• « On peut construire sa vie à son gré si on le veut vraiment, et si la Providence vous aide un peu. »

    Les Aventures de Guilhem d'Ussel, chevalier troubadour : L'Evasion de Richard Coeur de Lion et Autres Aventures

     

    Publié en 2016

    Editions J'ai Lu

    564 pages

    Tome hors-série de la saga Les Aventures de Guilhem d'Ussel, chevalier troubadour

    Résumé :

    Des serfs opprimés par un seigneur violent et cruel. Une troupe de chevaliers réunis pour libérer Richard Coeur de Lion, emprisonné en Allemagne. Un bien curieux chat botté. Un crime ménager. Un retour à l'abbaye de Cluny perturbé par des fresques qui saignent. Un loup démoniaque à combattre. Autant d'intrigues dans lesquelles Guilhem d'Ussel se retrouve plongé entre 1193 et 1201. Au fil de ces péripéties, on découvre que le mensonge se cache souvent derrière une apparente vérité, que l'évidence peut être un leurre, que la loyauté fait parfois défaut et que la vengeance justifie bien des crimes. Guilhem, quant à lui, aussi vif d'esprit qu'agile à l'épée, cherche sans relâche à faire justice. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Cela fait deux ans que je ne m'étais pas plongée dans une aventure de Guilhem d'Ussel, le chevalier troubadour de Jean d'Aillon. Il est vrai qu'après ma lecture de Rouen, 1203  alors le dernier tome de la saga en date, j'ai attendu la sortie en poche de Béziers, 1209, qui va me permettre de raccrocher les wagons et de reprendre le fil, après deux ans loin de cette saga.
    Pour me remettre un peu dans l'ambiance je me suis dit que la lecture de ce tome hors série, dont les nouvelles s'intercalent, de part leur chronologie, entre les romans de la saga, serait une bonne alternative. Guilhem est l'un de mes héros préférés chez Jean d'Aillon, que j'ai un peu délaissé à partir du moment où je me suis plongée dans Les Enquêtes de Louis Fronsac mais que, je le savais, je retrouverai forcément un jour. A mon sens, Guilhem d'Ussel, personnage particulier au passé lourd et pas forcément sans tâche est bien plus complexe que Louis Fronsac ou Olivier Hauteville, deux autres héros de Jean d'Aillon, très intéressants eux aussi, cela va sans dire, mais différemment, toutefois.
    Dans ce recueil d'un peu plus de cinq cents pages, l'auteur nous balade ainsi de 1193 jusqu'au début du XIIIème siècle : un peu naïvement, au départ, j'ai cru que chacune des nouvelles allait tourner autour de l'évasion de Richard Coeur de Lion qui, après son retour de croisade, se trouva otage, d'abord du duc d'Autriche puis de l'empereur Henri VI. Ca prouve que j'avais encore une fois bien lu le résumé, car si je l'avais fait, j'aurais vu que la chronologie des nouvelles s'étend sur près de dix ans.
    La plupart des nouvelles présentes dans ce recueil avaient d'abord été publiées en format numérique et j'avais été frustrée de ne pas pouvoir les lire, surtout que des notes de bas de page parfois renvoyaient vers l'intrigue de telle ou telle nouvelle et je me disais : « dommage, quand même... »

