• Aujourd'hui, et ça fait un moment que ça n'était pas arrivé, je reviens par ici pour vous parler d'une série télévisée... Je ne suis ni cinéphile ni forcément fan de séries même si j'en regarde. Disons que je ne suis pas une consommatrice compulsive ni forcément très régulière... Mais il arrive parfois que je sois captée et c'est ce qui est arrivé avec cette série française que j'ai trouvée de qualité et découverte sur France 2 en décembre dernier. J'ai raté les deux premiers épisodes mais je compte bien me rattraper et voir toute la saison 2 lorsqu'elle sera diffusée !

    Série judiciaire créée par Emmanuelle Rey-Magnan et Pascal Fontanille pour France Télévisions

    Pays d'origine : France

    Première diffusion : 29 novembre 2017

     

     

    Distribution : 

    Catherine Marchal (Astrid Lartigues) ; Ophélia Kolb (Audrey Lartigues) ; Charlotte des Georges (Sofia Lorenzi) ; Clémentine Justine (Roxane) ; Lionel Erdogan (Paul) ; Samir Boitard (Eric Leroy) ; Joseph Malerba (Alexandre Rotivel) ; Moïse Santamaria (Mehdi Kechiouche) ; Guilaine Londez (Colette) ; Jacques Chambon (Jean-Jacques) ; Joanna Tixier (Amal) ; 

     

    Synopsis : 

    Astrid Lartigues et Sofia Lorenzi sont associées dans un cabinet d'avocats lyonnais spécialisé dans le droit de la famille. À leurs côtés travaille également Audrey Lartigues, la fille d'Astrid, également avocate et mère de deux enfants. On suit les trois avocates dans les cas qu'elles défendent mais aussi dans leur vie privée.

    Bande-Annonce :

    Mon Avis :  

    Voilà une série que je n'aurais certainement jamais remarquée. Il a fallu que je tombe dessus par hasard (il s'agissait alors des deuxième et troisième épisodes) pour que je me mette à regarder avec un intérêt grandissant. Je ne suis pas très séries, comme je le disais plus haut. La dernière qui m'a vraiment énormément plu, c'est Downton Abbey, en 2014, parce que la trame historique correspondait à ce que j'aime, notamment dans les livres. J'en ai regardé d'autres depuis, j'ai aimé Outlander, notamment, mais sans suivre forcément ces séries ou alors, en dilettante.
    Là, absolument rien pour me plaire au premier abord : une intrigue plus que contemporaine, un univers qui m'est totalement étranger. Je ne connais rien au métier d'avocat et je n'aurais pas pensé qu'une série traitant du quotidien d'un cabinet puisse me plaire et surtout, m'intéresser. Eh bien, si. Parce qu'il n'y a pas que ça, mais aussi le développement, assez fouillé, d'histoires humaines. Le monde du travail est une chose, mais il est un moment où il laisse place à la sphère privée et  à tout ce qu'elle comporte : on suit ainsi Audrey, jeune avocate investie mais aussi mère attentive et prévenante, qui jongle entre sa vie de famille en construction et un boulot qui lui plaît et la motive. On suit sa mère, Astrid, une femme d'âge mûr, qui a de l'expérience, dans sa vie privée comme professionnelle et qui en impose et enfin, Sofia, leur associée, qui a créé le cabinet avec Astrid et se situe finalement entre elles deux. Bonne avocate, elle flirte sans cesse avec l'interdit et la limite. J'ai aimé que la série ne se contente pas de suivre les différents personnages uniquement dans leurs faits et gestes professionnels. C'est intéressant aussi de les découvrir ensuite dans leur vie quotidienne et cela permet de soulever tout un tas de sujets et donne l'occasion de brosser un portrait de la société dans laquelle on vit qui est assez juste. Quand à l'aspect professionnel, l'oeil avisé d'avocats de métier a décelé quelques libertés prises avec la réalité mais on est ici dans une fiction et la plupart des téléspectateurs n'ont pas dû s'en rendre compte. J'ai aussi beaucoup aimé que la série ne se situe pas, une énième fois, à Paris ou dans sa proche banlieue. On reste dans un univers très urbain mais nous sommes à Lyon et j'ai trouvé ça très ça très sympathique de changer un peu de cadre. La fiction française a souvent tendance à nous montrer uniquement la capitale ce qui est un peu dommage dans la mesure où Paris n'est pas toute la France, loin s'en faut. 
    On va s'aimer, un peu, beaucoup... est une série vraiment originale, décalée et ambitieuse. Les acteurs sont tous très bons et la trame des épisodes toujours bien écrite et maîtrisée. Entre drame et humour, entre moments légers et pleins de fraîcheur et d'autres un peu plus graves, c'est une bonne série, assez complexe, avec beaucoup de sujets abordés, tous très différents et sans préjugé. Les avocats du droit à la famille sont confrontés à des dossiers émouvants à d'autres beaucoup plus drôles voire assez surréalistes tout au long de la saison. Les interactions entre les personnages sont toujours amenées avec beaucoup de subtilité. Bref, pour moi, cette toute nouvelle série est agréable et suffisamment intéressante pour que j'aie envie de rédiger cet article sur le blog. Elle va peut-être souffrir du fait d'être une série française et certains vont peut-être céder à l'a priori c'est français, donc c'est mauvais ce qui serait dommage parce que je pense que cette série est prometteuse. Une chose est sûre, je serai devant mon écran quand la saison 2 va être diffusée. 
     
