• « Roger de Bussy demeura alors un long moment silencieux et immobile, troublé à l'idée qu'il allait habiter dans la maison de Jacques de Molay ! Le dernier grand maître du Temple. Son fantôme hantait-il les lieux ? »

    Les Enquêtes de Louis Fronsac, tome 8, Le Secret de l'Enclos du Temple ; Jean d'Aillon

     

    Publié en 2016

    Editions J'ai Lu 

    697 pages

    Huitième tome de la saga Les Enquêtes de Louis Fronsac 

    Résumé : 

    1647. La France souffre, les cabales se multiplient, le pouvoir se fissure. Poussé par la bourgeoisie écrasée d'impôts, le parlement de Paris tente d'imposer à Mazarin une constitution limitant le pouvoir royal. Le cardinal se cabre. Et le pays l'imite. Quand débute ce qui va dégénérer en sanglante guerre civile, le comte de Bussy fait une découverte étonnante : sa maison de l'enclos du Temple cache un message chiffré écrit par le dernier grand maître des Templiers. Réputé pour son habileté, Louis Fronsac va tenter de résoudre cette énigme. 

    Quelqu'un agit-il dans l'ombre pour multiplier les émeutes, faire régner la peur et s'approprier le trésor de l'Ordre ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Une balade entre Grand Siècle et Moyen Âge, qui plus est, racontée par Jean d'Aillon, ça ne se refuse pas !
    Ce huitième volume des Enquêtes de Louis Fronsac avait vraiment tout me plaire. On va voir maintenant en détails s'il m'a plu...ou pas !
    Déjà, quelques mots de l'intrigue : nous sommes en 1647, sous la régence d'Anne d'Autriche et de Mazarin et le peuple gronde. Nous ne sommes qu'à quelques mois de la retentissante arrestation des parlementaires, qui va mettre le feu aux poudres et déclencher cette fameuse émotion populaire, parlementaire et, plus tard, nobiliaire, qui est restée dans l'Histoire sous le nom de Fronde.
    Louis et son ami Gaston sont donc des témoins de cette grogne populaire qui enfle, des témoins dont l'inquiétude grandit en même temps que la contestation. Le premier, marquis de Vivonne et propriétaire de la seigneurie de Mercy, près de Paris, envisage avec beaucoup d'émotions l'installation de troupes étrangères non loin de chez lui, ce qui mettrait à mal le bon fonctionnement de sa seigneurie et la vie de ceux dont il est respinsable. Quant à Gaston, s'il continue de monter les échelons de l'administration royale, passant de commissaire à procureur puis à maître des requêtes, une contestation trop prononcée et un conflit ouvert avec la Cour pourrait annihiler tous ses efforts et sa volonté d'offrir une vie stable et confortable à sa toute jeune épouse, Armande.
    Au milieu de ça, voilà que débarque Roger de Rabutin, le fameux cousin de Madame de Sévigné, qui sera plus tard célèbre pour son Histoire Amoureuse des Gaules, un texte qui lui vaudra l'exil puisque ce n'est rien d'autre qu'une critique à peine déguisée de Louis XIV et de sa Cour. En cette fin d'année 1647, Roger de Rabutin s'est vu offrir par son oncle, grand prieur du Temple, une maison à l'intérieur même de l'enclos, qui appartint en son temps au célèbre Ordre du Temple. Et cette demeure n'est pas n'importe quelle demeure puisqu'elle a appartenu à Jacques de Molay, le dernier Grand Maître, arrêté en 1307 sur ordre de Philippe IV le Bel. Et bien sûr, parce que sinon ce n'est pas drôle et il n'y a pas d'intrigue, lors de travaux, le nouveau et heureux propriétaire découvre un vieux coffre en fer et un parchemin sur lequel a été inscrit un code indechiffrable. Parce qu'on a vanté ses talents au comte de Rabutin, Louis Fronsac se voit confier la mission de déchiffrer ce code qui pourrait peut-être amener...au Trésor des Templiers, rien de moins !
    Si on ajoute à ça un faux frère Hospitalier qui provoque ses victimes en duel avant de les tuer en leur demandant de renier Dieu et le Christ et une diablerie dont sont victimes de naïves Parisiennes, un meurtre dans la demeure du duc d'Orléans et un vent de fronde de plus en plus violent, on en déduit que le quotidien de nos héros ne sera pas de tout repos entre 1647 et 1649, dates auxquelles se situe cette huitième intrigue plutôt dense et dynamique !

    Le président Molé saisi par les factieux au moment des guerres de la Fronde, par François-André Vincent (1779)


    Alors, le verdict maintenant. Est-ce que j'ai aimé ? La réponse est oui, peut-être plus encore que les tomes précédents qui m'avaient plu au moment où je les ai lus mais que je trouve plus fades, en comparaison avec celui-ci. J'ai retrouvé la verve et la fougue des quatre premiers opus et le riche contexte historique, encore une fois bien relaté par Jean d'Aillon ! Encore une fois, j'ai été soufflée par la solidité des recherches et par le fait qu'il va toujours chercher des histoires totalement improbables mais bien authentiques pour illustrer son propos ! Il est vrai que la Fronde est un épisode assez passionnant de notre Histoire, un épisode peut-être pas forcément facile à saisir -il m'a fallu beaucoup de lectures, de romans ou de documents pour arriver à appréhender la Fronde dans sa globalité- mais très clair, quand il est raconté par Jean d'Aillon ! On sent encore une fois que l'auteur s'est astreint sans nul doute à des recherches très vastes pour nous livrer un propos aussi précis. J'ai cependant constaté quelques petites incohérences de dates que je mettrais volontiers sur le compte d'étourderies parce que cela arrive, même aux meilleurs -il n'y a qu'à lire Dumas, pour s'en rendre compte. Néanmoins, je trouve qu'elles se sont malheureusement un peu répétées et c'est dommage, cela donne la sensation que le roman n'a pas été bien corrigé...
    A part ces petites incohérences et des longueurs au départ, parce que l'intrigue met du temps à se mettre en place, je n'ai pas grand chose à reprocher au roman. Il est vrai que ce tome tournant autour des Templiers et de la découverte d'un mystérieux message codé dans la maison du dernier Grand Maître avait tout pour me plaire. J'aime les mystères de l'Histoire et suis assez fascinée par les Templiers et le brouillard qui entoure leur élimination par le pouvoir royal. Manifestement je ne suis pas la seule puisque le ministre de la Culture lui même, André Malraux, dans les années 60, donna son accord pour que soit fouillé le site de Gisors en Normandie, où le trésor du Temple aurait pu être caché en 1307. Et Jean d'Aillon semble lui aussi intéressé par cette histoire car ce n'est pas la première fois que l'on retrouve les Templiers dans l'un de ses romans. J'ai donc beaucoup aimé retrouver un peu de Moyen Âge au beau milieu d'une aventure de Louis Fronsac qui pourrait d'ailleurs presque être une aventure de Gaston de Tilly, parce que le personnage est très présent au centre de l'intrigue de ce huitième tome, ce qui m'a bien plu !
    Le fait que cette intrigue se situe aussi en pleine Fronde est un point fort, à mon sens, parce que c'est un contexte riche, avec beaucoup d'événements et de personnages charismatiques. Ce n'est pas forcément la période la plus évidente de notre Histoire, je crois qu'il faut beaucoup lire dessus avant de tout bien comprendre, mais sous la plume de Jean d'Aillon, c'est simple et clair, donc rien à dire.
    Finalement, les seuls éléments qui m'ont un peu gênée, ce sont ces fameuses petites incohérences, qui sont revenues souvent et c'est vraiment dommage parce que le reste du livre vaut vraiment le coup. S'il y'a bien une chose qu'on ne peut pas reprocher à Jean d'Aillon c'est de ne pas maîtriser ses intrigues parce que ce n'est pas le cas ! Donc ces petites imperfections ne sont pas graves en soi mais méritent quand même d'être relevées...
    A part ça, j'ai passé un bon moment de lecture. Ce volume est très conséquent mais relativement dynamique, une fois passées les longueurs du début. Je crois que j'ai aussi tenue en haleine tout du long parce que j'attendais vraiment le dénouement de l'intrigue autour de l'Ordre du Temple mais bien sûr, il n'y avait pas que ça non plus ! C'est un ensemble qui fait qu'on aime un livre ou pas.
    Je ressors de cette lecture contente parce que mon intérêt pour cette saga ne se dément toujours pas et je trouve qu'elle est toujours vraiment intéressante malgré quelques petits défauts. La perfection n'existe pas, de toute manière. C'est une vraie saga de cape et d'épée ! Le Secret de l'enclos du Temple est un bon huitième tome. A ce jour, je crois que la saga Louis Fronsac est la meilleure de l'auteur !

