve forcément dans plusieurs biographies : la mort d’Auguste, par exemple, conditionne l’accès au pouvoir de Tibère et on retrouve donc cet événement dans la biographie d’Auguste comme dans celle de Tibère), on se prend vite au jeu ! Même si je ne suis pas passionnée par l’Histoire antique en général, j’avoue avoir pris grand plaisir à lire ce livre en forme de catalogue biographique qui nous promène avec aisance dans l’Histoire : la passion de l'auteure est communicative. Le style de l’auteure est dynamique, très actuel et Virginie Girod déconstruit habilement les mythes qui continuent d’entourer, souvent d’une aura assez négative, la figure des Césars : certes, Néron était mégalomane mais il n'a pas mis le feu à Rome en 64, comme il n’a pas battu à mort son épouse enceinte, non Claude n’était pas l’abruti manipulable à l’envi, jouet de son ambitieuse femme Agrippine…
    Et pourtant, il y a un côté assez cinématographique et grandiloquent qu’on ne peut pas nier… quand on dit que la réalité prend souvent le pas sur la fiction, c’est vrai. Même le romancier à l’imagination la plus prolifique n’aurait peut-être pas pu imaginer des personnages aussi intéressants et complexes que les Césars.
    En bonne spécialiste des femmes, Virginie Girod laisse aussi dans son livre une grande place aux figures féminines qui ont jalonné l’histoire des premiers Césars et notamment des Julio-Claudiens : Livie, figure hiératique, première Augusta, Agrippine l’Ancienne et sa fille, Agrippine la Jeune, qui paiera son ambition et son amour du pouvoir par une mort ordonnée par son propre fils, Julie, l’unique fille d’Auguste et épouse de Tibère, Acté et Poppée, respectivement maîtresse et épouse de Néron, à la beauté débridée et sensuelle…
    Bref, La véritable histoire des Douze Césars est un livre de vulgarisation historique mais qui s’appuie sur la rigueur de l’historien et une méthodologie contemporaine fiable et cohérente. Il n’en reste pas moins que l’œuvre de Suétone a été un terreau fertile pour l’auteure, qui prend visiblement un grand plaisir à sortir des limbes de l’Histoire ces grandes figures que la légende noire a fini par marquer d’un halo monstrueux et bien sombre que Virginie Girod se plaît à nuancer sans pour autant réhabiliter. Une lecture agréable, riche et en même temps plaisante et divertissante.

    Livre ancien ouvert

    Une Vie des Douze Césars de Suétone, imprimée à Lyon en 1569

    En Bref :

    Les + : bien écrit, avec un style jeune et dynamique, qui dépoussière un peu l'Histoire, ce livre est riche et apporte beaucoup d'informations, tout en étant plaisant et divertissant.
    Les - :
    des répétitions, des redites, malgré tout nécessaires au vu du découpage du livre.


     La véritable histoire des Douze Césars ; Virginie Girod

    Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle

     

     

     

     

     


    votre commentaire
  • « Il ne va pas y avoir de guerre. Et si elle a lieu, rappelle-toi ce que l'on a appris en histoire...on gagne à chaque fois. »

     

    Couverture Étés anglais

     

     

      Publié en 1990 en Angleterre

      En 2021 en France (pour la présente édition)

      Titre original : The Cazalet Chronicles, Vol I, The    Light Years

      Éditions Folio

      608 pages

      Premier tome de la saga La saga des Cazalet

     

     

     

    Résumé :