     


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  • « Pour Louis XIII, l'historiographie française ou étrangère reste en retrait. Il est le mal aimé, l'inconsolé, le ténébreux chevalier dont le luth constellé, comme dirait le poète, porte " le soleil noir de la mélancolie." »

    Louis XIII ; Jean-Christian Petitfils

    Publié en 2008

    Editions Perrin 

    970 pages 

    Résumé :

    Au regard de l'Histoire, Louis XIII est un roi oublié. Éclipsé par le panache de son père Henri IV, occulté par l'éblouissante renommée de son fils Louis XIV, il laisse l'impression d'un monarque mélancolique, sans personnalité, fuyant son mal être dans la chasse, dominé par son Premier ministre, le tout-puissant cardinal de Richelieu. Erreur ! Ce n'est pas parce qu'il choisit un ministre d'une envergure exceptionnelle qu'il renonce pour autant à gouverner et à être pleinement roi. 

    Renversant les idées reçues, Jean-Christian Petitfils redonne ici toute sa place à ce souverain méconnu, à la personnalité déroutante, à la fois artiste, musicien, guerrier impétueux, extrêmement jaloux de son autorité, animé par la passion de la gloire et de la grandeur de la France. Sous son impulsion et celle du cardinal, le royaume se modernise. La monarchie dite absolue s'édifie. Son règne, traversé par une suite invraisemblable d'épreuves -lutte contre le parti protestant, conspirations des Grands, révoltes populaires, guerre contre la Maison d'Autriche-, prépare et annonce plus qu'on ne le croit celui de Louis XIV. 
    Sans négliger les faiblesses de l'homme, ses défauts, trop souvent exagérés, cet ouvrage se veut une réhabilitation. Celle d'un roi, d'un grand, d'un très grand roi. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    On ne peut pas dire que le deuxième roi de la dynastie des Bourbons jouisse d'une image très positive, même encore aujourd'hui. Il n'est pas affligé d'une légende noire comme peuvent l'être Louis XI ou Charles IX, par exemple. Mais lorsqu'on pense à lui, c'est immanquablement avec un peu de pitié en se disant, comme Marie-Antoinette à propos de Louis XVI : le pauvre homme.
    Impuissant à honorer sa femme, incapable de gérer les affaires de l'Etat qu'il laisse aux mains d'un ministre omnipotent, à tel point que certains historiens, même des plus réputés ont opéré un lent glissement jusqu'à qualifier l'époque du règne de Louis XIII à travers uniquement le ministériat de Richelieu, comme si ce dernier avait finalement été le vrai monarque. L'image que nous avons aujourd'hui de Louis XIII a été figée par les auteurs du XIXème siècle, historiens et romanciers qui en ont fait un homme faible et inapte à l'exercice du pouvoir, terne et dominé par un ministre perfide.
    Il est vrai que, dans la triade royale du Grand Siècle, Louis XIII n'a pas la place la plus simple. Son règne est coincé entre celui de son père, Henri IV, qui fut un très bon roi, un très bon administrateur et celui, flamboyant de son fils, le Roi-Soleil. D'un tempérament plus timide, plus secret, Louis XIII ne se distingue pas. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il n'a pas été un bon roi. En lisant cette biographie, je n'ai pu m'empêcher d'établir des parallèles entre lui et son descendant, Louis XVI... Tous deux sont accablés par les mêmes critiques : des rois faibles, incapables de gouverner, préférant à l'exercice du pouvoir des tâches peu ou pas du tout nobles -ils étaient tous deux passionnés par les travaux manuels, la serrurerie ou la menuiserie. Ils régnèrent aussi à des périodes pas faciles faites de troubles populaires et de conjonctures difficiles, notamment économiquement. Louis XIII put cependant s'appuyer sur un homme fort, Richelieu, qui n'en est pas pour autant tout puissant et qui n'était pas le roi effectif de la France. Louis XIII fut un bon roi et c'est ce que Jean-Christian Petitfils va s'employer à nous démontrer dans cette biographie.
    Conception du pouvoir, personnalité, sexualité, goûts personnels, mode de vie, tout y passe et l'historien nous remet les pendules à l'heure. Considéré aujourd'hui comme le biographe officiel de Louis XIII, Louis XVI ou encore Madame de Montespan, Jean-Christian Petitfils, historien spécialisé du Grand Siècle est une sommité ! On ne le présente plus et je sais que chacun de ses livres est une valeur sûre. Sa biographie du père du Roi-Soleil allait forcément en être une et, effectivement, elle ne déroge pas à la règle.
    Très dense et très documentée, cette biographie est foisonnante et brosse un portrait très large de l'époque. Chronique du règne, ce livre est aussi un portrait précis du personnage et de sa Cour. Il apparaît que le règne de Louis XIII est une vraie charnière entre la fin de la Renaissance et le siècle d'or du règne de Louis XIV. Transition et mutations en sont les maîtres mots. Le pays entre doucement dans une ère plus moderne, continuant les évolutions amorcées sous le règne d'Henri IV et préfigurant celles du grand règne de Louis XIV. Louis XIII fut le souverain d'un pays essentiellement rural mais très peuplé, épuisé par les Guerres de Religions encore proches et qui ne connaîtront d'ailleurs un point final que sous son règne grâce à la paix d'Alès.

    Louis XIII ; Jean-Christian Petitfils

     

    Détail d'un tableau de Philippe de Champaigne (XVIIème siècle)