    J'ai été donc ravie de les voir rassemblées en un seul et même ouvrage. Ça m'a fait un peu bizarre de faire un bond dans le temps, de revenir dans le passé et il a parfois fallu que je fasse un effort de mémoire pour me rappeler l'intrigue de certains tomes notamment de De Taille et d'Estoc et Férir ou Périr, les deux romans hors série qui racontent la jeunesse de Guilhem. J'ai apprécié qu'une chronologie soit disponible en fin d'ouvrage pour nous permettre de savoir entre quels tomes chaque nouvelle s'intercale. A la limite, cela permet de se rafraîchir la mémoire en allant relire les résumés mais, dans l'ensemble, je n'ai jamais été perdue. Sans me souvenir de tout, je me suis rendu compte que les tomes de la saga lus il y'a pourtant un moment étaient encore assez présents à mon esprit. Il est vrai que j'ai toujours beaucoup aimé Guilhem d'Ussel, un personnage assez atypique.
    Les nouvelles démarrent en 1193, avec La Charte Maudite et L'Evasion de Richard Cœur de Lion. Viennent ensuite, en 1198, Le Noël du Chat Botté, en 1199 Les Perdrix de Lectoure, en 1200 Retour à Cluny et enfin, en 1201, Le Loup maléfique, celle que j'avais très envie de découvrir car je pressentais encore l'utilisation d'un personnage très connu de notre imaginaire -peut-être la Bête du Gévaudan ?- un peu comme pour le chat botté, qu'on ne s'attend pas forcément à retrouver au Moyen Âge mais que l'auteur utilise cependant habilement.
    Ensuite, la grande question, qui m'est revenue sans cesse au cours de ma lecture mais à laquelle je n'ai pas réellement réussi à répondre c'est : est-ce que ces nouvelles présentent un intérêt à la compréhension de la saga dans son ensemble ? Si j'étais très encline à dire oui pour De Taille et d'Estoc et Férir ou Périr, qui nous permettent de mieux comprendre Guilhem, ses réactions et qui nous éclairent sur son passé, je dirais que ce n'est pas vraiment le cas pour ces nouvelles. Elles émaillent la chronologie de la saga mais ne sont cependant pas, à mon sens, nécessaires à la compréhension globale de l'intrigue. Du moins ne l'ai-je pas ressenti comme ça à leur lecture. Je les ai appréciées -même si La Charte Maudite m'a un peu ennuyée je dois le dire- mais je ne pense pas que leur lecture soit réellement nécessaire pour appréhender la saga dans son ensemble. Parfois j'ai même eu l'impression de lire autre chose que du Guilhem d'Ussel, c'était assez perturbant parce que je n'ai finalement pas vraiment perçu la continuité avec les autres tomes, malgré les références qui y sont faites. Je crois que ce qui m'a un peu perturbée, c'est l'absence ou, du moins, la mise à l'écart de l'aspect policier de la saga, surtout dans la première nouvelle. Les enquêtes y sont moins présentes et cela m'a surprise. Mais au final, cela permet à l'auteur d'aborder d'autres domaines, de nous livrer un roman encore plus historique, si tant est que cela soit possible ! Disons que le côté historique parfois un peu inhibé par le policier et celui-ci revient un peu plus sur le devant de la scène dans les dernières nouvelles et ce, pour mon plus grand plaisir de lectrice ! 
    J'ai cependant été ravie de retrouver en fin de volume des enquêtes ressemblant bien plus à ce à quoi Jean d'Aillon nous a habitués, notamment celle prenant corps à Lamaguère, le fief de Guilhem en Toulousain et mettant en scène ce fameux loup maléfique qui n'est pas sans rappeler certaines affaires de bêtes s'attaquant aux hommes, aux XVIIème ou XVIIIème siècles.
    Chaque nouvelle est originale, à sa manière. Jean d'Aillon excelle toujours à dépeindre un Moyen Âge assez grandiose, peut-être pas complètement conforme à la réalité mais qui essaie, du moins, de s'en rapprocher au mieux. C'est le condensé d'une époque finalement : relations entre vassaux et suzerains, entre seigneurs et vilains, croyances plus ou moins superstitieuses, cultes des reliques et des miracles etc... Sa plume est toujours vive, tout à fait adaptée à un récit d'aventures. Ces nouvelles m'ont permis de raccrocher les wagons et de me replonger dans l'ambiance de la saga, dont je m'étais un peu éloignée, avant ensuite de reprendre le fil chronologique. La prochaine fois, c'est donc à Béziers, au moment du siège de la ville par les croisés du Nord, que je retrouverai Guilhem et ses compagnons et, j'avoue, j'ai hâte ! 

    En Bref : 

    Les + : la diversité des thèmes et des ambiances et les personnages, bien sûr. 
    Les - : le recueil est peut-être un peu lent à démarrer. La Charte Maudite m'a un peu ennuyée, peut-être me serais-je plus vite plongée dedans en commençant ma lecture par une autre des nouvelles...

     

     


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  • In My Mail Box - Janvier 2018

     

     

    Couverture Une vie

    Une Vie ; Simone Veil

    Editions Le Livre de Poche

    Date de parution : 2009

    Sujet : Autobiographie, Souvenirs, Mémoires, Shoah, Déportation, Seconde Guerre Mondiale, Politique

