• « Sommes-nous en guerre ? Ou ne le sommes-nous pas ? Une atmosphère de conflit fluctue autour de nous. Nous vivons dans une illusion de paix ou une alternative de guerre. Les Tricastins en cette année 1424 savent qu'ils sont anglais, mais l'Anglais, lui, ne sait plus qui il est ! De régence en régence, nous flottons sur la vague incertaine de pouvoirs illusoires. »

    Couverture Mémoire, tome 2 : Mémoire d'encre et de cendres

     

     

        Publié en 2019

       Editions Pocket 

       400 pages 

       Deuxième tome de la saga Mémoire Froissée

     

     

     

     

     

    Résumé :

    1424. La guerre de Cent Ans fait rage. Le Dauphin Charles VII, qui a succédé à son père, s'est replié à Bourges, où il compte peu d'amis. Et l'Anglais multiplie les assauts... Séparée de son fils, Anne, la jeune herboriste, met ses compétences au service de la Duchesse de Bourgogne. C'est dans le sillage de cette puissante Dame, et grande conspiratrice, qu'elle entendra pour la première fois le nom de Jehanne. Une pucelle de Lorraine qui tiendrait dans ses mains le salut du royaume. Mais comment convaincre le Dauphin de cette fable divine ? 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Ce deuxième tome de la saga Mémoire Froissée, de Christine Machureau, nous ramène à l’époque de la Guerre de Cent Ans, à Troyes. Nous sommes exactement en 1424 quand démarre l’intrigue de ce deuxième tome et qu’Anne Chauverson, herboriste et libraire à Troyes, est sollicitée par la duchesse de Bourgogne, Marguerite de Bavière. A Dijon, Anne se rend compte qu’elle est entraînée dans une affaire qui la dépasse et pourrait bien concerner l’avenir du royaume de France.
    Avant d’aller plus loin, je vais vous parler en quelques lignes du premier tome de cette saga qui en compte 5 (pour le moment, seuls trois sont publiés chez Pocket) et nous emmène au cœur du XVème siècle français, dans le sillage d’Anne Chauverson et de ses descendants. Pour faire court, le premier tome s’ouvre à la fin du XIVème siècle, en Touraine, où la jeune Anne est herboriste. Petite, elle a vu sa mère, elle-même herboriste, arrêtée par l’Inquisition et ne jamais revenir. A Bourgueil, où elle a toujours vécu, Anne tente de construire sa vie et de perpétuer l’œuvre de sa mère Fleurine. Mais lorsqu’elle se voit confier un mystérieux livre, Anne prend la route vers les Flandres. Elle ignore alors que le voyage qui doit l’emmener vers l’Europe du Nord va s’arrêter bien avant, dans la ville de Troyes. Anne ne rentrera jamais en Touraine. En Champagne, dans cette ville opulente qui vit des foires annuelles, Anne va recréer son univers, s’entourer de nouveaux amis, rencontrer l’amour, mettre au monde son fils Rémy. Sa vie quotidienne se mêle à la grande Histoire, car les contemporains de ce début de XVème siècle vivent une époque bien aventureuse, alors que le royaume de France est déchiré par une guerre civile et le conflit avec les Anglais, qui s’éternise.
    Ce deuxième tome nous fait retrouver Anne, toujours à Troyes. Après la mort de son mari, elle a repris la librairie Chauverson, qu’elle dirige. Le temps de la maturité est arrivé pour Anne, qui a vu partir son fils Rémy vers d’autres contrées, poursuivant son rêve : devenir architecte. Et c’est sous les cieux déjà teintés de Renaissance de l’Italie que le jeune homme se forge son expérience. Temps de la maturité donc, pour Anne, mais sûrement pas du repos car elle est soudainement mandée auprès de la duchesse douairière de Bourgogne, Marguerite de Bavière. Celle-ci, mère du duc Philippe et veuve de Jean sans Peur, demande à Anne de la rejoindre sans lui donner plus amples explications. A la cour de la duchesse douairière, Anne découvre alors un « complot » qui la dépasse et qui semble menacer tous ceux qui sont dans le secret. Ambiance ! Sur fond de Guerre de Cent Ans, d’instabilité politique, d’indécision et de prophétie ancestrale, l’épopée johannique se prépare : le royaume de France est en train de basculer, la roue de la fortune tourne et il semblerait qu’elle soit de moins en moins favorable aux Anglais, dont le propre pouvoir est fragilisé par une double régence (Henry V étant mort en 1422, c’est son jeune fils Henry VI qui « règne », supervisé par deux régences, à Paris et à Londres).
    Anne se retrouve embringuée, c’est le mot, dans un vaste complot qui semble remonter à la nuit des temps et dans lequel elle n’a évidemment aucune envie de prendre part. En quoi est-elle concernée, elle, libraire sans histoires de Troyes, par l’histoire de cette gamine de Lorraine, Jehanne, censée sauver le royaume et redonner tout son pouvoir à Charles VII, dépouillé de son héritage par le traité de Troyes et qui, replié au sud de la Loire, peine à s’entourer d’alliés sûrs ? Et pourtant…dans le sillage de Marguerite de Bourgogne et de la confidente de cette dernière, Willemine von Hennenberg, Anne découvre les arcanes obscurs du pouvoir, sur fond de prophétie ancienne et de guilde occulte et vengeresse.
    Comment démêler le vrai du faux dans cette histoire ? Il est clair que l’intrigue de Mémoire d’Encre et de Cendres s’appuie sur un récit où l’imaginaire a une bonne part. Mais il ne faut pas oublier le contexte historique, bien restitué par l’auteure, qui s’est bien documentée et fournit d’ailleurs en fin de volume une biographie plutôt détaillée. Si Christine Machureau invente (c’est le propre du romancier, après tout) elle n’extrapole pas non plus. Toujours crédible, toujours plausible, la trame de Mémoire d’Encre et de Cendres est plutôt captivante ! Cette atmosphère de secret, cette confrérie occulte qui s’en prend à ceux détenteurs de la prophétie, cela a forcément de quoi piquer la curiosité. J’ai eu l’impression que ce deuxième tome se focalisait moins sur la vie quotidienne : elle y a toujours une bonne place, mais Anne se retrouve soudain investie d’une mission bien lourde pour ses épaules qui n’aspirent qu’à la paix et surtout qui vient bouleverser son quotidien relativement peu enlevé. Que faire quand on se retrouve entraîné dans une histoire aussi invraisemblable et surtout, quand on a rien demandé ? Comment réagir quand on n’a pas les armes des puissants pour répondre aux intrigues qu’eux-mêmes fomentent et pour s’en défendre ? Ce deuxième tome prend des allures d’épopée médiévale dans la France du XVème siècle, que j’ai trouvée plutôt plaisante à suivre. Dans le même temps, Anne doit faire face, l’âge venant, aux disparitions de ceux qui lui sont chers, elle doit aussi composer avec le manque de son fils unique, qui poursuit ses rêves puis se marie, a des enfants à son tour. J’ai apprécié finalement que ces préoccupations que l’on peut considérer comme mineurs ou lambda, se mêlent à quelque chose de bien plus romanesque, à une intrigue qui sert de trame de roman et qui explique, à sa manière, l’épopée de Jeanne d’Arc.
    Le XVème siècle est une époque passionnante à bien des égards et c’est cela qui m’a fait choisir cette saga : ce n’est pas l’époque dont on parle le plus dans les romans et pourtant ! Il y’a tellement matière. Trait d’union entre le Moyen Âge et la Renaissance, le XVème siècle commence à l’époque médiévale et s’achève dans l’essor de la première Renaissance et des Grandes Découvertes. C’est juste une époque extraordinaire ! Ainsi, dans le roman, se côtoient les chevaliers et les guerriers de la Guerre de Cent Ans et Brunelleschi. On a vraiment l’impression d’assister à la naissance d’une nouvelle ère, qui sera bien différente de celle qui s’achève et pourtant celle-ci, ensanglantée par une guerre interminable, semble ne jamais vouloir finir.
    Mémoire d’Encre et de Cendres m’a donné l’impression d’être plus dense que son prédécesseur, d’avoir plus de teneur. La chronologie, très floue dans le premier tome (ce qui m’avait gênée, d’ailleurs) est beaucoup plus fluide ici, plus linéaire et un peu moins présente (ce que je préfère, à la limite, à une chronologie qui serait bien là, mais pas facile à comprendre). En tout cas, ce deuxième tome vient à merveille compléter le premier et j’ai compris finalement que Mémoire Froissée venait surtout poser une intrigue, un univers, des personnages. Les choses sérieuses commencent réellement ici, dans ce second volume, qui étaye donc le premier et annonce déjà la suite, avec notamment l’apparition de Clara Chauverson, petite-fille d’Anne et qui va devenir un personnage important dans la suite de la saga, au vu des résumés des tomes 3, 4 et 5. Est-ce que je les lirai ? Oui, bien sûr ! Cette saga n’a pas recueilli que de bons avis, c’est même en général des impressions mitigées que j’ai lu ici ou là… personnellement, mon avis va totalement à l’encontre de cela et l’agréable surprise du premier tome n’a fait que se confirmer ici. J’apprécie beaucoup l’histoire d’Anne Chauverson, personnage assez symbolique de son époque (bourgeoise d’une ville opulente qui vit du commerce) et qui, si elle mène une vie somme toute relativement convenue, se trouve parfois bien malgré elle mêlée au tourbillon et aux dangers de la grande Histoire qui s’emballe