    Pour sa défense, on peut dire que le fils d'Henri IV accéda au pouvoir à une période vraiment difficile, tant sur le plan intérieur que sur le plan extérieur : les conflits seront récurrents notamment du fait de la Guerre de Trente Ans qui prendra fin en 1648, les tensions franco-espagnoles sont récurrentes, malgré le mariage de Louis avec Anne d'Autriche...
    Louis XIII n'en fut pas pour autant un mauvais roi ni un mauvais homme. Voilà de quoi veut nous convaincre Jean-Christian Petitfils et il y arrive très bien. En abordant le règne dans sa globalité, sans ignorer ses défauts mais sans minimiser pour autant le positif, l'historien signe là plus qu'une biographie. C'est le portrait élargi de toute une époque et de tout un pays.
    Cette lecture est très dense et assez érudite : je ne dis pas ça pour me jeter des fleurs en pensant que je suis trop forte d'y être arrivée ! C'est la vérité, ce livre est extrêmement scientifique dans sa conception, sur lequel on peut s'appuyer sans problème pour une dissertation ou une thèse : une énorme bibliographie, des notes nombreuses et précises. Oui, on est là dans un vrai livre d'Histoire et on comprend pourquoi l'auteur est aujourd'hui considéré comme un chercheur de référence et est recommandé par les enseignants en fac.
    Si j'ai été moins intéressée par les chapitres traitant de guerres, de diplomatie et de géopolitique -mais ils sont des maux nécessaires si je puis dire-, j'ai été captivée par ceux plus sociétaux ou domestiques, traitant de l'état du royaume, du mode de vie des Français sous Louis XIII, des sciences, des arts qui, justement, connaissent une forte émulation à l'époque : description de l'héliocentrisme par exemple, développement des mathématiques et du classicisme dans les arts et les lettres. J'aime aussi les portraits intimes des souverains qui nous permettent d'entrer dans leur particulier. Ici on rencontre un homme secret mais infiniment intelligent et ayant une grande conscience de son rang et des responsabilités qui en découlent. Traumatisé par la mort brutale de son père bien-aimé, quand il avait neuf ans, Louis XIII cherchera toujours à être à la hauteur de sa charge, tout en gardant, un peu comme son descendant Louis XV, une blessure de cette perte enfantine.
    Très inhibé par son bégaiement, il s'appuya sur un ministre puissant et loyal, toujours conscient d'être l'affidé du roi. En réhabilitant Louis XIII, c'est aussi Richelieu que Petitfils défend pour la postérité.
    Bref vous l'aurez compris, on est là dans un excellent livre d'Histoire. Il est difficile voire impossible de dire si on aime ou pas. On n'est pas là dans un roman, où les sentiments du lecteur entrent en ligne de compte. Lorsqu'on s'attelle à une lecture comme celle-ci, on sait qu'elle va nous prendre du temps mais qu'on va en retirer énormément de connaissances, malgré quelques chapitres peut-être moins captivants ou très techniques.
    Le Louis XIII de Jean-Christian Petitfils est d'ores et déjà une biographie de référence

    En Bref :

    Les + : une plume chaleureuse alliée aux connaissances solides de l'historien, un sujet d'étude intéressant. En un mot, une biographie très complète et assez passionnante. 
    Les - : quelques passages un peu techniques, mais nécessaires malgré tout, comme dans toute biographie.

     

     


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    Coucou tout le monde !

    Je reviens aujourd'hui pour un nouvel article thématique, qui tournera autour des classiques. Genre littéraire que j'affectionne tout particulièrement, les classiques font partie intégrante de ma vie de lectrice et ce, depuis très longtemps. Je crois que je peux même dire que c'est grâce à eux que j'ai opéré une réelle transition entre les lectures jeunesse du collège, par exemple, à des lectures plus adultes. Je ne les ai plus jamais quittés, même si j'en lis beaucoup moins qu'avant, il est vrai. Ils ont quand même gardé une place spéciale.
    J'ai eu l'idée de cet article parce que cet été, cela fera dix ans (déjà !) que j'ai vraiment découvert Zola, grâce à son roman L'Assommoir, dont mon prof d'Histoire de l'époque nous avait parlé. J'ai lu ce roman et j'ai eu une révélation. Je n'ai plus jamais délaissé Zola et j'ai découvert, de là, d'autres romans et d'autres auteurs.
    Un petit tour d'horizon de ces classiques qui m'ont marquée...

     

    Les douze classiques qui ont marqué ma vie de lectrice

    Madame Bovary, Gustave Flaubert (1857)

    Madame Bovary fait partie de ces rares lectures scolaires que j'ai aimées. Il y'en a peu et ce roman se distingue tout particulièrement. Je ne peux pas expliquer ce qui m'a plu, ce qui m'a parlé mais je l'ai relu par la suite : deux fois, et j'ai ressenti la même chose. La qualité littéraire est là, bien sûr, mais il y'a autre chose. 

    Tout le monde connaît l'histoire d'Emma Bovary, qui inspire encore, notamment le cinéma. Jeune normande naïve, la tête farcie des romans d'amour qu'elle lit en permanence, elle ne cessera de chercher dans sa propre vie ce romanesque qu'elle aime tant et qu'elle ne trouvera jamais, ce qui est son drame d'ailleurs. Elle va connaître une véritable descente aux enfers, jusqu'à l'irréparable. Le destin d'Emma Bovary a quelque chose de tragique et irrémédiable, qui m'a toujours plu et effrayée, quelque part.

     

    L'Assommoir, Emile Zola (1877)


    Si j'avais su, à l'été 2008, quand j'ai acheté ce livre par hasard, que j'allais tomber amoureuse d'un auteur, d'une plume, d'un univers ! Parfois, un coup de coeur, ça tient à peu de choses. Je suis certainement l'une des rares à avoir aimé L'Assommoir...Dites-moi que je ne suis pas la seule, s'il vous plaît ! L'histoire, terrible, de Gervaise, m'avait horrifiée, parce que ce XIXème siècle miséreux et violent que décrit Zola n'est finalement pas si éloignée de nous que cela. Le roman est dur, terrifiant mais tellement dense. Une vraie claque.
    Je ne l'ai jamais relu. Cela va faire dix ans et pourtant, j'en garde un souvenir énormément précis, alors que certaines lectures plus récentes ne m'ont pas autant marquée. Cette lecture m'a donné envie de découvrir les autres romans des Rougon-Macquart, ce que j'ai fait. Je les ai lus entre 2008 et 2009...Et maintenant, je les relis. Non seulement ils me rendent nostalgique parce qu'ils me rappellent des souvenirs, mais ce sont aussi des livres tellement plaisants : un thé, un plaid, un feu de cheminée, un Zola...Pour moi, c'est un monde parfait.