    * * * 

    Une Chanson pour Ada ; Barbara Mutch

    Editions Pocket

    Date de parution : 2015

    Sujet : Histoire, Afrique du Sud, Drame, Saga familiale

    * * * 

    Couverture L'espoir au coeur / Hope ou le secret des Harvey

    Hope ou le Secret des Harvey ; Lesley Pearse

    Editions Charleston 

    Date de parution : 2017

    Sujet : Histoire, Angleterre, Drame, XXème siècle, Secrets

    * * * 

    Couverture L'été avant la guerre

    L'Eté avant la Guerre ; Helen Simonson

    Editions 10/18, Collection Domaine Etranger

    Date de parution : 2017

    Sujet : Histoire, Première Guerre Mondiale, XXème siècle, Drame 

    * * * 

    Couverture La vie secrète de Violet Grant

    Les Sœurs Schuyler, tome 1, La Vie Secrète de Violet Grant ; Beatriz Williams

    Editions Pocket

    Date de parution : 2017

    Editions : Romance, Histoire, Saga familiale, XXème siècle

    * * * 

    Couverture Les Maîtres d'Ecosse, tome 3 : Avènement

    Les Maîtres d'Ecosse, tome 3, Avènement ; Robyn Young

    Editions Pocket

    Date de parution : 2017

    Sujet : Histoire, Fresque historique, Moyen Âge, Ecosse, Guerres de succession, Robert Bruce, XIVème siècle


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  • « Il n'y a pas de progrès en art, seulement des innovations techniques, des changements de point de vue, de si légères variations... »

    L'Obsession Vinci ; Sophie Chauveau

     

    Publié en 2009

    Editions Folio

    528 pages

    Troisième tome de la saga Le Siècle de Florence

    Résumé :

    Qui était vraiment Léonard de Vinci ? 
    On connaît l'inventeur virtuose, le scientifique précurseur...mais qu'en est-il de l'homme, des ressorts de sa créativité ? Des bas-fonds de Florence à la forteresse de Ludovic le More, des campagnes guerrières de Borgia à la cour de François Ier, Léonard veut tout connaître, tout essayer, tout explorer. 
    Sa ville, Florence, le boude. Rome le rejette. Venise se méfie de lui...Pourquoi ? Quelles relations eut-il avec ses pairs, Michel-Ange et Botticelli ? 
    Sophie Chauveau nous raconte la vie de Léonard de Vinci avec la rigueur et la puissance narrative qui ont fait le succès de La Passion Lippi et du Rêve Botticelli. Elle rend ainsi hommage aux artistes qui ont, il y'a cinq siècles, conquis leur liberté. « Le siècle de Florence » s'éteint avec le plus mystérieux d'entre eux. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    L'Obsession Vinci clôture la saga florentine de Sophie Chauveau, Le Siècle de Florence -tout simplement-, commencée avec La Passion Lippi, continuée avec Le Rêve Botticelli et terminé, donc, avec le personnage le plus riche, peut-être, le plus complet : Leonardo di ser Piero da Vinci, plus connu sous le nom de Léonard de Vinci, le plus génial des artistes florentins, le plus scientifique et surtout, le plus français -même s'il ne passe finalement que les trois dernières années de sa vie à Amboise. 
    Léonard de Vinci est un personnage particulièrement fascinant et qui avait bien sûr toute sa place dans ce triptyque sur le Quattrocento florentin. Après m'être émerveillée de la perfection des anges et des madones de Lippi, dont le modèle était une nonne qu'il enlèvera et qui sera la mère de ses enfants, Lucrezia Buti, avoir vibré avec Botticelli, le plus torturé, le plus à fleur de peau, le formidable auteur du Printemps et de La Naissance de Vénus, c'est donc avec de Vinci que Sophie Chauveau nous donne rendez-vous.