    En Bref :


    Mémoire Froissée, tome 2, Mémoire d'Encre et de Cendres ; Christine Machureau  

       Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle


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  • « Elle suivit le chemin qui contournait cette colline boisée, sorte d'écrin derrière lequel dormait le château des Hautefort. Il lui apparut en même temps que les maisons du village qu'il dominait comme un parent protecteur. Ses inquiétudes s'apaisèrent, elle était de retour chez elle. »

    La Demoiselle de Hautefort ; Isabelle Artiges

     

     

     

     

        Publié en 2016 

      Editions De Borée 

      336 pages 

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Soeur Constance a décidé de consacrer sa vie aux pauvres. Volontaire pour travailler à l'hôpitl de Hautefort, elle s'emploie à soulager, grâce aux plantes médicinales, es maux du corps, et parfois de l'âme. 
    Alors que la révolte gronde à Paris, que le peuple se soulève pour l'abolition des privilèges et des impôts, l'inquiétude monte au château des Hautefort. La fièvre vengeresse de certains gardes nationaux les pousses à des exactions qui n'épargnent personne. 
    Outre les difficultés à surmonter pour que l'hôpital continue de fonctionner malgré le chaos, Dieu semble avoir mis sur le chemin de Constance une épreuve supplémentaire : ses sentiments pour Martial... 