     

    La Faute de l'Abbé Mouret, Emile Zola (1875)


    Voilà certainement, sur les vingt romans qui composent la saga Les Rougon-Macquart, celui qui m'a le plus touchée, qui a fait le plus écho en moi. Pastiche de l'Eden ou de Roméo et Juliette, au choix, La Faute de l'Abbé Mouret m'avait émerveillée et fait vibrer. L'histoire d'amour, bien que tragique, qui est au centre du récit, est certainement l'une des plus belles de la littérature française. Je ne me suis jamais autant attachée à un duo : j'ai une affection toute particulière pour Serge, jeune abbé torturé par un amour instinctif qu'il voue à la Vierge Marie et par sa conscience religieuse et pour Albine, la jeune sauvageonne qui vit comme dans un jardin d'éden immaculé, au sein du domaine du Paradou. Comme pour L'Assommoir, je garde de ce roman un souvenir extrêmement fort et que je retrouve chaque fois que je le relis. Je crois que je l'ai relu déjà trois fois. Et je le relirai très certainement, dans un avenir plus ou moins proche.

     

     Les Misérables, Victor Hugo (1862)


    Une autre émotion d'été... L'été 2007, cette fois. J'étais encore au lycée, j'aimais lire, mais beaucoup moins qu'aujourd'hui. Je crois que j'avais à l'époque perdu énormément de plaisir à la lecture parce que je me consacrais surtout à des lectures imposées et ça n'a franchement pas la même charme. Je n'ai jamais lu Les Misérables au collège ou au lycée et je remercie mes professeurs de n'en avoir jamais eu l'idée ! J'ai ainsi pu découvrir ses romans toute seule, quand j'en ai eu envie. Et ce fut une véritable révélation. J'ai lu les quatre tomes en un mois. Cette histoire est magistrale, tant sur le fond que sur la forme : une somme de personnages extraordinaires, qu'on ne présente plus et qui est aboutie et ciselée juste ce qu'il faut, un contexte qui, pour nous, est historique et nous apparaît dans toute sa grandeur, sa violence et sa beauté. J'avoue m'être un peu ennuyée au début du deuxième tome : cents pages pour décrire la bataille de Waterloo, c'est un peu long, quand même...mais une vague impulsion m'a toujours poussée à aller plus loin et j'ai bien fait. En plus, je crois que je suis un peu tombée amoureuse de Marius, au cours de ma lecture ! En général, quand on me demande quels sont mes classiques préférés, Les Misérables me viennent tout de suite en tête. Ils ne font pas naître la même émotion chez moi que les Zola, donc en général, je les classe ex-aequo, mais il est vrai que cette saga est magistrale. 

     

    Germinal, Emile Zola (1885)

     

    Impossible de ne pas citer ce roman. Celui-là, je l'ai découvert en Seconde, mais d'abord en version abrégée. Ca m'avait plu mais très vite, j'ai eu envie de lire le roman intégral. Et quelle claque ! Zola est magistral dès qu'il s'agit de décrire la société de son époque : il n'est pas naturaliste pour rien. Et je crois qu'il est particulièrement doué pour décrire les plus déshérités, les ouvriers, les paysans...Ici, au travers des yeux d'Etienne Lantier, l'un des fils de Gervaise, c'est le monde terrible des mines de charbon qui est décrit au lecteur. Ce roman industriel, dans lequel est abordé la lutte des classes mais aussi beaucoup d'autres sujets, est pour moi l'un des meilleurs de notre littérature et il est à lire, ne serait-ce que pour se rappeler ces mineurs de fond qui souvent ont laissé leur vie dans les galeries souterraines et ont permis à l'industrialisation de perdurer et de se développer. 

     La Terre, Emile Zola (1887)


    Quelle appréhension j'avais en démarrant cette lecture. J'avais cherché des infos dessus un peu avant et je savais que cette lecture serait extrêmement violente : la vie des paysans à l'époque, avant la mécanisation, était encore extrêmement difficile. Mais c'est aussi toute la violence d'une communauté, fruste, sans éducation, mal dégrossie, en somme. Zola ne fait pas dans le bon sentiment et on le lyncherait aujourd'hui pour avoir décrit de cette manière le monde de la terre ! Et pourtant... ce qu'il décrit n'était peut-être pas si éloigné de certains villages isolés. A travers le personnage de Jean Macquart, frère de Gervaise et qu'on retrouvera ensuite dans La Débâcle, c'est une paysannerie presque barbare que décrit l'auteur, avec peut-être un peu d'exagération parfois mais sans aucune concession.

     

     La Reine Margot, Alexandre Dumas (1845)


    Mon premier Dumas, qui m'a fait découvrir le souffle, la verve, l'énergie du style de l'auteur ! On ne présente pas la reine Margot, fille d'Henri II et Catherine de Médicis, présentée ici comme une princesse sulfureuse collectionnant les amants et ayant même, peut-être, des relations dégénérées avec ses propres frères. Dumas a participé à véhiculer des idées fausses sur bien de nos personnages historiques. Et pourtant... lire Dumas, c'est tellement...extraordinaire ! Ce qu'il écrit ne vaut rien historiquement parlant mais... alors ! Quel souffle et quelle qualité ! Je n'ai jusqu'ici, jamais été déçue !

     

     Salammbô, Gustave Flaubert (1862)


    Voilà un classique très particulier et dont je garde encore un excellent souvenir (même si je serais, là maintenant tout de suite, incapable de me souvenir en quelle année je l'ai lu). Flaubert nous décrit un monde onirique, celui de la princesse carthaginoise Salammbô. Le roman prend corps dans une Antiquité un peu imaginaire et sublimée mais qui a su me séduire. J'ai eu l'impression de lire un conte des milles et une nuits, plein de rêve. 