    Né en 1452, le futur grand Léonard est de petite naissance. Il est le fils d'un notaire, Piero da Vinci et d'une servante, Catarina. En un mot, c'est un bâtard. Tout jeune, il est vite remarqué par Verrocchio, sculpteur, peintre et orfèvre, qui en fait son élève. Homosexuel invétéré, le très beau Léonard se perd dans une vie dissolue avec ses compagnons. S'il y'a bien d'une chose dont on peu taxer les artistes florentins de l'époque, c'est bien d'anticonformisme. Que ce soient Lippi, moine lui-même qui se défroque pour épouser une religieuse ou bien les autres artistes qui s'adonnent à la sodomie, considérée comme un péché, parfois même puni de mort, une chose est sûre, c'est que la morale est le cadet de leurs soucis et que flotte sur la Florence de la fin du XVème siècle un parfum de licence et de corruption. Mais c'est aussi l'époque qui va nous donner le plus de talentueux artistes et des tableaux devenus emblématiques. Déçu par les Médicis, Léonoard décide de quitter leur cité. Il va s'installer à Milan, où il travaillera plusieurs années au service de Ludovico Sforza, surnommé le More. Ce sont ensuite Rome, Bologne, Venise qui l'accueillent, mais jamais tout à fait. Puis la France, qui sera sa dernière demeure, car à l'époque de Léonard, les rois français caressent le doux rêve d'établir leur puissance de l'autre côté des Alpes. L'utopie commence avec Charles VIII puis se poursuit avec Louis XII, fort de sa filiation avec les Visconti, supplantés à Milan par les Sforza et qui se verrait bien mettre la main sur le duché qui a autrefois vu naître sa grand-mère, Valentine Visconti. Son successeur, François Ier, marche dans ses pas, pour son malheur pourrait-on dire puisque la terrible défaite de Pavie sonne le glas des espérances françaises dans la péninsule. Mais, de ses voyages, le roi a ramené le goût de l'Italie, des influences qui se traduiront tout au long du XVIème siècle en France. Et surtout, il a proposé à Léonard de se mettre à son service. C'est donc en France, au bord de la Loire, à Amboise, que Léonard de Vinci passe ses dernières années, meurt -en 1519- et est inhumé. Il connaît alors une notoriété qui ne s'éteindra pas et perdure encore aujourd'hui. Pour nous, très souvent, le nom de Vinci est synonyme de génie.
    Et pourtant, de son vivant, comme pour beaucoup d'autres artistes dont il est le contemporain, rien n'est simple. Homosexuel invétéré, jouisseur, grandiloquent, gaucher -donc inverti, sur tous les plans-, Léonard est différent, trop peut-être pour être facilement compris. Sa carrière démarre doucement, il scandalise, il choque, se voit refuser les oeuvres qui avaient été commandées parce que non conventionnelles. Nomade, il ne connaît pas vraiment le succès jusqu'à devenir le protégé du roi de France, qui l'accueille et le loge, au château du Clos-Lucé, où Léonard va pouvoir, au cours des dernières années de sa vie, s'adonner pleinement à toutes ses passions.
    Car elles étaient nombreuses, ces passions. Autodidacte, Léonard va pousser la curiosité jusqu'au génie. Artiste, mais pas que, il se passionne pour la médecine -les dissections auxquelles il s'adonne lui permettent non seulement de bien connaître le corps humain et son fonctionnement mais aussi de le rendre, en peinture, le plus précisément possible-, pour les sciences en tous genres. Amateur de musique, il est aussi compositeur et poète. Philosophe. Mathématicien et j'en passe. Curieux de tout et jusqu'au bout, Léonard, en avance sur son temps -mais peut-être pas aussi visionnaire qu'on a pu cependant le penser à une époque-, est un grand homme, un grand scientifique, un grand artiste, un grand intellectuel qui essaie par tous les moyens de comprendre le monde dans lequel il vit, retranscrivant le théorique en pratique, sans cesse, tout le temps. Mais rien n'a été évident pour lui, comme pour la plupart des artistes du temps, dépendants des Grands ou de l'Eglise, parfois contraints à la misère faute de commandes ou condamnés pour leurs mœurs.