    En Bref :

    Les + : entre fiction et réalité historique, Jean d'Aillon signe là un vrai roman de cape et d'épée, moderne, mais qui n'en respecte pas moins les codes de ce genre inimitable. 
    Les - : quelques incohérences qui, malheureusement, se répètent...


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  • Colis reçu le : 29 novembre 2017

    Aujourd'hui, je vous présente un colis un peu atypique qui n'est pas vraiment un swap mais qui, dans le principe, peut s'en rapprocher un peu. La seule différence, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'échange...mais on reçoit un colis chaque mois et c'est toujours la surprise à chaque fois, un peu comme pour les swaps ! ! Donc j'ai décidé que je vous présenterai mes Thé Box dans la catégorie des Swaps puisqu'il faut bien les classer quelque part !

    Quand arrive la fin d'année et qu'on est abonné à la Thé Box, évidemment, on attend avec impatience la Box de Noël. Quelle ne fut pas ma surprise de la trouver ce matin même dans ma boîte aux lettres alors que nous ne sommes même pas encore en décembre (presque, mais pas encore). Je n'ai pas eu le temps d'aller fureter sur le site (je suis très curieuse et j'ai du mal à garder la surprise) donc la Box de ce mois-ci a été une vraie surprise ! Et quelle surprise... ! 

    C'est parti pour la découverte... 

     

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël  

    Voici donc la Box Trésors de Noël, toute en brillance et avec de jolies couleurs... Hâte de soulever le cahier des saveurs et voir ce qui se cache dessous... 

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    J'ai été ravie de retrouver le thé Casse-Noisette, une création de Tamia & Julia découverte dans la Box de l'année dernière, Concerto de Noël. J'avais adoré son goût de noisette torréfiée... 

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    McCoy Tea nous propose ce mois-ci un petit sapin dans lequel se cache un sachet de thé : Orange Orchard, un thé fruité où les notes d'orange dominent mais dans lequel on peut retrouver aussi de subtils arômes d'ananas et de pêche. 

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    Une Thé Box ne serait pas un Thé Box sans quelques petites douceurs. Ce mois-ci, c'est une confiture de mandarine (la saveur d'hiver ultime) qui est proposée ainsi que des petits gâteaux italiens, des Baiocchi...je ne connais pas du tout mais il paraît que c'est l'équivalent italien des pièces en chocolat. En effet, ces petits sablés au chocolat et à la noisette tirent leur nom des baïoques, des monnaies de cuivre qui circulaient autrefois dans les Etats Pontificaux...

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël  

    La marque bio Les Jardins de Gaïa, que je connais déjà et que j'apprécie beaucoup, nous propose un sachet d'un breuvage au nom évocateur : Premiers Flocons. Cela donne envie de se lover dans un plaid et de regarder tomber la neige. Il s'agit d'un thé bleu Oolong aux arômes de cannelle, de chocolat, de framboise et de cacao...Miam !  

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    Pour accompagner la jolie tasse 2017, encore plus jolie que celle de 2016, je trouve, Noël, une infusion proposée par L'Herboristerie du Palais Royal. Ce mélange réunit toutes les saveurs de Noël : cardamome, badiane, hibiscus et cynorhodon. Toutes ces plantes agissent en synergie et permettent de dynamiser les défenses naturelles et d'apporter de la vitamine C, indispensable à cette période de l'année. Quant aux Jardins de l'Hermitage, c'est un thé au joli nom qu'ils nous proposent. Alors, la burle, c'est quoi ? Eh bien c'est le nom que l'on donne, à l'est du Massif Central, au vent très froid qui souffle en hiver et provoque des températures particulièrement basses. Un vrai temps à boire du thé, non ? Sur une base de Sencha de Chine et de thé Chun Mee viennent se poser des arômes de vanille, de marron glacé, de caramel, de pomme et de safran... j'ai hâte d'y goûter. 

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    Noël ne serait pas vraiment Noël sans les fameux thés de la maison française Dammann, qui n'a plus besoin de faire ses preuves. Noël à Vienne nous emmène passer les fêtes chez Sissi : il s'agit d'un thé noir au chocolat, à l'abricot et à la vanille. Noël à Paris, que je connais déjà, est un mélange de thés noirs associés à des saveurs de cerise, de pain d'épices, de gingembre, d'amandes. Noël à Venise nous fait voyager vers la cité des Doges, avec un thé noir sur lequel se mélangent des saveurs de citron et de meringue. Enfin, Noël à Prague est certainement le plus surprenant : sur une base de thé noir viennent se poser des arômes de vodka, de cacao, de pruneau et un soupçon d'huile essentielle de clémentine. 

    La Thé Box, Décembre 2017 : Trésors de Noël

    J'ai retrouvé ce mois-ci avec plaisir les sachets de la marque britannique Newby. Ils sont magnifiques et donnent vraiment envie de savoir ce qui se cache dessous, non ? Kan-Junga est un mélange de thés noirs du Népal, proposés nature. Rooibos Orange comme son nom l'indique, est un thé rouge parfumé à l'orange et, enfin, English Breakfast est un thé noir qui fait voyager en Angleterre, où il est très apprécié...