     

     Jane Eyre, Charlotte Brontë (1847)


    Jane Eyre fut une révélation à retardement. Il m'a fallu énormément de temps pour me plonger dans ce livre. Le début, je me souviens, m'avait mise extrêmement mal à l'aise. J'ai démarré ce livre un matin, avant d'aller en cours. J'étais en fac alors et je reprenais petit à petit un vrai rythme de lecture, avec des livres qui me donnaient vraiment envie et qui n'étaient pas des lectures obligatoires. L'histoire, puissante, de Jane Eyre, m'a beaucoup plu mais elle m'avait tourné dans la tête toute la journée après avoir en avoir lu ces premiers chapitres qui m'avaient si perturbée ! Charlotte Brontë est la première des soeurs que j'ai lues et son univers ainsi que sa plume m'avaient parlé. L'histoire de Jane et de Mr. Rochester est sublime et tellement forte ! Une très bon souvenir.

     

    Une Vie, Guy de Maupassant (1883)


    Avec Maupassant, au départ, ça n'a pas passé. J'avais dû lire Le Horla pour les cours, au collège et j'avais laissé tomber cette lecture, qui m'avait fait peur et ne m'avait absolument pas parlé, faute certainement d'explications. Je n'ai lu Une Vie que bien plus tard. C'était en 2013. Je savais qu'on était loin du fantastique du Horla, loin de cet univers un peu torturé qui m'avait effrayée. Avec Une Vie, on revenait à ces classiques réalistes qui me plaisent beaucoup et, effectivement : j'ai été très agréablement surprise et j'ai fait une très belle découverte, même si l'intrigue n'est pas évidente, avec ce couple qui se délite lentement, entraînant dans son sillage les inévitables ressentiments, humiliations et désillusions.

     

    Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas (1844 - 1846) 


    Avec Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas expérimente un genre vraiment particulier. Il délaisse l'historique pour nous livrer un roman étrange, qui serait presque un conte oriental et surtout, une lente et machiavélique variation sur la vengeance. Son talent ne se dément pas ceci dit et c'est avec beaucoup de curiosité et de plaisir que je me suis lancée, moi aussi, à la suite d'Edmond Dantès, entre les salons parisiens, les belles maisons bourgeoises où il se passe souvent les choses les plus laides, les cellules du château d'If et les merveilles de l'île de Monte-Cristo, en pleine Méditerrannée.

     

     Les Liaisons Dangereuses, Pierre Choderlos de Laclos (1780)


    L'amoureuse du XVIIIème siècle que je suis ne pouvait pas ne pas parler de ce roman. Découvert au lycée, le célèbre roman de Laclos m'avait laissée de marbre. Je l'ai relu l'an dernier, avec dix ans de plus, une expérience de lectrice plus importante. Et je me suis délectée de bout en bout, parce que ce roman représente si bien et à lui seul ce que fut le XVIIIème siècle, tout en contrastes et en paradoxes. Qui ne connaît pas la perfide Merteuil, le non moins roué Valmont, la naïve Volanges, la prude Tourvel, l'amoureux Danceny ? Si cette lecture a été très laborieuse la première fois et m'avait laissée relativement indifférente la première fois, j'en ai bien mieux pris la mesure la deuxième fois et cela, pour mon plus grand plaisir, découvrant non seulement un auteur mais aussi un style comme on n'en fait plus. 

     

     


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  • « Pour chaque jour qui passait, elle aurait eu besoin d'un jour supplémentaire afin de l'assimiler. »

    Brooklyn ; Colm Tóibín

     

    Publié en 2009 au Royaume-Uni et en Irlande ; en 2012 en France (pour la présente édition)

    Titre original : Brooklyn

    Editions 10/18 (collection Domaine Etranger)

    332 pages 

    Résumé :