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Au XVIIIème siècle, la jeune Constance, contre l’avis de ses parents, choisit de devenir religieuse au sein de la congrégation de la Charité des Sœurs de Nevers plutôt que d’accepter le « beau » mariage choisi par son père. Son choix l’amène à devoir quitter sa région natale pour le Périgord, où elle devient soignante à l’hôtel-Dieu de Hautefort, un village aux confins du Périgord et du Limousin. Là, Constance découvre sa vocation : celle de faire don de sa vie aux autres, par la charité, le soin aux indigents et aux malades. C’est son travail à l’hôtel-Dieu qui la conduit à rencontrer la jeune Manon, fille de métayers du village, qui vient un jour pour la consulter pour sa mère. Par le biais de Manon, Constance fait aussi la rencontre de son frère aîné, Martial, qui est loin de la laisser indifférente.
    La Demoiselle de Hautefort démarre en 1787. Autrement dit, nous sommes à l’aube de la Révolution, ce n’est plus qu’une question de mois… En Périgord comme ailleurs, un vent de révolte souffle, attisé parfois chez certains par le découragement de voir les récoltes perdues plusieurs saisons de suite. Dans un pays essentiellement rural, où la population paysanne est majoritaire, le désarroi est grand quand un printemps pourri noie les jeunes plantations, quand un hiver trop rigoureux et des gelées trop dures anéantissent les vergers et les récoltes de noix et de châtaignes, sur lesquelles la population compte pour passer l’hiver. On assiste à la montée des idées nouvelles, dans un pays éloigné de la capitale certes mais qui n’en est pas moins ignorant : les cahiers de doléances, les premiers extrémistes qui prônent des idées radicales et incitent à la haine contre les grands bourgeois ou les nobles.
    Hautefort, en Périgord, est un village un peu à part : fief ancestral de la famille du même nom, érigé en marquisat en 1614, les habitants nourrissent un respect sincère et réel pour la famille et pour son château, qui domine leur paysage depuis son promontoire rocheux. Si les idées nouvelles circulent, elles vont vite se heurter à des populations qui refusent de détruire le château des seigneurs ou de donner la chasse à ces derniers. Elles vont se heurter aussi au bons sens pratique paysan : finalement, les grandes idées, les grandes réformes, elles sont peut-être salutaires mais elles n’empêcheront pas les hivers trop froids, les printemps trop pluvieux ou les étés trop chauds. On voit finalement apparaître une Révolution unilatérale, faite par les bourgeois et les lettrés de Paris et qui laisse sur le bas-côté la majorité de la population française de l’époque : les ruraux, les paysans qui ne voient finalement rien changer à leur situation ni à leur quotidienY'aura plus de gelées, après ça ? » lance un paysan lorsqu'on leur fait part de la décision de supprimer les girouettes, symboles seigneuriaux). Les provinces lointaines ne seront cependant pas épargnées, le Périgord non plus : il verra ainsi son clergé démantelé en 1791 lors du vote de la Constitution civile du clergé, décision qui prend forcément une part non négligeable dans la vie de Constance, religieuse, dont l’activité dépend du clergé, dont les subsides dépendent des hiérarchies religieuses pour prendre soin des pauvres, des malades, des enfants abandonnés. Rien ne sera plus jamais comme avant pour elle. Déliée de ses serments, rendue brutalement à la vie civile, devant faire tout ce qu’elle peut avec des bouts de ficelle, Constance se retrouve soudainement démunie et surtout, face à ses démons : l’attirance sans cesse croissante qu’elle ne cesse de ressentir envers Martial et qu’elle parvenait jusque là à maîtriser en se cachant derrière sa condition de religieuse.

    MUSÉE D'HISTOIRE DE LA MÉDECINE - Mairie de Hautefort

    L'hôtel-Dieu de Hautefort (aujourd'hui musée de la médecine) et le château en surplomb du village


    La Demoiselle de Hautefort est un roman tourbillonnant, une grande fresque historique sur fond de roman de terroir : très ancré dans une région (le pays d’Ans, région industrielle du Périgord qui se développe au XVIIème siècle avec ses forges qui alimentent les armées de Louis XIV et de ses successeurs) et dans un village, racontant l’histoire de la famille Montagnac (la famille de Manon et Martial), de la famille de Hautefort (la comtesse Camille et sa jeune nièce Amélie) et de la courageuse et déterminée Constance, qui se révèle petit à petit. En filigrane, on découvre un pan important de notre Histoire : la Révolution qui éclate en 1789 et bouleverse irrémédiablement la France. C’est tellement intéressant de quitter un peu le prisme de la Révolution parisiano-parisienne. C’est malheureusement encore l’angle de vue le plus répandu parce que, oui, la Révolution s’est faite à Paris. Mais on oublie souvent que les provinces ne sont pas restées en arrière, certaines se sont enflammées pour la Révolution, d’autres, comme la Vendée, sont restées fidèles à l’ordre ancien et au roi, mettant le feu aux poudres d’un véritable conflit civil qui tombe dans les pires horreurs et les pires bassesses. Il est intéressant de voir comment chaque province, de part son histoire, de part sa situation géographique, a réagi à cet immense bouleversement. J’ai aimé découvrir les réactions des personnages : celles du mari de Manon, Antoine, exalté par ces idées nouvelles qui nourrissent et étayent la haine viscérale qu’il ressent contre les nobles ; celles de Constance, qui est déterminée à continuer de soulager, par charité et par bonté, quitte à devenir contre-révolutionnaire et risquer sa propre vie ; celles de la garde nationale de Hautefort, qui obéit mais sans aucune conviction.
    La littérature du terroir, que l’on appelle aussi littérature régionaliste, souffre bien souvent d’une mauvaise image, d’une réputation de sous-littérature un peu bas de gamme. C’est dommage parce que, comme dans tout genre littéraire, il y’a de tout, du bon et du moins bon aussi parfois. Mais si vous aimez les romans historiques et authentiques, des portraits vivants de la France d’antan, alors vous pourrez certainement y trouver votre bonheur.
    La Demoiselle de Hautefort se passe dans ma région et ce fut un plaisir de me projeter dans ces paysages si familiers plus de deux cents en arrière, de découvrir (ou redécouvrir) l’histoire de ce petit coin de Périgord au passé si riche.
    J’avais lu il y’a quelques années Les Petits Mouchoirs de Cholet, d’Isabelle Artiges, qui a été une excellente surprise : j’avais beaucoup aimé la trame de ce roman se passant pendant la Première guerre mondiale et qui abordait notamment l’espionnage des princes de Parme pour le compte de leur beau-frère l’empereur Charles d’Autriche. C’était un sujet peu abordé dans les romans historiques et j’avais beaucoup aimé ce parti-pris. La Demoiselle de Hautefort n’a pas été un coup de cœur, même si j’ai vraiment beaucoup aimé l’histoire de Constance et de tous les autres personnages qui gravitent autour d’elle et représentent chacun à leur manière leur époque. Le petit bémol que je soulèverais ici, c’est le style de l’auteure qui ne m’a pas forcément séduite. Pour autant, il est juste, j’ai trouvé qu’Isabelle Artiges parvenait à raconter avec nuance et justesse une époque complexe, troublée, où de nombreuses idées, de nombreuses fidélités se mêlent et s’entrecroisent.
    Vous l’aurez compris, globalement, ce roman a été une bonne surprise. Je l’ai trouvé agréable à lire et les personnages y sont attachants et pleins de relief, peut-être beaucoup plus que ce à quoi je m’attendais, il est vrai.