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  • In My Mail Box - Novembre 2017

     

    Les Chroniques d'Edward Holmes et Gower Watson, tome 2, Le Chien des Basqueville ; Jean d'Aillon

    Editions 10/18, Collection Grands Détectives

    Date de parution : 2016

    Sujet : Moyen Âge, Guerre de Cent Ans, Policier, Aventures

    * * * 

    Les Aventures de Guilhem d'Ussel, Chevalier Troubadour, tome 8, Béziers, 1209 ; Jean d'Ailllon

    Editions J'ai Lu

    Date de parution : 2017

    Sujet : Moyen Âge, Policier, Aventures

    * * *

    Mademoiselle de Pâquelin ; Jocelyne Barthel

    Editions Pocket

    Date de parution : 2017

    Sujet : Romance, Histoire, Renaissance, Guerres de Religion

    * * *

    In My Mail Box - Novembre 2017

    La Malédiction de Gabrielle, tome 1, Le Fléau de Dieu ; Andrea H. Japp

    Editions J'ai Lu

    Date de parution : 2016

    Sujet : Histoire, Thriller, Policier

    * * * 

    In My Mail Box - Novembre 2017

    La Malédiction de Gabrielle, tome 2, A l'Ombre du Diable ; Andrea H. Japp

    Editions J'ai Lu

    Date de parution : 2017

    Sujet : Histoire, Thriller, Policier

    * * *

    Alchemia, tome 1, La Femme sans Tête ; Vivane Moore

    Editions 10/18, Collection Grands Détectives

    Date de parution : 2014

    Sujet : Histoire, Renaissance, Policier, Aventures

    * * * 

    La Saga de Tancrède le Normand : Le Peuple du Vent / Les Guerriers Fauves / La Nef des Damnés ; Viviane Moore

    Editions 10/18

    Date de parution : 2013

    Sujet : Histoire, Aventures, Saga historique

    * * *

    Alchemia, tome 3, Le Souffleur de Cendres ; Viviane Moore

    Editions 10/18, Collection Grands Détectives

    Date de parution :2017

    Sujet : Histoire, Renaissance, Guerres de Religion, Aventures, Policier

    * * *

    Perline, Clémence, Lucille et les Autres ; Jeanne-Marie Sauvage-Avit

    Editions Pocket

    Date de parution : 2017

    Sujet : Histoire, XXème siècle, Grande Guerre, Histoires de femmes 

    * * * 

    Lettres du Père Noël ; J.R.R Tolkien

    Editions Pocket

    Date de parution : 2010

    Sujet : Lettres, Noël, Enfance

     


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  • « Les racines sont profondes, elles nourrissent les branches qui poussent, s'entrelacent par les mariages, passent par la maison royale d'Ecosse et la noblesse d'Angleterre, jusqu'à mon père et à moi. Toi, Robert, tu es un bourgeon qui pousse sur des branches maîtresses. »

    Les Maîtres d'Ecosse, tome 1, Insurrection ; Robyn Young

     

    Publié en 2010 en Angleterre ; en 2013 en France (pour la présente édition)

    Titre original : Insurrection trilogy, book 1, Insurrection 

    Editions Pocket

    826 pages

    Premier tome de la saga Les Maîtres d’Écosse

    Résumé :

    Le tonnerre gronde. En 1286, l’Écosse subit le plus terrible hiver de son histoire. Certains y voient l'annonce du jugement dernier. Mais les hommes ne respectent pas plus le destin qu'ils ne prennent garde aux avertissements. Afin de s'octroyer le trône, laissé vacant depuis l'assassinat du roi Alexandre III, la noblesse du pays s'est lancée dans une guerre féroce. Edouard Ier, roi d'Angleterre, compte profiter de ces luttes fratricides pour assujettir l'Ecosse à son royaume. 
    Robert Bruce, jeune écuyer, est décidé à l'en empêcher. Avec la foudre, frappe son insurrection. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    En 1286, le roi Alexandre III meurt, sans descendance mâle. Son seul héritier est une petite fille, Marguerite de Norvège, âgée de sept ans, la propre fille de la fille d'Alexandre III. Vous suivez ? Alors, on continue.
    Tout le monde le sait, un souverain qui meurt sans laisser de réel héritier, abandonne son royaume au chaos, aux intrigues et aux assassinats en tous genres... C'est là que les ambitieux et les opportunistes se réveillent... Et en cette fin de XIIIème siècle, la succession écossaise s'avère bien compliquée... Après le décès de la petite héritière d'Alexandre III, les grandes familles se déchaînent et deux se sont face avec beaucoup de violence : les Bruce, représentés par le vieux lord d'Annandale et les Balliol, soutenus par les Comyn, ambitieux sans aucun scrupule, prêt à tout pour un peu de pouvoir et de gloire. Dans le camp des Bruce, un jeune garçon, le petit-fils de lord d'Annandale, observe et grandit... Robert Bruce est promis à un avenir qu'il n'aurait jamais soupçonné... Mais il ne le sait pas encore et, à l'heure où Jean de Balliol ceint la couronne écossaise, il assiste surtout à une lutte sans merci pour le pouvoir.
    Ce premier tome, Insurrection, est un roman d'apprentissage. On suit Robert de ses plus jeunes années jusqu'aux premières de l'âge adulte, peut-être les plus importantes pour un jeune homme issu de la noblesse, au Moyen Âge. C'est l'époque de son apprentissage de chevalier, couronné par la symbolique cérémonie de l'adoubement. Les jeunes prennent conscience de leurs devoirs, c'est une réelle initiation par laquelle ils passent et, même dans la sauvage et reculée Écosse, on y passe, quoi qu'il arrive. C'est donc le récit de cette jeunesse, d'un garçon pas tout à fait comme les autres, que Robyn Young aborde dans ce premier roman, premier volume d'une trilogie sur Robert Bruce et l’Écosse médiévale.
    Ce roman est une vraie fresque historique et a beaucoup de souffle. Très visuel, le roman permet de faire renaître les paysages grandioses de cette île britannique encore morcelée et divisée. Et très sauvage !
    Mais je dirais que cette fiction historique, si elle est efficace et mêle habilement le vrai et l'imaginaire, a les défauts de ses qualités. Très dense, ce premier tome pose les bases d'une saga, il est donc normal que l'auteure prenne son temps pour poser son intrigue et nous présenter les personnages mais j'avoue que les premiers chapitres ont été pour moi extrêmement laborieux... J'ai eu du mal à avancer vraiment parce que, ne connaissant pas le contexte ni les personnages -du moins vaguement-, j'ai souvent interrompu ma lecture pour faire des recherches, d'autant plus que, et je pense que cela est imputable à la traduction française, beaucoup d'incohérences sont venues se glisser dans les chapitres : noms de personnages orthographiés différemment d'un chapitre à l'autre, liens entre les personnages qui changent...Et beaucoup de coquilles également, ce qui me gêne un peu même si ce n'est pas la faute de l'auteure. C'est cependant assez désagréable pour le lecteur et dommage pour le livre qui en perd un peu en crédibilité du coup.