    Années 1950. New York, terre d'exil et nouvelle Terre promise, s'étend à l'horizon. Alors qu'elle quitte l'Irlande pour travailler à Brooklyn, la jeune Eilis se perd dans cette ville anonyme. Mais bientôt un drame la rappelle dans son pays natal. Déchirée entre deux mondes, entre l'enfance et l'avenir, quels choix fera-t-elle pour tracer sa voie ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Brooklyn fait partie de ces romans que j'ai découverts grâce aux avis des autres lecteurs. Et puis il se trouve que le résumé m'a plu et que, avec ou sans la publicité que j'aie pu voir ici ou là, sur Instagram, Livraddict ou les blogs, j'aurais sûrement ajouté ce livre à ma PAL quoi qu'il arrive car dans le résumé se trouvait tout ce qui me plaît : les années 50, le portrait d'une jeune femme courageuse, entre Irlande et États-Unis.
    Le roman s'ouvre à Enniscorthy en Irlande -qui est aussi la ville de l'auteur, Colm Tóibín- dans les années 50, donc. Eilis Lacey, notre héroïne, habite là avec sa mère et sa sœur Rose. Elle poursuit des études de comptabilité tandis que sa sœur fait vivre la maison. Orphelines de père, les deux jeunes femmes ont trois frères, qui sont partis chercher un avenir meilleur en Angleterre.
    Aucun avenir n'étant possible en Irlande, Eilis part en Amérique sur les conseils de sa mère et de sa sœur. Là-bas, la jeune femme peut entrevoir un destin radicalement différent de ce qu'elle aurait pu espérer en Irlande. A Brooklyn où elle a trouvé un travail et un logement, dans une pension de famille tenue par une Irlandaise, Eilis construit petit à petit sa vie, jusqu'à ce qu'un drame la rappelle dans son pays. Alors elle se trouve écartelée entre les souvenirs, l'environnement, familier, qui a été le sien depuis toujours et son avenir à Brooklyn, où elle a commencé à se tisser un univers stable.
    Brooklyn est un roman relativement court, dans lequel l'auteur ne perd pas de temps. J'ai regretté que le début soit si abrupt : j'ai eu l'impression d'être jetée dans l'histoire sans préparation, comme si j'avais plongé à un endroit où je n'avais pas pied. Ça surprend un peu au départ et il faut un petit temps d'adaptation : c'est ce que j'ai ressenti à la lecture des premières pages de Brooklyn. J'aime quand les auteurs nous préparent un peu, nous donnent des informations sur les personnages que l'on va suivre. Ce début assez brutal m'a fait craindre le pire : au final, le reste du roman est intéressant même si, encore une fois, l'auteur ne se perd ni en détails ni en développements superflus ce qui, par certains aspects, peut s'avérer parfois bénéfique.
    Au final c'est surtout des informations sur Eilis qui m'ont manqué : à part le fait qu'elle vit à Enniscorthy avec sa mère, sa soeur Rose, que son père est décédé quelques années plus tôt et que ses trois frères ont quitté l'Irlande pour trouver un emploi en Angleterre, on ne sait rien. Vous me direz que c'est déjà pas mal mais par exemple, à aucun moment l'âge de la jeune femme n'est mentionné... Sa sœur Rose ayant trente ans et ses trois frères ayant déjà quitté la maison depuis un moment, j'en ai déduit que Eilis devait être la benjamine de la fratrie... Je lui ai donné une petite dizaine d'années de moins que sa soeur : pour moi Eilis a environ vingt ans. J'aurais aimé cependant que son age soit mentionné de façon précise, parfois cela permet de mieux comprendre les personnages et leurs réactions.
    Justement, parlons-en, d'Eilis. Pour ma part, je l'ai beaucoup aimée. Je sais que certains lecteurs ont eu un ressenti plus mitigé la concernant. Pour moi, cette jeune femme est une battante et je n'ai pas eu l'impression, comme certains lecteurs, qu'elle marchait à côté de sa vie, au contraire. Qu'elle subisse parfois, oui. Qu'elle soit indécise, aussi. Mais qui ne l'a jamais été et qui ne le serait pas dans la même situation ? Le départ en Amérique, s'il est envisagé par Rose, plus âgée, peut-être plus mâture et responsable, ne l'est d'abord pas par Eilis : on lui force la main. J'ai eu l'impression que la jeune femme se débattait souvent entre soumission et sens du devoir, ce qui, finalement, ne devrait pas nous surprendre quand on sait à quelle époque se passe le récit : les années 50 sont encore conservatrices et traditionalistes et les femmes n'y ont pas une place de choix. On se plie à des obligations, on s'y conforme et c'est ainsi.

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    L'actrice Saoirse Ronan tient le rôle d'Eilis dans l'adaptation du livre par John Crowley (2016)


    A part ça, j'ai beaucoup aimé découvrir le New York des années 50 au travers des yeux d'Eilis, jeune femme qui n'a jamais quitté son pays natal. Les États-Unis ont toujours été une terre d'élection pour l'émigration irlandaise et, là-bas, Eilis va retrouver une communauté soudée autour de traditions et d'une langue commune mais elle va aussi approcher un mode de vie totalement différent de ce qu'elle avait connu jusque là. Pour moi, la découverte de sa nouvelle vie par Eilis est une vraie conquête ! Bien qu'intégrée à une communauté irlandaise, l'expérience des États-Unis est quelque chose d'extrêmement bouleversant pour la jeune femme, on comprend que sa vie après ça ne sera plus jamais la même. Eilis se métamorphose et devient adulte, plus sérieuse et plus mâture. Je n'ai pas ressenti son courage dans une détermination à toute épreuve, une rage de vaincre comme on peut en voir chez d'autres héros de roman. Certains lecteurs ont soulevé la passivité d'Eilis : quelque part, ils n'ont peut-être pas tort... Le départ en Amérique n'est pas de son fait, au début. Quant à son retour, après qu'elle soit revenue passer quelques semaines en Irlande, on comprend qu'il n'est pas motivé non plus par l'envie mais plus par le devoir ou le sacrifice. Pourtant, Eilis a toute mon admiration : partir alors qu'on ne l'a pas voulu, faire preuve d'abnégation au risque de mettre son propre bonheur sur la sellette... Je me suis sentie frustrée pour elle parce que j'aurais peut-être voulu prendre qu'elle prenne d'autres décisions. Mais cela n'enlève en rien à l'héroïne ses qualités. Pour moi, elle en a beaucoup.
    Brooklyn est un roman relativement court, donc mais il est très fluide et c'est le genre de roman dans lequel vous ne devez pas avoir peur de vous lancer. Je n'ai pas vu les pages défiler. Personnellement, je n'ai pas ressenti de longueurs : au contraire, je trouve que l'auteur aurait peut-être plus expliciter un peu plus certains passages, notamment le début. J'aurais aimé en savoir plus sur Eilis, qui, si je l'ai aimée ne m'en reste pas moins assez étrangère dans la mesure où je ne sais pas grand chose d'elle. J'ai parfois déploré des passages un peu saccadés qui me rappelaient un peu une rédaction : beaucoup de puis et de soudain qui n'allègent pas du tout le style, même si dans l'ensemble je l'ai trouvé assez juste, précis et tout à fait plaisant à lire.
    Quant à la fin eh bien... Je ne m'y attendais pas du tout mais j'ai ressenti une vraie émotion ! Je ne pleure pas souvent en lisant un livre... Et là, je crois que les mots m'ont touchée et j'ai versé ma petite larme. Mais, encore une fois, comme au début, c'est très brutal. J'ai eu l'impression que la fin de Brooklyn était comme un tremplin... Je suis persuadée qu'une suite ne serait pas superflue ! Je l'ai lu à plusieurs reprises, sur des blogs et je comprends effectivement pourquoi énormément de lectrices ont pensé cela parce que je le pense aussi...Les dernières pages du roman appellent une suite. A part ça, j'ai malgré tout passé un bon moment. J'ai été touchée par Eilis et j'ai trouvé son histoire plutôt jolie. Eilis Lacey personnifie à elle seule tous ces Irlandais qui sont partis, dès le XIXème siècle, pour émigrer aux États-Unis dans l'espoir d'une vie meilleure, qui ont quitté leur terre pour souvent ne jamais y revenir mais sans pour autant en oublier leurs racines.
    En démarrant ce roman, j'avoue que ma curiosité était un peu tempérée par les avis mitigés que j'avais pu lire ici ou là. Cette petite appréhension a été renforcée par le début un peu trop rapide à mon goût. Il a juste fallu que je rentre dans l'histoire et alors, j'ai passé un très bon moment. Brooklyn a été une bonne et belle surprise