    L'Annonciation par Léonard de Vinci (1475-1480)

    Le roman de Sophie Chauveau nous emmène des années 1470 jusqu'en 1519, des rives de l'Arno, jusqu'à celles de la Loire -plus tard chantées par Joachim du Bellay. Léonard a alors une vingtaine d'années. Il peint déjà, il est entouré de toute une clique d'accolytes plus ou moins talentueux -parmi eux, même s'il arrive sur le tard, on citera le fameux Salaï, petit voyou milanais mais au visage d'ange qui le prêtera à plusieurs tableaux de Léonard et notamment son Jean-Baptiste. La plupart sont ses amants, ce qui révulse son père, qui peine à admettre sa bâtardise -même s'il en est responsable- et surtout, sa sexualité scandaleuse, qui ternit le nom de Vinci. Léonard est un beau jeune homme, courtisé, ayant du succès, aimant se perdre dans les lieux de plaisir. Les années se déroulent, la jeunesse, puis l'âge mûr et enfin, la vieillesse, passée loin de son pays natal. C'est elle la plus connue de nous, finalement. Lorsqu'on évoque aujourd'hui Léonard de Vinci, c'est l'image d'un sage vieillard, les cheveux blancs et la barbe longue, telle que représentée sur l'un de ses autoportraits, daté d'entre 1512 et 1515. Mais on oublie qu'il a été jeune, comme tout un chacun et que Léonard a été un homme beau, sensuel, dans la fleur de l'âge, désiré et désirable. Une force de la nature, qui plaît aux hommes comme aux femmes mais qui n'aime que ceux de son sexe.
    L'Obsession Vinci est d'ailleurs un roman extrêmement érotique et sensuel, dans lequel transparaît le désir, affleurant sur les pages. Sophie Chaveau dépeint son personnage comme un très bel homme, grand, les cheveux longs, les yeux sombres. Beau, en un mot, jeune et plein de vie. On en deviendrait presque un peu amoureux de lui, comme si le désir que sème Léonard sur son passage se communiquait au lecteur. Oublié, le vieillard aux allures de philosophe, Léonard est un être qui jouit, qui donne du plaisir et qui se perd dans son art. Car cette dimension très sexuelle de sa vie -le sexe, qu'il considère comme une nécessité, un vrai besoin vital- se communique vite à son art et à la manière dont il le perçoit. La passion qu'il peut éprouver pour un bel homme, il va la ressentir aussi pour un projet, une sculpture, une toile, une fresque, une nouvelle toquade. Léonard aime, beaucoup et très fort. Et il aime tout, il est curieux de tout. C'est un être extrêmement riche et complexe que l'auteure parvient à nous décrire avec le plus de précision possible.
    Au-delà de ce destin exceptionnel, ce que j'aime dans les romans de Sophie Chaveau, ce que j'aime infiniment pourrais-je même dire, c'est son style. Il est puissant et racé et s'il s'adaptait déjà parfaitement à la relation des destins de Lippi et Botticelli, il épouse totalement la grandiose destinée de Léonard, le fils de notaire devenu le génie universel. J'ai vraiment l'impression que l'auteure s'adapte totalement à son sujet, le vit, le ressent, le porte. C'est ce qui transparaît dans l'écriture, très vivante, en tous cas. Les phrases sont courtes, le récit est au présent : cela pourrait lui donner un rythme monocorde, un peu saccadé mais il n'en est rien, au contraire. J'ai pris énormément de plaisir à la lire, encore une fois. Son style, unique et vraiment plaisant fait beaucoup pour le roman, je crois.
    Petit bémol, note discordante dans ce concert de louanges : quelques approximations historiques, c'est dommage et cela a fait s'éloigner le coup de cœur, pour moi. Par exemple, lorsque Léonard arrive, au début des années 1480, à Milan, pour se mettre au service de Ludovico Sforza, le pape n'est pas encore Alexandre VI Borgia ; Charles VIII n'est pas mort en jouant à la paume mais en s'y rendant ; enfin Louis XII est mort le 1er janvier 1515 et non pas le neuf -c'est sa première épouse, Anne de Bretagne, qui est morte un 9 janvier.

    La Cène, peinte à fresque pour le réfectoire du couvent Santa Maria delle Grazie à Milan (1495-1498) : jusqu'au XIXème siècle, cette oeuvre, qui a depuis nécessité d'importants travaux de restauration, était considérée comme le chef-d'oeuvre de Léonard