    Robert Bruce, roi d'Ecosse de 1306 à 1329


    J'ai aussi déploré beaucoup de longueurs et des chapitres qui, à mon sens, étaient superflus et pas forcément utiles pour la compréhension de l'histoire. Les prises de liberté de l'auteure si elles sont bien expliquées en fin de volume, ce que j'apprécie toujours -ça prouve que l'auteur s'est renseigné même si, au final, il choisit de faire primer le romanesque-, m'ont semblé parfois, peut-être pas inutiles, mais injustifiées... Quel intérêt par exemple de transformer une mort naturelle en assassinat alors que les conséquences de cette mort finalement, seront les mêmes ?
    Si les points que je viens de soulever m'ont effectivement gênée, je dois dire que j'ai quand même passé un bon moment et que j'ai trouvé ce roman de plus en plus plaisant, à mesure que j’avançais... Malgré quelques longueurs, découvrir cette Histoire inconnue pour moi -la crise dynastique en Écosse, l'ingérence anglaise, les rébellions galloises etc- et ses personnages m'a plu. Robyn Young a mâtiné tout ça d'un peu de légendaire, avec Arthur et Merlin et ses prophéties qui apparaissent au cours du récit et au sein d'un ordre secret de chevaliers. Si je n'ai pas forcément compris pourquoi au départ, cela ne m'a pas dérangée au final... Les légendes celtiques sont très présentes dans l'Histoire de la Bretagne et de la Grande-Bretagne et se confondent parfois avec l'Histoire établie donc j'ai finalement bien aimé cet aspect là du récit ! Que le roi Edouard mène en quelque sorte sa propre quête, comme Arthur, m'a plu. Cela permet de créer un lien entre l'Histoire immémoriale de l'île et les monarques de cette fin du XIIIème siècle. 
    C'est un Moyen Âge assez onirique, flamboyant mais aussi très violent que l'auteure nous décrit, relativement bien, grâce notamment aux nombreuses et solides recherches effectuées, ce qui est tout à son honneur. Insurrection est une bonne fiction historique, qui a des défauts et présente aussi quelques inégalités. Ce roman peut être cependant une bonne introduction à des lectures un peu plus scientifiques sur l'Histoire des îles britanniques. Et surtout, malgré quelques moments où je me suis ennuyée, j'ai refermé ce livre en ayant envie de continuer la saga, ce qui est bon signe ! Insurrection nous démontre comment devenir le pivot d'une Histoire nationale tient parfois à peu de choses. Qui, au XIIIème siècle, en Écosse et ailleurs, aurait parié sur Robert Bruce ? Et finalement, devenu le père de Marjorie Bruce, qui épousera Alexander Stewart, il deviendra l'ancêtre des rois Stuarts, qui ont régné à la fois sur l’Écosse et l'Angleterre. Un roman qui permet de toucher du doigt un grand destin, complexe également et multi-facettes, comme l'explique bien l'auteure en fin de roman. On comprend aisément l'obsession qu'elle a pu ressentir à la lecture de textes et documents concernant la crise de succession en Écosse et dans lesquels elle a fatalement retrouvé Robert Bruce et William Wallace... Ce dernier, que l'imaginaire connaît mieux, apparaît finalement comme très uniforme face à Bruce, qui changea plusieurs fois d'allégeance et est dépeint dans toute sa complexité par une auteure convaincue. Assurément, Insurrection est un bon roman historique et j'en ressors décoiffée par son souffle, pas dénué de défauts mais qui parvient cependant à capter le lecteur. 

    En Bref :

    Les + : une fresque très vivante et dynamique. On sent l'intérêt de l'auteure pour son sujet et elle parvient à nous convaincre. Ce roman a au moins le mérite de nous éclairer sur un pan de l'Histoire de la Grande-Bretagne, qui est plutôt intéressant. 
    Les - : beaucoup de coquilles d'impression, des approximations dans les liens entre les personnages (peut-être dues justement à ces fameuses coquilles) et quelques distorsions des faits historiques un peu superflues à mon goût. 

     


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    INTERMEDE XXIII

     

    L'un des portraits les plus célèbres de Victoria, daté de 1882. La photographie a été prise par Alexander Bassano. 

     

     

    I. Une petite fille qui n'était pas destinée au trône

     

    Victoria à l'âge de quatre ans, peinte par Stephen Poyntz Denning (1823)

    A l'aube du 24 mai 1819, à quatre heures et quart du matin, une petite fille pousse son premier cri à Kensington. Elle est l'enfant d'Edouard Auguste de Kent et de Strathearn et de Victoria de Saxe-Cobourg-Saalfeld. Par sa mère, la nouvelle-née a donc du sang allemand qui coule dans ses veines, par contre, par son père, elle est apparentée directement à la plus grande monarchie d'Europe, puisqu'Edouard de Kent n'est autre que le quatrième fils du roi Georges III du Royaume-Uni, qui règnera encore un an avant de s'éteindre, atteint d'une forme de folie.
    Normalement, l'enfant qui vient de naître et à qui l'on donne le prénom d'Alexandrina Victoria, n'est pas destinée à devenir la grande souveraine que l'on connaît. C'est une crise de succession qui va amener la descendance du duc de Kent sur le trône d'Angleterre...en effet, deux ans plus tôt, en 1817, l'unique petite-fille du roi Georges III, qui avait pour nom Charlotte Auguste de Galles, est morte, sans descendance. Cette mort entraîne une véritable crise dynastique au sein de la famille royale britannique et l'on encourage alors le duc de Kent, futur père de la petite Victoria ainsi que ses autres frères célibataires à convoler au plus vite, afin d'avoir des enfants. En 1818, Edouard de Kent épouse Victoria de Saxe-Cobourg-Saalfeld, qui n'est autre que la soeur de Léopold, veuf de la princesse Charlotte Augusta.
    Victoria sera l'unique enfant du couple. Par contre, d'un premier mariage, la duchesse de Kent, sa mère, avait eu deux enfants, dont le père est Emile Charles de Linange, second prince de Leiningen : Charles, né en 1804 et Feodora, en 1807. Plus tard, la jeune Victoria gardera des contacts assez soutenus avec sa demi-soeur.
    Dès sa naissance, la petite Victoria est baptisée, en privé, par l'archevêque de Canterbury, Charles Manners-Sutton, dans la Cupola Room du palais de Kensington, où elle vient de voir le jour. Le prénom d'Alexandrina lui est donné en hommage à l'un de ses parrains, Alexandre Ier de Russie. Quant au prénom de Victoria, c'est aussi celui de sa mère.