    En Bref :

    Les + : une vision nuancée d'une époque complexe mais fondatrice, des personnages avec beaucoup de relief. 
    Les - :
    une plume qui n'est pas toujours parvenue à me séduire.


     La Demoiselle de Hautefort ; Isabelle Artiges  

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  • «  Nous avons gagné, mais à quel prix. Un père tué par ses fils. Le coup de grâce asséné par le favori. Et vous, mère, enfermée tant d'années. Existe-t-il des victoires ourlées de regrets ? Ou bien faut-il toujours se montrer digne d'une certitude ? Et si je n'étais pas digne ? »

     

     

     

         Publié en 2019

      Editions Le Livre de Poche 

      224 pages

     

     

     

     

     

    Résumé :

    « Sa robe caresse le sol. A cet instant, nous sommes comme les pierres des voûtes, immobiles et sans souffle. Mais ce qui raidit mes frères, ce n'est pas l'indifférence, car ils sont habitués à ne pas être regardés : ni non plus la solennité de l'entretien - tout ce qui touche à Aliénor est solennel. Non, ce qui nous fige, à cet instant-là, c'est sa voix. Car c'est d'une voix douce, pleine de menaces, que ma mère ordonne d'aller renverser notre père. »

    En 1173, Aliénor d'Aquitaine pousse trois de ses enfants à la rébellion contre le roi d'Angleterre, son époux. La voici racontée par son fils, Richard Cœur de Lion, dans une oeuvre pétrie de poésie et de cruauté. Un regard qui révèle deux personnages pleins d'amour, d'honneur et de violence, et tiraillés par leurs passions - ambition, haine, loyauté. 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :


    Au début des années 1170, Aliénor d’Aquitaine pousse ses trois fils, Henri, Geoffroy et Richard, à se rebeller contre leur père, le roi Henri II d’Angleterre. On connaît le dénouement de l’histoire : la défaite des fils, leur amende honorable et l’emprisonnement de la mère. Aliénor restera en captivité pendant plus de quinze ans, pour avoir osé inciter ses fils à la rébellion.
    Malgré le titre, le roman ne tourne pas qu’autour de cette fameuse révolte, qui éclate en 1173 et sera si durement matée par Henri Plantagenêt. C’est un point de départ : le point de départ qui va permettre à Richard Cœur de Lion de raconter sa reine, sa mère. Aliénor.
    Née au début des années 1120 (probablement en 1122), morte en 1204, elle a presque connu un siècle. Surtout, elle l’a marqué d’une trace indélébile. Aliénor d’Aquitaine et son image restent consubstantielles à ce XIIème siècle flamboyant, le Moyen Âge central des troubadours et de la fin’amor. Fille du duc d’Aquitaine Guillaume X, elle hérite de ses terres alors qu’elle est encore adolescente. L’Aquitaine de l’époque est un immense territoire, qui s’étend du Poitou à la Bigorre et jusqu’en Limousin. Alors que la France n’est encore qu’une vague idée, un royaume morcelé dont le souverain a parfois moins de pouvoir et de richesses que ses vassaux, le duc d’Aquitaine joue dans la cour des grands. Son héritière devient donc un parti très convoité : en 1137, elle épouse le fils du roi de France, Louis. Ils quittent Bordeaux pour Paris, où ils arrivent fraîchement intronisés : le roi Louis VI est mort entre-temps. Aliénor d’Aquitaine et Louis VII sont les nouveaux souverains. La jeune femme va dicter les nouvelles modes de la Cour : elle va choquer, scandaliser. Aliénor d’Aquitaine a le sang du sud qui coule jusqu’au bout des ongles. Elle ne sera pas comprise par ses nouveaux sujets et ils lui forgeront une véritable légende noire. Son mariage avec Louis n’est pas heureux : trop dissemblables, les deux époux ne se comprennent pas. Celle qui croque la vie à pleines dents ne peut comprendre celui qui, s’il n’avait régné, aurait voulu se faire moine. Ils n’auront pas d’héritier : avec Louis, Aliénor n’aura que deux filles, Marie et Alix de France, qu’elle laissera derrière elle après son divorce d’avec le roi. La croisade en Orient porte un coup fatal à leur union : après le scandale causé par les retrouvailles d’Aliénor avec son oncle Raymond de Poitiers, que certains maquillent en inceste, le mariage est dissous pour cause de consanguinité entre les époux. Nous sommes en 1152. Au mois de mai de la même année, après avoir échappé de justesse au rapt organisé par le comte de Blois et de Champagne, qui se serait bien vu devenir duc d’Aquitaine, Aliénor convole avec le jeune Henri Plantagenêt. Fils de Mathilde l’Emperesse, qui a disputé la couronne d’Angleterre au roi Stephen de Blois, descendant de Guillaume le Conquérant, le jeune Plantagenêt, qui a dix ans de moins qu’elle, est comte d’Anjou, du Maine et duc de Normandie. Deux ans plus tard, il devient roi d’Angleterre. Aliénor d’Aquitaine devient reine pour la seconde fois : surtout, son mariage dessine le destin de toute une époque. La guerre de Cent Ans, qui éclate plus d’un siècle après la mort d’Aliénor, est une conséquence directe de ce mariage qui apporte dans sa corbeille les terres d’Aquitaine. Ces opulents territoires deviennent anglais, jusqu’à leur retour dans le giron français en 1453. Avec Henri II, Aliénor aura les fils qu’elle n’a pas pu donner au roi de France. Leurs filles feront de beaux mariages : Mathilde épousera le duc de Saxe et de Bavière, Aliénor devient reine de Castille par son mariage avec Alphonse VIII (elle sera la mère de Blanche de Castille), Jeanne sera reine de Sicile puis comtesse de Toulouse…surtout, elle donne naissance à des fils qui ont marqué l’Histoire et sont devenus presque légendaires. Ces fils qu’elle va pousser contre le père. Ces fils qu’elle verra disparaître, les uns après les autres : seul le benjamin, Jean, lui survivra. Cinq ans avant sa propre disparition, elle a la douleur de perdre le fils préféré, Richard, devenu roi en 1189 et pour lequel elle avait retourné ciel et terre pour le sortir de captivité quand il fut fait prisonnier par le duc d’Autriche, à son retour de croisade.