    A part ça, je n'ai pas vraiment grand chose à reprocher au roman. Quelle est la part d'imaginaire, de vérité ? Je n'ai pas envie d'entrer dans ce jeu-là et de chercher. J'ai aimé ce que Sophie Chauveau a fait de Léonard et ça suffit, je crois. Le roman, très intime, faisant la part belle aux sentiments, est bien évidemment mâtiné d'imaginaire, sans que cela vienne pour autant entacher l'aspect plus historique du récit -car Léonard vit à une époque très riche où se croisent beaucoup de grandes figures : Laurent le Magnifique, Savonarole, des grands artistes, des papes...
    Le côté très psychologique de l'oeuvre m'a plu, comme il m'avait déjà plu dans La Passion Lippi et Le Rêve Botticelli. Si l'auteure s'était contentée de faire une banale relation du destin d'artiste de son sujet, sans creuser l'intime, le personnel, cela serait devenu une accumulation d’œuvres, d'événements, sans aucune saveur. Aborder le caractère un peu plus personnel du personnage principal, c'est lui rendre un peu de vie. Qui, aujourd'hui, même le meilleur des historiens, peut prétendre connaître à la perfection l'intellect et le moi intérieur de Léonard ou de tout autre personnage historique ? Peut-on considérer alors que Sophie Chauveau extrapole ? Je ne crois pas. Je me plais à penser que, même si l'époque ne connaissait pas aussi bien que nous les sentiments humains et leurs mécanismes, ils ont toujours été sensiblement les mêmes. Peut-être pas abordés de la même façon, mais les mêmes. Pour moi, l'homme du XXIème siècle raisonne et s'articule, intimement, de la même façon que l'homme de la Renaissance. Prêter à ce caractère universel à ces grands peintres, c'est les faire descendre un peu du piédestal que l'Histoire leur a créé. C'est les remettre à notre portée et les faire redevenir, le temps d'un livre, des humains, qui sont peut-être morts depuis longtemps mais ont vécu, mus par des désirs, des passions, des peines, des désillusions, des joies. Plus haut, j'ai évoqué la sensualité du roman et c'est vrai qu'elle est très présente, très perceptible. Sensualité et désir. Mais j'ai omis de parler aussi de l'émotion. Le roman est extrême en tout, comme Léonard et, notamment, dans les impressions qu'il suscite en nous, lecteurs. On en vient à désirer Léonard ou à pleurer pour lui. Personnellement, je suis passée par tout un panel d'émotions et de ressentis à la lecture de ce roman qui a le mérite d'être tout sauf linéaire.
    L'Obsession Vinci est un bon cru, un bon roman historique -ne perdons pas de vue cependant qu'il s'agit avant tout d'une fiction. Mon intérêt pour la saga n'a cessé de grandir à mesure que je la découvrais. J'ai même un réel coup de coeur pour Le Rêve Botticelli, lors de ma lecture en 2015. Un roman qui reste encore très présent à mon esprit, comme le restera L'Obsession Vinci. Le bouquet final est vraiment grandiose et ce roman clôture merveilleusement bien cette trilogie très artistique et masculine, où trois portraits d'hommes sont magnifiquement racontés par une plume de femme qui a su se mettre à leur place, mieux, leur redonner une voix, cinq cents plus tard.
    Je n'ai été déçue par aucune de ces biographies romancées consacrées aux grands artistes que j'aie pu lire depuis plusieurs années... Et ils sont nombreux les auteurs à s'être sentis inspirés par ces grandes destinées : Mathias Enard et Léonor de Récondo par Michel Ange, Dominique Fernandez par Le Caravage et enfin, Sophie Chauveau par la Renaissance florentine, entre ombres et lumières, toute en contraste et en clair-obscur dont Léonard, en perfecteur du fameux sfumato, est certainement le meilleur et le plus formidable des symboles.

    La fameuse Joconde, peinte entre 1503 et 1506, l'un des tableaux les plus mondialement connus

     

    En Bref :

    Les + : le style de l'auteure qui s'adapte très facilement à son sujet et l'épouse parfaitement ; le sujet en lui-même, pour son génie et sa richesse. 
    Les - : quelques approximations historiques, c'est dommage. 


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  • Colis reçu le : 5 février 2018

    Aujourd'hui, je vous présente un colis un peu atypique qui n'est pas vraiment un swap mais qui, dans le principe, peut s'en rapprocher un peu. La seule différence, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'échange...mais on reçoit un colis chaque mois et c'est toujours la surprise à chaque fois, un peu comme pour les swaps ! ! Donc j'ai décidé que je vous présenterai mes Thé Box dans la catégorie des Swaps puisqu'il faut bien les classer quelque part !

    Après une Box mexicaine et colorée en janvier, voici celle de février, qui allie Hiver et Saint-Valentin et surtout, nous amène...à la montagne ! Hâte de découvrir cette Box qui sent bon les épices, le génépi et la poudreuse bien fraîche. Chaussez vos skis, c'est parti...tout schuss... ! 

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    La Thé Box de février nous emmène donc dans les alpages enneigés...

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    La marque Teatower, que je connais déjà grâce à La Thé Box nous propose I love you, un mélange de thés chinois vert et blanc aux saveurs fruitées : mangue et ananas, avec un soupçon de pétales de roses. Belle romance nous est proposé par Collection T. une maison de thé française ; il s'agit d'un thé noir à la poire. Etant donné que c'est l'un de mes fruits préférés, j'ai hâte d'y goûter, en espérant retrouver la saveur si particulière de la poire. Mont-Blanc, proposé par Tea Tap, nouvelle découverte de La Thé Box, est un breuvage où s'entremêlent les saveurs du thé noir et du cacao. Original ! 

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    Yogi Tea est une marque que je connais et pratique depuis l'an dernier et que j'apprécie, malgré les saveurs particulières de ses thés et boissons ayurvédiques. Comme nous sommes en plein hiver, un petit coup de fouet pour les défenses immunitaires n'est pas de trop. Avec cette infusion à l'échinacée, à l'acérola et à l'orange, on est paré ! 

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    Quelques douceurs montagnardes : les fameux bonbons Ricola au caramel et un gâteau sec avec de jolis motifs, idéal pour accompagner un bon thé bien chaud. 