    A sa naissance, Victoria est cinquième dans l'ordre de succession au trône, après son père, le duc de Kent et ses trois oncles, le prince régent, le duc d'York et le duc de Clarence. Le prince régent et le duc d'York étaient alors séparés de leurs épouses, sans descendance et, qui plus est, d'un âge avancé, ce qui excluait donc presque à coup sûr l'éventualité d'une descendance. Quant aux ducs de Kent et de Clarence, ils se marièrent le même jour, en 1818. On l'a vu, l'union du duc de Kent sera rapidement couronnée par une naissance. Quand à celle du duc de Clarence, futur Guillaume IV d'Angleterre avec Charlotte de Brunswick, elle fut endeuillée par la mort en bas-âge des deux filles qui en était nées.
    En 1820, à une semaine d'écart, la petite Victoria perd, et son grand-père Georges III et son père, Edouard de Kent. Quant au duc d'York, il mourut en 1827 et le roi Georges IV en 1830. Ces décès successifs rapprochent la petite Victoria de la couronne britannique. En 1830, c'est Guillaume IV qui monte sur le trône et sa nièce, âgée de onze ans, devient son héritière présomptive. Le Regency Act, ratifié en 1830, stipule d'ailleurs que la duchesse de Kent devra assurer la régence au nom de sa fille dans l'éventualité où Guillaume IV mourrait avant que sa nièce n'ait atteint sa majorité, c'est-à-dire, l'âge de dix-huit ans. Cependant, le roi avait peu confiance en sa belle-soeur pour assurer la régence et, en 1836, il déclara qu'il souhaitait vivre jusqu'à la majorité de sa nièce, pour éviter au pays de subir une période de régence.
    Si l'on en croit, la reine, qui évoque ses souvenirs, elle passa une enfance « plutôt triste ». Sa mère était très protectrice avec elle et fit en sorte de l'élever à l'écart des autres enfants. Son éducation était étayée par des règles et des protocoles très stricts, rédigés par la duchesse elle-même et par son ambitieux contrôleur de gestion, John Conroy qui, le bruit courrait, aurait été son amant. Cette série de règle et protocoles porte un nom : c'est le « système de Kensington ». Il était par exemple interdit à la jeune princesse Victoria de rencontrer toute personne jugée indisérable par sa mère et par Conroy -par exemple, la plus grande partie de sa famille paternelle-, et ce système avait pour but simple de rendre la petite faible et dépendante. Choquée par la présence à la Cour des bâtards du roi, la duchesse de Kent évite au maximum d'y emmener sa fille, cherchant ainsi à ne pas l'exposer à l'inconvenance sexuelle. Victoria partage la chambre de sa mère la nuit, étudie en journée avec des maîtres privés selon un emploi du temps très précis et ses quelques heures de loisir se partageait entre ses poupées et son petit chien, un king charles prénommé Dash. On lui apprit le français, l'allemand, l'italien et le latin mais elle ne parlait que l'anglais dans l'intimité.
    Dans les années 1830, la duchesse de Kent et Conroy décidèrent d'emmener Victoria visiter l'Angleterre. Partout où elle se rendit, la jeune fille fut accueillie avec les honneurs et elle put se rendre compte qu'elle était populaire dans le peuple, au grand agacement de son oncle, le roi Guillaume IV qui considérait ces voyages comme des Joyeuses Entrées où Victoria n'était plus son héritière présomptive mais réellement, sa rivale. Cela dit, ces voyages n'étaient pas non plus du goût de la jeune Victoria car ils la fatiguaient. Mais, malgré ses plaintes et la désapprobation du roi, sa mère refusa de ramener sa fille à Londres.
    Et ce qui devait arriver, arriva. En octobre 1835, à Ramsgate, la jeune Victoria, âgée de seize ans, développe soudain une forte fièvre. Le contrôleur Conroy se moqua de cette maladie qu'il qualifia de caprice enfantin. Pendant cette maladie, sa mère tenta, sans succès, de la pousser à nommer Conroy comme son secrétaire général mais la jeune fille ne flancha pas et, une fois, couronnée, elle le bannira de sa Cour.
    En 1836, l'oncle maternel de Victoria, Léopold, qui avait été un temps l'époux de sa défunte cousine, Charlotte Augusta, devient roi des Belges et espère marier sa jeune nièce britannique avec Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, un autre de ses neveux, fils de son frère Ernest Ier de Saxe-Cobourg et Gotha. Victoria et Albert sont cousins germains, puisque la mère de l'une et le père de l'autre sont frère et soeur.
    En mai 1836, alors que Victoria s'apprête à fêter ses dix-sept ans, le roi Léopold de Belgique décide d'organiser une grande réunion de famille dans le but de présenter Victoria à Albert. Cependant, le roi d'Angleterre se montrait peu favorable à une union de sa nièce avec un Saxe-Cobourg et Gotha et privilégiait le parti d'Alexandre des Pays-Bas, second fils du prince d'Orange.
    Victoria est tout sauf une jeune fille naïve et elle est tout à fait consciente des nombreux projets matrimoniaux qui la concerne. Il faut dire que l'héritière présomptive d'un roi d'Angleterre est un bon parti. C'est avec un oeil critique qu'elle juge tous les candidats qui lui sont proposés. Finalement, malgré la désapprobation du roi Guillaume IV, Victoria va rencontrer Albert, son cousin, qui a deux mois de moins qu'elle seulement -il est né le 26 août 1819. A l'en croire -Victoria rédige un journal- cette première rencontre a été loin d'être désagréable et c'est plutôt bien passée. Il semble que le physique du jeune prince ait fait grande impression sur cette jeune fille de dix-sept ans, puisque voici ce qu'elle écrit à propos de son cousin : « [Albert] est extrêmement beau ; ses cheveux sont de même couleur que les miens ; ses yeux sont grands et bleus et il a un beau nez et une bouche très douce avec de belles dents ; mais le charme de sa contenance est son atout le plus délicieux ». A l'inverse, le prince Alexandre, soutenu par son oncle, est jugé quelconque par la jeune fille.
    Par la suite, la jeune Victoria écrit à son oncle Léopold afin de le remercier de l'avoir fait rencontrer Albert. « Il possède toutes les qualités qui pourraient être désirées pour me rendre parfaitement heureuse. Il est si raisonnable, si gentil et si bon et si aimable aussi. Il a en plus l'apparence et l'extérieur les plus plaisants et les plus délicieux qu'il vous est possible de voir. », dit-elle dans sa lettre. Il semblerait donc que le dessein de Léopold de Belgique et de la duchesse de Kent soit en passe de de se réaliser : Victoria a, semble-t-il, était tout à fait impressionnée par son cousin et parait disposée à envisager une union avec lui. Cela dit, ce ne serait pas pour tout de suite, Victoria se jugeant un peu jeune pour convoler, à dix-sept ans seulement. Ainsi, on ne s'accorda pas sur un engagement formel mais on estima que le mariage se ferait en temps et en heure.