    Aliénor d'Aquitaine, l'indomptable

     

    L'une des images les plus connues d'Aliénor d'Aquitaine : son gisant polychrome, à Fontevraud, qui repose près de ceux de son époux et de son fils Richard Coeur de Lion. La reine tient un livre entre les mains, symbole de la connaissance

    Richard donc, qui se fait narrateur dans ce roman polyphonique, Richard qui se dépouille de son manteau de roi pour ne rester qu’un homme, un homme qui se raconte et raconte sa mère, figure imposante et même écrasante, à laquelle il voue un amour sans bornes qu’il ne pourra jamais exprimer. Drame d’une vie, drame malheureusement intemporel et universel.
    La Révolte est un roman qui s’appuie sur une trame historique avérée : la lutte entre les trop semblables Aliénor et Henri, qui se choisissent puis se déchirent, est vraie. La captivité de la reine, sévèrement mise au pas par son époux, est vraie aussi. La relation adultère d’Henri II, menée au vu et au su de tous, avec la belle Rosemonde Clifford (la Fair Rosamund de Waterhouse), est tout aussi authentique. Clara Dupont-Monod déroule un contexte historique bien maîtrisé, même si elle prend quelques libertés avec lui (libertés expliquées en fin de volume et qui sont de toute façon suffisamment subtiles pour qu’on ne les remarque pas). Et pourtant…je n’ai pas eu l’impression de lire un roman historique. Un peu comme dans le roman de Carole Martinez, Du domaine des murmures, on a l’impression que l’Histoire est là surtout pour supporter un propos bien plus vaste. Ce que raconte Richard Cœur de Lion et tous les autres narrateurs (Aliénor elle-même, Henri II, Aélis de France, la fille du roi Louis VII) n’est pas inhérent au XIIème siècle. Ce qu’ils racontent, c’est une histoire humaine dans laquelle nous pouvons tous nous retrouver. Les mots de Clara Dupont-Monod peuvent nous parler à tous. Richard, ce peut être vous, ce peut être moi. Aliénor peut être n’importe quelle mère : mère aimante, mère omnisciente, mère toute-puissante, mère écrasante aussi. Une mère qui ne sait pas dire ses sentiments, peut-être parce que l’époque ne s’y prête pas, peut-être parce qu’elle est faite comme ça et n’y arrive pas. Drame des enfants, alors, qui attendent et ne reçoivent pas ou trop peu.
    La Révolte oscille sans cesse entre Histoire (avec un grand H) et contemporanéité : Histoire parce que le roman est fermement ancré dans son époque. Mais la contemporanéité se retrouve dans l’analyse des sentiments, des émotionscontemporanéité des mots, aussi, qui sont bien ceux de notre époque. C’est pour cela qu’on a du mal à se situer dans ce roman : que lit-on exactement ? Voilà une question qui revient très souvent au cours de la lecture, du moins qui est revenue très souvent, en ce qui me concerne. Souvent, je me suis aussi demandé si les personnages que je voyais évoluer sur les pages de La Révolte auraient réellement réagi comme cela ? Probablement, non. Réagissait-on au XIIème siècle comme neuf-cents ans plus tard ? Probablement, non. Mais que des sentiments humains aient transcendé les époques parce que, justement, ils sont profondément humains, pourquoi pas ? Si socialement nous sommes différents de nos ancêtres, nos cœurs le sont-ils, eux ? Parfois, je me dis que non ou du moins, je l’espère. Si la maternité est une notion sociale, elle est aussi instinctive : certes, au Moyen Âge comme dans les siècles qui suivent, on ne s’attache pas aux enfants parce que peu d’entre eux parviennent à l’âge adulte. La mortalité infantile est particulièrement forte, tant dans le peuple que dans les hautes sphères : une fièvre, une maladie, une poussée dentaire qui se passe mal et un enfant peut disparaître en quelques jours, voire quelques heures et on ne parle pas de l'épreuve de la naissance, qui peut coûter la vie à l'enfant somme à sa mère. Pour autant, est-ce que toutes les mères de l’Histoire ont été indifférentes ? Certainement que non. L'image d'Aliénor d'Aquitaine en mère toute-puissante, adulée en silence par ses enfants, les aimant elle aussi sans savoir le leur dire, m'a plu. Je ne sais pas si elle est un reflet de la réalité et bien malin celui qui pourra dire avec certitude, en 2021, ce qu'était l'âme de cette femme morte depuis presque 820 ans. Mais ce qu'en fait Clara Dupont-Monod est cohérent.
    Il m'a manqué quelque chose pour pleinement aimer ce roman : je ne saurais vous dire quoi... peut-être les premiers chapitres que j'ai eu du mal à m'approprier. J'ai cependant savouré les mots de l'auteure et eu le sentiment de lire un OVNI, un roman hors-normes et un peu déroutant qui m'a cependant beaucoup plu par beaucoup de ses aspects.