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    Le cache-mug (j'adore !) accompagne Organic Roobis Honeybush, un mélange de ces deux fameuses plantes qui ne poussent qu'en Afrique du Sud et nous proposent les mêmes vertus que le thé mais sans théine. Le honeybush tire son nom de ses petites fleurs jaunes utilisées en infusion et qui sentent le miel.

    La Thé Box, Février 2018 : Two Schuss !

    La maison française Les 2 marmottes (j'adore le design un peu rétro et qui nous emmène tout de suite à la montagne) nous propose quatre de ses créations. Tout schuss (le premier en haut, à gauche) est une infusion qui mêle le serpolet à la menthe poivrée, le genévrier et l'origan, pour une boisson hivernale réconfortante. A côté, cette préparation pour vin chaud qui allie écorces d'orange amère, cannelle, poivre et girofle peut être infusée dans un grand verre de vin rouge ou bien dans une tasse d'eau bien chaude. J'opterai pour la deuxième alternative mais je suis curieuse et j'ai hâte d'y goûter. Yéti Y es-tu ? est une infusion qui ressemble un peu à Tout schuss, avec des saveurs de menthe poivrée mais aussi de bleuet et de serpolet. Enfin, le thé Génépi reprend les saveurs de cette fameuse liqueur : un thé noir aux saveurs d'agrumes (écorces d'orange, bergamote et citron) sur lequel vient se poser une saveur de génépi. Original, il pique ma curiosité ! 


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  • « Quoi qu’il ait enduré, il demeurait un être humain et, pour la première fois depuis de longues semaines, il éprouva de la joie mêlée de tristesse. »

    Les Rohan Montauban, tome 1, L'Héritier des Pagans ; Anne-Laure Morata

    Publié en 2009

    Editions du Masque (collection Labyrinthes)

    285 pages

    Premier tome de la saga Les Rohan Montauban

    Résumé : 