    II. Reine d'Angleterre !

    Le couronnement de la reine Victoria, par George Hayter

    Le 24 mai 1837, Victoria fête ses dix-huit ans. Victoire de son oncle, qui avait déclaré vouloir vivre jusqu'à la majorité de sa nièce afin d'éviter une régence au royaume. Lorsque Victoria accède à la majorité son oncle est à bout de souffle mais il est encore vivant. Il s'éteint à peine un mois plus tard, le 20 juin, à l'âge de 71 ans, abandonnant le royaume à une reine majeure, capable d'assurer ses affaires. A 2 heures 12 du matin, Guillaume IV n'est plus ; à 6 heures, la duchesse de Kent vient éveiller sa fille, qui s'était couchée héritière et s'éveille ainsi reine du Royaume-Uni : « J'ai été réveillée à 6 h pile par Mamma qui me dit que l'archevêque de Cantorbéry et Lord Conyngham étaient là et qu'ils voulaient me voir. Je suis sortie du lit et me suis rendue dans mon salon (en ne portant que ma robe de chambre) et seule, je les ai vus. Lord Conyngham m'informa alors que mon pauvre oncle, le roi, n'était plus et avait expiré à 2 h 12 ce matin et que par conséquent Je suis Reine. », écrit la fraîche souveraine dans son journal. Les documents officiels sont préparés au nom de la reine Alexandrina Victoria mais, à sa demande, le premier prénom est supprimé : la reine Victoria vient de naître...
    Depuis 1714 et la mort, sans descendance, de la reine Anne, le royaume d'Angleterre était passé sous la tutelle des rois hanovriens. Comme la loi salique est en vigueur au Hanovre, Victoria n'héritera pas de ce titre-là, puisque les femmes ne peuvent prétendre à la succession. Si elle se voit investie de la tutelle de toutes les colonies britanniques, le pouvoir au Hanovre sera, lui, dévolu au frère de son propre père, le duc de Cumberland et Teviotdale, qui devient Ernest-Auguste Ier de Hanovre. Il est également l'héritier de sa nièce, tant que cette dernière reste sans enfant.
    A son accession au trône, Victoria, qui est encore toute jeune, est politiquement inexpérimentée et c'est le premier ministre whig Lord Melbourne qui va la seconder et exercer une influence importante sur elle. L'écrivain Charles Greville disait même que Lord Melbourne, veuf et sans enfant considérait la jeune reine comme sa propre fille et Victoria, qui n'avait pas connu son père, mort alors qu'elle avait à peine un an, le voyait certainement comme une figure tutélaire et maternelle.
    La reine est couronnée solenellement le 28 juin 1838, un an après son accession au trône. Elle réside au palais de Buckingham et devient en cela le premier souverain à y séjourner durablement. Elle hérite des revenus des duchés de Lancastre, de Cornouailles et se voit dotée d'une liste civile annuelle de 385 000 £. Relativement prudente financièrement, elle en profita pour rembourser les dettes de son père.
    Au début de son règne, la jeune Victoria est populaire et estimée. Mais, en 1840, sa réputation est ternie par l'affaire Hastings : l'une de ses dames d'honneur, lady Flora Hastings présente un ventre arrondi qui pourrait très bien signifier une grossesse. Victoria, qui ne peut supporter « cette odieuse Flora » la fait examiner, après que des rumeurs aient sous-entendu que la dame d'honneur aurait été enceinte des oeuvres de John Conroy, l'exécré contrôleur de gestion de la duchesse de Kent, la mère de la reine. Or, il s'avère que Flora Hastings est...vierge. Elle souffrait d'une importante tumeur hépatique qui l'emporte d'ailleurs au mois de juillet 1840. Victoria est alors conspuée et huée lors de ses apparitions publiques et appelée ironiquement « Mme Melbourne ». Ce dernier avait démissionné après que les radicaux et les tories, parti opposé aux whigs qu'il représentait, aient voté contre une loi suspendant la constitution de Jamaïque. La législation prévoyait en effet de supprimer les pouvoirs politiques des planteurs qui s'opposaient aux mesures associées à l'abolition de l'esclavage. Malgré la détestation qu'elle vouait aux torries, la reine Victoria chargea Robert Peel de former un nouveau gouvernement. A l'époque, il était d'usage que le premier ministre nomme les « dames de la chambre à coucher », qui sont au service de la famille royale dans ses diverses résidences et, la coutume voulait que ces dames soient souvent des épouses des membres du parti au pouvoir. Or, les « dames de la chambre à coucher » étaient alors des épouses de whigs et Peel, tout logiquement, souhaitait les remplacer par des épouses de torries, ce que Victoria refusa. Cela donna lieu à la « crise de la chambre à coucher » et au retour de Melbourne au pouvoir puisque Peel, refusant de gouverner selon les conditions de la souveraine, donna sa démission.
    Maintenant que Victoria est une souveraine couronnée, sa position de célibataire devient délicate et elle doit se marier. De plus, les conventions sociales lui imposaient de vivre sous le même toit que sa mère, avec qui elle ne s'entendait absolument pas, notamment à cause de John Conroy. La duchesse de Kent vit donc à Buckingham auprès de sa fille mais la reine refuse souvent de la rencontrer. Un jour, Victoria se plaignit à Melbourne de cette promiscuité avec sa mère qui ne promettait que des « souffrances pendant de nombreuses années ». Alors, le ministre conseilla à la reine de se marier car c'était le seul moyen pour elle d'échapper à la tutelle de sa mère. Mais la reine rétorqua que c'était là une « alternative choquante ». Même si elle se met à songer sérieusement à son cousin, rencontré quelques années plus tôt, Victoria refuse de céder aux pressions qui la poussent à se marier rapidement.
    Finalement, Victoria saute le pas en octobre 1839, alors que son cousin est venu en séjour en Angleterre. Le 15, elle le demande officiellement en mariage et le couple se marie le 10 février 1840 dans la Chapel Royal du palais de St-James de Londres. Victoria se montre très éprise de son époux et ils formeront, jusqu'à la mort d'Albert un couple aimant et uni. Grâce à la médiation du prince consort, les relations entre la duchesse de Kent et sa royale fille s'amélioreront également progressivement.
    En cette année 1840, la jeune reine, âgée de vingt-et-un ans, s'aperçoit qu'elle est déjà enceinte. Alors qu'elle se promène dans une calèche avec son époux, lors d'un déplacement pour rendre visite à sa mère, un jeune homme de dix-huit ans, Edward Oxford, tire deux fois sur la reine mais manque sa cible. Jugé pour haute trahison, il fut condamné mais finalement acquitté pour raisons mentales et il fut interné pendant une trentaine d'années. Après cette agression, la popularité de Victoria augmenta significativement et calma le mécontentement résiduel après l'affaire Hastings et la crise de la chambre à coucher. Au cours des années suivantes, la reine Victoria échappa à plusieurs autres tentatives d'attentat : en 1842, alors qu'elle descendait le Mall en calèche, John Francis, armé d'un pistolet, tira en direction de la reine, mais l'arme ne fonctionna pas ; en 1849 et 1850, William Hamilton et Robert Pate tentèrent également de s'en prendre à la personne royale...
    Le 21 novembre 1840, la reine Victoria donne naissance à son premier enfant, une fille, qui recevra également le prénom de Victoria. Victoria n'aimait pas beaucoup les enfants -elle considérait les nourrissons comme des êtres laids-, elle se montrait dégoûtée par l'allaitement et détestait être enceinte mais elle eut néanmoins huit enfants. A ce moment-là, la maison de la reine est alors gérée par son ancienne gouvernante, la baronne Louise Lehzen, hanovrienne d'origine. Jugée incompétente par le prince Albert, elle sera limogée à la suite d'une violente dispute opposant les deux époux. Quoi qu'il en soit, le couple resta très amoureux, très uni et Victoria et Albert devinrent les parents de neuf enfants. En 1853 et 1857, Victoria donna naissance à ses deux derniers enfants. En 1853, pour la première fois, elle usa pendant son accouchement d'un nouvel anesthésiant, le chloroforme, à la grande fureur des prélats, qui estimaient que ceci était contraire aux enseignements de la Genèse et à l'inquiétude des médecins qui considéraient cette substance comme dangereuse.