    Juillet 1937, Sussex. Dans la propriété de Home Place, la Duche, affairée avec ses domestiques, prépare l'arrivée de la famille au grand complet : ses trois fils, Hugh, Edward et Rupert Cazalet, sont en chemin depuis Londres avec épouses, enfants et gouvernantes. Entre pique-niques sur la plage et soirée auprès du gramophone, les intrigues familiales se succèdent. Aux préoccupations des adultes font écho les inquiétudes des enfants, et à la résilience des femmes répond la toute-puissance - ou l'impuissance - des hommes. L'été regorge d'incertitudes mais, sans l'ombre d'un doute, une nouvelle guerre approche.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Voilà, je viens enfin de découvrir les Cazalet…encore une fois après tout le monde, mais vous le savez, c’est un peu ma marque de fabrique. Mais quelle rencontre ! Je vous préviens, ma chronique va être très, très élogieuse. Je n’ai pas eu de coup de cœur mais je me suis vraiment délectée de cette lecture, dans laquelle je suis restée près de dix jours. Je me suis voluptueusement, délicieusement plongée, comme dans un bon bain bien tiède.
    Eté 1937, dans le Sussex. La maison de Home Place, propriété de William Cazalet (surnommé le Brig) et de son épouse Kitty (la Duche), s’apprête à recevoir les enfants du couple et leurs petits-enfants pour la saison estivale. Dans l’écrin de verdure campagnard où vivent leurs parents et leur sœur célibataire Rachel, Rupert, Edward et Hugh, vivant à Londres, viennent se délasser quelques semaines au vert et la maison de Home Place revit : parties de squash et de tennis, discussions à bâtons rompus à l’ombre des arbres ou sur les grasses pelouses, promenades pour les enfants dans la campagne opulente anglaise, pique-niques, excursions à la mer, toute proche…un bel été qui se profile donc pour les Cazalet, toutes générations confondues.
    Chronique familiale lente et contemplative, Étés anglais ravira certains lecteurs et en décevra d’autres, c’est certain. Autant vous le dire tout de suite, je fais partie de la première catégorie et je ressors vraiment enchantée de cette lecture. J’avoue que, après pas mal de lectures en demi-teinte au printemps, j’ai été vraiment contente de pouvoir me plonger à nouveau dans un livre plaisant, bien écrit, que je prenais énormément de plaisir à retrouver à chaque séance de lecture. Alors certes, au départ, je me suis un peu perdue dans les personnages, ne saisissant pas forcément tous les liens familiaux (je confondais par exemple les nombreux enfants). Mais une fois ce petit écueil surmonté (et je tiens à préciser que chacun des personnages est suffisamment unique et bien traité pour être attachant à sa manière) franchement c’était parfait. Scindé en deux parties, Étés anglais couvre en fait deux étés : 1937 et 1938. Les Cazalet font partie de cette haute société britannique très à l’aise du début du XXème siècle, partageant leur vie entre la ville (en l’occurrence Londres, où deux des frères s’occupent, avec le patriarche, de l’entreprise familiale) et la campagne, où ils se retrouvent tous les étés pour passer quelques semaines au calme, loin de la frénésie de la vie quotidienne. Le choix de l’époque n’est pas innocent : en effet, alors que le rythme de vie semble immuable, on a aussi l’impression que les Cazalet, comme tous leurs contemporains, vivent et dansent sur un volcan. Sous leurs pieds, une catastrophe bouillonne doucement et menace de faire voler en éclats le monde et la société. Est-ce les dernières années d’insouciance et de bonheur que sont en train de vivre les humains de cette fin de décennie 1930 ?  Bien sûr, près de cent ans plus tard nous savons qu’en effet, la guerre n’a jamais été aussi proche qu’en ces années 1937/1938 et que toutes les tentatives des dirigeants européens (Chamberlain, Daladier…) resteront vaines : Hitler veut la guerre et il l’aura. Alors, toujours en toile de fond, on retrouve ce contexte historique anxiogène, que chacun des personnages gère à sa manière…il y a le Brig, qui décide de transformer Home Place en place fortifiée, refuge et dispensaire, la Duche, qui accepte ce que l’on appelle pudiquement « la Situation » avec flegme, les fils, pour qui cette hypothétique guerre qui se rapproche fait remonter des souvenirs de la Grande Guerre, les épouses, qui voient avec effroi la probabilité d’une mobilisation se rapprocher, les enfants, que la situation angoisse franchement ou excite.
    Mais cette chronique familiale et estivale, souvent gorgée de soleil, n’est pas pour autant dramatique. Certes, le contexte politique et mondial n’est pas simple, mais les humains ont toujours fait preuve de beaucoup d’imagination quand il s’est agi de s’étourdir, de s’amuser, comme si c’était la dernière fois. Les enfants conspirent et commettent des bêtises, se fâchent, se battent et se rabibochent tandis que les adultes affrontent leurs propres problèmes mais aussi des joies simples comme celles de se retrouver un moment loin de Londres et des tracas du quotidien.
    Comme je le disais plus haut, je me suis délectée de cette lecture. Certes, il y a parfois des longueurs mais ces petites inégalités ne m’ont pas gênée, bien au contraire. C’est bien écrit, cohérent, fluide… la simplicité de l’intrigue m’a, paradoxalement, beaucoup plu. Il n’y a rien de romanesque ni de très enlevé dans ce roman et pourtant, c’est passionnant. Elizabeth Jane Howard fait la part belle à chacun des personnages, que l’on découvre un peu mieux à chaque chapitre. Mention spéciale à la description des nombreux enfants : c’est souvent un exercice difficile pour les romanciers de retranscrire les réflexions des enfants et rien ne m’horripile plus que lorsque des enfants très jeunes s’expriment ou agissent comme des adultes, ce qui rend la chose totalement invraisemblable. Rien de tout cela ici et j’avoue que j’ai pris un grand plaisir à suivre tous ces petits personnages dans leur quotidien, leurs préoccupations d’enfants ou d’adolescents. Ils apportent tous beaucoup de fraîcheur et de candeur au récit.
    Et enfin, je tenais à souligner que, pour une fois, alors qu’on m’a vendu une intrigue à la Downton Abbey eh bien…je l’ai effectivement trouvée, même si c’est assez différent bien évidemment. Mais c’est vrai que les Cazalet ont quelques traits en commun avec les Crawley : d’ailleurs, pour l’anecdote, dans l’adaptation des romans d’Elizabeth Jane Howard par la BBC en 2001 (la série The Cazalets), c’est Hugh Bonneville (le vicomte Grantham de Downton Abbey) qui joue l’un des frères ! Alors qu’on évoque un peu à tort et à travers Downton Abbey, j’avoue que là j’ai retrouvé une ambiance tout aussi plaisante (alors que pas du tout dans La villa aux étoffes, souvent considéré comme un Downton à l’allemande). Je n’ai maintenant plus qu’une envie : lire la suite et retrouver tous nos personnages alors qu’un nouveau conflit mondial plane au-dessus de l’Angleterre. Rendez-vous bientôt en 1939 dans A rude épreuve, suite d’Étés anglais. Je croise fort les doigts pour aimer tout autant la suite, après cette parenthèse vraiment savoureuse et estivale.