                                          Henry's wife was one of England's most famous queens, Eleanor of Aquitaine.  | Eleanor of aquitaine, Queen eleanor, Art  Richard Cœur de Lion, le roi pressé - Histoire de la Normandie

    Visions romantiques d'Aliénor et de son fils préféré, Richard Coeur de Lion par deux artistes du XIXème siècle : The Accolade (L'Adoubement) de Edmund Blair Leighton et un portrait du roi Richard Ier par Merry-Joseph Blondel, conservé à la galerie des Batailles du château de Versailles 

     

     

    En Bref :

    Les + : le style, très contemporain, qui raconte presque comme une légende un pan très ancien de l'Histoire. Sous la plume de Clara Dupont-Monod, le XIIème siècle devient presque un siècle d'or, à demi-légendaire.
    Les - :
    les premiers chapitres nous jettent immédiatement dans l'univers, presque sans préparation. J'ai eu du mal à me les approprier : il s'agit d'un sentiment purement subjectif et personnel.


    La Révolte ; Clara Dupont-Monod

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  • «  Ne perds pas ton temps avec le passé ou à t'inquiéter pour l'avenir. Fais confiance au présent. Crois-moi, ma chère petite, Dieu a tracé ton futur bien mieux que je ne pourrais le lire. »

     

     

        Publié en 2017 aux Etats-Unis 

      En 2018 en France (pour la présente édition)

      Titre original : Proof of Providence

      Editions Pocket

      384 pages

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Hallie Erminie, issue d'une famille de planteurs du Kentucky, est une jeune femme de caractère. A l'hiver 1897, du haut de ses 20 ans, la romancière en herbe part à New York, son manuscrit sous le bras, pour y chercher la gloire. Elle y fera la connaissance de Post Wheeler, jounaliste arrogant et farouche célibataire. Libres et indépendants, chacun à sa manière, ils s'aimeront sans se plaire, fuiront pour se trouver, dans un chassé-croisé où le destin aura son mot à dire... 

    Ma Note : ★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    Dans le Kentucky des années 1880, Hallie Erminie est une petite fille passionnée par l'écriture. Elle noircit des carnets entiers qu'elle garde ensuite précieusement dans des malles. La petite fille le sait déjà : un jour, elle sera romancière.
    Plusieurs années plus tard, alors qu'elle se trouve à New York à la recherche d'un éditeur, elle rencontre un journaliste du nom de Post Wheeler. Originaire de Pennsylvanie, ce dernier s'est notamment illustré en publiant un essai faisant l'éloge du célibat masculin, ce qui a choqué la bonne société américaine de cette fin du XIXème siècle.
    Les années qui vont suivre vont les réunir ou les séparer : Hallie Erminie va connaître un grand succès avec ses romans qui font scandale tandis que Post voyage jusqu'en Alaska et au Yukon, où il expérimente la fièvre de l'or, dans des paysages immaculés et un environnement hostile. Ils se retrouveront dans les grandes plaines du Kentucky, un état rural où les souvenirs de la guerre de Sécession sont encore douloureux, dans la ferveur de New York, une ville qui vit à cent à l'heure, dans le Londres victorien où Hallie Erminie écrira un roman sur les amours contrariées de lord Byron.
    Le souffle des Feuilles et des Promesses est un roman qui raconte une histoire vraie. Je ne le savais pas en commençant ma lecture, ne connaissant ni d'Ève ni d'Adam Hallie Erminie Rives et George Post Wheeler. Ce sont notamment les opinions très sudistes de l'héroïne qui m'ont fait m'en douter : un auteur oserait-il aujourd'hui, me suis-je demandé, mettre dans la bouche de son héros, fut-il de fiction, des propos favorables à la pratique du lynchage, par exemple, qui s'apparente à une justice expéditive et qui était courante dans les États du Sud, contre quelle communauté en priorité, on le comprend aisément ?
    Alors attention ! Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit ! Hallie Erminie Rives n'est pas du tout présentée dans le roman comme raciste ou pro-esclavage, mais il ne faut pas oublier qu'elle est néanmoins née dans une Amérique où la guerre de Sécession est terminée depuis quelques années seulement et où les États du Nord peinent à s'imposer face à un Sud qui représente presque une nation à lui tout seul.
    Bref, c'est donc cela qui m'a emmenée à me demander si l'histoire qui sert de trame à ce roman ne serait pas vraie. Et oui, effectivement, c'est le cas. Nés respectivement en 1869 en 1874, Post Wheeler et Hallie Erminie Rives se sont mariés en 1906. Ancien étudiant de Princeton, journaliste puis diplomate, sa mère Mary Sparkes fut elle-même écrivaine et poète. Wheeler s'illustre notamment par sa carrière internationale au service des États-Unis : il voyagera du Japon à la Suède en passant par le Brésil, le Paraguay ou encore l'Albanie. Il meurt dans le New Jersey le 23 décembre 1956, à l'âge de 87 ans. Au début des années 1950, il rédige avec son épouse Dome of Many-coloured Glass, sur son expérience au sein du Service Extérieur des États-Unis (United States Foreign Service). Ce document a servi de base à Sarah McCoy pour la rédaction de son roman.

    Hallie Erminie Rives et Post Wheeler au début du XXème siècle : ils se sont mariés en 1906