    Automne 1629 : l’orage et la tempête se déchaînent sur les côtes bretonnes du pays Léon. Un splendide trois-mâts vient s'abîmer sur les rochers, attiré par les feux des pagans, ces naufrageurs de navires tant redoutés des marins. Les pilleurs d'épaves ont tôt fait d'emporter leur butin, laissant derrière eux un unique témoin d'à peine trois ans, recueilli par la femme de l'un d'entre eux. Quelques années plus tard, élevé en petit paysan breton, Gilles Le Bars, jeune homme insouciant, retrouve à la fête du village Gaël, son ami d'enfance. Au petit matin, au bord du lavoir, Gilles se réveille couvert de sang et, à son côté, gît le corps sans vie de Gaël. Qui veut éliminer Gilles Le Bars, jeune paysan sans histoire, au point de commettre un meurtre pour l'envoyer aux galères ? L'adversaire tapi au sein de la cour du jeune Louis XIV s'annonce redoutable... 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    C'est une trilogie que Anne-Laure Morata ouvre avec L'héritier des Pagans, trois livres qui peuvent cependant se lire indépendamment les uns des autres.
    Pour ma part, j'aime faire les choses dans l'ordre et je vais donc lire la trilogie dans son ordre chronologique. Entre la Fronde et les débuts du règne personnel de Louis XIV, l'auteure nous emmène donc en plein cœur du XVIIème siècle français, pour une saga pleine de rebondissements et d'aventures, qui porte le nom de l'une des plus grandes familles de la noblesse française : les Rohan. En effet, la trilogie est sobrement intitulée Les Rohan Montauban.
    De l'aventure, du rythme, de l'Histoire, une époque qui me plaît et m'a rappelé aussi Les Enquêtes de Louis Fronsac, par Jean d'Aillon... Sur le papier, ce premier tome des Rohan Montauban avait tout pour me plaire : outre Jean d'Aillon, c'était aussi Juliette Benzoni que ce roman me rappelait. Assurément, j'allais passer un bon moment. 
    Oui mais voilà... Voilà quoi ? C'est justement ça, le problème. C'est que c'est resté sur le papier et ne s'est pas concrétisé.
    L'Héritier des Pagans est donc ma première déception de l'année 2018, d'autant plus importante que j'avais repéré cette saga depuis un moment et que j'en attendais pas mal de choses.
    Mais je n'ai pas du tout été emballée par cette histoire d'enfant escamoté lors d'un naufrage et qui réapparaît vingt ans plus tard pour se venger.
    Justement, l'histoire, qu'en est-il ? Le roman s'ouvre en 1629 alors qu'une terrible tempête fait rage au large de la Bretagne. Sur la plage, un groupe de naufrageurs a attiré un bateau pour le piller et les rares rescapés sont tués, sauf un petit garçon qu'une paysanne prend en pitié et persuade son mari d'épargner. Vingt ans plus tard, le garçon, prénommé Gilles et élevé en Bretagne près de Yann et Marie, ses parents adoptifs, est accusé du meurtre de son meilleur ami Gaël. Commence alors pour Gilles une véritable quête qui l'amènera des chemins de France vers le bagne de Marseille, en passant par Lyon puis par Paris où il n'aura de cesse de découvrir qui il est et surtout pourquoi on lui en veut.
    Bon... Vous voyez, dis comme ça, c'est plutôt sympa -même si assez lambda, comme histoire finalement- et franchement c'est vrai que le résumé est vendeur et alléchant. Seulement le reste ne suit pas et j'ai été vraiment déçue par ce que l'auteure en a fait. Des dialogues qui sonnent faux, des personnages un peu caricaturaux que se soient dans leur description ou dans leurs comportements, des anglicismes qui m'ont fait me hérisser : le terme de zombie pour qualifier les bagnards ou le leadership du prince de Condé m'ont fait bondir de ma chaise ! Sérieusement ? ! Soyons clair, je ne suis pas réac et je n'ai rien contre certains anglicismes. On en utilise tous sans nous en rendre compte mais là, leur emploi m'a vraiment gênée d'autant plus que des termes en bon français étaient à fait utilisables. Le propos est, de toute façon dans sa globalité, trop moderne à mon goût. Qu'on écrive dans une langue du XXIème siècle, d'accord. Les auteurs ne vont pas s'amuser à écrire leurs livres dans la langue de l'époque : n'est pas Françoise Chandernagor qui veut. Mais un minimum est requis quand même, à commencer par le bannissement de termes trop modernes, qui ne collent pas au propos... 
    Quand à l'intrigue mi-aventureuse mi-policière qui emmène Gilles sur les traces de sa famille et du secret de sa naissance, je l'ai trouvée intéressante même si j'ai parfois levé les yeux au ciel devant la succession très rapprochée des péripéties et mésaventures qui arrivent au héros -un vrai poissard ce Gilles, ca ne peut pas être autrement quand on se rend compte qu'il lui arrive un pépin à peu près tous les deux mois !
    Dire que l'intrigue est sans intérêt est peut-être un peu fort...et ce n'est pas forcément vrai non plus, dans la mesure où elle a quand même des points positifs, à commencer par le contexte historique, plutôt bien raconté par l'auteure. J'ai peut-être été un peu gênée par la description légèrement négative de la Cour et notamment de Mazarin et Anne d'Autriche, dans la mesure où c'est une époque qui me plaît beaucoup et que j'ai appris à nuancer à force de lectures : non, Anne d'Autriche n'était pas qu'une pauvre malheureuse écervelée séduite par son ministre tandis que celui-ci ne cherchait qu'à s'enrichir avant la majorité de son filleul, Louis XIV. Mais dans l'ensemble, Anne-Laure Morata nous raconte la Fronde de façon simple et claire et c'est ce qui faut, pour comprendre un tel contexte, très complexe, avec des multitudes d'alliances, de retournements, de personnages. 

    Mais voilà, il y'a cette intrigue romanesque qui vient s'y greffer et qui m'a tout, sauf convaincue. Je n'ai pas du tout réussi à y entrer, je suis passée à côté et, à quelques exceptions près, je ne me suis jamais sentie ni surprise, ni captivée. Parfois, l'auteure a réussi à me faire m'étonner, mais c'était malheureusement trop peu fréquent ou trop tard. Le roman fait moins de trois cents pages, un avis mitigé dès le départ est donc peu facilement rattrapable. C'est dommage. J'aurais voulu m'attacher au personnage principal Gilles -qui prend un autre nom par la suite-, j'aurais voulu me sentir concernée par son histoire, j'aurais voulu m'y sentir intégrée mais ça n'a pas été le cas. 
    Je vais maintenant essayer de conjurer le mauvais sort avec les deux prochains tomes, en espérant que ceux-ci me plaisent bien plus

    En Bref :

    Les + : le contexte historique choisi et bien raconté par l'auteure.
    Les - : une intrigue trop faible, des personnages caricaturaux auxquels on ne parvient pas à s'attacher, des termes trop modernes qui n'ont rien à faire dans une intrigue historique et lui font perdre en crédibilité. Ce premier tome est bien trop bancal, à mon goût, pour que j'aie pu me sentir captivée de bout en bout. Dommage.

     

    Brooklyn ; Colm Tóibín

    Thème de février, « Jeune premier », 2/12


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