     

    En Bref :

    Les + : un roman touchant, servi par une plume simple mais efficace, une héroïne émouvante mais qui force en même temps le respect. 
    Les - : un début et une fin un peu abrupts, un manque de repères spatio-temporels. 

     



    Bande-annonce du film (John Crowley, 2016)
     
     

    Brooklyn ; Colm Tóibín

    Thème de janvier, « Silence, ça tourne », 1/12


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  • « D'après mon expérience, nous sommes trop versés dans l'art de draper les actes les plus vénaux d'une intention vertueuse. »

    Francesca, Empoisonneuse à la Cour des Borgia, tome 2, La Trahison des Borgia ; Sara Poole

     

    Publié en 2011 aux Etats-Unis ; en 2014 en France (pour la présente édition) 

    Titre original : Poisoner Mysteries, book 2, The Borgia Betrayal

    Editions Pocket

    505 pages

    Deuxième tome de la saga Francesca

    Résumé :

    1493. Voilà un an que les Borgia règnent sur la chrétienté, depuis que Rodrigo est devenu le pape Alexandre VI. Et si les talents d'empoisonneuse de Francesca ont grandement contribué à son ascension, sa science est désormais le seul rempart contre tous ceux qui veulent attenter à la vie du pape. 
    Car de ses cryptes cachées à ses rues écrasées de soleil, Rome abrite autant de traîtres que de fanatiques. Et Francesca va devoir affronter ses propres démons pour déjouer un complot visant à détruire les Borgia, à prendre le contrôle de la chrétienté et à plonger pour toujours dans le monde des ténèbres. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★ 

    Mon Avis :