    III. La politique victorienne

    Si le parti whig est majoritaire au début du règne de la jeune Victoria, il va en s'affaiblissant au cours des ans. En 1841, les whigs, parti de Lord Melbourn, qui avait servi de mentor à la jeune reine, est battu lors des élections générales et Peel devint premier ministre. Il réorganisa alors la chambre à coucher de la reine et les dames les plus associées au parti whig furent remplacées.
    En 1845, en Irlande, une grave crise alimentaire survient, alors que la pomme de terre, aliment de base de la population, est touchée par le mildiou. Cette crise entraîna la mort d'un million environ d'habitants tandis que d'autres émigrèrent, notamment vers les Etats-Unis : cette période est restée dans l'Histoire sous le nom de Grande Famine et, en Irlande, Victoria fut surnommée « The Famine Queen », autrement dit « la reine famine ». Et pourtant, la reine piocha dans sa propre cassette afin de venir en aide au peuple Irlandais et donna environ 2 000 £ pour que la famine soit endiguée. La légende qui veut qu'elle n'ait donné que 5 £ tandis que, le même jour, elle versait une somme extravagante à une organisation de protection des animaux, la Battersea Dogs Home, n'est qu'un mythe, créé de toutes pièces vers la fin de son règne.
    En 1846, le gouvernement Peel doit affronter la crise qui survient après le projet d'abolition des Corn Laws : ces lois, votées essentiellement au siècle dernier et au début du XIXème siècle -la dernière datait de 1815- interdisaient toute importation de céréales lorsque les cours passaient en dessous d'un seuil-plafond. Les tories, c'est-à-dire les conservateurs, étaient opposés fermement à ce projet mais Peel, quelques membres du parti torry et la reine Victoria elle-même étaient favorables à l'abolition de ces lois. Votée de justesse, l'abolition de ces lois coûta tout de même son poste de Premier Ministre à Peel, qui dut démissionner et fut alors remplacé par Lord Russell.
    En ce qui concerne la politique extérieure, la reine Victoria va travailler à l'amélioration des relations diplomatiques avec la France. Ainsi, elle rencontra à plusieurs reprises des membres de la famille d'Orléans, liée à la famille royale britannique par des mariages, notamment via les Cobourgs. En 1843 puis 1845, Victoria et Albert se rendirent en France où ils rencontrèrent le roi Louis-Philippe d'Orléans au château d'Eu, en Normandie. Elle fut le premier souverain britannique à rencontrer son homologue français depuis le fameux Camp du Drap d'Or, en 1520, qui avait réuni François Ier et le célèbre Henri VIII !! En 1844, ce fut Louis-Philippe qui se rendit en Angleterre et, de même, devint le premier roi français à se rendre outre-Manche. Lorsqu'il fut déposé, à la suite de la révolution d 1848, le roi Orléans parti en exil en Angleterre. Cette année 1848 est mouvementée partout en Europe, où l'on constaste de nombreux soulèvements populaires. Par précaution, la reine et sa famille iront séjourner à Osborne House, la demeure de Victoria sur l'île de Wight, achetée en 1845. Finalement, il n'y eut pas de soulèvement général au Royaume-Uni et la perspective d'une révolution s'éloigna peu à peu. En 1849, Victoria effectue un voyage en Irlande, voyage qui fut un succès en terme de relations publiques mais qui n'eut pas, cependant, d'impact sur la croissance du nationalisme dans l'île. Elle dut s'accomoder pendant de nombreuses années du gouvernement de Lord Russel, dominé par les whigs, un parti que la reine n'appréciait pas. Elle détestait tout particulièrement Lord Palmerston, le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, qui faisait souvent cavalier seul et se permettait d'agir sans l'avis du Cabinet, du Premier Ministre ou de la reine. Finalement, il fut limogé en 1851 lorsqu'il osa annoncer que le gouvernement britannique approuvait le coup d'état mené par Louis-Napoléon Bonaparte, en France, qui venait de renverser la république pour instaurer un nouvel empire. L'année suivante -1852-, Russel fut remplacé par lord Derby.
    En 1855, du fait de la guerre de Crimée, le gouvernement de lord Aberdeen, qui avait remplacé Derby, démissionna, à la suite de critiques formulées envers leur mauvaise gestion de la situation de crise. La reine approcha alors Derby puis Russel pour reformer un gouvernement mais n'ayant pas suffisamment de soutiens, les deux hommes refusèrent et Victoria fut donc contrainte de nommer l'ingérable Palmerston au poste de Premier Ministre.
    Durant la guerre de Crimée, la France de Napoléon III et le Royaume-Uni furent alliés et l'Empereur des Français se rendit donc, en avril 1855, en Angleterre pour rendre visite au couple souverain. Victoria et Albert firent le voyage inverse en août de la même année : ils furent accueillis par Napoléon III à Dunkerque et ce dernier les conduisit ensuite jusqu'à Paris où le couple royal britannique put visiter l'exposition universelle. Albert et Victoria se rendirent également sur la tombe de Napoléon Ier aux Invalides -ses cendres avaient été rapatriées en 1840- et furent au centre d'un bal donné en leur honneur au château de Versailles. A la fin des années 1850, les gouvernements successifs connurent de graves crises, notamment à la suite d'une tentative d'assassinat de Napoléon III par un réfugié italien en Angleterre qui avait tenté de tuer l'Empereur avec une bombe fabriquée outre-Manche. Derby fut rappelé au pouvoir puis, en juin 1859, il fut de nouveau remplacé par Palmerston.
    Par la suite, la politique victorienne sera marquée par le ministériat du célèbre Disraeli -à la mort de ce dernier, la reine fut sincèrement affligée- et Victoria devint officiellement impératrice des Indes le 1er janvier 1877. La reine, au cours des dernières décennies de son règne, sera de nouveau la cible de plusieurs attentats, qui, fort heureusement pour elle, manqueront leur cible à chaque fois et devra affronter la montée du républicanisme en Angleterre, ravivé notamment par l'avènement de la Troisième République en France.

    IV. Victoria s'achemine vers la mâturité

    Le prince Albert, Victoria et leurs enfants, en 1857

    Le 25 janvier 1858, alors que leur dernière fille, Béatrice du Royaume-Uni est encore au berceau, Victoria et Albert marient leur fille aînée Victoria au prince Frédéric Guillaume de Prusse. La cérémonie a lieu à Londres. Victoria et Albert ont trente-neuf ans, la jeune Victoria, dix-huit. Ce fut avec beaucoup d'émotion que la reine Victoria vit partir la jeune fille vers la Prusse et voilà d'ailleurs ce qui lui écrira par la suite, dans la correspondance qui les unit :« cela me fait vraiment frissonner quand je regarde vos sœurs douces, joyeuses et inconscientes et que je pense que je devrais les abandonner également, une par une. » Dès l'année suivante, alors que le couple royal a à peine quarante ans, leur fille Victoria leur donne leur premier petit-enfant, un garçon qui sera prénommé Guillaume.
    Les années 1860 sont marqués par des deuils pour Victoria. Ainsi, en mars 1861, la duchesse de Kent, Victoria de Saxe-Cobourg-Saalfeld, mère de la reine, meurt, sa fille à son chevet. Après son décès, Victoria prend connaissance des documents de sa mère où elle découvre avec stupeur et tristesse que sa mère, contrairement aux apparences, l'aimait profondément. La reine en eut le coeur brisé et blâma sévèrement John Conroy et sa gouvernante, Louise Lehzen, pour l'avoir sciemment éloignée de sa mère. Albert fut d'une grande aide pour la reine pendant cette période troublée de sa vie et prit notamment en charge une partie de ses fonctions bien qu'il eût lui-même des problèmes de santé. En août, le couple rend visite à leur fils, le Prince de Galles, qui assistait à des manoeuvres militaires non loin de Dublin et passèrent quelques jours en Irlande. En novembre, le prince consort apprit avec stupeur les rumeurs selon lesquelles son fils avait couché avec une actrice irlandaise. Ulcéré, il se rendit à Cambridge, où Edward étudiait, afin de le réprimander. Début décembre, Albert est gravement malade. Appelé à son chevet, le médecin William Jenner diagnostique une fièvre typhoïde et, le 14 décembre 1861, le prince rendait son âme à Dieu à l'âge de quarante-deux ans, laissant une veuve profondément anéantie. Révoltée par la mort de son époux, la reine n'hésita pas à en attribuer la responsabilité à l'attitude frivole de son fils, Edward et affirma qu'Albert avait été « tué par cette affreuse affaire. » Pendant tout le reste de sa longue vie, on ne verra plus la reine que vêtue de noir, portant le deuil d'un mari très aimé et parti trop jeune. Après la mort d'Albert, elle vint de moins en moins à Londres et se retira au château de Windsor, ce qui lui valut d'ailleurs le surnom de « veuve de Windsor ».
    Cet isolement volontaire entraîna une diminuation de la popularité de la monarchie, ce qui encouragea donc une croissance du mouvement républicain dans le pays. Cependant, Victoria continua d'assumer ses fonctions gouvernementales comme elle l'avait toujours fait mais choisit de rester le plus souvent confinée dans ses résidences favorites : Windsor, en Angleterre, Balmoral, en Ecosse et Osborne House, sur l'île de Wight, où elle vivait dans le souvenir de son cher disparu. Cependant, l'isolement de la reine encourage la colère du peuple et, en mars 1864, un manifestant n'hésite pas à placarder une affiche sur les grilles du palais de Buckingham, proclamant que « ces imposants bâtiments étaient à vendre en raison du déclin des affaires de l'ancien propriétaire ». Sur le conseil de son oncle, Léopold, roi des Belges, Victoria consentira à apparaître de nouveau en public. Sa première sortie a lieu aux jardins de la Royal Horticultural Society à Kensington.
    Durant les années 1860, suite à son veuvage, la reine diminuée par la peine d'avoir perdu son compagnon de vie va s'appuyer et se raccrocher de plus en plus à un de ses domestiques, un Ecossais du nom de John Brown. Bien vite, cette relation privilégiée alimente les rumeurs, qui font état d'une relation entre la reine et Brown et même d'un mariage secret entre eux. La reine fut perfidement affublée du sobriquet de « Mrs. Brown ». Pourtant, dans son livre intitulé Leaves from the Journal of Our Life in the Highlands, Victoria n'hésitera pas, malgré les rumeurs qui vont bon train, à rendre un vibrant hommage à cet homme qui lui apporta réconfort et protection. Un film, La Dame de Windsor, en 1997, relate cet épisode de la vie de la reine Victoria.
    Désormais veuve, c'est sur ses enfants que la reine Victoria vieillissante reporte toutes ses inquiétudes. En 1871, elle doit affronter la maladie de son fils, le prince de Galles, héritier du trône qui a contracté la typhoïde, la maladie qui avait emporté Albert dix ans plus tôt. Victoria craignit que son fils ne mourut mais, finalement, le prince survit. Victoria sortait alors tout juste elle-même d'une maladie relativement sérieuse : en septembre 1871, elle avait souffert d'un abcès au bras et dut son salut au médecin Joseph Lister qui incisa l'abcès et le désinfecta au phénol. En février 1872, Arthur O'Connor, âgé de dix-sept ans, petit-neveu du député irlandais Feargus O'Connor, agita un pistolet non-chargé sur le passage de la reine. Neutralisé par Brown, il sera condamné à de la prison et son geste renforcera la popularité de la souveraine.
    Le 14 décembre 1878, Victoria s'apprêta à commémorer comme il se doit le dix-huitième anniversaire de la mort de son époux chéri, Albert. Ce même jour, sa seconde fille, nommée Alice et qui avait épousé Louis IV de Hesse, meurt de la diphtérie à Darmstadt, en Allemagne. Cette Alice de Hesse était la mère d'une petite fille appelée à connaître un destin aussi brillant que tragique : la petite Alix deviendrait un jour impératrice de Russie sous le nom d'Alexandra Fedorovna, épouse de Nicolas II, tsar de toutes les Russies...Victoria, à la veille de son soixantième anniversaire, sera particulièrement touchée par le décès de sa fille. En mai 1879, elle devient arrière-grand-mère, à l'occasion de la naissance de Théodora de Saxe Meiningen, petite-fille de Victoria, sa première fille. La reine se dit alors vieillie, abattue par la perte de « perte de [son] enfant chéri ». Victoria s'achemine vers la vieillesse dans la tristesse.