     
    Quant à Hallie Erminie, née en 1874 à Hopkinsville dans le Kentucky, elle est la fille d'un ancien soldat confédéré, qui passa deux années prisonnier dans le Nord. Elle est connue pour avoir abordé dans ses romans des sujets brûlants comme la race, l'amour et les relations charnelles. Dans son premier roman Buisson ardent, relativement controversé, publié en 1897 elle s'empare d'une affaire qui eut lieu quelques années plus tôt et impliqua un homme noir dans l'agression d'une femme blanche ; la cour chargée de juger l'affaire avait été déboutée car suspectée de racisme et l'agresseur avait été acquitté avant d'être victime de la justice expéditive de la foule.
    Difficile, plus de cent ans plus tard, de savoir exactement ce qu'a voulu démontrer l'auteure dans son livre : Buisson ardent est-il un pamphlet ouvertement raciste ou simplement un texte engagé pour la défense et la reconnaissance d'une victime, peu importe la couleur de sa peau ?
    Plutôt anticonformiste, Hallie Erminie est présentée dans le roman comme une femme libre, aux opinions bien arrêtées, soutien de la cause des femmes et n'hésitant pas à aborder des sujets relativement peu abordés par les femmes à l'époque, à plus forte raison dans des romans ! Entre 1892 et 1952, elle publiera 18 productions, dont la dernière écrite à quatre mains avec son époux. Elle meurt en août 1956, quatre mois seulement avant Post, à l'âge de 82 ans.
    Franchement, quel couple ! Ils sont peu connus en Europe (du moins je le pense : personnellement, je n'en avais jamais entendu parler) et j'ai pris grand plaisir à découvrir cette histoire qui au final aurait très bien pu être une fiction mais a été d'autant plus savoureuse quand j'ai su que c'était une histoire vraie.
    Bon, cette lecture fait suite à un gros coup de cœur pour Le bruissement du papier et des désirs, lu en octobre dernier. C'est une place assez mal commode quand on y pense parce que c'est quitte ou double : ça passe ou ça casse. Sarah McCoy m'a moins enchantée ici qu'avec Le bruissement du papier et des désirs qui m'a tellement plu et donné envie de découvrir l'œuvre de Lucy Maud Montgomery. Mais Le souffle des feuilles et des promesses n'a pas été une déception, loin de là. J'ai pris un grand plaisir à lire ce roman et à suivre Hallie Erminie comme Post dans leurs pérégrinations... la description des paysages du Yukon et de l'Alaska est de toute beauté et la détermination d'Hallie Erminie force le respect : peut-être a-t-elle pris position pour des opinions contestables qui aujourd'hui nous choqueraient à raison. Mais il ne faut pas oublier qu'elle est née il y'a près de 150 ans dans un monde bien différent du nôtre. D'ailleurs ce n'est finalement pas ça le plus important dans le roman mais plus sa valse hésitation avec Post Wheeler : dès lors qu'ils se rencontrent, ils ne se quitteront jamais vraiment.
    Bien sûr, quasiment dès le début du roman, on comprend que quelque chose va se passer entre ces deux-là. Honnêtement je ne vous révèle pas le scoop du siècle en vous disant cela. Finalement plus que sur le dénouement c'est vraiment sur le développement de leur histoire hors du commun que Sarah McCoy s'est attardée.
    Ce que j'aime avec cette auteure c'est qu'elle a un petit côté Tracy Chevalier : un univers assez unique et personnel. Quand vous lisez du Tracy Chevalier, vous savez aussitôt que c'est elle, parce qu'elle a le don d'aborder des sujets originaux et qui n'auraient pu inspirer qu'elle ! Eh bien, Sarah McCoy c'est un peu pareil. D'ailleurs dans Le souffle des Feuilles et des Promesses, il y'a un peu de Chevalier : ce roman m'a par exemple rappelé La Fugitive ou encore À l'orée du verger.
    La magie n'a donc pas opéré avec ce roman comme avec Le bruissement du papier et des désirs mais n'en est pas moins une bonne lecture ! Si tous les livres qui ne sont pas des coups de cœur devaient être des déceptions, la vie des lecteurs serait bien pauvre !
    Le souffle des Feuilles et des Promesses a été une lecture simple, efficace, sans prise de tête. Un bon moment, qui ne s'est pas transformé en coup de cœur mais a eu le mérite de me faire découvrir la vie hors des sentiers battus de deux personnages aux trajectoires intéressantes.  

    En Bref :

    Les + : les personnages, sans nul doute, leurs trajectoires (diplomatie, écriture etc...), leur histoire commune. Le fait que ce soit une histoire vraie m'a aussi beaucoup plu.
    Les - :
    pas vraiment de bémol à soulever même si je n'ai pas eu de coeur de cœur. 


    Le Souffle des Feuilles et des Promesses ; Sarah McCoy

     Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle


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  • « Je ne suis pas homme de regrets. J'ai une ambition. Et aujourd'hui les moyens de la mener. J'ai choisi la France. Le reste est passager. »

     

     

     

         Publié en 2018

      Editions Pocket

      416 pages 

     

     

     

     

     

     

    Résumé :

    Paris, 1630. La mystérieuse jeune comtesse de Rivière Sainte-Anne, arrivée depuis peu de Québec, fascine autant par sa beauté que par les fêtes somptueuses qu'elle donne. Elle attire le regard du cardinal de Richelieu, tout-puissant Premier ministre, pour qui le Nouveau Monde est un  sujet brûlant.
    Dans un Paris où coexistent les splendeurs de la Cour et la misère de la cour des Miracles, agité par une série de meurtres inexpliqué et par de violents affrontements politiques, l'Indienne et le cardinal s'observent, se jaugent et interprètent dangereusement la partition de l'amour et du pouvoir.
    Entre liberté et désir, vengeance et ambition, chacun joue son avenir et celui du royaume.

    Ma Note : ★★★★★★★★★★

    Mon Avis :