    Quel plaisir de retrouver Francesca dans ce deuxième volume ! J'avais beaucoup aimé le premier : son intrigue, son contexte et surtout, son héroïne, atypique mais tellement intéressante et charismatique.
    En 1493, Rodrigo Borgia est pape depuis quelques mois, sous le nom d'Alexandre VI et le moins qu'on puisse dire, c'est que son pontificat ne démarre pas sous les meilleurs auspices. Sur fond de découverte d'un nouveau monde, Alexandre VI doit faire face aux appétits et ambitions des grandes familles italiennes, tandis que les Rois Catholiques en Espagne sont tapis dans l'ombre en attendant leur heure. A Rome, l'empoisonneuse de la famille, Francesca Giordano a fort à faire pour protéger le pape et les siens, notamment ses enfants illégitimes, à commencer par la petite Lucrezia, qui s'apprête à épouser le seigneur de Pesaro. Quant au pape, malgré sa position, il n'est pas à l'abri de tentatives d'homicide répétées que la jeune femme doit contrer tant bien que mal. Et à une époque où on manie les poisons et autres poudres aussi facilement que nous, nos Smartphones, il est sûr qu'un pape aussi sulfureux que Borgia est une cible toute trouvée pour les empoisonneurs et autres ennherbeurs de tout poil !
    Cinq cents plus tard, les Borgia fascinent toujours et je trouve ça tellement fou ! Comment cette famille, non seulement a pu se hisser à la fonction suprême à l’époque, le pontificat, mais aussi s'insinuer, un peu comme les Médicis, au sein des plus grandes familles ? Et tout ça en se traînant une légende noire des plus indélébiles... Qui n'a jamais entendu parler des hypothétiques relations incestueuses entre Lucrèce Borgia et son frère César voire avec son propre père ? Qui n'a jamais entendu dire qu'ils savaient manier mieux que personnes poudres et poisons et notamment la fameuse cantarelle ?
    Et si les Borgia c'était aussi bien plus que ça ? Aujourd'hui, on s'accorde à les considérer ni plus ni moins que les autres grands de l'époque, les Sforza, les Médicis, les d'Este et j'en passe. D'origine espagnole, la famille Borgia donnera plusieurs princes de l'Église et notamment deux papes. Corrompus, ils l'ont sûrement été, riches et peu respectueux des préceptes de l'Église, certainement aussi. Mais ils sont aussi inscrits complètement dans une époque d'émulation artistique et culturelle, en plein humanisme naissant. Cultivés et mécènes, les Borgia devinrent en l'espace de quelques décennies une grande famille de la péninsule italienne. Alexandre VI, s'il fut un pape atypique religieusement parlant, a certainement été, malgré quelques faux pas, un bon politique car il ne faut pas oublier que le pape à l'époque était un chef d'Etat à part entière, qui avait toute sa place dans la diplomatie européenne, au-dela du fait qu'il soit le chef de la Chrétienté.
    Francesca est un personnage très atypique et qui a su tout de suite me séduire, par son charisme d'une part mais aussi de part sa différence. La jeune femme, par fidélité filiale à son père, a repris le flambeau : seulement ce n'était pas n'importe quelle activité que son père exerçait avant sa mort, mais bien celle d'empoisonneur officiel du cardinal Rodrigo Borgia. Un métier à haut risque on s'en doute mais qui place de facto celui qui l'exerce au ban de la société. Un peu comme un bourreau, en fait : indispensable mais relégué malgré tout aux marges de la société. Il est alors très difficile voire impossible de prétendre à une vie normale, un mariage, des enfants ou autres, à plus forte raison quand on est une femme.
    Au départ, je me suis qu'en cette fin de XVème siècle, Francesca était un peu un précurseur, ces femmes qui, à une époque où ce n'était pas la norme, choisissaient de vivre libres, indépendantes. Et puis petit à petit, j'ai compris que la jeune femme n'était finalement pas si libre que ça, dans la mesure où elle la subit, cette liberté, qui est d'ailleurs bien plus un fardeau pour elle qu'autre chose. Certes, à une époque où cela ne se faisait pas, Francesca choisit de vivre célibataire, s'offrant quelques moments charnels avec le fils du pape. Et elle exerce un métier à part entière. Mais sans avoir rien choisi pour autant. Au final, Francesca n'est pas plus libre que la petite Lucrezia, aimée de son père mais tout de même considéré comme un pion sur l'échiquier diplomatique.
    Quant au métier exercé par les Giordano, père et fille, parlons-en : à ce jour, sans être une experte pour autant, j'ai pas mal lu sur les Borgia et rien ne me permet de croire que ce métier a bien existé. Mais, quand on y pense, il est pertinent et cohérent à une époque où le poison est
    une arme comme les autres et où, faiblesse de la médecine oblige, on est relativement peu préparé à le contrer. Le poison faisait peur et que les grands de ce monde se soient entourées de personnes connaissant bien l'usage des poisons et des plantes...Pourquoi pas ? Catherine de Médicis en son temps, aura bien ses fameux parfumeurs...
    Vous l'aurez compris, Francesca est donc un personnage complètement fictif mais inséré dans un contexte authentique. Cela donne une bonne fiction historique, comme je les aime, avec un contexte historique bien relaté et de petites histoires imaginaires qui viennent s'y ajouter, comme à une trame. Ainsi, sur fond de Grandes découvertes et de guerre larvée entre les puissances européennes qui retrouvent toutes un certain équilibre après les troubles des décennies voire des siècles précédents, on découvre une Francesca de plus en plus enchaînée à sa vengeance qui devient une idée fixe. On la découvre de plus en plus instable et de plus en plus menacée, incapable de mener une vie normale. Relativement normale, dirions-nous.
    Ce deuxième tome était un peu lent à démarrer et peut-être un peu confus au départ. J'ai eu l'impression que l'intrigue se mettait en place difficilement mais, une fois que c'était parti, c'était parfait. Sara Poole signe encore une fois un roman très abouti. Assez poisseuse, l'intrigue nous enveloppe comme un brouillard. J'ai trouvé ce premier tome à la hauteur du premier : l'intrigue, les personnages, l'ambiance de la saga se peaufinent et deviennent ainsi de plus en plus ciselés. J'apprécie aussi que Sara Poole, suivant ainsi l'historiographie actuelle qui, sans dénier totalement la sulfureuse réputation des Borgia, la tempère et la minore, mettant aussi en avant leurs qualités : génie militaire et politique pour César, sens politique tout aussi satisfaisant chez le pape Alexandre VI. Effectivement, ils entretinrent des maîtresses, ils eurent des bâtards, pratiquèrent allègrement le meurtre, la simonie, le népotisme, mais ni plus ni moins que les autres grandes familles de l'époque et c'est ça qui est agréable. Découvrir des personnages débarrassés des traits les plus grossiers de leur légende noire, comme l'inceste odieux entre César et sa sœur Lucrèce ou bien encore entre la jeune fille et son père. De tous les Borgia, c'est d'ailleurs peut-être la fille unique du pape qui bénéficie de la meilleure presse, actuellement : Lucrèce, comme les princesses européennes de cette fin de XVème siècle, comme les filles des grandes familles italiennes, n'était rien qu'un pion, un jouet entre les mains ambitieuses des siens. On est loin du stupre et de la réputation de luxure que lui feront les auteurs du XIXème siècle et elle est d'ailleurs présentée par Sara Poole comme une adolescente douce et gentille, lucide mais qui parvient à rêver encore un peu. Comme Francesca, qui est nuancée à l'extrême, faisant d'elle un être ambivalent où combattent le Bien et le Mal, tous les membres de la famille Borgia sont représentés tout en nuances et c'est cela que j'apprécie vraiment dans cette saga.
    Bref, ce deuxième tome, La Trahison des Borgia, avait, sur le papier, tout pour me plaire. Et ce bon a priori s'est vraiment confirmé à sa lecture. Malgré un début un peu confus qui m'a empêchée de vite rentrer dans l'intrigue, j'ai ensuite été totalement happée et j'ai suivi Francesca dans ses pérégrinations et sa traque de Morozzi avec beaucoup de tension, parfois et d'intérêt.
    J'ai passé un bon moment de lecture et encore une fois, j'ai vraiment aimé retrouver ce personnage pour le moins surprenant et original mais assez attachant, par certains aspects de sa personnalité. Cette saga est à conseiller à tous ceux qui aiment l'Histoire et l'aventure. Car évidemment, les bouquins de Sara Poole sont truffés d'aventures, rebondissements et autres péripéties, suspense en tout genre mais toujours bien dosés et crédibles. Ce deuxième tome ne me donnait, à la lecture des dernières pages, qu'une seule envie : celle de me lancer aussitôt dans le troisième et ultime volume, mais...je vais attendre un peu avant de retrouver Francesca une dernière fois, afin de faire durer le plaisir.

    En Bref :

    Les + : une intrigue enlevée et pleine de surprises, un personnage principal certes fictif mais toujours travaillé, poussé plus loin et intéressant, enfin, un contexte des plus palpitants !
    Les - : un début peut-être un peu confus qui m'a empêchée d'entrer rapidement dans l'intrigue. 

     

     


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