    V. Les dernières années

    La reine Victoria à quatre-vingt ans, représentée en 1899 par Henrich von Angeli 

    Le 2 mars 1882, Victoria, alors âgée de soixante-trois ans, échappe à une tentative d'assassinat perpétrée par Roderick McLean, un poète visiblement mécontent que la reine ait refusé l'un de ses poèmes. La reine se montrera particulièrement outrée qu'il ne soit finalement pas condamnée pour cause de santé mentale défaillante. Cela dit, elle fut réconfortée par les nombreuses manifestations de soutien du peuole et aurait eu ces mots : « cela valait la peine de se faire tirer dessus pour voir à quel point l'on est aimée ».
    En 1893, elle tomba dans les escaliers du château de Windsor et ne récupéra jamais complètement de cet accident. Cette même année, elle eut la douleur de perdre Brown, qui mourut 10 jours après son accident et, malgré la consternation de son secrétaire privé, Henry Ponsonby, qui considérait d'un mauvais oeil son initiative, la vieille reine décida d'entreprendre une biographie de son ancien domestique. Il lui fut cependant déconseillé de la publier si elle ne souhaitait pas alimenter les rumeurs qui lui prêtaient une relation amoureuse avec Brown. Elle eut encore le chagrin de devoir faire face à la mort de l'un de ses enfants, le prince Léopold, décédé à Cannes mais, quelques années avant sa mort, la reine Victoria eut le bonheur de connaître son arrière-petit-fils, le prince Edward, qui devait un jour monter sur le trône sous le nom d'Edward VIII. En 1887, les Britanniques célébrèrent le Jubilé d'or de la reine, c'est-à-dire le cinquantenaire de l'accession au trône de Victoria. Dix ans plus tard, Victoria, âgée de soixante-dix-huit ans, célébra son Jubilé de Diamant, autrement dit, ses soixante ans de règne. A l'heure actuelle, elle est le souverain britannique à avoir régné le plus longtemps sur le pays, quoique sa descendante, la reine Elizabeth II, semble bien décidée à concurrencer sa célèbre aïeule : elle a célébré son Jubilé de Diamant en 2011.
    Malgré son âge très avancé, Victoria continua de voyager en Europe. Ainsi, en 1889, lors d'un séjour à Biarritz, elle en profita pour passer la frontière espagnole et fut donc le premier monarque britannique à poser le pied sur la terre hibérique. Cependant, en avril 1900, alors qu'elle devait se rendre en voyage en France, le voyage fut annulé en raison de la guerre des Boers jugée de manière particulièrement négative partout en Europe. Victoria se rendit don en Irlande, où elle n'était plus allée depuis 1861. En juillet 1900, la vieille reine dut affronter la mort de son fils Alfred, surnommé Alfie et elle écrivit ceci dans son journal : « Oh, Dieu ! Mon pauvre chéri Affie est parti aussi. C'est une année horrible, rien d'autre que la tristesse et l'horreur sous une forme ou une autre ».
    Le réveillon de 1900 se passa à Osborne House, comme Victoria en avait pris l'habitude depuis son voyage. Elle boitait un peu, du fait des rhumatismes qui la torturaient depuis des années et sa vue s'était obscurcie à cause de la cataracte. Au début du mois de janvier 1901, la reine, âgée de bientôt quatre-vingt-deux ans, se sent faible et souffrante. Elle meurt finalement le 22 janvier 1901, à l'aube du XXème siècle, à 18 heures 30. Elle avait régné soixante-quatre ans sur le Royaume-Uni et aurait fête ses quatre-vingt-deux ans au mois de mai suivant. C'est son fils, Edward, prince de Galles, qui lui succède sous le nom d'Edward VII.
    Victoria fut habillée d'une robe blanche et couronnée d'un voile de mariée. Des souvenirs rappelant sa famille, ses amis et ses domestiques furent placés à ses côtés dans le cercueil. Elle fut inhumée le 2 février 1901 : à la suite d'une cérémonie en la chapelle Saint-Georges de Windsor, elle fut portée en terre à Frogmore, dans le mausolée royal, aux cotés de son mari Albert.

    © Le texte est de moi, je vous demanderais donc de ne pas le copier, merci.

    Pour en savoir plus : 

    - La Saga des Windsor, Jean des Cars. Essai historique.
    - Queen Victoria : A Personal History, Christopher Hibbert. Biographie. 
    - Écrits de la reine Victoria (disponibles sur l'Internet Archive) 
    - La reine Victoria, Jacques de Langlade. Biographie. 
    - La reine Victoria, Philippe Chassaigne. Biographie. 
    - Victoria : Reine d'un Siècle, Joanny Moulin. Biographie. 


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