    La France du début des années 1630 est dominée par la figure tutélaire du cardinal de Richelieu, qui semble tout-puissant et qui, pour beaucoup, est l'homme à abattre. Pourtant, la position de l'omnipotent ministre de Louis XIII n'a jamais été plus précaire qu'en ce début d'automne : on semble comploter contre lui, des meurtres particulièrement horribles endeuillent la ville et une jeune et mystérieuse comtesse arrive de Nouvelle-France. Qui est-elle ? Et que cherche-t-elle à Paris ?
    Roman policier mêlé à une intrigue historique (le roman se concentre sur les dernières semaines qui précèdent la Journée des Dupes, le 11 novembre 1630 quand Louis XIII, après un retournement de situation inattendu, désavoue le partie de la reine-mère et confirme son ministre dans ses fonctions alors que la flamme de Richelieu vacillait comme jamais), L'Indienne et le Cardinal avait, sur le papier, tout pour me plaire : l'époque, les personnages, la Nouvelle-France, cette mystérieuse comtesse de Rivière Sainte-Anne qui, immanquablement, pique la curiosité... D'ailleurs j'avais remarqué ce roman depuis un bon moment.
    Bon, ce serait mentir de dire que je n'ai pas aimé...mais ce ne serait pas non plus la vérité si j'encensais ce roman ici.
    Commençons par aborder les points forts du roman : les personnages et les dialogues, sans nul doute. Ces derniers sont ciselés, percutants, vivants, j'ai trouvé qu'ils apportaient une vraie teneur au roman. Quant aux personnages, ils sont tous intéressants à leur niveau (mais, dommage, ils ne sont pas attachants, on en reparlera) : le cardinal de Richelieu est décrit comme un politique prodigieux mais qui n'est pas étranger aux doutes et dont le corps perclus de douleurs et de fatigue le crucifie chaque jour. Richelieu est un personnage double, déployant son aura et son charisme en public et cachant une santé chancelante ainsi que la fatigue et les doutes afférents à la gestion des affaires d'Etat dans son particulier, ne s'ouvrant qu'à ses proches et notamment à son conseiller le père Joseph, qui le comprend entièrement.
    La comtesse Loïse de Rivière Sainte-Anne, quant à elle, est un personnage mystérieux et quelque peu sulfureux : superbe jeune femme brune aux grands yeux magnétiques, elle est un mélange de l'Ancien et du Nouveau Monde. Veuve d'un commerçant français installé à Québec, elle est entourée d'Indiens hurons dont elle parle la langue et dont elle connaît parfaitement les coutumes.
    Quant au jeune et fougueux mousquetaire Alexandre de Malataverne, fraîchement débarqué de sa province natale, il découvre Paris, ses pièges et le voisinage d'un monde interlope qui se cache dans le dédale des ruelles sombres et médiévales des anciens quartiers. Aux côtés de Richelieu, il apprend le dévouement et la fidélité à toute épreuve tandis que son cœur s'éveille à l'amour avec Loïse qui ne laisse pas les hommes indifférents et semble prendre un véritable plaisir à les manipuler. Surtout, elle est indépendante et insaisissable et semble poursuivre une vengeance qui lui est propre.

    Cardinal Richelieu / Champaigne painting - Philippe de Champaigne en  reproduction imprimée ou copie peinte à l'huile sur toile

    Richelieu, tout-puissant ministre de Louis XIII, est au centre de ce récit qui se concentre notamment sur sa disgrâce, que ses ennemis fomentent à l'automne 1630 mais qui se retournera contre eux (tableau du XVIIème siècle, Philippe de Champaigne)


    Soulignons aussi une restitution assez réussie de l'époque et une bonne connaissance du contexte puisque l'auteur parvient à insérer de manière parfaitement cohérente son récit de fiction à un événement historique avéré et auquel il donne une explication, certes absolument imaginaire mais plausible et qui ne dénote pas.
    Pour le reste, j'avoue que j'ai trouvé le roman un peu long. Son découpage, qui alterne entre deux temporalités (les années 1610 et les années 1630) est une bonne idée et apporte un certain rythme au récit tandis que l'on découvre en parallèle, les multiples vie de la comtesse de Rivière-Sainte-Anne. Et si la description des personnages est vraiment ciselée, si on sent que l'auteur a pris soin de les rendre le plus vivants possibles, que ce soit les personnages principaux comme les personnages secondaires (que ce soit la duchesse de Chevreuse, grande conspiratrice ou les Indiens hurons de la comtesse de Rivière-Sainte-Anne), je dois dire que je ne me suis pas attachée à eux et cela m'a manqué. Oui, ils sont clairement le point fort de ce roman très visuel et qui se déroule comme un film : mais ils nous laissent souvent sur le bas-côté, on ne s'attache pas à eux et le lecteur reste un peu à distance tout au long du roman, c'est dommage.
    La présence de quelques anachronismes m'ont aussi un peu gênée : ainsi, le terme crinoline n'a rien à faire au XVIIème siècle, quant à l'utilisation récurrente du verbe stopper, je pense qu'il aurait été peut-être plus judicieux d'en utiliser un autre moins contemporain. Mais ce ne sont que des détails.
    L'Indienne et le Cardinal ne me laissera pas un mauvais souvenir mais, malheureusement, il m'a manqué pas mal de choses pour l'apprécier pleinement. Je ne me suis pas sentie partie prenante de l'intrigue et j'ai senti peu à peu mon intérêt s'émousser. J'avais lu des avis assez mitigés mais je partais du principe que l'aspect historique du roman (les années 1630 ne sont pas les plus traitées dans les romans historiques en général, les romanciers préfèrent le règne plus flamboyant de Louis XIV) et le fait que l'auteur aborde la Nouvelle-France sauraient me captiver. La magie n'a pas opéré mais je n'ai pas non plus détesté cette lecture. Je crois que le mieux est de se faire son propre avis : pour moi, c'est chose faite. A vous de jouer, maintenant.

     

    Redécouvrir le Site de la Nouvelle-France | Café, boulot, Dodo | ICI  Radio-Canada Première

    Paysages de Nouvelle-France au XVIIème siècle : c'est dans cet univers que vit Loïse de Rivière Sainte-Anne pendant de nombreuses années  

     

    En Bref :

    Les + : les personnages sont finement décrits, le contexte est maîtrisé, nous sommes à Paris en 1630 ! Les dialogues, vivants et ciselés, donnent une véritable teneur au roman...
    Les - :
    ...mais L'Indienne et le Cardinal est un peu long, des personnages froids auxquels on ne s'attache pas...il m'a manqué quelque chose pour véritablement aimer ce roman. Mon avis est donc assez mitigé sans être totalement négatif.


    L'Indienne et le Cardinal ; Denis Lepée 

     Mémoires de la baronne d'Oberkirch sur la cour de Louis XVI et la société française avant 1789 ; Henriette Louise de Waldner de Freundstein, baronne d'Oberkirch LE SALON DES PRÉCIEUSES EST AUSSI SUR INSTAGRAM @lesbooksdalittle


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