    En Bref :


    La saga des Cazalet, tome 1, Etés anglais ; Elizabeth Jane Howard

     Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle 


    2 commentaires
  • [ZOOM SUR 1 CLASSIQUE] Emma

    Bonjour à tous ! Déjà fin juillet ? Eh oui, presque ! Et qui dit fin du mois dit...Zoom sur 1 classique. Ce mois-ci, découvrons un autre des romans phares de Jane Austen, le pétillant Emma, plusieurs fois adapté à l'écran et, dernièrement avec Anya Taylor-Joy (The Queen's Gambit) dans le rôle d'Emma Woodhouse pour la BBC. 

    Retour en cinq points sur ce roman devenu culte.

    [ZOOM SUR 1 CLASSIQUE] Emma

    1. Le roman est dédié au Prince régent d’Angleterre, futur Guillaume IV.

     

    2. Emma est un roman de mœurs, considéré par Walter Scott comme le précurseur d’un nouveau genre littéraire réaliste.

     

    3. L’héroïne du roman, Emma Woodhouse, a vingt-et-un ans et se distingue par sa beauté, sa richesse mais aussi…son snobisme !

     

    4. Dans les adaptations cinématographiques ou télévisées de l’œuvre, Emma Woodhouse a été incarnée par Gwyneth Paltrow mais aussi Kate Beckinsale ou encore Romola Garai.

     

    5. Plusieurs thèmes apparaissent en filigrane dans Emma : la question de l’esclavage ou encore, la condition des femmes au début du XIXème siècle en Angleterre (mariage, maternité…).

     

    • L'AUTEUR EN QUELQUES PHRASES

    Credit: Getty Images/Hulton Archive

    Née le 16 décembre 1775 dans le Hampshire, morte précocement en juillet 1817 à Winchester, Jane Austen est issue de la petite gentry rurale et ses éléments biographiques sont assez lacunaires : on connait surtout Jane Austen à travers la correspondance qu'elle entretint avec les siens (frères, sœurs et nièces) et les souvenirs de ces derniers. Ses premiers romans sont publiés de manière anonyme de 1811 à 1816 et l’œuvre d'Austen connaîtra surtout un succès croissant à partir du siècle suivant. Aujourd'hui, sa popularité est mondiale et les admirateurs de Jane Austen sont appelés « janeites ».


    2 commentaires
  •  L'instant poétique #3 : Heureux qui comme Ulysse, Joachim du Bellay, 1558

     

    Les Bibliothèques Virtuelles Humanistes - Fac-similés > Notice

      

    • LE POÈME

     

    Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
    Ou comme cestui là qui conquit la toison,
    Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
    Vivre entre ses parents le reste de son aage !

    Quand reverray-je, helas, de mon petit village
    Fumer la cheminee, et en quelle saison
    Reverray-je le clos de ma pauvre maison,
    Qui m’est une province, et beaucoup d’avantage ?

    Plus me plaist le sejour qu’ont basty mes ayeux,
    Que des palais Romains le front audacieux ;
    Plus que le marbre dur me plaist l’ardoise fine,

    Plus mon Loyre Gaulois, que le Tibre Latin,
    Plus mon petit Lyré, que le mont Palatin,
    Et plus que l’air marin la douceur Angevine.

     

    • ET CA PARLE DE QUOI ?

    Entrée de l'ancienne demeure

    Vestiges du château de La Tumelière, à Liré, où est né Joachim du Bellay

    Issu du recueil Les Regrets, le sonnet Heureux qui comme Ulysse évoque le voyage et la douleur de l'exil, dans un registre lyrique et élégiaque souvent chers aux auteurs de la Renaissance. En effet, lorsqu'il rédige Les Regrets, Joachim du Bellay est à Rome, où il vécut plusieurs années auprès de son oncle le cardinal Jean du Bellay, auprès duquel il remplissait les fonctions de secrétaire et intendant : ce sonnet témoigne de sa nostalgie de sa terre natale, l'Anjou, où il fait, selon l'auteur, si bon vivre.

    Ce texte sera repris plusieurs fois, notamment par le chanteur Ridan, qui le met en chanson en 2007 tout en respectant parfaitement le texte du XVIème siècle. 

    • L'AUTEUR EN QUELQUES MOTS

    Né vers 1522 à Liré en Anjou et mort à Paris le 1er janvier 1560, Joachim du Bellay est un poète de la Renaissance. Sa rencontre avec Pierre de Ronsard est à l'origine de La Pléiade, groupe de poètes pour lequel du Bellay rédigea un manifeste, la Défense et illustration de la langue française


    2 commentaires